Une nouvelle dégustation de LPV Versailles, sur un thème qui a les faveurs de beaucoup d’entre nous, et qui a permis d’ouvrir de bien belles bouteilles !
Par le plus beau des hasards, c’est quasiment le même thème (étendu à tout le Rhône, depuis sa source en Suisse jusqu’au sud de la France) qui a été choisi par la RVF dans son numéro de février pour établir un classement des 50 meilleures cuvées. Mais alors qu’elle l’a fait sur un même millésime, 2012, bien trop jeune pour les grandes cuvées, nous avons l’immense avantage à LPV Versailles de pouvoir proposer des vins à point !
Quand en plus c’est organisé par Philippe, on peut être sûr que ce sera de main de maître, avec des paires tip-top, des triplettes aux petits oignons et un ordre à la précision chirurgicale … Un grand bravo à lui
et à tous les dégustateurs, qui sont par la même occasion les apporteurs …
Une seule chose n’a pu être maîtrisée, l’attaque sournoise d’un mauvais bouchon, qui n’a heureusement touché qu’une bouteille (mais quelle bouteille !), alors que la dernière fois c’était quatre…
Première paire : les deux cuvées stars d’une même appellation, sur un même beau millésime jeune
Crozes-Hermitage – Domaine Combier – Clos des Grives – 2010
Robe sombre, avec un début d’évolution.
Nez très intense, doté de beaux arômes fumés, de fruits noirs et de réglisse.
Bouche ronde, fruitée et très agréable, simple et bien faite, qui finit sur une bonne sapidité même si on aurait espéré plus de persistance.
Bien ++/ Très Bien
Crozes-Hermitage – Domaine Alain Graillot– La Guiraude – 2010
Robe très sombre et jeune.
Nez profond, sur des fruits noirs et de belles épices.
La bouche est pleine, très charpentée, à la chair fruitée et concentrée et aux tanins saillants structurants.
Bien +(+) en l’état mais va se bonifier en s’affinant et à l’avenir sans doute meilleur que le Clos des Grives.
Deuxième paire : deux vins d’un niveau d’appellation équivalent, sur un même très beau millésime à point
Crozes-Hermitage – Domaine Alain Graillot– La Guiraude – 1999
Quelle magnifique idée, tout en changeant de paire, de nous servir à la suite (et à l’aveugle, comme pour tous les autres vins) la même cuvée avec 11 ans de plus !
Robe sombre aux reflets bien tuilés.
Nez puissant, d’une très belle complexité par ses arômes évoluant des épices à la mûre, avec une touche animale fugace qui apparaît par moments.
La bouche est aristocratique avec un fruit en filigrane, bien charnue et profonde, dotée d’une énergie qui l’allonge superbement et stimulée par une finale très saline.
Très Bien ++
Saint-Joseph – Domaine Chapoutier – Les Granits – 1999
Robe assez sombre, bien évoluée.
Nez intense, d’abord animal, puis le fruité secondaire l’emporte, complété par des notes vanillées.
La bouche est à l’avenant, sur de beaux arômes de fruité secondaire. Elle joue plus sur la finesse, avec une présence acide marquée. La finale est également saline, mais moins que celle de La Guiraude.
Très Bien +
Troisième paire : deux vins d’une même appellation, de producteurs pas loin du top, sur deux millésimes proches calendairement mais aux caractéristiques différentes
Côte-Rôtie – Domaine Clusel Roch – Viallière – 2010
Robe sombre et non limpide, au bord de disque déjà tuilé.
Nez très intense, d’un fruité pur et généreux sur le cassis et la mûre.
La bouche est large, possède une trame dense, une matière riche et un manteau de tanins vigoureux. Ce vin trop jeune doit encore s’affiner pendant quelques années mais possède tous les atouts pour devenir un très beau vin.
Très Bien + en l’état, à table.
Côte-Rôtie – Domaine Jasmin – 2009
Robe sombre, très brillante, aux reflets légèrement tuilés.
Nez très intense équilibré entre fruits noirs et épices, titillé par des notes de réduction que certains ont trouvé très présentes mais moins sensibles pour moi.
La bouche fait montre d’une grande élégance, portée par une belle acidité en rien acerbe. Le vin tout en longueur bascule doucement sur des arômes tertiaires avant une finale sapide à souhait.
Très Bien +(+)
Étonnante, cette sensation que les deux millésimes ont été inversés, sur les seuls critères de richesse et de finesse ! Mais à y regarder de plus près, l’évolution plus rapide du Jasmin est un indice important, et pas seulement à cause d’une année de différence…
Première triplette : trois vins d’une même appellation, de producteurs au top de l’appellation et d’un même très beau millésime ; elle s’est transformée en paire, mais quelle paire intéressante !
Cornas – Domaine Robert Michel – Les Coteaux – 2005
Robe moyennement sombre et bien évoluée.
Beau nez fort agréable, suave et complexe, sur des senteurs de magnifiques épices douces, de belles touches florales et d’une note de suie.
La bouche aristocratique présente une grande droiture, elle est toute en dentelle et les tanins fins et soyeux sont dans la même veine.
Très Bien ++ / Excellent
Cornas – Domaine Robert Michel – La Geynale – 2005
Robe sombre, marquant un début d’évolution.
Nez riche sur un grand fruit, des notes chocolatées qui feraient partir plus au sud ou sur du grenache (mais c’est 2005) et d’autres épicées qui rappellent la syrah.
La bouche possède une belle étoffe et une carrure impressionnante, avec pour base une superbe matière très mûre. L’ensemble n’est en aucun cas dénué de tonicité grâce à une acidité sous-jacente.
Très Bien ++ / Excellent
Je n’ai donc pas pu départager sur le moment ces deux très beaux vins, mais on comprend lequel des deux va sans doute devenir grand. Quelle belle idée d’associer dans une triplette ces deux enfants de ce grand vigneron ! Malheureusement la troisième bouteille ne sera pas au rendez-vous.
Cornas – Domaine Auguste Clape – 2005
Hélas bouchonnée…
Quatrième paire : deux vins d’une même appellation, à des stades d’évolution très différents
Hermitage – Domaine Bernard Faurie – Bessards-Méal – 2008
Robe sombre, dénotant à peine quelques signes d’évolution.
Nez très intense et expressif, mâtiné d’arômes de fruits compotés et d’épices, et de quelques touches balsamiques qui apportent de la fraîcheur.
La bouche toute en rondeur plait par son équilibre, sur un beau fruité agréable, une chair pas très concentrée mais suffisante, et des tanins civilisés.
Une très belle réussite pour le millésime.
Très Bien +(+)
Hermitage – Domaine Paul Jaboulet Aîné – La Chapelle – 1995
Robe sombre, bien évoluée.
Nez puissant sur les fruits noirs et les olives noires, des notes truffées de bon aloi, mais aussi un côté lacté qui m’a un peu dérangé.
L’énorme concentration en bouche en impose. L’aromatique est clairement passée sur le tertiaire, mais beaucoup plus sur les champignons et le sous-bois que sur le fruité secondaire. Les tanins encore en vie sont de belle facture.
Ce n’est pas mon style mais je dois dire que d’autres dégustateurs ont encore plus apprécié et que l’ensemble a fait un beau mariage avec un superbe lapin à la royale.
Très Bien +
Deuxième triplette : trois vins d’une même appellation, de producteurs au top de l’appellation, sur un même millésime pour deux d’entre eux et un millésime proche calendairement mais aux caractéristiques différentes pour le troisième
Côte Rôtie – Domaine René Rostaing – La Landonne – 2006
Robe sombre et déjà bien tuilée.
Nez très intense, sur des arômes floraux magnifiques (violette et même rose fanée) complétés par de l’orange sanguine.
La bouche est d’une superbe élégance, bâtie sur une matière bien mûre et d’une allonge propulsée par une belle acidité.
Très Bien ++
Le style en a étonné plus d’un, surtout pour une Côte Brune et face à ses deux compères d’un style très différent. Mais c’est le vigneron qui a imprimé sa patte… D’ailleurs cela m’a fait penser à un autre grand vigneron d’une autre région : Emmanuel Reynaud. Beaucoup n’étaient pas d’accord mais je persiste : floral tout en finesse, orange sanguine et élégance de la bouche sont pour moi des marqueurs de Reynaud. Mais je dois avouer avoir beaucoup moins d’expérience sur Reynaud que mes contradicteurs.
Côte Rôtie – Domaine Jean-Michel Stephan – Vieille Vigne en coteaux – 2005
Robe sombre qui se teinte de reflets légèrement tuilés.
Très beau nez qui allie avec brio des arômes fruités et floraux.
La bouche est sphérique, soutenue par une belle charpente et habillée d’une chair généreuse et très mûre, se terminant par une finale bien sapide.
Une très belle syrah encore bien jeune mais déjà très avenante.
Très Bien ++ / Excellent
Côte Rôtie – Domaine Jamet – 2006
Robe très sombre où l’on peut encore percevoir quelques reflets violine de jeunesse !
Nez intense, plutôt sur les fruits noirs mais avec aussi des épices et de la vanille, complétés par des notes balsamiques et mentholées qui rafraîchissent et complexifient l’ensemble.
Racée et de noble origine, la bouche révèle une matière riche et fruitée qui s’appuie sur une finesse sous-jacente et une acidité subtile. Des tanins discrets viennent titiller la finale qui rebondit plusieurs fois.
Le vin de la soirée pour quasiment tout le monde :
Excellent (+)
Et quelques « after »…
Côtes du Rhône – Eric Tessier – Brézême – Vieille Serine
Ce n’est pas vraiment un intrus car 100 % syrah et à la limite sud du Rhône septentrional. Je n’ai pas noté le millésime.
Robe assez sombre, bien évoluée.
Nez intense, fin et frais.
Bouche ronde, matière assez fluide et fruitée, bonne fraîcheur.
Bien +
Mosel-Saar-Ruwer – Winninger Röttgen – Weingut Reinhard und Beate Knebel – Riesling Spätlese – 2004
Robe or clair.
Nez très puissant aux beaux hydrocarbures prégnants et des notes citronnées.
Bouche à l’équilibre légèrement décentré vers le fruit plus que le sucre et l’acidité. Un vin au style moelleux très digeste et à la longueur honnête.
Bien ++ / Très Bien
Vin de Pays des Coteaux de l’Ardèche – Domaine du Grangeon – Grains passerillés rouges - 2011
Un OVNI : 100 % gamay !
Robe assez sombre, aux reflets nettement tuilés.
Nez puissant, aux notes lactées très présentes et sur des fruits rouges et noirs.
Bouche au sucre présent, plus sur les fruits rouges et des notes de noix, manque de finesse et d’acidité.
Assez Bien +
Et voilà : encore une très belle soirée assortie de discussions animées et toujours intéressantes (j’apprends beaucoup !). La prochaine fois nous irons encore plus nettement au sud : ce sera le Roussillon !
Amitiés oenophiles,
Jean-Loup