Le millésime 2016 au domaine Vincent Dancer
Les rendements en amélioration en 2017
Nous prenons des nouvelles du millésime rentré en Septembre
- Comment se situe 2017 en terme de rendement? Vous devez apprécier d’avoir davantage de raisins.
- C’est mieux mais cela ne demeure que la moitié d’une récolte possible. On ne cherche pas non plus à faire une grosse récolte. Nous faisons un travail d’ébourgeonnage serré en Avril ou en Mai. La fin de saison a été sèche. Les volumes et les jus ont diminué. Nous avons également de la perte sur mildiou. Mais honnêtement, nous sommes contents. Vous n’allez pas trouver beaucoup de vignerons qui vous diront le contraire.
- Une moitié de récolte possible, cela semble assez peu finalement.
- Nous faisons 45 tonneaux en 2016, 83 en 2017 sur potentiellement 160 autorisés. A aucun moment je n’ai un objectif de rendement. Si je fais le travail d’ébourgeonnage, c’est pour aérer les grappes.
Bourgogne blanc
SP (moi): Frais, strict, pierreux et salivant. Un beau volume et déjà de la matière à ce niveau
AB
« Elevage en cuve, sur lies. Soutiré mi-Août. »
Chassagne Montrachet
SP: Plus d’acidité. De la matière, de la droiture, des épices. Une belle sapidité. Un peu de perlant. Une finale sur une pointe de sucre d’orge. Une fond persistant sur la consistance
B L’ensemble ne traduit effectivement nullement une année qui aurait fraîche. 2016 apparaît bien ici comme suffisamment solide.
OG:Nez accessible et virevoltant de citron vert, tilleul, beurré. La bouche est grasse en entrée, tendue et épicé en finale. Belle fraîcheur sur l’ensemble, effet kiss cool. Très bon et accessible.
- C’est bien plus en place que l’an passé. Une partie de vos 2015 n’avaient pas fini leur malo…
- La fermentation malolactique était bien terminée. Ce n’est jamais un souci car il n’y a pas de SO2. Ce sont les sucres qui ont été longs.
(Note pour plus tard: bien relire le CR de l’année précédente
)
- Et cette année?
- Le Bourgogne est sur la fin. Tête de Clos travaille et Romanée est également en train de la terminer. Les sucres ont été assez rapides également sur 2017. La saison fut chaude.
2016, un millésime froid?
- Nous vendangeons le 15 Septembre. Il ne faut pas croire que 2016 est une année froide. Il y a eu du soleil.
- Laquelle de vos parcelles fut le plus affectée par le gel?
- C’est hétérogène. Nous ne faisons pas de Corbins.
Meursault Grands Charrons
SP: Plus doux au toucher à son attaque. Un vin plus arrondi. La matière se fait sur la pierre sèche.
B+
OG: Le nez est cette fois plus en retrait, et laisse échapper des notes de beurre et de noisette. La bouche s’arrondit sur le palais et est accompagnée d'une belle tension mêlée d’épices sur la pointe de la langue. La finale est propre et exprime des amers fins et délicats.
- Les amers et la fraîcheur commencent à venir. Après les vendanges, on a quelque chose d’un peu lourd. C’est après l’élevage que la fraîcheur arrive. Il ne faut pas hésiter à attendre.
- Comment avez-vous renouvelé votre parc entre 2016 faible en volume et 2017 plus généreux? Il n’y a pas de fûts neufs en 2016 de mémoire. Qu’avez-vous fait de ceux inutilisés?
- Chaque année j’en vends à un copain dans le Jura.
- Vous ne souhaitiez pas en conserver, en mettant du vin ou de l’eau soufrée?
- Je ne préfère pas avoir des fûts vides. Et l’eau soufrée peut donner des tournures non recherchées. En 2017, j’ai racheté des fûts d’occasion à un ami - Jean-Philippe Fichet. L’essentiel est d’avoir un contenant frais. Qu’il y ait du vin.
Chassagne Montrachet 1er cru Tête de Clos
SP: Le perlant est sensible. « Le vin est encore en fermentation alcoolique ». La construction est plutôt agréable, l’ensemble se tient sur le bonbon de citron. La fin manque de dynamisme. On perçoit le sucre restant.
OG: Très beau nez élégant fruité (poire), floral, de beurre frais. La bouche est large et aérienne, tandis que la finale laisse ressortir une petite pointe sucrée. Un vin qui n’a selon son géniteur pas tout à fait fini sa fermentation. Laissons-lui le temps car c’est déjà très bon !
- Vous allez peut-être profiter d’avoir fini une période dense pour prendre du repos?
- Non, on a du temps nous les vignerons. Il faut arrêter de croire qu’on travaille tout le temps comme des forcenés. Pour l’image, ça fait toujours bien de dire qu’on n’a pas un moment. Mais qui est-ce que vous allez retrouver sur les pistes de ski?
Nous ne sommes pas des éleveurs d’animaux. Eux n’ont pas de répit. Tous les jours, tous les matins, il faut s’occuper de ses bêtes. Nous ne sommes pas à plaindre.
La malo et le SO2
- La fermentation dure depuis plus d’un an?
- Elle est au ralenti.
- Et la malo est-elle faite?
- Oui.
- Elle ne se produit pas après la fermentation alcoolique?
- C’est ce qu’on apprend dans les livres
. Elles ne sont pas nécessairement séquentielles, notamment lorsqu’il n’y a pas de SO2. La malo est sensible à ce dernier. Si on utilise du S02 alors il faut ensemencer.
- Puisque vous n’en mettez pas, ne craignez-vous pas l’oxydation?
- Au début oui. C’est d’ailleurs la crainte qui fait intervenir. Il faut voir les premiers jus des pressoirs.
- Comment en êtes-vous arrivés à vous dire qu’il ne fallait pas agir?
- C’est une discussion avec Claude Maréchal. Il m’a dit laisse faire, tu verras. Avant je mettais du SO2 sous pressoir.
Chassagne Montrachet 1er cru la Romanée
SP: Une grande fluidité, de l’ananas rôti, des agrumes: citron vert et kumbawa. Des arômes très dicibles.
TB
OG: Cette fois le fruité est un peu plus mûr et exotique sur les ananas et sur la mangue en particulier ainsi que sur un panier d’épices. La bouche est arrondie et suave pour se retendre en finale et laisser une rémanence épicée.
- Les années où les malos sont plus tardives correspondent souvent à des années de pourriture. L’oenologue recommande alors de mettre plus de SO2.
- Si les oenologues savent cela, pourquoi le recommandent-ils? Ils pourraient laisser faire.
- Je (en tant que vigneron) suis le seul à prendre ce risque. L’oenologue, lui, est payé pour son conseil. Si ce conseil conduit à abîmer les vins, l’oenologue n’a plus de travail. Les éléments indigènes sont sources de risque. Autant tout tuer avec du SO2 puis ajouter ensuite des levures de qualité. Il en existe plein. Dans mon cas, je préfère laisser faire. L’expression du millésime sera plus typique. Mais c’est un risque.
- Vous protégez tout de même vos vins.
- Bien entendu, je mets du SO2 juste avant la mise et selon ma perception. Je ne suis pas un adepte des vins natures non plus. 2016 n’en a pas besoin en ce moment. 2013 oui. Nous le sentions plus fragile.
Meursault 1er cru les Perrières
SP: D’emblée, un sacré volume. Une sphère de matière enrobée de fruits à chair blanche. Une tension altière et un assèchement crayeux en finale allonge le vin dans le temps tel un cylindre. C’est très persistant. Remarquable.
Excellent
OG: Le nez est jouissif et exprime la tension sur les agrumes, tandis que des fleurs et fruits sont plus en retrait. La bouche est impactante, haute, et porte les arômes longtemps…. Magnifique finale épicée, fruitée, saline. Effet Waooooouuuuuh.
- Avez-vous été tenté d’acidifier sur les millésimes chauds?
- Cela ne m’intéresse pas. Si je le faisais, tout mon discours tombe à l’eau. Je cherche à obtenir le millésime, avec ses qualités et ses défauts. Qu’il y ait de l’acidité ou un peu moins. Pareil pour le sucre, un raisin peut être mûr à bas degré alcoolique 11,5 mais aussi à 14.
Chevalier Montrachet grand cru/color]
SP: Finesse est le premier mot qui vient à l’esprit lorsque l’on trempe ses lèvres. De la prune, de la mirabelle. Un peu d’amer. C’est un nectar plein.
La longueur s’exprime dans un registre plus délicat. Chevalier demande cette année un surplus de concentration pour se livrer.
Excellent-
OG: Les arômes ne se livrent que peu, mais laissent transparaître des fruits jaunes et une note fumée. La bouche est délicate dans une sensation de rondeur très agréable. Beau vin mais qui ne s’exprime que peu en l’état.
- Au début je faisais déguster à l’aveugle. J’ai arrêté lorsqu’un client m’a dit « Il est très bon votre Bourgogne. »
Evidemment que savoir ce que l’on déguste à son importance. Certains vins demandent à ce qu’on leur prête un peu plus d’attention, qu’on leur donne une seconde chance. Vous voulez goûter les rouges?
- Nous allons être en retard pour notre prochain rendez-vous mais nous ne pouvons refuser
Les rouges sur 2016
Cela faisait 3 millésimes que nous n’avions plus goûté cette couleur. Nous sommes ravis de pouvoir le faire à nouveau, et nous ne croyions pas si bien penser.
Bourgogne
« J’en fais 600 bouteilles en 2016 »
SP: Un panier de fruits rouges d’une belle évidence. Très digeste.
AB+
OG: Nez fruité et accessible sur le sirop de grenade. La bouche est gourmande, un vrai bonbon sur le fruit.
Pommard les Perrières
SP: Un chouette nez, contenu. C’est floral tant aux effluves qu’au goût. Les tanins sont présents mais ils démontrent une belle souplesse dans le temps majeur du vin. Ils deviennent discrètement asséchant en fin. Une belle surprise. Loin des vins plus anguleux.
B
OG: Arômes complexes à la fois balsamiques, de fruits noirs, floral. La bouche est agréable, les tannins très souples, très accessible et en rondeur. Je me risque à exprimer que ce vin ne ressemble pas aux canons du Pommard rustique, ce à quoi Vincent Dancer m’explique qu’on fait de très beaux vins à Pommard qui a de superbes terroirs, pour peu qu’on sache rester dans des rendements raisonnables.
Pommard 1er cru les Pézerolles
« Je n’en fais pas plus de 600 non plus sur le millésime. »
SP: C’est soyeux, d’un toucher subtil. Une grande, grande finesse. C’est précis, gourmand et durable dans le temps.
TB+/Exc- Mes camarades et moi nous regardons. Wouaouh effect inside. L’un des vins rouges qui nous aura marqué pendant le séjour tant nous ne l’attendions pas.
OG: Un grand frère du précédent avec plus de profondeur. Une bouche toujours souple et une magnifique allonge.
Beaune 1er cru Les Montrevenots
« La parcelle se situe à côté de Pézerolles. Elle est exposée plein Sud. La terre y est plus calcaire. »
SP: Les fruits sont plus ténébreux. L’ensemble plus masculin. Difficile de passer après le Pézerolles. C’est néanmoins bon
B+
OG: Allo?
- Vous égrappez les rouges?
- Oui à 100%.
- Et en terme d’extraction?
- Je fais un pigeage le matin et je regarde ensuite le chapeau.
(..)
- Un grand merci à vous Monsieur Dancer.
OG: En prenant le temps du recul, il est évident Vincent Dancer nous prépare un millésime 2016 magnifique, et son travail à la fois simple et intransigeant donne cette année encore de superbes résultats. Ses explications sur les fermentations, hors des sentiers battus et des livres, ont surpris plus d’un parmi nous et moi le premier ! Nous avons eu une chance unique de déguster une gamme complète, et ses rouges tellement délicieux et accessibles ont été une véritable révélation. Que c’est beau la Bourgogne en compagnie de vignerons pareils, lorsque s’expriment les démarches de chacun à la vigne, au chais, et en compagnie des dégustateurs amateurs que nous sommes. Si je devais tirer un enseignement de ce voyage, c’est la richesse et la diversité des approches de chacun qui font que les notions de beau ou grand vin s’effacent spontanément face à celles de styles personnels. Ça ne va pas nous simplifier la vie, mais certainement l’enrichir de complexités magnifiques, et les discussions de passionnés ne sont pas prêtes de s’épuiser.
SP: Mes amis, quelle dégustation et quel cours passionnant sur la malo et le SO2! 2016 est finalement assez mûr et la vie du vin n’est pas une succession de séquences préprogrammées. Un moment remarquable en tout point. Ce sont des personnes tel Vincent Dancer qui nourrissent notre passion pour le vin. Vivement l’an prochain !