Quel plaisir d'avoir été convié par JérômeM a une verticale Léoville Barton réunissant passionnés dont certains sont sur LPV, dans un cadre parfait.
Les vins sont servis à l'aveugle, par paire, et les chaussettes enlevées après chaque duo.
1993: la robe trahit un peu son âge déjà avancé. Il présente un joli bouquet tertiaire, sans excès. Son côté végétal ne fera que s'amplifier à l'aération, même si je lui trouve une belle trame et des tannins joliment fondus. Un vin à sa place dans la hiérarchie des millésimes.
1999: un nez beaucoup plus puissant, pimpant, mais pas encore épanoui. Tannique et très "en dedans", il semble promis à un bel avenir. Petit doute autour de la table sur un léger défaut (pas de bouchon) qui amplifie ce côté encore un peu creux en bouche. Je l'ai placé plus jeune que 99.
1995: arômes de viandé, de cassis, on a affaire à un vin qui n'est pas encore à sa plénitude. En bouche, très droit dans ses bottes, pêchant par un manque de longueur et une impression d'une trame un peu diffuse. Cela reste de la belle ouvrage, le meilleur vin à ce moment.
1996: le bouquet est d'une finesse nouvelle dans la série naissante. La bouche à tout d'un grand vin: trame serrée, superbe amplitude, longueur, harmonie même s'il semble en avoir encore sous le capot avant d'atteindre son plateau. Grande bouteille !
1986: en phase tertiaire, il me déroute car semblant très léger, voir tendre malgré son petit côté acidulé. Pas encore à point ? Je suis surpris du millésime quand l'étiquette est dévoilée.
1982: je le trouve très évolué, mais avec une touche végétale et un petit côté laiteux qui me dérangent. En bouche, je le vois perdu, cherchant son chemin, avec une finale quelque peu asséchante. Ayant recueilli de meilleurs suffrages autour de la table, je me dis que j'ai pu passé à côté. Las, la fin de bouteille bue à table sera proche de la mort clinique. A ne pas attendre en tout cas.
1989: la 1ère péripatéticienne de la soirée. Un nez de Porto, confit et yogourt mocca. Moins terrible en bouche, il est quand même sacrément joufflu et pas dans mon style de prédilection. Je soutiens mordicus que c'est 2003, mais c'est en fait bien plus âgé.
1990: nous revenons dans la grâce. Très beau nez, assez typique de mon idée de Barton avec une légère note de lierre. La bouche présenté un bel équilibre, tout en finesse et en longueur, mais avec quelques tannins qui montrent que le plaisir durera encore quelque temps. Un must !
2000: un magnifique nez de Bordeaux mûr. Belle trame, plus longue que large, portée par une belle amertume. Beau sans être majestueux à ce stade.
2003: la 2ème fille de petites mœurs de la soirée. Baby fat, café, joufflu, barrique, tannins marqués, un peu de sécheresse, je passe mon chemin rapidement.
2002: un nez jeune, avec une touche de goudron, et un joli côté floral. Superbe trame et concentration, hyper racé et en place. Quelle magnifique surprise !
Pirate: Léoville Poyferré 2002. Un nez plus dissocié, quelque peu soufré. Je le trouve sec et peu affriolant. Il ne se goûte pas comme dans mes souvenirs.
2008: un nez jeune, concentré, avec son baby fat mais bien intégré dans le profil du vin. La bouche à tout d'un grand en devenir, serée, joli grain de tannins. Un classique comme je les aime.
2006: encore plus racé que le précédent, bien en place et très claquant en bouche. Je lui trouve un petit bémol au niveau des tannins un peu lourds, mais dans l'ensemble, une belle bouteille et un superbe duo avec le 2008.
2004: un archétype Bordeaux rive gauche avec une bouche un peu fluide, mais outre cela longue, belle et avec de la race. Bonne surprise !
2011: le char à p.... du carnaval de Rio, poudré, barriqué, gras, trop de tout et imbuvable en l'état pour moi.
Synthétisant parlant:
Les seigneurs -1996 et 1990. Heureux ceux qui en ont encore
Les nobles - 1995 et 2002. Un sacré plaisir
Les bourgeois - 2000 et 2006. Ils vont surprendre
Les vassaux - 1986, 1999, 2008 et 2004. Le style fera que certains aimeront plus que d'autres
Les vieillards - 1993 et 1982, même s'il me plairaît à regoûter ce dernier
Les parias - 1989. 2003 et 2011. Je n'ai jamais payé pour acheter l'amour, je ne commencerai pas ce soir.
En amont et aval de la dégustation, nous avons aussi bu un Menetou-Salon 2013 d'Isabelle et Pierre Clément de Châtenoy (Loire), très sympa, un Ch. Petit Graviet Aîné 2000 (St.Emilion GC) qui se laissait boire, un Larrivet Haut-Brion 2000 à la belle race et un magnifique 1999 Grain Noble en Marsanne Blanche de MT Chappaz. J'ai laissé le vin jaune de côté.
Belle soirée et superbe ambiance !