Passage au Domaine Jean Claude Bachelet & Fils
Alors que nous étions déjà dans le hameau Gamay ce matin, au
Domaine Sylvain Langoureau
, nous voilà de retour à Saint Aubin en cette fin d’après-midi, après avoir profité d’un très beau moment à Nuits Saint Georges (
Domaine Chicotot
). Je me délecte d’avance de faire découvrir ce domaine à Henri, et nous avons une pensée amicale pour Cédric qui, malheureusement, n’a pas pu se joindre à nous.
Jean Baptiste nous attends en cave, autour du vieux fût qui trône sur les graviers en bas de l’escalier. C’est donc lui qui lancera cette dégustation. Benoît nous rejoindra à la fin de la série des blancs et nous accompagnera jusqu’à la fin.
Le domaine s’étend sur environ 10 ha, dont ¾ planté en blancs
(Chardonnay en immense majorité et un peu d’aligoté) et ¼ de pinot noir. Le domaine est en agriculture biologique sans le revendiquer et en cours de certification biodynamique. Les vins sont égrappés totalement, et élevés 2 hivers en fût, pour un élevage total de 18 mois environ, afin de leur permettre de s’harmoniser, leur permettant de prendre du volume et de gagner en tension. Cet façon de procéder, cet élevage long est d’une part, une
« marque de fabrique » et en second lieu est capital selon le domaine pour obtenir les vins qu’ils souhaitent : ils gagnent ainsi finesse, profondeur et structure. Les 4 principaux tonneliers sont François Frères, Chassin, Taransaud et Doreau, essentiellement, sur des fûts à la chauffe moyenne longue, et de plus en plus en volume de 456 L, afin de moins marquer les vins. Les vins sont ainsi entonnés très vite après la presse, les fermentations démarrant rapidement par l’intermédiaire de levures indigènes.
Le domaine est très heureux de ces derniers millésimes, en particulier le 2020, vendangé à partir du 27 août
(un peu plus tard que d’autres), avec le rendement pratiquement atteint sur les blancs
(+/- 55hL/ha) et environ 30hL/ha pour le pinot noir.
Mais revenons au millésime 2018, pour lequel nous sommes venus, que nous goûterons dans des verres Grassl…avant de remonter un peu le temps !
Notes pas tout à fait dans l’ordre de dégustation. Tous les blancs 2019 ont été goûté avant les rouges 2019, puis seulement ensuite les bouteilles mystères
Bourgogne Chardonnay 2018 :
Mise en bouteille fin juillet, filtration lenticulaire. 21a10ca de vignes sur Chassagne Montrachet, plantée en 1999, exposé Sud Sud Ouest, sur un sol argilo-calcaire. Nez beurré, sur la poire et le chèvrefeuille. Belle finesse et longueur pour cette entrée de gamme, bordée par un juste gras.
TB
Bourgogne Pinot Noir 2018 :
52a16ca, vignes plantées en 1964 et 1967 sur Chassagne Montrachet, exposées Sud-Sud Ouest, sur un sol argilo-calcaire. On a un nez de bonbon kréma. La bouche est bâtie autour de tous petits tanins poudrés. On retrouve de la griotte et de la framboise. C’est court pour cet ensemble acidulé et frais.
B-
Saint Aubin 1er Cru Les Combes au Sud 2018 : Nez de poire, assez discret néanmoins. La bouche est doucereuse, un peu chaleureuse. La matière est assez ronde, volumineuse. C’est riche et mûr, mais assez juteux.
TB
Saint Aubin 1er Cru Les Champlots 2018 :
Vignes de 50-60, sols marneux. Nez neutre. La bouche présente un joli volume magnifié par un beau gras, autour de notes particulièrement prégnantes de poire, juteuse. On retrouve de la menthe et de la chlorophylle pour rafraichir cet ensemble au joli corps.
TB-E
Saint Aubin 1er Cru Le Charmois 2018 :
1 ha, exposé Est, vignes de 30-35 ans sur calcaire et riche mère de marnes rouge. Le nez est sur le citron, le chèvrefeuille et le gravier humide. La bouche est fluide, on retrouve un fin citron avec de la verveine. C’est un peu plus simple et évanescent, de ½ corps, avec de très beaux et fins amers en final. Ensemble plus délicat.
TB+
Saint Aubin 1er Cru En Remilly 2018 :
Jeunes vignes de 15 ans exposées Sud, sur un sol dur, caillouteux et de terres blanches. On a un nez d’orange, de menthe, de chlorophylle, de fleurs blanches, montrant une belle complexité. La bouche est mentholée. On retrouve une grosse puissance, un joli corps enrobé par un superbe gras, avec une longueur très satisfaisante. Grosse colonne vertébrale acidulée et fraîche.
E
Saint Aubin 1er Cru Les Murgers des Dents de Chien 2018 :
0,27a70ca acheté en 2004, vignes plantées en 1957 et 2016, exposées Sud Est sur un sol calcaire, à la limite des Champs Gains de Puligny Montrachet. Le nez est plus neutre. La bouche est puissante, sur le menthol, la chlorophylle, la verveine. Il y a un gros volume, avec un très fin gras, moins marqué que En Remilly. C’est droit, tendu et très long, avec une rémanence sur le gravier humide. Je le sens un peu sur la retenue.
E-
Saint Aubin 1er Cru Derrière la Tour 2018 : Le nez, assez frais, est sur les baies rouges et finement sur la ronce. La bouche est droite, rigide et dure, un peu austère, verte sur la rafle et les épices. Les tanins sont un peu rugueux. Ensemble court, pas facile en dégustation analytique.
AB+
Chassagne Montrachet Les Encégnières 2018 :
Situé à la limite de Puligny Montrachet, sous le Bâtard. 37a02ca, planté en 1964, 1969 et 1973, exposé Est-Sud Est, sur un sol argilo-calcaire. On a un nez de tilleul et de beurre frais. La bouche est ronde, grasse, avec de belles notes de viennoiserie chaude. Très sphérique, il présente un beau volume pour un village.
TB-E
Chassagne Montrachet 1er Cru Les Macherelles 2018 :
Sol argilo-calcaire. Nez neutre. La bouche est très mentholée, avec des notes de poivre blanc et de chlorophylle. Joli volume, plus dense et étiré. Finale avec de gros amers grillés. Pas tout à fait en place.
TB+
Chassagne Montrachet 1er Cru La Boudriotte 2018 :
Vignes de 70 ans plantées sur des Marnes un peu grasses, sur l’entité « Morgeot ». On a un nez de poire et de chèvrefeuille. La bouche est mentholée, grasse, mais présente une belle colonne acide, assez riche, mais sans lourdeur. C'est très équilibré, avec un corps plein et dense. La finale est légèrement portée sur les agrumes. Très bel ensemble, la finale est fraîche, sur la menthe fraîche, les fleurs blanches et un peu de poivre blanc.
E-
Chassagne Montrachet 1er Cru Blanchot Dessus 2018 :
12a42ca, planté en 1927 (la plus vieille du domaine), exposé Sud, sur un sol argilo-calcaire. Situé sous le Montrachet du Comte Lafon, entre les vignes des domaines Vincent Girardin et Morey Coffinet. On a un nez neutre, un peu beurré à l’aération. La bouche est riche, volumineuse, longue, dense et minérale. La finale est légèrement grillée (noisette) et fraîche, sur le menthol.
E-
Chassagne Montrachet Le Concis des Champs 2018 : Le nez est sur la ronce et le marc de raisin. La bouche est un peu amère, avec un fruit un peu mat. Très tanique en finale, c’est un peu court.
AB-B
Chassagne Montrachet 1er Cru La Boudriotte 2018 : Le nez est plus précis et élégant, fumé, avec des baies rouges, de la myrtille, un fond d’hémoglobine et d’encre. La bouche est mûre, riche, avec des tanins beaucoup plus dociles et agréables. Joli volume bâti autour d’une matière pleine. Tanins très fins, qui resserrent en finale. Longueur moyenne. Très largement supérieur aux précédents rouges.
TB+
Puligny Montrachet Les Aubues 2018 : A la limite de Chassagne, mitoyen des Encégnières. Le nez est neutre. La bouche est grasse, sur les fleurs blanches et le tilleul. C’est très floral et évanescent. La finale est assez longue, un peu chaleureuse. Une essence de Puligny.
TB+
Puligny Montrachet 1er Cru Sous le Puits 2018 :
23a15ca, vignes de 1951, exposé Est, sur un sol argilo-calcaire. On a un nez de fleurs blanches. La bouche est dense, large et opulente. On retrouve encore des fleurs blanches. La longueur est conséquente pour cet ensemble de belle constitution.
TB-E
Bienvenues Bâtard Montrachet Grand Cru 2018 :
L’équivalent de 2 barriques sur ce millésime (1 fût de 456 L). Nez de tilleul, de chlorophylle, avec un souupçon de caramel et de réglisse. La bouche est très volumineuse, avec un gros gras tapissant. C’est très long, et puissant mais un peu moins que Blanchot Dessus, me semble-t-il. Mentholé, plus floral et aérien par contre, il reste frais.
E
Je m’attendais à un millésime 2018 beaucoup plus riche et pataud en blanc. Que nenni ! Tous les vins présentent ici une acidité précise et tonifiante, tendant tous les vins et leur donnant un certain peps. Certes, ce millésime se montre un tout petit peu plus chaleureux que le précédent mais néanmoins, le plaisir est largement au rendez-vous. De grandes concentrations, ils pourront sans problème tenir dans le temps.
Il est désormais l’heure de jouer aux bouteilles mystères ! Benoît s’éclipse ainsi quelques minutes pour revenir avec :
Vin n°1 : La robe est d’or. On a un nez assez fermé. La bouche est souple, longiligne, avec un léger gras. On retrouve un fin beurré, mentholé. La finale est belle, salivante, un peu aérienne. J’étais sur Saint Aubin 1er Cru Charmois 2015.
TB-E. Il s’agit de
Puligny Montrachet les Aubues 2013. Une réussite sur ce millésime. On sent un côté mûr mais en même temps délicat.
Vin n°2 : La robe est or claire, à reflets verts. On a un nez énorme de citron vert et de fruits exotiques. La bouche est tonique, acidulée, sur l’écorce d’orange. On retrouve une belle tension, avec un gros volume. La finale est ample, soulignée par de fins amers réglissés. J’étais sur Chassagne Montrachet 1er Cru Boudriotte 2010.
E+ Il s’agit de
Saint Aubin 1er Cru Charmois 2007…Quelle tenue et quel éclat dans le temps pour cette cuvée !!!
Vin n°3 : La robe est or à reflets verts. Le nez est sur la viennoiserie, la brioche chaude. La bouche est plus grasse et large, sur le citron, le coco, l’amande, la viennoiserie, la brioche…Un festival. De sacré volume et de belle complexité aromatique, il parait en pleine force de l’âge. La finale est belle, nette, tendue et d’une très grande longueur. J’étais sur Chassagne Montrachet 1er Cru Boudriotte 2002.
E++ Il s’agit de
Chassagne Montrachet 1er Cru Boudriotte 2004. Bonne pioche ! Et là encore, quelle tenue…
Vin n°4 : La robe est d’or. On a un nez un peu évolué, sur la truffe blanche, le cédrat. La bouche est florale, la matière est équilibrée, mais tend à se huiler un peu. On retrouve de la noisette grillée, un peu de glace rhum/raisin. La finale est belle, longue et délicate, finement citronnée derrière de belles notes de mousseron et de truffe. Avec ces notes d’évolution, il me parait à boire. J’étais sur Puligny Montrachet 1er Cru Sous le Puits 1998.
E- Il s’agit de
Puligny Montrachet 1er Cru Sous le Puits 2002. Nouveau bel exemple de vieillissement, semble à pleine maturité et permet d’imaginer des accords gustatifs automnaux et hivernaux
(Boudin blanc truffé ou aux morilles, par exemple…)
Au total, du bourgogne générique au Grand Cru, tout est ici recommandable. Néanmoins, sur ce millésime, j’ai eu quelques coups de cœurs en blancs sur le bourgogne chardonnay, le Saint Aubin en Remilly et le Chassagne Montrachet 1er Cru Boudriotte. Les Saint Aubin sont caractérisés par de belles et hautes acidités. Les Chassagnes reprennent également cette caractéristique à leur compte, avec des densités plus importantes, des notes mentholées et grillées plus marquées il me semble. Enfin, les vins de Puligny révèlent tous une floralité assez marquée à type de tilleul et de fleurs blanches. On a, par ailleurs, encore eu la démonstration par l’exemple de la grande tenue dans le temps des différentes cuvées.
En rouge, le 1er Cru La Boudriotte est intéressant, mais c’est vrai que les rouges dans leur globalité n’ont pas tout à fait le volume, l’éclat et la précision des blancs. Mais ceci n’est pas très grave au demeurant.
Bref, ce fût encore un grand et riche moment de partage, de passion et d’enseignement, empreint de générosité évidemment. Des grands vins de garde et de gastronomie, voici ce que sont les vins du domaine. Plus qu’une valeur sûre, le domaine Bachelet représente désormais pour moi un passage obligé.
Benoît, Jean Baptiste, Merci pour tout…et de nouveau : à l’an prochain, en étant débarrassé de ce satané virus !!!
Il est 19h30, et l'heure du dîner approche...Meursault n'est pas si loin pour manger un morceau en bonne compagnie LPVienne...
A suivre...