Avertissement : Compte-rendu un peu long, mais ô combien instructif.
Clos Veličane échantillon 2018.
ACTE 1 : Votre mission, si vous l’acceptez…
26 avril 2019, 22 h 06. Réception d’un courriel émanant du propriétaire d’un célèbre Clos Slovène.
«
Mes chers Experts.
Finalement, vous êtes 8.
Je vous envoie un peu de la production du Clos Veličane 2018, production confidentielle qui à cause de la grêle ne dépassera pas 1 600 bouteilles pour ce millésime.
Trois cuvées en quantité égale : Riesling, Pinot gris et une cuvée d'assemblage des 2, nommée Plešivica (là aussi, parité dans l'assemblage).
Vous recevrez un échantillon de 25 cl sans savoir de quelle cuvée il s'agit.
Le vin est tiré des cuves : la mise aura lieu en juin. Je ne désire pas trop amputer la production, mais surtout éviter tout risque d'oxydation en tirant trop d'un coup (la cave est encore fraîche et même avec des chapeaux flottants, il faut faire attention). C'est la raison de la petite quantité prélevée.
Le vin n'est pas filtré et est donc légèrement trouble.
Je vous recommande de mettre au frais dès réception et de ne pas trop traîner pour le goûter car la protection est vraiment minimale. Servir à 8 degrés et voir comment le vin évolue : à mon avis c'est vers 12 qu'il est au mieux.
Ce serait bien d'étalonner avec un sparring partner : si vous avez un vin avec une acidité haute mais également assez riche, sans boisé marqué. Type Vouvray Jasnières, Riesling alsacien ou allemand, Furmint hongrois ou slovène, éventuellement un Jurançon; à mon avis, vous pouvez cibler dans la gamme autour de 15 € marché français. Là, je m'avance ou me dévoile, c'est selon ... -)
Vincent se propose de centraliser les comptes rendus et je l'en remercie vivement. Envoyez les lui, donc, sans passer par moi : je découvrirai vos commentaires sur LPV. Dès que Vincent aura reçu tous les CR, je lui communiquerai la solution de l'énigme. (Qui a eu quoi et vous le découvrirez en ligne).
Les questions :
- Est-ce que c'est bon ?
- Qu'est-ce que c'est ?
- A quoi ça ressemble ? A quoi je peux le comparer ?
- Combien ça vaut ?
J'envoie le reste des échantillons (un est déjà parti en Finlande) lundi ou mardi.
Si tout pouvait être plié pour le 15 mai, ce serait bien.
Je vous remercie infiniment de votre aide : elle m'est précieuse et me servira à fixer le prix des cuvées. Je tiens à cette modulation du prix au regard de la qualité et vous savez que je refuserai un prix ridiculement élevé, par principe.
Je ne vous cache pas également que par l'éclairage que vous porterez sur mes vins, vous participerez à ma publicité. Il est encore temps de refuser ! -))
Merci de m'informer de l'arrivée des petites bouteilles et prévenez moi juste si le vin est défectueux (il ne l'est pas actuellement).
Encore une fois, acceptez mes remerciements et si votre route passe près d'ici et que je suis là, je me ferai un plaisir de vous montrer le "pays".
Bien amicalement",
Jérôme
Clos Veličane
ACTE 2 : les protagonistes.
Et voilà… A la joie d’être reconnus, pour la seconde année, « experts » en vin primeur slovène succède, immédiatement, la lourde responsabilité que cela implique. Comme l’année dernière, il va falloir juger un vin pour ce qu’il est et non pour ce qu’il représente. Evaluer le potentiel d’un nouveau-né… Effrayant, non ? Tout du moins une lourde tâche à laquelle chacun d’entre nous s’astreindra avec responsabilité et impartialité. Si tu veux rendre service à un ami, dis-lui la vérité !
Les 8 « experts », dans l’ordre alphabétique :
EricB, Hyllos, Jean-Loup Guerrin, Mgtusi, Oliv, Peterka, Th.mauss, Vougeot.
Experts auxquels s’adjoignent deux Guest stars : Gildas et ma femme, Anne.
Chaque dégustateur a reçu une fiole de 25 cl (probablement un flacon d’huile ou de vinaigre parfaitement nettoyé) hermétiquement fermée par un bouchon en plastique. Pas sexy, mais efficace. Et j’avoue que l’idée de réemploi ne me déplaît pas.
Le protocole de dégustation, fourni par Jérôme, sera suivi par chacun. Gildas et moi dégusterons ensemble, sans confronter nos opinions durant la dégustation. Une fois terminée, nous échangerons en toute liberté sur ce que nous avons bu.
Chacun dans notre coin, donc, nous allons déguster cette nouvelle interprétation d’une partition qui s’est jouée, en plusieurs temps, sur la portée que représentent les courbes du Clos Veličane. Une interprétation du minéral, du végétal, de la pluviométrie, de la chaleur ou de la fraîcheur ; bref d’un terroir dont un néo-vigneron souhaite tirer le meilleur. Une vision globale et plusieurs points de vue dont voici la teneur…
ACTE 3 : la dégustation du lot 1
Allez ! On commence avec les
Guest Stars :
La dégustation de Gildas (Spiegelau Expert) :
Robe saumon. Enfin presque. Enfin… J’me comprends
. Evoque une macération.
Nez présentant une odeur de pêche, assez ouvert, acidulé, quelques notes de nougat.
Cela me fait penser à une vinification courte, mais avec plus de complexité tout de même.
Quelques notes de cassis, de lilas et de muguet.
Attaque salivante, poivre blanc, soutenue par une bonne acidité ; cette dernière étant le fil conducteur du vin.
A ce stade, le vin est énergique, de longueur correcte, mais manque pour l’instant de complexité et d’homogénéité. A noter, encore, des notes de lilas. Termine finement salin et glycériné.
Est-ce que c’est bon ? Bien dans l’exécution.
Qu’est-ce que c’est ? Assemblage de 2/3 de pinot gris et d’1/3 de riesling.
A quoi le comparé-je ? A rien que je connaisse.
Le prix : 12 €
Gildas, en pleine concentration : on ne copie pas !
Dégustation d’Anne, elle aussi « experte » en vins slovènes (Spiegelau Expert).
Un mélange fruité et un peu floral, avec une petite pointe d’acidité. En fin de bouche ; pas désagréable car discrète. Ce vin me plaît. J’aime son nez fruité - ananas - et floral. En bouche, c’est équilibré et j’aime bien son acidité.
Il a un parfum de fleur que je n’arrive pas à identifier, mais c’est bon. Il a une très belle typicité, sa propre identité.
Le verre dégustée par l'unique "experte" française du Clos Velicane.
La dégustation d’EricB (Unit-Verre n°1) :
Température de service : 12-13 ° C
La robe est jaune d'or aux reflets rosés.
Le nez est fin, floral, sur des notes de pêche blanche, de rose séchée et une pincée d'épices.
La bouche est ronde, ample et aérienne, avec une fraîcheur éclatante et une belle allonge. La matière est fine et élégante, tapissant le palais tout en douceur.
La finale gagne en intensité et en concentration, avec une fine mâche épicée et séveuse, et un retour élégant de la rose séchée. Le tout persistant assez longuement sur des notes orientales et salines.
24 h plus tard…
La robe est plus dorée
Le nez est plus épicé, avec des notes de fruits jaunes mûrs.
La bouche a gagné en densité, gras et allonge, tout en restant élégant.
La finale est plus énergique, avec plus d'épices et moins de floral.
Est-ce que c'est bon ? Oui ! On va dire TB- en langage LPVien … ou B++(+)
Qu'est-ce que c'est ? Je dirais plutôt le pinot gris, car on ne sent pas l'acidité du riesling qui avait l'air importante, aux dires de Jérôme.
A quoi ça ressemble ? A quoi je peux le comparer ? A un muscat qui ferait dans la sobriété élégante. Mais je ne penserais jamais à un riesling ou à un pinot gris, ou à l'assemblage des deux.
Combien ça vaut ? 11-12 €
L'échantillon reçu par Eric. Il y a du favoritisme dans le choix des contenants ! (voir photo ci-dessus)
La dégustation de Vougeot (Spiegelau Expert) :
Dans la fiole, le vin présente une couleur bronze, légèrement trouble.
Dans le verre, c’est totalement différent. La couleur est très engageante, dorée, toujours trouble, à reflets roses. Premier indice en ce qui me concerne.
Premier nez légèrement citrique, laissant place aux fruits blancs plutôt doux, pêche notamment, enveloppé d’une touche florale. L’aération révèle une note lactée qui témoigne, à mon avis, des stigmates de la fermentation. Le nez m’évoque, en premier lieu, un gewurzt pas du tout variétal. Je révise ensuite mon jugement pour pencher du côté du Klevner. Deuxième indice.
En bouche, le vin est matérialisé par une attaque ronde et acide. Comme l’a justement dit Gildas, l’acidité est le fil conducteur de ce vin. Mais la bouche est également construite sur ce que je pense être une larmichette de sucre résiduel (4 à 6 g). 3e indice. Le vin tapisse les papilles d’une enveloppe glycérinée et offre un bon volume. C’est confortable, loin de la tension du Clos Veličane 2017 ; tension que j’avais pourtant adorée.
La finale est marquée par un soupçon de miel d’acacia, qui pourrait rejoindre le nougat évoqué par Gildas, ainsi qu’une amertume de bon aloi. Plusieurs minute après dégustation, reste en bouche la saveur et l’astringence de grains de raisin italien fraîchement croqués.
Est-ce que c’est bon ? Assurément, oui.
Qu’est-ce que c’est ? Pour moi, il s’agit d’un 100 % pinot gris, vinifié pour être un peu plus confortable que la version initiale. La couleur légèrement rose, l’aromatique sans notes terpéniques, la larmichette de sucre résiduel et, pour finir, l’acidité qui portait le Clos Veličane 2017 me font opter pour ce pronostic.
A quoi le comparé-je ? Le vin, en l’état est très difficile à comparer à un autre. Très honnêtement, je n’ai pas suffisamment de repères pour tenter une comparaison. Elle serait trop hasardeuse.
Le prix : 10-12 €.
24 heures plus tard…
Très peu protégé, le vin a perdu sa note de pêche blanche, a renforcé son aspect miellé et a développé une saveur d’amande fraîche.
La bouche est marquée par un beau gras, mais aussi par la présence de l’alcool qui, en plus de l’acidité, a tendance à dissocier un peu le vin. Au-delà de l’alcool, une saveur de mie de pain frais est apparue, confortant mon idée de notes fermentaires entr’aperçues lors de la première dégustation. La fin finale
est toujours marquée par le raisin blanc italien. Rien ne me faisant penser à un riesling, je reste sur mon idée d’un 100 % pinot gris. Je pense que le vin titre 13°.
De quoi s'arracher le peu de cheveux qui reste ! Gildas, tu ne copies pas !
ACTE 4 : la dégustation du lot 2.
La dégustation d’Oliv (Riedel tombé du camion ) :
Robe jaune vert de gris.
Nez très discret quand le vin est servi froid mais qui va s'ouvrir généreusement au fur et à mesure de son réchauffement dans le verre pour livrer de délicieuses notes fruitées, sur la pêche blanche et l'abricot frais. Le fond de verre finira par prendre une toute petite volatile, sur une pointe de vinaigre blanc. Beaucoup de charme émane du verre !
Attaque de bouche ultra traçante immédiatement propulsée par une acidité très haute et qui alliée à la précision fruitée offre un côté apéritif très agréable. L'ensemble est tout en vivacité.
Le vin manque un peu d'enrobage et d'épaules pour s'envoler vers des horizons plus en profondeur, proposant une finale pointue et désaltérante, toujours sur ces jolis goûts fruités.
L'échantillon de 25 cl s'est asséché très vite. Très joli !
Est-ce que c'est bon ? OUI, j'ai beaucoup aimé cette acidité salivante et ce charme aromatique.
Qu'est-ce que c'est ? Aromatiquement, je suis largué ! Mais niveau pointu, je ne vois que le riesling pour livrer une pareille tension.
A quoi ça ressemble ? A quoi je peux le comparer ? L'acidité d'un chenin sec, le charme d'un jurançon.
Combien ça vaut ? 10-12€
La dégustation de Perterka (Spiegelau Expert et Stölze lausitz exquisit):
Protocole initial (premier round de dégustation avec 1/3 de bouteille) :
Je demande à mon épouse de me préparer 3 verres (spiegelau expert) avec 3 vins différents : le Clos Veličane ainsi qu’un riesling (vom grauen Schiefer 2014 de Clemens Busch – Allemagne Moselle) et un juhfark (Somlo Juhfark premium 2016 de Tornai – Somlo Hongrie) à titre de comparaison.
La dégustation se fait donc à l’aveugle (plus exactement en semi-aveugle). La température de service initiale est de 10° dans le verre; elle évoluera jusque 15°. Bouteilles ouvertes au débotté.
Vin n° 1 :
Couleur jaune doré à reflets verts.
Le premier nez propose des senteurs légèrement terpéniques avec du miel de fleurs sauvages, des agrumes confits (lime, pamplemousse), le tout évoluant vers des notes de fruits exotiques (fruits de la passion) et du melon vert mûr. C’est d’intensité et de complexité satisfaisante mais limitée.
En bouche, l’attaque est vive et fine, légèrement perlante. La suite est longiligne, plutôt ferme et droite. Bonne finale plutôt citrique et minérale avec un beau compromis entre le zeste de citron vert et les amers structurants.
Vin tonique et cohérent.
Vin n°2 :
Couleur jaune doré à reflets verts (identique au premier).
Le nez est très réservé pour ne pas écrire mutique. On décèle un peu de miel, de la poire, des notes de caillou. Même avec l’aération, le vin s’exprime difficilement. Il évolue vers des notes de fumée et de pierre à fusil, discrètes mais nettes.
L’attaque est un peu plus ronde que le premier et le milieu de bouche se montre plus gras et plus épicé avec des amers salivants. Impression de stabilité et de fermeté. Bonne longueur également sur des amers salins plutôt que sur le fruit. Fond de verre sur la fumée.
Vin un peu austère et plein de caractère.
Vin n° 3 :
Couleur jaune doré à reflets verts avec nuance un peu plus grisâtre.
Bouquet très expressif dominé par le miel, la fleur d’oranger et autres notes florales plus lourdes, puis la bergamote. Impression nettement plus « baroque » que les deux autres. Les arômes au départ plus lourds s’affinent à l’aération vers l’amande, la menthe et la compote de pomme acidulée.
L’attaque est ronde et fruitée. Le milieu de bouche, avec un joli gras, propose de la fraîcheur et se fonde sur des amers salivants. D’un bel équilibre, l’ensemble manque cependant un peu de relance (surtout par rapport au vin n°1) et manifeste une rétro un peu trop monocorde sur la pomme. En revanche, très belle persistance (la plus longue des trois). Fond de verre sur le miel.
Vin très expressif avec un certain décalage entre le nez et la bouche qui peut interpeller intellectuellement.
Bien entendu, commentaire rédigé intégralement avant découverte des « étiquettes ».
Le vin n°1 est le riesling, le n°2 le juhfark et le Clos Veličane le n°3.
Pour être honnête, ce résultat ne m’a absolument pas surpris tant les différences entre les vins étaient marquées avec des profils très personnels (ce qui est bon signe...)
Deuxième round avec le 2ème tiers de bouteille après 5 h :
Dégusté seul et étiquette découverte dans un Stölze lausitz exquisit. Température entre 10 et 15°.
Le bouquet s’est clairement assagi. Les senteurs de miel et de pomme / poire mûres restent dominantes. Arrive ensuite le citron vert avec en arrière-plan des notes de menthe, de tisane (tilleul et verveine) et de bouquet garni. C’est très aromatique, élégant et séducteur.
En bouche, la dominante compote de pomme à l’attaque s’impose et colore toute la rétro. Le vin se montre très salivant, voire tendu et presque tannique mais avec un beau gras pour compenser. Il y a de la présence et de l’énergie. Finale persistante et minérale sur les amers, la compote de pomme et le citron vert. Fond de verre intense sur le miel.
La complexité du bouquet direct ne se retrouve toujours pas complètement en rétro de sorte qu’on perd un fil conducteur entre un beau nez et une belle bouche pris séparément.
Contrairement à la première dégustation, la structure de bouche le rapproche d’un riesling.
Troisième round avec le dernier tiers de bouteille après 8 h :
D’abord dans les Spiegelau expert.
Le nez s’est fait discret (avec une toute légère pointe d’oxydation), d’abord floral ; le miel et la compote de pommes se sont effacés pour la tisane et la tarte tatin puis pour l’amande et le citron vert. Retour du miel au réchauffement. Aromatiquement, on demeure finalement assez similaire au deuxième service mais avec moins de présence. En bouche, le vin apparaît plus ferme, davantage serré sur sa structure et toujours aussi salivant.
La dominante pomme en rétro reste en place mais avec moins d’intensité.
Transvasé dans le Stölze, le bouquet apparaît plus confus et moins pur que 3 h auparavant et perd ainsi en évidence. Bouche similaire au Spiegelau.
Conclusions :
Est-ce que c'est bon ?
Indéniablement ! J’ai pris du plaisir avec ce vin même si la dominante pomme en rétro m’a gêné tout comme le petit manque de cohérence entre la bouche et le nez. C’est de la belle ouvrage avec de la personnalité, de la présence en bouche et de la séduction aromatique.
Qu'est-ce que c'est ?
Je pense qu’il y a du riesling… J’ai un doute sur le fait qu’il s’agisse d’un mono cépage à cause de la pomme… donc assemblage ?
A quoi ça ressemble ?
Question difficile car le vin a sa personnalité propre, ce qui est une qualité essentielle. Si c’est un assemblage riesling / pinot gris, je n’ai pas de point de comparaison sur ce cas de figure.
Plus globalement et en général, rien ne me vient directement à l’esprit non plus.
A quoi je peux le comparer ?
Sans que les profils soient vraiment comparables : albarino en Espagne et Portugal, Mantinia, robola et assyrtiko en Grèce, furmint, harslevelu en Hongrie, amigne, humagne blanche en Suisse, nasceta, carricante, cortese, greco di tufo, ribolla en Italie, riesling (hors France, Allemagne et Autriche).
En gros, à un vin bien vinifié d’un cépage autochtone (non international) sur un terroir précis (et sans élevage sous bois ambitieux).
Combien ça vaut ?
Le riesling de Busch vaut 14 € au domaine et le Juhfark 12,50 €…
On est clairement dans cette fourchette de prix. L’objectif de 15 € me paraît raisonnable.
La dégustation de Thomas (Th.mauss) (Grand royal glas) :
Premier nez intense sur la confiture d’abricot et la pêche jaune. Notes de fleurs blanches, jacinthe. En arrière-plan, notes d’amande et comme une impression de poudre de cannelle, peut-être une vue de l’esprit vu que je connais les possibilités de cépages…
Bouche à l’attaque sur un volume assez confortable, sur l’abricot, une impression de sucrosité sans qu’il y en ait. Très vite une acidité très citrique (s’il y a les analyses des différentes acidités cela m’intéresse!) dans son goût, à savoir très Pulco-citron jaune prend le relais et emmène le vin jusqu’en finale. Il faut aimer, moi j’aime bien, mais il y a un côté très pulpe de citron jaune qui réveille les papilles avec vigueur ! Cela me semble tout de même mûr, ce n’est pas la question, et j’aime beaucoup.
A l’aération, quelques notes moins gratifiantes de vernis et de chien mouillé apparaissent avec fugacité, sans jamais dominer.
Un vin vif, fuselé, assez simple mais original aromatiquement et qui a une certaine classe dans son toucher de bouche.
Finale assez longue.
Un vin au profil assez original auquel j’attribuerai une bonne note. Sachant son origine lointaine et rare, en tant que fada de vin je pourrai mettre jusqu’à 18 € si je voulais absolument en avoir, mais son juste prix oscille pour moi entre 10 € et 16 €. Je dirai qu’il vaut plus de 10, bien que j’ai bu récemment un vin blanc du Languedoc magnifique pour 7€ et supérieur à ce vin (afin de relativiser en tous points, mais c’est un vrai killer celui-là ! Mas Bres - Stella
)
Les arômes d’abricot ne me rapprochent d’aucun des deux cépages, c’est déroutant, je m’orienterai vers un assemblage des deux cépages. Peut-être une originalité de ce riesling, l’acidité est bel et bien là, mais il y a aussi du corps et ces légères notes d’amande et de cannelle obligent le pinot gris. Alors banco pour les 2 !
ACTE 5 : la dégustation du lot 3
La dégustation de Michel (Mgtusi) (Chef et Sommelier Arom Up) :
Flacon mis au froid dès son arrivée.
Goûté juste après débouchage et regoûté environ une heure après. Un riesling Brand, de la cave de Turckheim, a été bu en parallèle mais les vins sont extrêmement différents. Je n'ai rien qui ressemble à l'échantillon goûté.
La robe est légèrement trouble, ce qui semble normal à ce stade de sa vie.
Nez très ouvert sur un arôme que j'ai du mal à identifier, du type floral médicamenteux.
L'attaque est molle, on s'attend à un vin moelleux. Toujours cette arôme très végétal un peu exubérant. Le vin manque de netteté en bouche. Contre toute attente, la finale est sur l'acidité. Je parle plus d'acidité que de tension.
Je trouve quelques touches d'agrumes sympas en rétro. Pour moi un vin très brouillon, absolument pas en place, difficile à juger en l'état.
La réponse aux questions de Jérôme :
- je ne pense pas un ED, aucune trace d'oxydation dans cette bouteille.
- je n'aime pas, l'aromatique me déplait et le vin est déséquilibré, ça manque de tension et de volume.
- j'hésite entre un 100% pinot gris et un assemblage riesling/pinot gris. La note citronnée entr'aperçue me fait opter pour cette dernière hypothèse.
- je rapprocherais ce vin d'un vin à base de colombard, un côte de Gascogne ou bien un picpoul peu tendu.
- le prix en l'état : pas plus de 5 €.
En conclusion, j'aurais naturellement souhaité faire un autre CR mais celui-ci correspond à mon ressenti et ce vin ne va certainement pas en rester là.
La dégustation de Jean-Loup (Spiegelau Expert) :
Dégustation jour J (jour racine, précision pour Jérôme ), le soir même après réception le matin à 9h.
La robe présente un or jaune assez dense qui tire nettement vers le rosé voire l’orangé. Elle est assez trouble mais Jérôme nous avait prévenu : le vin n’a pas été filtré.
Le nez est puissant mais étonnant, voire déroutant et dérangeant par son aromatique. Il est dominé par des arômes terpéniques, sur la gentiane, la rose et même le géranium. On y décèle ensuite un peu de fruits blancs, notamment la pire, de la guimauve et une touche mentholée. Lorsque le vin se réchauffe (températures estimées à 8° en début et 12° en fin de dégustation) quelques notes fugaces de miel apparaissent.
L’attaque est ronde et sapide puis la bouche montre une bonne ampleur avec un toucher gras, presque huileux. Une infime sensation de sucrosité est à peine perceptible, donnant un ressenti estimé à 4 à 5 g de SR. Une vivacité moyenne mais bienvenue apparaît en deuxième partie de bouche pour étirer la finale de façon honnête sans plus, sur une aromatique plus avenante de poire William et finement citronnée.
La bouche manque cependant de tonus et de peps, surtout comparée à celle des deux sparring-partners que j’avais choisis : un Vouvray « Le Compte Marc » 2017 de Julien Vedel (un modèle de densité et d’acidité vertébrale) et un Riesling GC « Eichberg » 2014 du Domaine Schneider (belle minéralité, autant aromatique que de structure).
Au total, Bien, sans plus, avec un fort contraste entre le nez peu agréable et la bouche plus intéressante.
Dégustation Jour J + 1 (encore un jour racine…)
Le nez est un peu moins expressif mais plus engageant car la poire fait cette fois jeu égal avec les arômes floraux et terpéniques.
La bouche est plus fondue entre le gras (pas seulement en attaque) et l’acidité (pas seulement en finale) et donc plus harmonieuse. La finale a gagné en persistance, elle est plus citronnée et se fait salivante. Sans être un monstre de vivacité, l’ensemble a gagné en fraîcheur.
C’est bien mieux ! Bien +(+)
Je me demande si le vin n’avait pas besoin de se reposer plus longtemps après le transport. Jérôme avait conseillé de ne pas trop attendre pour le déguster car la protection est minimale et d’autre part j’étais impatient… mais heureusement j’en avais gardé pour le deuxième jour.
Dégustation Jour J + 2 (jour fleur)
Le nez a encore un peu perdu en intensité mais gagné un peu en accessibilité, des arômes citronnés venant aider la poire à combattre les arômes de géranium et de gentiane peu flatteurs.
La bouche est proche de celle du J + 1 , avec plus d’ampleur et un ressenti en sucre plus important en attaque, sans doute car la vivacité a surtout repris sa place en 2ème partie de bouche.
Bien +(+)
Le questionnaire :
Est-ce que c’est bon ? Oui sur la dégustation à J+1, mais ce n’est pas excellent, très proche en niveau de notation du Riesling alsacien positionné en face de lui, mais tellement différent que la comparaison n’a pas beaucoup de sens. En revanche j’avoue ma nette préférence pour le Vouvray qui s’est révélé un sparring-partner de haut niveau.
Qu’est-ce que c’est ? Si je l’avais bu complètement à l’aveugle j’aurais été bien embêté et n’aurais certainement pas dit ni riesling ni pinot gris. Sachant que c’est l’un ou l’autre ou un assemblage des deux à égalité, je penche pour le pinot gris, plutôt en monocépage mais au moins en assemblage pour la robe aux reflets nettement rosés, le léger déficit d’acidité (pourtant j’ai cru comprendre que le pinot gris 2017 en avait à revendre !) et l’aromatique assez riche, dont la poire jamais rencontrée avec du riesling.
A quoi ça ressemble ? A quoi je peux le comparer ? Je trouve que ce vin se rapproche d’un chenin de Loire par son aromatique (notamment la poire) et son équilibre rondeur-acidité, d’un bon niveau mais pas au niveau des meilleurs.
Combien ça vaut ? Je mettrais autour de 12 € pour acquérir une bouteille de ce vin, pas plus à cause du nez malheureusement.
La couleur du vin dégusté par Jean-Loup.
La dégustation de Matthieu (Hyllos) :
Veličane X 2018
D’abord, je tiens à remercier Jérôme de m’avoir fait confiance sur cette dégustation. Je vais essayer d’être le plus précis et constructif possible.
Suite à mes récentes expériences de verreries, je décide de goûter en priorité le vin dans un Sophienwald Bordeaux. Le verre est idéal pour les blancs, dont il supporte bien les arômes, tout en permettant une excellente aération. C’est un verre fait main d’environ 550ml, donc assez grand.
Pour m’assurer de la justesse du choix, j’ai naturellement comparé avec un Zwiesel Fortissimo, un Stölzle Lausitz Experience Vin rouge, un Zwiesel Fine Beaujolais et un Zalto Universal. Le résultat est beaucoup plus intéressant et beaucoup plus complexe en Sophienwald. Je fais un récapitulatif de ces verres en fin de CR.
Je commence la dégustation à 8°C mais la température monte tellement vite dans un verre qu’en réalité, après le service on est déjà rendu à 9,6°C.
La robe est jaune paille assez intense. Avec des reflets plutôt jaunes. (Nb : le retour vers la couleur, que j’avais oublié d’apprécier, m’a fait pencher vers le Pinot Gris en fin de dégustation).
Le premier nez est très aromatique, sur la brioche, la noisette, les fruits jaunes (dans cet ordre de perception et d’intensité). Les fruits dominent assez nettement l’ensemble. L’intensité globale est forte. Puis le vin s’homogénéise et laisse ressortir des notes plus citronnée pour revenir en finale sur ce je ne sais quoi de pâtissier. Intervient alors une note que j’avais un peu ratée ; florale, je dirais rose, légère et évanescente, qui vient relever la finale. Dans les autres verres que j’ai testés, je penchais plus vers le jasmin. Beau nez de bonne complexité, axé fraîcheur. Je signale que simplement en sentant ainsi le vin, on est déjà rendu à 12°C.
L’équilibre, à ce niveau, est impeccable.
La bouche est d’une attaque très nette. Fruit jaunes, légère touche d’ananas. Puis développement en milieu de bouche sur les agrumes, citron mûr, pomelos qui monte en puissance avec une touche d’orange sanguine et des accents floraux qui vont et viennent tout au long de la dégustation.
Impression de minéralité et une finale explosive avec une acidité croquante soutenue par l’amertume, qui construit la structure du vin.
La longueur est excellente et retombe dans un long décrescendo. En toute fin on retrouve une toute petite note briochée avant que le vin disparaisse. J’insisterais que la longueur est vraiment impressionnante en terme de persistance. Vraiment une belle promesse pour les accords mets-vins ! C’est un vin que je qualifierais de très bon, avec un potentiel intéressant. L’aromatique est belle et pure.
Je n’attribuerais pas à ce vin le qualificatif de grand vin, mais c’est un beau vin. Mon opinion évoluerait certainement et en mieux avec quelques mois en bouteilles, voire quelques années.
A noter que l’échantillon n’a pas vraiment bougé à J+1, à part les amers et acides qui sont plus intégrés.
La fiole reçue par Matthieu. Design, non ?
Pour moi, c’est un vin qui respire le terroir et ne donne pas l’impression d’être poussé ou soutenu par la vinification. Pas technologique quoi. Ça n’est pas en l’état un coup de cœur, mais c’est un vin que je pourrais recommander facilement modulo prix. Pas dans son aromatique, mais dans l’impression qu’il me donne, ça me rappelle mes premières impressions à la dégustation d’Etincelle du Mas Cal Demoura.
Quelques notes supplémentaires : le vin est inexpressif en sortie de frigo (logique). Il commence à bien donner vers 10°, est idéal vers 12° et se boit parfaitement jusque vers 14°. Je ne suis pas monté plus haut (chez moi, c’est dur
)
Concernant la dégustation sur plusieurs jours. Le vin n’a pas trop bougé J+1. A J+2, l’aromatique est moins complexe et moins intéressante mais la bouche est stable. Elle a perdu un peu en longueur et en pureté, elle me plaît un peu moins. Le vin reste néanmoins sans réel problème. A J+2, compte tenu de mes tests de verre, je n’ai plus de contenu. Mais je pense que le vin n’aurait pas trop bougé sur 24h de plus. Sachant que l’échantillon a été dégusté tardivement, plus d’une semaine après réception, c’est vraiment positif.
Maintenant place aux questions de Jérôme :
Est-ce que c'est bon ?
Oui, c’est très bon et c’est d’une buvabilité implacable. Les amers sont assez nets, donc à ne pas recommander aux personnes allergiques à cette sensation.
Qu'est-ce que c'est ?
Là, je suis moins catégorique. Comme toujours sur l’aveugle, plus on réfléchit, plus on dit de conneries ! Je préfère donc toujours expliquer non ce que c’est mais pourquoi je pense que c’est ceci ou cela. Car si la devinette est ratée, les raisons pour lesquelles on s’est planté sont valides
. J’ai naturellement en tête les trois possibilités. D’un point de vue général, ça correspond au profil que j’attendais, d’après mes dégustations précédentes de vins slovènes. C’est-à-dire, une maturité intéressante, supérieure à la Styrie, je trouve, mais qui sait préserver la fraîcheur.
Spontanément, je serais parti sur un monocépage et je dirais le Pinot Gris. Pourquoi ? La gamme aromatique en attaque est « trop riche », il y a notamment des notes florales type rose que j’ai beaucoup de mal à associer au Riesling. L’acidité finale par contre, correspond plus au Riesling qu’au Pinot Gris. Du coup l’assemblage serait tentant… Mais je ne ressens pas vraiment les caractères d’un assemblage. En tout cas, quel que soit le vin, c’est de toute façon peu comparable aux équivalents directs français.
A quoi ça ressemble ? A quoi je peux le comparer ?
Dans le style, clairement, ça me rappelle les vins slovènes que j’ai bus. Il y a un rapport avec le Furmint de Pulkavec que j’ai justement à côté, bien qu’on identifie très clairement que ce n’est pas le même cépage. J’ai eu des impressions similaires sur la gamme de Verus, il y a quelques années. Sinon. Je trouve que ça a une personnalité forte qui fait qu’on ne peut pas sortir trop spontanément un équivalent. Le trouver en France est encore plus compliqué.
En soi, je trouve que c’est une bonne chose et même plus, une chose souhaitable.
Assurément, il possède un style septentrional. Si je pousse un peu, en France, ça me rappelle plus la Loire, avec l’acidité et l’absence d’élevage marqué (sur un Chenin type Coteaux du Loir), mais avec une meilleure intégration des composantes et surtout une aromatique plus généreuse au nez. Par contre la structure en finale va dans le même sens (et l’absence de bois) mais en étant plus puissante.
Si on cherchait un vrai équivalent, j’irais en Autriche, sur un terroir frais et en visant un Gemischtersatz, un Rotgipfler ou Zierfandler. Bien que souvent, ces vins aient une acidité moins marquée. Du point de vue de l’acidité/amer, les rieslings du Kremstal peuvent aussi être mis en perspective, mais pas du tout du point de vue aromatique général.
Combien ça vaut ?
Je parle d’un prix TTC consommateur (France ou départ cave avec un euro de moins). Un vin de ce type, je mettrais entre 10 et 12 €. Jusqu’à 10 €, ce serait une bonne affaire et même très bonne entre 8 et 9 €. Entre 10 et 12 €, ce serait un prix normal, que j’attendrais pour ce type de vin. Au-delà de 12 €, j’aurais du mal à me justifier l’achat.
Quelques mots sur l’effet verre :
Sophienwald Bordeaux : intense, complexe, met en valeur des arômes floraux et fruités. Longueur en bouche et homogénéité. Bouche vive.
Schott-Zwiesel Fortissimo vin blanc : Nez beaucoup plus faible. Axé brioché.
Stölzle Expérience VR : Proche Zwiesel mais petit accent sur le métal/herbacé peu plaisant.
Schott-Zwiesel Fine Beaujolais : plus vers le fruit. Bonne homogénéité.
Zalto Universal : Nez floral (jasmin) et abricoté, très fin mais très délicat. Gomme le pâtissier. Bouche beaucoup moins vive !
La supériorité de rendu du Sophienwald est indiscutable. Le Zalto présente une alternative très intéressante, surtout si on veut apaiser l’acide/amer, au prix de perdre un peu de l’intensité aromatique. Globalement, je préfère le rendu du Sophienwald mais comme dans beaucoup de cas de dégustation récente, je préfère le confort de consommation du Zalto. Les trois autres sont un cran en dessous. Le Fine s’en sort mieux en mettant bien en valeur tous les aspects du vin. Le Fortissimo est assez neutre, au final, mais fait perdre beaucoup de plaisir au nez. Le Stölzle est un peu en retrait car il met l’accent sur des « défauts » directement imputables à la jeunesse du vin et son passage traumatique par la poste
ACTE 6 : Conclusion.
En résumé :
Lot 1 : Eric B, Vougeot, Anne et, dans une moindre mesure, Gildas sont conquis par ce qu’ils ont goûté. Chacun est prêt à mettre de 10 à 12 € dans cette bouteille.
Lot 2 : Oliv, Peterka et Th.mauss ont apprécié ce vin. Chacun est prêt à mettre entre 10 € (Oliv) et 16 € (Thomas).
Lot n°3 : Michel (Mgtusi), Jean-Loup Guerrin sont plus circonspects que Matthieu (Hyllos) sur ce lot. Ce dernier a bien plus apprécié l’échantillon que les deux premiers dégustateurs.
En l’état, Michel ne l’achète pas à plus de 5 € alors que Matthieu :
- ferait une bonne affaire à 9 €,
- achèterait à un prix normal entre 10 et 12 €,
- et aurait du mal à acheter ce vin s’il était vendu plus cher.
Jean-Loup estime ce vin à 12 €.
Un grand merci à Jérôme pour sa confiance ainsi qu'aux "Experts" qui, en toute honnêteté, ont donné leur avis sur le 2e opus du Clos Veličane.
Une des trois expressions du lieu, des vignes et du millésime.
ACTE 7 : épilogue.
Je laisse à Jérôme le plaisir de dévoiler qui a dégusté quoi.