Villa d'Este Wine Symposium
Édition 2017
Weingut Egon Müller
Un océan de verres aux couleurs chamarrées emplit la salle préalablement rafraichie afin que les vins soient servis à températures idéales.
Les dames en seront pour leur frais mais les vins pour leur fraîcheur !
François Mauss rappelle aux convives présents les consignes habituelles et qui font l'incroyable qualité des moments de dégustation à Villa d'Este : silence absolu exigé afin que chacun puisse juger en son âme et conscience de la qualité ou des limites des vins qu'il est en train de déguster et ce sans voir sa liberté écrasée par les éructations précoces d'un enthousiaste de service ou par les commentaires d'un cador à vos côtés dont le pedigree est à même de vous faire douter de vous.
Andiamo !
Scharzhofberger, Kabinett “alte Reben”, 2015
Robe cristalline, à peine teintée d'un léger gris vert.
Nez totalement masqué par le soufre, sur des notes d'allumette craquée qui empêche tout autre expression aromatique de se libérer en écrasant un arrière plan d'agrumes.
Bouche aérienne, sur une texture d'eau de roche et une acidité pointue mais sans morsure.
Le vin est totalement muet aromatiquement mais pose une structure impeccable, à la fois fine et délicate, légère et fraîche mais sans déficit de matière, creux ou sécheresse.
Finale en toile d'araignée, fragile d'apparence mais d'une vraie résistance et donc persistance.
Attente impérative mais en toute sérénité vu la qualité de matière.
Scharzhofberger, Kabinett, 1994
Robe à peine plus teintée que le 2015.
Nez sur la crème au beurre mentholée, la verveine séchée, une pointe d'hydrocarbure qui tire sur le caoutchouc.
Bouche tonique et fraîche, sur un déroulé aérien avec beaucoup de relance, sur une matière légère et déliée qui s'enroule autour d'une acidité très présente et qui crée une impression de verticalité.
Goûts complexes, compromis de zestes d'agrumes (citron vert) et de notes pétrolées très légères et agréables.
Finale mentholée traçante d'une apparence délicate mais qui s'étire tout en longueur.
Très bien.
Scharzhofberger, Spätlese, 2015
Robe toujours aussi claire, sur un gris vert à peine perceptible.
Nez compliqué et évolutif, sur une curieuse première impression de senteurs presque vinaigrées qui se libère lentement autour de notes de... morito, compromis de citron vert, de menthe poivrée et toujours ce côté un peu bizarre et border-line.
Bouche agréable et fraîche construite autour d'une acidité croquante enroulée dans une superbe acidité.
L'équilibre est réussi mais je trouve toujours la présence d'une acidité volatile marquée et qui crée comme une pointe brouillonne qui chahute des goûts qui manquent de définition.
Finale un peu brutale et qui perd en cohérence de trame quand on aimerait la voir s'étirer en ligne droite.
A revoir car je n'ai pas bien compris ce vin qui ne pas semblé du tout en place.
Scharzhofberger, Spätlese, 1997
Robe sur un jaune très clair, légèrement gris vert fluo.
Beau nez frais assez similaire au Kabinett 1994 mais plus puissant et construit, sur la naphte, le thé à la menthe, la crème au beurre et presque un côté Paris-Brest.
Bouche délicieuse, à la fois ultra nerveuse par son énorme acidité motrice mais équilibrée par une matière croquante et de superbes amers qui font saliver.
L'ensemble est redoutable d'énergie, sur un équilibre construit sur les extrêmes qui produit un vin fragile en apparence mais superbement réussi.
Finale toute en fraîcheur et en noblesse, délicieuse de précision et de gourmandise et qui m'évoque l'architecture gothique, comme une envolée vers les cieux.
Superbe !
Scharzhofberger, Auslese, 1988
Robe jaune paille qui tire vers un doré léger.
Nez complexe, assez serré, sur le beurre, la pierre humide, les fleurs blanches, le citron, la papaye et une pointe de volatile.
Bouche à l'attaque délicieuse, propulsée par une acidité qui tranche dans une matière crémeuse au toucher, sur de beaux goûts de tabac blond.
Le milieu de bouche est agréable mais au moment où l'on attendrait que le vin se relance et s'envole vers des horizons illimités, il me laisse comme en plan avec mon plaisir immédiat en poche, comme manquant de puissance et de capacité de relance.
Finale agréable mais assez statique et raccourcie.
Bien à très bien mais sur cette bouteille, ce vin était à boire.
Scharzhofberger, Auslese Goldkapsel, 1975
Robe vieil or (
enfin un peu d'évolution visible ! )
Nez au bouquet complexe, avec de l'évolution, sur l'abricot, le thé noir, le safran et des notes qui oscillent entre la plombière et un côté minéral agréable.
Bouche à l'acidité vertébrale impressionnante qui porte haut et loin une matière à la liqueur délicieuse et franche dans un ensemble ultra tonique impressionnant de légèreté.
Le vin déroule une structure remarquable qui concilie puissance, tranchant et une capacité de relance redoutable.
Finale délicieuse de trame, toute en tenue et à laquelle je ne reprocherai qu'une aromatique un peu simple, marquée par des notes de pierre humide qui crée comme un point d'austérité.
Très bien.
Scharzhofberger, Beerenauslese Eiswein, 1975
Robe ambrée.
Nez complexe et gourmand, sur le miel, le melon confit, le thé, le beurre, la menthe fraîche.
Bouche monumentale construite autour d'une acidité dantesque, une vraie lame de rasoir et qui propulse une matière pleine et au sucre sans lourdeur dans un ensemble génial d'énergie, d'ampleur et de précision.
Le vin est littéralement incrachable, énorme de maîtrise, sur une sensation tactile incroyable d'équilibre, quand les extrêmes se concilient et trouvent une totale cohérence en bouche, sur des goûts de confiture d'abricot, de thé matcha, de miel enrobés dans un truc minéral frais absolument délicieux.
Finale gigantesque de puissance, à l'acidité volatile sûrement très présente mais qui étire à l'infini un vin génial de complexité et de fraîcheur.
Grand vin !
Scharzhofberger, Trockenbeerenauslese, 1976
Robe acajou clair, comme un café léger.
Nez pointu, où l'acidité volatile lance et titille le miel mille-fleurs, la confiture d'abricot, la crème brulée, le thé noir et des notes de pierre chaude.
Bouche d'une lecture plus riche que le 1975, plus concentrée en sucre mais géniale d'équilibre, là encore par cette acidité énorme et qui tranche au cœur du vin en mobilisant sa liqueur franche exempte de tout côté collant.
Les goûts sont en pleine phase du nez, toujours sur ce compromis de fruité miellé enrobé de notes minérales.
Finale énorme de persistance, riche et pourtant sans une once de lourdeur.
Superbe !
Une magnifique dégustation et qui prouve combien ces vins qui résistent à l'usure du temps sans faiblir imposent d'être attendus à des échéances qui peuvent dépasser celle d'une génération pour trouver leur expression la plus valorisante et intégrer des protections en soufre que j'imagine assez élevées.
Le niveau des acidités est absolument incroyable sans pourtant jamais verser dans l'aridité sèche et prouvent qu'il n'est de grand vin que d'équilibre !
Et le grand avantage des rieslings à ce niveau, c'est qu'ils ouvrent l’appétit et vous laissent la bouche fraîche et disponible pour enchainer sur le dîner qui s'annonce.
Allez zou, il est temps de libérer la salle pour permettre aux équipes de Villa d'Este d'opérer la mise en place des tables avec l'organisation incroyablement maitrisée qui permet à l'évènement de toujours se dérouler sans accrocs.
A suivre...
Oliv