Ouvrir des bouteilles, c'est l'inverse du loto.: Des fois, on perd...
J'ai pu, pour diverses entreprises viticoles, travailler sur les différents types de bouchages: Liège classique, liège agglomérés, capsule à vis et bouchons verres (mais pas sur du synthétique)
Chacun à ses avantages et ses inconvénients pour moi.
Le principal défaut du bouchon liège classique est sa non-homogénéité: chaque bouchon est différent et donc chaque bouteille aura une qualité de bouchage différente même à bouchon liège ultra haut de gamme. La conservation du vin pour un bon bouchon sera cependant très bonne du fait des échanges entre intérieur et extérieur de la bouteille homogène. Le problème du liège, c'est que c'est un matériel vivant, il va vivre en fonction des conditions de températures et d'hygrométrie présents. Il va s'user plus vite dans des mauvaises conditions, perdre de sa souplesse et moins jouer son rôle de base, garder le contenu dans le contenant. Cette usure peut entraîner l'appauvrissement gustative du vin par une oxydation poussée et donc rendre le vin plat. Il est intéressant de changer les bouchons de ses vieilles bouteilles afin de limiter les risques (on donne en moyenne une petite dizaine d'année de vie à un bouchon liège).
Et son plus gros défaut réside dans un mauvais traitement de base du bouchon et qui lui confère le goût de bouchon.
Le bouchon aggloméré en liège existe sous de multiples formes. L'idée de base est la même: des morceaux plus ou moins gros de liège agglomérés entre eux par une colle alimentaire. Cela va de la poussière de liège aux gros morceaux bien visibles. Des rondelles de liège pur peuvent être accolés de chaque côté pour avoir une zone de contact en liège pur avec le vin (Il est facile de reconnaître ce type de bouchon: il suffit d'ouvrir une bouteille d'un vin effervescent quel qu'il soit, une très grande majorité sont bouchés de cette manière. J'imagine cependant qu'il existe d'autre manière pour boucher des bulles).
Les principaux problèmes de ces bouchons réside dans la mauvaise qualité du liège de base, parce que bouchon moins cher pour la plupart. On retrouve donc les mêmes problèmes que sur certains bouchons lièges classiques. Un autre problème peut aussi rentrer en jeu dû à l'agglomération du bouchon: amener un goût de réduit. La colle rend étanche le bouchon est empêche un échange avec l'extérieur. Je classerai pour cette raison les bouchons plastiques dans cette catégorie, parce qu'ils ont les mêmes caractéristiques d’étanchéité que les agglomérés. Le goût de bouchon en moins.
Cependant, parmi la catégorie des bouchons agglomérés à la poussière de liège, il existe de bons résultats parce que les traitements de la poussière sont plus efficaces que sur un gros morceau de liège. Et les bouchonniers qui cherchent des solutions (du moins j'ose espérer...
) ont peut être trouver des moyens pour conférer à ce type de bouchon une certaine porosité pour lui conférer les mêmes qualité d'échange qu'un bouchon liège classique. Ce type de bouchon n'existant que depuis peu à grande échelle, il reste à voir sur la durée ce que ça donne, sur plusieurs types de vins, dans différents type de conservation.
La capsule à vis est, pour moi, un bon compromis. Une longévité dans le temps, une technologie qui aujourd'hui confère à l'objet les mêmes échanges gazeux que le liège et l'absence de goût de bouchon. Son problème ne réside pas dans le produit en lui-même mais plutôt dans son image. Aujourd'hui acheter une bouteille en dessous de 10€ en capsule vis est envisageable mais au delà...
Je n'imagine pas le consommateur prêt à débourser une petite somme pour un joli flacon avec une capsule à vis: où sera le plaisir du cérémonial qui consiste à enlever la capsule au couteau, utiliser un tire bouchon dans les règles de l'art, entre le "plop" et avoir cette seconde d'appréhension avant de sentir le bouchon et lire dans le regard de l'assistance attablée cette lueur qui sournoisement se pose quoi qu'il arrive la question: Ben alors? Il est bouchonné ou pas?
Ici, un simple tour de main suffit à ouvrir la bouteille. Et soit dis en passant à la refermer. On l'accepte sur les vins dit d'apéritif (Muscat et autre Vins doux du Roussillon qui ne demandent cependant qu'à être bu en dessert d'ailleurs...) mais sur un vin sec, c'est plus compliqué...
Pour l'anecdote, lors d'un séjour en Australie où j'ai travailler de cave en cave pour visiter le pays, j'ai pu échanger avec les vignerons. Si là bas la capsule à vis est totalement démocratisée c'est plutôt dû à un rejet massif du liège. Là bas les chênes liège n'existe pas, la seule solution était l'importation. Et les tarifs de transport étant relativement important, pour économiser, les bouchons importés étaient relativement bas de gamme. Il y a eu aussi certains litiges avec des bouchons commandés dans une gamme et envoyé dans une gamme beaucoup plus faible... Le nombres de bouteilles bouchonnées étaient alors très important. La capsule à vis s'est alors imposée. Et la consommation de vin Downunder est plus décomplexée que ce qu'elle est en France, l'évolution n'a "choqué" personne.
Enfin, le bouchon verre est pour moi un gadget qui n'est pas dédié au vieillissement du vin. Attention, je ne le dénigre pas! Il amène une jolie image au produit, le démarque par rapport aux vins de même gamme sur le rayon et est donc un atout de vente. J'ai pu, tout l'hiver dernier, boucher ( à la main... X( ) toute une cuvée de rosé qui a fait fureur sur les plages du sud de la France. Cependant, ce bouchon est étanche grâce à ce petit joint plastique. Petit joint plastique qui ne permet pas de conserver le vin car rend complètement étanche la bouteille. Cela va donc bien pour des vins à rotation rapide comme les rosés ou les blancs et rouges de soifs qui sont fait pour être bu dans les 6 mois. Au delà que devient le joint plastique sous l'attaque de l'acidité du vin? Et surtout les goûts de réduit sont à mon avis à prévoir.
Il n'existe pas de solutions miracles qui permet de régler tous les problèmes mais plutôt des solutions qui permettent d'accompagner au mieux le produit en fonction de ce qu'on veut faire du produit. Vieillissement, vin à boire rapidement... De là à boucher un même vin de manière différente reste une solution qui peut s'avérer intéressante pour satisfaire plusieurs clients (Là où je travaille, le rosé était bouché en verre et en liège) mais peut vite s'avérer problématique au niveau logistique. Sur une cuvée , passe encore, mais pour un domaine qui fait plus de 10 vins différents, cela va vite devenir problématique à gérer...
Enfin, pour rajouter une couche, je parlerai des TCA, les tétra chloro anisol. Ces molécules donne également au vin un goût de bouchon. Elles peuvent provenir des traitements qui sont faits sur le bois, (bois de charpentes de cave entre autres...) et donc se retrouver dans des vins même bouchés à vis, en bouchon verre...
Je tiens à préciser que je ne parle ici que de mes convictions et de mes expériences, je ne prétends en rien amener une ou des vérité(s), et donc contrairement au loto, des fois on perd. Ça fait parti du jeu et du charme du vin. Même si ça fait râler quand on tombe sur la dernière bouteille d'une cuvée qu'on avait gardé depuis un moment pour une occasion spéciale et qu'on avait payé son petit pesant d'or...
Amicalement, Nico