Bon j' me lance avec l' aveu d' un avantage sur mes camarades : les fonds de bouteilles qu' ils ont laissés, ont largement contribué à l' écriture de ces quelques notes ! A une exception prés, une magnifique Coulée de Serrant (eh oui, çà arrive) dont il ne restait plus une seule goutte.....
[size=medium]Coteaux du Loir. Domaine de Bellivière. L' Effraie 2006.[/size]
anguille fumée sur toast, crème huile de noix, noix rapées.
Hier soir, ce vin singulier nous titillait par son équilibre tendu où l' acidité et l' amertume, presque fondues mais trés présentes, comme arc boutées, donnaient à son empreinte minérale, une pureté presque cristalline. Un jour plus tard, ce coté vertical, un peu incisif, est revêtu de beaux arômes de fleurs blanches, de poire, avec des touches d' abricot un peu miellées. Toujours cette impression de respirer et de boire du caillou recouvert de fleurs et de fruits, avec en bouche, un grain cristallin trés fin, équilibré, savoureux dont l' amer comme pénétré d' acidité, fait couler son goût subtil de fruit sec et de feuille morte au fond de la gorge. C' est vraiment bon et cette cuvée permet d' attendre les Vieilles Vignes Eparses, plus longues à s' ouvrir.
[size=medium]Vouvray sec. Sébastien Brunet. Arpent 2009.[/size]
charcuterie ligérienne ( rillons, rillettes, andouille).
Beaucoup de fraicheur au nez plus subtil qu' il n' y parait, dont l' acidité citronnée décline des touches de pêche et d' abricot évoquant le Vermentino des blancs de Corse pour certains, des parfums de fleurs de tilleul, des touches un peu plus exotiques (litchie), d' autres un peu miellées, le tout intégré à un bouquet trés frais, à l' allure printanière. La bouche agréable, fraiche, tendue par l' acidité, avec une finale au goût un peu métallique, décline un beau jeu de saveurs, avec un petit manque de matière et de longueur, à mon goût. Un vin franc, sympathique à boire dans le jardin, sous les derniers rayons du soleil, accompagné d' une tartine de rillettes, comme hier soir.
Rebu avant de poster ce cr, ce vin à l' ambiance citron ce soir, a plus de corps et de longueur qu' il n' y parait. C' est vrai qu' il est trés jeune !
[size=medium]Chinon blanc. Jérôme Lenoir. Clos des Roches 1997[/size].
idem
Le nez plein, totalement fondu, exprime les 14 ans d' age de ce vin. Les parfums de fleurs blanches un peu miellées se dégagent d' une matière aromatique fruitée ( poire, pomme, fruits secs) dense, profonde, au caractère complexe mais sans aucune lourdeur, tant le fruit parait imprégné de fraicheur, de jeunesse, ce qui laisse supposer la longévité de ce vin rare, à la production presque confidentielle. Cette densité se retrouve en bouche, avec une texture grasse et fine, à la fois, dont les saveurs fondues mais tenues par une vraie structure racontent une histoire passionante, étayée par de beaux amers fondus en finale. Un trés beau vin qui nous a tous impressionés, que Cyril a déniché dans les réserves cachées du vigneron qui a la réputation de conserver (et de vendre !) des vins un peu agés, à des prix angéliques. Pour preuve, son superbe clos des Roches rouge 2002 goûté chez Augé Samedi dernier, vendu jusqu' à demain soir....à 10,30€, s' il en reste !
Jean Bernard, aucun souci pour laisser dormir en cave ton 2006 !!
[size=medium]Saumur blanc. Domaine Guiberteau. Brézé 2005.[/size]
petits patés de Pézenas.
Le nez nous impressione tous par la profondeur et l' exhubérance (toute Alsacienne pour certains) de son fruit dense et fin, par son équilibre aromatique rehaussé d' une fine trame acide, où se cotoient des arômes bien mûrs de poire, de pomme rainette bordée de citrus, comme imprégnés d' une fraicheur toute florale, avec un petit coté fumé brioché et un fin boisé vanillé qui semblent signer l' ambition (réussie) et l' élégance de l' élevage. La bouche prolonge cette impression avec un toucher fin et délicat, trés harmonieux, une texture dense et fine dont la structure présente et discrète semble n' être là que pour révéler le jeu de saveurs fruitées florales, bordées par un bel amer en finale, exprimant cette fraicheur réjouissante commune aux grands vins de chenin auquel ce vin me semble appartenir. Magnifique !
[size=medium]Savennières. Eric Morgat. L' Enclos 2007.[/size]
pot-au feu de poulet aux légumes de printemps selon la recette de Ph Faure-Brac.
Au nez, chenin oblige, on retrouve évidemment des arômes évoqués sur les vins précédents. avec sur ce vin, une délicatesse, une finesse, une subtilité qui me touchent profondément. Un nez dont la combinaison à jamais renouvellée des éléments aromatiques, selon l' heure, la température, l' age du vin, l' attention du dégustateur, ouvre l' émotion, tant cette combinaison aux cent visages, parait équilibrée, ouverte à des alliances révélant le meilleur du fruit et de la fleur, un peu comme ces thés précieux d' origine différente que l' on mélange par dosages subtils pour se rapprocher d' une sorte d' absolu du thé. Je savais pour l' avoir lu ( merci Mr Casamayor !) que le chenin sur les terroirs de Savennières offre "cette fragrance de thé mélée aux parfums de fruits mûrs, confits ou secs, suivant l' age du vin" ( Arômes du vin. Hachette), mais je ne l' avais jamais ressenti d' une façon aussi absolue, aussi émouvante, de surcroit sur un chenin sec. Cette impression d' harmonie où chaque élément est à sa place, se retrouve en bouche où la puissance, la structure sont totalement au service de la finesse, de la précision des saveurs croisées dont la rémanence longue, longue, tapissant tous les recoins de votre bouche, évoque à nouveau les saveurs et fragrances d' un grand thé subtilement parfumé à la pêche et à la vanille. Grandiose !!
[size=medium]Savennières. Coulée de Serrant. Sélection de tries du Grand Clos 1996.[/size]
idem
Non seulement la bouteille est désespérément vide, mais en plus je n' ai pris aucune note !!
Grande bouteille assurément, mémoire (confuse) d' un nez profond, envoûtant, d' un toucher de bouche " lever de rideau "- comme j' ai pu le dire d' un autre vin - qui annonce déjà la puissance, le volume, la structure, l' équilibre, l' harmonie, la longueur de ce vin hors norme, absolument sans aucun défaut, sans aucune déviance ( Luc, si tu me lis, je sais à quel point les critiques et sarcasmes que tu balances à la Coulée sont à la mesure de l' enthousiasme dont tu nous as souvent fait part sur leurs grandes bouteilles !). On a eu du pot, mais je dois reconnaitre ne pas avoir eu de problèmes sur les 3 bues récemment: ce 96 magnifique, un 2006 dont le seul défaut est d' avoir été bu trop jeune, insuffisament carafé et un 1995 qui reste pour moi l' apothéose de tous les Savennières que j' ai pu boire, à un niveau largement supérieur, à mon goût, que le 96 bu Lundi. Mais je l' avoue, il y' a trois jours, comme les deux vins ont été bus en parallèle, j' ai été impressioné comme nous tous, par la puissance, le volume, la longueur de la Coulée, mais c' est le Savennières de Morgat qui m' a le plus touché, par sa finesse, sa délicatesse, sa transparence cristalline, si jeune encore...Mais si j' avais regoûté tranquillement la Coulée, comme j' ai pu le faire longuement avec l' Enclos de Morgat, j' aurais peut être un avis différent, mais pourquoi comparer ? A noter, l' accord remarquable entre les Savennières et le pot au feu de poulet aux légumes de printemps, tissant une histoire d' amour entre le chenin, le goût des légumes et la crème !
Une question au passage. La " Sélection de tries du Grand Clos " indiquée sur l' étiquette, est-elle une cuvée particulière qui se distingue de la cuvée normale ? Si oui, est-elle produite régulièrement ou simplement sur certains millésimes d' exception ?
[size=medium]Vin de table ( Anjou). La sève astrale du paradis des Bonnes Blanches 2005. Josette Médau, Pierre Weyand[/size].
assortiment de fromages de chèvre ligériens, Sainte-Maure....
Si la chaleur de l' alcool ( 15°) ne venait tapisser les narines sans jamais être envahissant, le nez évoquerait un jus de fruit alcoolisé hybride, entre raisin et pomme, pas encore blète mais pas loin, légèrement teinté de pamplemousse et de fragrances de noisette. Plutot sympathique et charmeur... mais la perplexité ( non dénuée de curiosité bienveillante !) s' affiche sur les visages surmontés pour certains d' une bulle remplie d' images de la dégust Loire chez Augé, Samedi dernier (donc à tendance "nature" comme ce "vin de terre libre comme l' air", peut-on lire sur l' étiquette). Si je n' avais pas su le nom du vigneron, j' aurais avancé Claude Courtois, d' autres évoquèrent Mark Angeli...eh bien, non ! La bouche au caractère résolument oxydatif, mais sans aucune déviance, révèle un bel équilibre de saveurs fruitées, rehaussée par une fine acidité de bon aloi, mais avec un curieux retour d' amertume un peu astringente en finale, qui laisse en bouche, la sensation de sécheresse un peu rapeuse de la prunelle, prolongée, il est vrai, d' une rémanence à la saveur de pomme, plutot agréable. "Cà me plait, mais pas comme du vin", commente alors Dominique. Suggérons en guise de joker que ce vin singulier, astral (c' est le vigneron qui le dit), sans défauts si ce n' est d' être un peu monocorde, a été servi en compagnie de vins plutôt dans la même mouvance ( toutefois sans ce discours baba bio militant sympa, mais un peu gonflant !) avec lesquels je me sens plus en résonnance sans jamais me poser la question de savoir si leur vin est du vin ou pas. Allez, j' arrête mon mouvement d' humeur, même que je vais me resservir une lichette de ce jus astral plutôt sympa en guise d' apéro ! Hubert, quelques info sur ce domaine et leurs vins dont l' un des propriétaires est décédé des suites d' un tragique accident de tracteur, il y' a deux ans ?
[size=medium]Vouvray. Domaine Huet. Clos du Bourg demi-sec 2005.[/size]
idem
Le nez franc, droit, au fruit trés pur, presque aérien, révèle tout d' abord des arômes de pomme et de coing mélés, évoluant vers le litchi et la mangue, avec l' aération. La bouche révèle un équilibre magistral rendant toutes ses lettres de noblesse au genre demi sec. Demi corps, demi portion, un demi quelque chose prend souvent des connotations péjoratives dans le sens d' inabouti, d' incomplet ! Là, c' est tout le contraire, le chenin by Noël Pinguet décline du sec au liquoreux, tout un monde de nuances, de subtilités dont chaque déclinaison est une totalité, un genre à part entière. Dans sa catégorie, ce demi sec relève de l' excellence tant sa trés légère sucrosité, déjà présente au nez comme un parfum, est la signature d' un fruit bien mûr. En bouche, la sucrosité reste merveilleusement gérée, la matière équilibrée au grain fin et délicat, tenue en laisse par l' acidité, confortée par des amers généreux et si légers, nous régale longtemps des saveurs de son fruit goûteux, entre sec et moelleux. Un bien bel entre-deux.
[size=medium]Vouvray moelleux. Domaine de la Mabillière 1990[/size]
idem
Un nez mi tropical parce que le coing est plutôt un fruit de chez nous, mais quand son arôme si prégnant se mêle à celui de la mangue, non moins singulier, le tout enrobé d' arômes évoquant à nouveau le thé, il prend tout de suite une allure tropicale caressante, jouant plus sur la tension par son acidité que sur l' indolence, ce qui lui donne un coup de jeunesse malgré ses 20 ans d' âge. La bouche est trés agréable, équilibrée par son acidité minérale un peu métallique qui fait subtilement cling sur les dents ; c' est simple mais vraiment goûteux et le tiers de la bouteille qui nous reste nous fera un excellent vin d' apéritif. C' est sur qu' entre le Huet et le Delesvaux qui suit, ce vin sympathique, dans la mouvance bio lui aussi, comme la majorité des vins servis, ne la ramenait pas trop.... Pourtant trois jours plus tard, de longues minutes aprés l' avoir dégusté, ce moelleux simple et superbe, laisse flotter dans ma bouche, un nuage de thé, d' épices et de miel qui appelle l' accord avec une cuisine aux saveurs d' Asie. Gardez vos vieux chenins, ils vous conduiront en Cochinchine !!
[size=medium]Bonnezeaux. Chateau de Fesles 1996.[/size]
tarteTatin, glace à la vanille de Madagascar de François Thérond.
nez profond, séducteur par son bouquet voluptueux évoquant un pain d' épices qui intègrerait sans les confondre, des fragrances d' abricot secs, de zestes d' orange, de raisins de Corinthe, de dattes et de figues séchées, le tout bordé d' un fil acide évoquant le zeste de citron qui apporte une grande fraicheur, comme si l' horizon olfactif était recouvert d' un voile légèrement mentholé du plus bel effet. Un nez tout en nuances et en finesse dont les petites touches successives dessinent un paysage olfactif assez envoûtant mais moins puissant que dans mon souvenir, il y' a dix ans. La bouche fondue, toujours tenue par cette acidité rafraichissante, vrai fil rouge de la soirée, joue également plutôt sur la finesse, la délicatesse que sur la densité, la puissance. Pour ma part, surtout en comparaison du vin qui suit, j' aurais aimé que le jeu de saveurs goûteuses soit porté par une texture avec un peu plus de corps, un peu plus de gras, même si le paysage olfactif qui m' avait tant envoûté quelques minutes avant, semble se déposer au fond de la gorge sur une belle finale de saveurs toute en douceur, survolé par un nuage d' abricot sec. Un vin étonnant de fraicheur, malgré tout.
[size=medium]Coteaux du Layon Sélection de Grains Nobles 1997. Philippe Delesvaux[/size]
idem
Comment ne pas comparer le Bonnezeaux et le Layon servis en parallèle ? Transposé en Alsace, cela reviendrait à comparer, toutes proportions gardées, une Vendange Tardive et une SGN.....
Le nez est massif, presque compact, incroyablement riche, comme si l' horizon olfactif résonnait déjà de cette texture grasse inoubliable que le premier toucher de bouche révèlera quelques minutes plus tard. Une matière olfactive dense, donc, hors norme, un monument en vérité qui consent peu à peu à ouvrir ses portes, par couches successives d' arômes qui ne seraient pas fondamentalement différents des arômes du Bonnezeaux, si ce bouquet fantastique n' était pas composé d' arômes si profonds, si denses, si harmonieux qu' ils font figure d' essences d' arômes, faisant accéder ce nectar au rang des plus beaux liquoreux que j' ai pu goûter dans ma vie. La bouche est ample, si large qu' elle semble dépasser les les limites de notre bouche, avec une texture insolemment grasse, profonde, pénétrée de saveurs généreuses évoquant à leur tour, une essence de fruit, presque une essence de sucre. Un sucre qui se transformerait en ogre s'il n' était lui-même, pénétré encore et toujours plus, de cette fraicheur ligérienne, décidemment commune à tous ces grands blancs de chenin tendus par l' acidité, du plus sec au plus liquoreux. Un nectar que l' on consomme par petites gorgées, comme un alcool fort, dont le gras de sa texture et la concentration en sucre, me rappelle un autre monstre sucré, le bien nommé Folie Pure de Patrice Lescarret. Vraiment impressionant, je te rejoins cent pour cent dans tes appréciations, Bruno !
A vos plumes, les amis pour faire revivre à votre tour cette soirée magnifique !
Good night.
Daniel