Un vin « nature » dès le premier nez, pas parce
> qu’il sent l’écurie, mais au contraire parce qu’on
> est sur un nez pétant de fruit qui donne
> immédiatement envie d’en boire une gorgée. Si je
> chipote un peu, c’est vrai que ce type de nez,
> très plaisant, est peut-être un tout petit peu
> trop systématique et sans nuances sur cette
> famille de vins.
Philippe à propos du Pommard de Dominique Derain.
Alors là, je n’en reviens pas et te tire bien bas mon chapeau, Philippe(tu)
de reconnaitre cet état de fait alors que tes propos parfois, pouvaient laisser supposer une vocation de croisé du vin nature pourfendant à qui mieux mieux un camps adverse qui dans le fond n’existe pas, du moins chez les amateurs ouverts à une expression plus “naturelle” du vin (qui pourrait s’opposer à cela ?)...mais aptes néanmoins à reconnaitre et remettre en cause un défaut organoleptique ou à sentir qu’un nez pétant de fruit, si gourmand soit il, n’échappe pas,
parfois mais pas toujours, à une forme d’uniformisation paradoxale pour des vins dits “libres”, mais je ne veux pas relancer
le débat l’échange, d’autant que je me suis régalé avec les deux vins concernés dont l’un sortait de ma cave.
Encore une belle soirée où les absents furent remplacés haut la main par quelques amis de Philippe qui nous recevait, dégustateurs rédacteurs émérites comme lui, du
Rouge et le Blanc.
Pas grand chose à rajouter au cr précis et argumenté de Philippe, d’autant que je n’ai pas pris beaucoup de notes.
Gran Ramona Gran Reserva est vraiment l’un des plus beaux
Cava que j’ai gouté : fin, fruité, délicat, de la dentelle de bulle au gout d’anis et de noisette, avec pour seul petit bémol, à mon gout, un coté très légèrement pâteux et saturant sur la persistance (dosage, pointe de sucre ?).
Sur la 1ère série de blancs, le
Pernand-Vergelesses 1er cru Ile des Vergelesses 2007 Domaine Chandon de Briailles, m’a donné plus de plaisir immédiat par son nez d’agrumes, prolongé par une bouche au bel équilibre sur une trame acide à la fois vive et délicate ; le
Meursault 1er Cru Blagny 2007 de Jobard nettement plus boisé, souffrait d’une certaine de réduction, faute peut être d’avoir été carafé, mais on ne va pas changer de si tôt les usages de la maison Barret...
Pour le vin suivant, même à l’aveugle, l’évidence est là, architecturale, ciselée, harmonieuse, certes encore un peu dans les limbes avec “une plénitude un peu comprimée, très tendue” pour certains ou “incroyablement concentrée” pour d’autres dont moi. Et là, Philippe tu soulèves vraiment un point qui me passionne, en évoquant que ce vin que tu reconnais indubitablement grand, “ne te provoque pourtant pas une grande émotion” en rajoutant que tu n’as d’ailleurs pas le souvenir d’un grand chardonnay bourguignon qui t’ait véritablement ému. Nos curseurs d’émotion ne résonnent pas forcément dans le même moule, donc je respecte ce que tu ressens, [size=x-small]bien que je te demanderai plus tard quelques éclaircissements[/size]
mais spontanément, ce
Meursault Charmes 2009 de Roulot pour moi, somptueux, me donne envie d’établir un parallèle avec ce que m’avait inspiré une
dégustation de vins d’Alsace
, dont un Altenberg 2005 de Deiss :
”N'avez-vous jamais ressenti que face à un très grand vin, l' esprit ne ressent plus, ou bien moins, le désir de décrire ce qu' il ressent en terme de jardinier, de géologue ou de cuisinier, mais plutôt en terme d'architecte, de peintre, de musicien, de poète ? Ce qui est merveilleux, c'est de sentir l' abstraction des concepts géniaux et si puissants, de grandeur, de profondeur, d' harmonie, d’unité, devenir concrète, vivante, prendre corps, s' incarner totalement dans le vin à même la nudité de notre écoute. Décidemment, la grandeur du vin est vraiment une affaire d' immanence”.
Ces mots peuvent sembler intellectuels, “prise de tête” mais ils ne sont que de simples poteaux indicateurs d’une réalité organique tangible, bref d’un vécu bien incarné. Mes émotions les plus profondes en matière de dégustation, naissent de cette ouverture à une verticale en nous même qui nous édifie, dont le vin est le reflet. Comment ne pas établir une hiérarchie entre le bas de la verticale - ex le nez pétant de fruit que tu évoquais plus haut, plus générateur de plaisir, de gourmandise que d’émotion profonde, non ? – et le haut de la verticale qui impose le silence, le pressentiment de quelque chose qui nous dépasse et nous émeut. Je me demande si dans ces joutes souvent stériles à propos du vin nature, le problème, vu du clocher de ses thuriféraires, n’est pas d’ériger ce fruit gourmand en absolu bien relatif, comme s’il était au diapason du sommet de la verticale à laquelle il participe évidemment Sur un plan plus profond où tous les éléments se résolvent en unité dans une synthèse qui les regroupe, bien sûr il n’y’a plus de hiérarchie, mais dans le monde de références et de comparaisons dans lequel on vit, oublier comme trop souvent aujourd’hui dans tant de domaines d’activité et de création, qu’il y’a un haut et un bas, un plus et un moins, me rend perplexe...
N’étant pas à un paradoxe près, je reconnais que le
Volnay Saint François 2008 de Roblet Monnot que j’ai apporté, est un bien joli vin qui associe finesse et délicatesse à ses qualités de franchise et de naturel craquant. Une cuvée un peu plus épanouie que le tout aussi délicieux
Volnay Santenot 1er cru 2008
, du même domaine, gouté il y’a deux ans. En comparaison, le
Meursault Les Durots 2008 de Pierre Morey, paraissait plus tannique, plus structuré, moins à son avantage, ce soir là. Pour le
Pommard Les Petits Noizons 2010 de Dominique Derain - qui Marc Sibard oblige, aurait pu venir également de ma cave - j’ai noté pèle mêle “fruits rouge, gelée de groseille, rondeur, tannin exigeant, un poil de sucrosité, précision craquante, vin de contact immédiat, pinot gourmand idéal”.
Deuxième série de rouges avec deux vins du
Domaine Voillot plus classiquement bourguignons, avec ce coté terrien touchant mais pas rustique dont Philippe témoigne bien - qui dans mon registre d’expérience limitée, me rappelle un peu, toutes proportions gardées, l’émotion procurée par les vins de Gouges - dont je retiens surtout l’alliance de structure et de finesse et la race de tannins, impressionnante, du
Pommard Pézerolle 2009.
Petite déception quand on a découvert l’étiquette du
Corton GC 2004 de Bonneau du Martray, dont le fruit est un peu retenu, rétracté, un poil végétal sans être agressif ; je ne me souviens plus vraiment du
Corton Les Hautes Mourottes 2005 du Domaine Ravaut ; par contre, je trouve vraiment comme Philippe que le
Pommard 1er Cru Clos des Epeneaux est le vin rouge de la soirée, déjà vraiment renversant par son nez voluptueux, parfumé, épicé, suave, pour le reste Philippe a déjà tout dit...je me contenterais de suggérer qu'il ne faut pas confondre les vins qui nous régalent et les vins qui nous transportent [size=x-small]et prendre ces propos en les réduisant, au pied de la lettre.[/size].
Ah si j'oubliais un second vin de dessert que j'ai apporté, le Banyuls
Vin de méditation du Domaine La Tour Vieille, reconnu tout de suite par Frank
, avec son nez merveilleux sur la noix, les raisins de corinthe, la figue, et en bouche, sa douce brûlure du fruit fondu à l'alcool dont le
shoot vous met l'âme sens desus dessous...
Daniel