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LPV Paris Nord-Est

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LPV Paris Nord-Est a été créé par Ilroulegalet

Après une magnifique « David Cameron 2015 », la réunion de février prit place chez moi avec pour thème « Languedoc-Roussillon ». En effet, parmi le vaste choix de thèmes créatifs, éclectiques et intéressants, j’avais glissé celui-ci à titre de concession en dépit de mes préférences archi-connues. Paf ! Cela n’a pas manqué et me voilà à devoir ordonner des vins que je ne connais pas !
Inspiré par Nicolas Sarkozy et la triangulation politique, autant embrasser le thème, le traiter avec dilettantisme et incompétence afin de bien montrer l’inanité des propositions adverses . En pratique, la séquence ne fut pas optimale et il n’y a pas eu de blancs (j’ai confondu certaines couleurs). Le solide s’est composé d’excellentes charcuteries, d’une tielle sétoise, quelques crudités et le grand-œuvre fut un risotto à la saucisse de Morteau très gourmand.

Les irréductibles connaissant ma ponctualité germanique arrivent à l’heure tapante et nous en profitons pour écluser le fond de riesling du Rheinhessen Weingut Sankt Antony, Niersteiner Orbel Riesling 2017 commenté ici . Si les compagnons reconnaissent sans hésitation le riesling, la question du pétrole n’a pas le temps d’être éclaircie avant l’arrivée du reste du groupe. (Personnellement, ça sent le riesling mais pas le pétrole). 

Mise en bouche : une petite bulle. Malheureusement, pas de Limoux parmi les apports et le maître du jeu que je suis glisse un pirate (diabolique).

Vin 1 : Allemagne, Moselle (Sarre), Weingut Peter Lauer – Grande Réserve Brut Nature 2002
12,5°. Dégorgement 01/21. On continue la série des sekts de Peter Lauer issus de ses tous meilleurs crus. Cette itération a une bouteille spécifique en raison de la considération spéciale qu’a Florian Lauer pour cette cuvée. Plus d’explication ici . 

Robe limpide et transparente. Nez ouvert, citron, huile essentielle, fleurs blanches, c’est très frais et primaire. En bouche, le volume est relativement large, la pression également, la trame acide est longue et saline. L’impression globale d’un effervescent jeune, bien né et de beau calibre. A la tombée de la chaussette, la surprise est grande tant au niveau de l’âge que du cépage.

A titre personnel, j’y trouve une certaine similitude avec le Château d’Avize 2013 de Leclerc-Brillant dégusté en septembre. Par rapport aux 1984, 92, 99 précédentes, le volume de celle-ci est nettement plus important, signe du réchauffement climatique dans la région.

Vin 2 : Languedoc-Roussillon (Roussillon), Mas Llossanes – IGP côtes catalanes Dotrera 2018
14°. 40% Carignan, 30% Grenache, 16% Chenanson (cépage local), 14% Syrah. Grenaches élevés en cuves inox durant un an, le reste passe en barriques d’un vin. Vignoble d’altitude (plus de 600m) sur granit et normalement recherche d’infusion plus que d’extraction. Informations ici .

Robe trouble et foncée sans trace d’évolution. Certains trouvent un nez un peu lacté, fruit noirs, grosses maturité. En bouche, les tanins sont certes doux mais la sensation d’alcool prégnante et cela tombe rapidement. Pas de chance, je pensais que l’importante altitude du vignoble et la faible teneur en grenache donneraient un vin frais pour entamer les hostilités. Il se trouvera que ce sera l’un des 2 vins les plus « indigestes » lié à la perception d’alcool.

Vin 3 : Espagne, Rioja, Lopez de Heredia – Vina Bosconia Reserva 2011 (mon apport)
13,5°. Dominante de tempranillo avec 3 autres cépages. Altitude d’environ 500m, calcaires et cailloux. Ce vignoble est considéré comme le 2ème en hiérarchie dans la gamme. Comme toujours, commercialisation décalée chez ce producteur (rarement moins de 10 ans de garde avant mise sur le marché).  Informations du domaine.

Robe évoluée, tuilée et qui évoque une « nuisette » de pinot noir chère à Starbuck. Le bouquet plaît beaucoup à Jean F qui nous a annoncé que ce thème serait un supplice pour lui. Fruit rouge, vanille, groseille, un peu de ronce, là au moins il se sent à la maison.
En bouche, cela reste un vin sudiste large, boisé, pourtant non dénué de finesse mais qui ne fait pas dans la délicatesse et l’élégance. La fraîcheur et l’acidité sont là, le vin procure une expérience agréable en dépit du bois jugé excessif par certains.
Je voulais servir les Creisses initialement mais je ne l’ai pas retrouvé en cave ☹. Ce fut l’occasion de mettre un classique et véritable carte de visite du vignoble espagnol.

Vin 4 : Languedoc-Roussillon (Roussillon), Le Roc des Anges – Las Trabassères 2014
12,5°. Vieux carignans parcellaire de 1913 sur sol de schistes riches en fer et silice. Exposition nord-est. Elevage en cuve inox.  Page du domaine.

La robe est légèrement évoluée et surtout plus fluide dans le verre que les rouges précédents. Joli bouquet de petits fruits, c’est fin et élégant avec de la réserve. En bouche, le corps est lui fuselé et plein d’énergie, sans nervosité et agressivité pour autant. Deuxième partie plus saline, moins fruitée et sensation agréable. Pas de sensation de tannins, ni de stigmates de vin sudiste. Le vin comble l’assemblée de manière générale.

Amateur de vin sur schistes mais en moselle allemande, je trouve que ce vin parvient à combiner les attraits du climat ensoleillé et la finesse de corps que confère le schiste sans leurs contreparties respectives que sont l’excès d’alcool et de matière sudistes, ainsi que la nervosité parfois un peu âcre du schiste.

 Vin 5 : Languedoc-Roussillon (Roussillon), Domaine Sainte-Croix – Carignan de vignes centenaire 2018
14°. 100% vieux carignan de 1905. 16 mois d’élevage en vieux fûts de 300 litres. Pas de filtration.  Fiche du domaine.

Robe dense aux reflets pourpre. Le bouquet est celui de fruits noirs très mûrs et dense qui s’oriente vers le pruneau et la figue ainsi que des notes d’élevage assez prégnante (toasté, cacao amers). La bouche est du même tonneau avec beaucoup de richesse, de matière sur le café, chocolat et les fruits noirs cuit. Les tannins sont fondus et la texture agréable.
En revanche, la finale et l’évaluation globale n’est pas consensuelle. Certains apprécient beaucoup cette force, gourmandise et fruité équilibrée par l’amertume du moka et du café. D’autres (dont moi) trouvent que le duo alcool/amertume trop lourd et plombant.

Vin 6 : Languedoc-Roussillon (Languedoc), Montpeyroux, Domaine d’Aupilhac – Le Clos 2010
14°. 40% Carignan, 40% Mourvèdre, 20% Syrah. Sol argilo-calcaire. 30 mois d’élevage en fûts.  Fiche du domaine.

Robe dense sans trace d’évolution particulière. Nez élégant mélangeant quelques fruits rouges à une dominante de fruits noirs ainsi qu’un peu de sanguin (du mourvèdre probablement). En bouche, l’aromatique est agréable, la trame étant d’une certaine élégance mais aux tannins pas encore tout à fait intégrés et qui accrochent. L’expérience demeure agréable par son joli fruit.

Vin 7 : Languedoc-Roussillon (Languedoc), Terrasse du Larzac, Mas Jullien – Carlan 2019
14°. 50% grenache, 30% carignan, 10% cinsault, 10% syrah. Sol caillouteux et gréseux exposé plein est avec 200m de dénivelé. Elevage en demi-muids de 600 litres pendant plus de 12 mois. En raison du référencement, c'est Vigneron d'Exception qui reprend la fiche domaine .

Robe dense et jeune, turbide (sans filtration). Nez agréable, complexe, combinant arômes fruits et d’autres plus solaires avec notamment des effluves de garrigues. En bouche, l’équilibre est très bien trouvé entre fruit sudiste et fraîcheur digeste. Pas de trace d’excès d’alcool. La bouteille fait l’unanimité et merci Pauline qui est notre rhéteur de la région.

Vin 8 : Languedoc-Roussillon (Roussillon), Côtes Catalanes, Domaine Le Soula – Le Soula rouge 2009
12.5°. Terroir de granit entre 350 & 650m. 50% Carignan, Syrah et un peu de Macabeu dixit Infinivin .

Jolie robe légèrement évoluée. Bouquet friand de fruits rouges et noires bien mûres sans être compotés pour autant. Le vin se boit tout seul et avec plaisir sans percevoir tant de traces d’évolution. A nouveau un vin très apprécié par l’ensemble.

Transition avec les fromages. Une discussion à propos des divers types d’évolution m’incite à ouvrir cette cuvée devenue un de mes classiques.

Vin 9 : Allemagne, Moselle (Sarre), Weingut Peter Lauer – Grande Réserve Brut Nature 1984.
10,5°. Dégorgement 04/21. 100% Riesling issu de l’Ayler Kupp. Pas de liqueur d’expédition.  Fiche de la part de Vinothek der Saar.

L’objectif était de montrer comment le 2002 du début de soirée pourrait évoluer. Connaissant bien la 1984 dont les 4 fois précédentes avaient donné des vins au stade tertiaire, complexes et harmonieux, j’en suis pour mes frais cette fois-ci .

En effet, le vin a une couleur transparente et claire. Le cordon est un peu plus vif que d’habitude. Le nez est puissant et plutôt simple sur une aromatique de menthe glaciale/pastille vichy/solution de laboratoire pour les plus virulents. En bouche, la trame acide est à la fois saillante et intégrée et reprends les mêmes éléments que le nez. La longueur est bonne, c’est bon, mais moins que les expériences conformes précédentes sur la cuvée même si je n’ai pas l’impression de défauts particuliers.

En fait ça me rappelle 2 expériences sur de très vieux rieslings et peut-être est-ce un chemin d’évolution « mineur » ? Dans celui-ci, le miel d’évolution n’enrobe et n’harmonise plus l’ensemble de l’expérience et on se retrouve sur une acidité tranchante et florale.
La troupe a été clivée sur le vin, certain le trouvant intéressant et joli, d’autres insaisissable mais le consensus ne lui trouvait pas de défauts particuliers.

C’est avec les sourires goguenards et taquins des camarades que j’ouvre l’incontournable VDN pour accompagner le gâteau praliné/chocolat de Cyril Lignac.

Vin 10 : Languedoc-Roussillon (Roussillon), Banyuls, Abbaye Sainte-Eugénie – Âme de Pierre 2008
16°. 50% de grenache noir, 45% grenache gris, 5% grenache blanc sur schistes bruns en terrasse. « Mutage sur grains », 18 mois d’élevage en fûts ouillés puis à nouveau 6 mois en cuve (milieu réducteur afin de minimiser le rancio).  Fiche domaine.

La robe montre un disque très légèrement tuilé avec une profondeur encore très dense. Stéphane et Julien sont déçus par le bouquet qui leur semble éteint (ce sont les plus familiers avec le style). Les autres n’ont aucune difficulté à trouver une jolie complexité de VDN fruité plutôt que rancio : orange confite, pruneau, cerise à l’eau-de-vie etc…
Les mêmes arômes sont présents sous le palais et l’accord aussi scolaire, qu’évident et performant a lieu avec le dessert. Quelque chose d’aussi éculé ne devrait pas être magique au bout de la 5ème fois, ça l’est pourtant.

Enfin comme bonnet de nuit et pour redresser tous ces palais ayant subi l’attaque de la puissance alcoolique et de la structure sudiste, une ½ de Prädikat allemand est la meilleure médecine.

Vin 11 : Allemagne, Moselle (Mittelmosel), Weingut Selbach-Oster – Riesling Zeltinger Sonnenuhr Auslese 2011.
8,5° & environ 100g/L de SR. Le Zeltinger Sonnenuhr est le grand cru de ce village situé après Wehlen.

La robe marque de l’évolution, ainsi que le bouquet où le miel se fait de la place au côté du fruit confit et de la groseille fraîche. L’équilibre typique de mittelmosel est là avec ce jeu entre le fruité et l’acidité stimulante qui se rejoignent puis fusionnent avec les amers d’ardoise dans une longue finale qui donne le sourire. Le fruité domine dans l’expression comme d’habitude comparé à une auslese de Sarre.

Tout le monde repart avec le sourire, la tête remise à l’endroit et content d’avoir passé une bonne soirée avant de prendre le dernier métro.

Les vins se sont très bien défendus et 2 seulement finalement correspondaient aux clichés les plus affreux des vins de la région, le reste était top. On pourra noter que les vins sur schistes s'en sortaient très bien. Enfin, tous les vins s'étaient plutôt améliorés le lendemain et ceci m'incite à persister dans mon habitude de déboucher les bouteille tôt le matin pour le soir, l'oxydation prématurée semblant devenir un risque mineur dans la majeure partie des cas.
 
Merci de m’avoir lu.

Sven. Curieux de tout, prédilection pour les vins blancs légers et européens. Toujours prendre une saine distance avec mes CR. Amateur d'ironie, surtout à l'égard du bourgogne et du vin rouge en général ;).
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25 Fév 2024 10:03 #1
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Réponse de Ilroulegalet sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

LPV Paris Nord-Est s’est réuni avec grand plaisir au pied du Sacré-Cœur et après la Bourgogne, a enfin mis l’autre région phare du vignoble français à l’honneur : Bordeaux.
 

Les accompagnements ont été les suivants : pâtés en croûte divers de Lastre sans apostrophe & charcuteries diverses. Foccacia briochée aux olives avec différentes tapenades. La pièce de résistance fut un rôti de bœuf de Chalosse avec ses échalotes confites et des cocos blancs. En dessert, une exquise tarte fraise-yuzu concoctée par notre chef pâtissier pro bono Nicolas.

Vin n°1 : Crémant de Bordeaux, Château de Thieuley - Crémant de Thieuley 2020
12,5°. Fiche technique.  Méthode traditionnelle de 60% Cabernet Franc en blanc de noirs & 40% de Sémillon. Repos sur latte entre 12 & 24 mois dixit la contre-étiquette. 

Robe claire toutefois assez teintée doré, signe de raisins noirs. Bouquet fruité et floral (fleurs blanches, fruits blancs croquants). Sous le palais, l’attaque est fruitée et légère avant qu’une amertume crescendo se manifeste en deuxième partie de bouche. Malheureusement celle-ci ne s’appuie pas sur une structure particulière, préempte l’expérience et finit assez courte. Ce n’est pas mal fait mais il est clair qu’il y a de meilleures propositions parmi les crémants à ce prix. A associer avec des mets charnus afin d’apporter de la structure à l’accord.

Vin n°2 : Saint-Emilion Grand Cru, Domaines Manoncourt, Château La Fleur Pourret 2019
14°. Appartenant au propriétaire de Figeac, le château est une parcelle de 5 ha situé sur le fameux plateau argilo-calcaire. C’est la même équipe et le même chai que Figeac qui opère ici. Dixit le guide Hachette , le 2019 est à majorité de Cabernet-Franc au côté du Merlot. Elevage en vieux fûts issus de Figeac. Epaulé à 8h du matin

Robe foncée et assez visqueuse, sans guère de traces d’évolution. Bouquet classique bordelais – cassis, fruits noirs, cèdre, sous-bois et tabac. C’est souple et soyeux sous le palais en général avec une longueur correcte et une finale boisée et encore un peu asséchante.
La bouteille est consensuelle, certes très jeune mais l’avis du groupe est que c’est un Bordeaux bien fait et bien né sans autre prétention. Les bémols sont un certain aspect solaire et un peu d’alcool général malgré tout.

C’est une bonne entrée en matière.

Vin N°3 : Pauillac, Château Lafite-Rotschild – Vin de Cadre 2016 (sans étiquette)
14° (probablement). Dixit l’apporteur, c’est le vin proposé aux employés du fameux 1GCC issu de barriques du Grand Vin non-sélectionnées pour rentrer dans la gamme commerciale du château. Ce sont des jus issus du domaine et ayant achevé l’élevage également. Carafé avant service une vingtaine de minutes.

Robe sombre et dense. Nez complet, légèrement évolué et pour tout dire élégant. Jean, notre hôte et zélote du bourgogne (d’autant plus ironique qu’il a commencé frénétiquement avec du bordeaux dans son cheminement de passionné du vin) se sent presque à la maison. Pire, pour lui c’est du Clos Vougeot 2018 en « bon » 😉 ! Fruits noirs, bois noble, humus le tout expressif et embaumant.
La bouche par contraste paraît en dessous avec de l’austérité qui fait très cabernet sauvignon pour l’ensemble de la table même s’il y a de la structure, une trame acide puissante mais avec suffisamment de matière pour que l’ensemble demeure agréable.

Nous supposons que le vin échoue sur la densité et l’intensité des saveurs pour rentrer dans la gamme, mais en soit on est déjà à un niveau très satisfaisant.
D’ailleurs, le vin ne fera que progresser le long du dîner puisqu’il n’avait eu qu’un court carafage au moment de son passage.

Vin n°4 : Saint-Emilion Grand Cru, Vieux Châteaux Chauvin 1998.
12,5°. Page du domaine. Cette cuvée qui n’est plus produite était constituée des plus vieilles vignes de la propriété et incluait donc des cépages antédiluviens comme du malbec. C’est également une page d’histoire puisque la propriété est rentrée en 2014 dans le giron de la famille Cazes dont le fanion est le Château Lynch-Bages.

Dixit l’apporteur Julien, Chauvin faisait partie des propriétés très estimées des amateurs sans esbroufe.
Robe sombre ne marquant pas la moindre trace d’évolution (surtout avec l’esprit d’escalier). Beau bouquet de fruits noirs confiturés sans excès, quelques notes iodées et camphrées ainsi qu’une note mentholée apportant du tonus.
La bouche suit les promesses du nez en étant juteuse, fraîche avec des tanins fondus qui apportent la juste structure permettant de donner une direction au vin dans la longueur. Seule la finale encore un peu sécharde serait une réserve.

Les vieux de la vieille trouvent que c’est l’antithèse de Parker, perso je m’en fiche, on prend du plaisir évident avec ce vin et le bas degré d'alcool manifeste ses vertus doublement par contraste avec les bouteilles plus jeunes.

Vin n°5 : Pauillac, Château Pontet-Canet 2011
13,5°. Est-il encore nécessaire de présenter ce vin ?  Fiche technique.  La propriété a été d'un très grand dynamisme technique depuis le début du XXIème siècle et inclus un élevage en amphore de plus en plus significatif. 

Robe opaque et plutôt fluide étonnamment. Nez à la fois très bordelais et raffiné : palette aromatique habituelle mais de la distinction.
En bouche, le vin étonne par son soyeux et l’absence d’impression boisée, surtout sur la finale. Pourtant il y a du volume et la matière mais effectivement sans corset de bois. On note également un peu de fruits rouge (fraise) en bouche qui apporte un peu plus de complexité. Un commentaire concis qui reflète l'évidence du plaisir pris.

C’est très très bon.

Vin n°6 : Pessac-Léognan, Château Smith-Haut-Lafite 2010
14,5°. Inutile de présenter le producteur ni la cuvée. 98/100 Parker. Carafé à 13h par notre hôte.  Fiche technique du 2018.  60% de barrique neuve environ, variant légèrement en fonction des millésimes.

Robe très sombre et dense. Nez opulent, assertif, démonstratif même : confiture de fruits noirs, boisé luxueux. C’est mâchu, large et long en bouche. On est vraiment sur la maximisation des paramètres quantitatifs. La présence réglissée, voire même un peu anisée ainsi que la perception d’un peu de fumée donnent la fraîcheur qui aide à la sapidité.
Paradoxalement, la gourmandise l’emporte et cela se boit très bien pour quelques uns dont moi. En revanche, c’est vrai que l’expérience fait plus cabernet californien que Bordeaux plus classique et que mon indulgence n'est pas partagé par tous, surtout par le maître des lieux et notre Z à nous, convertis enthousiastes à la finesse.

Vin n°7 : Margaux, Cru Bourgeois Exceptionnel Château Bel-Air-Marquis-d’Aligre 1998
12,5°. Propriété la plus singulière de la rive gauche, le style « BAMA » est d’une hétérodoxie sans faille avec notamment très peu de fût et un élevage long en cuve béton. De même, M.Boyer mets sur le marché ses cuvées après un long repos dans ses propres caves.  Fiche vins étonnants.

Robe très sombre, pas de trace d’évolution. Bouquet très surprenant qui n’envoie pas à Bordeaux du tout. Cela évoque les grenaches les plus solaires de Châteauneuf-du-Pape ou des vins italiens gorgés de soleil et de volatile.
En bouche, c’est un océan de fruit rouge d’une opulence rare et c’est très généreux. Toutefois, les critiques les plus véhéments dont j’en suis trouvent un manque de structure rédhibitoire en deuxième partie de bouche avec un fruité qui s’étend comme un lobe glaciaire (ou qui évoque Jabba le Hutt se déplaçant pour les moins charitables) dans le palais avant de s’estomper rapidement. Et puis finalement, cela manque d’intensité et de persistance.
En revanche c’est tout à fait atypique et c’est génial que les hétérodoxes ont voix au chapitre. Mais à titre personnel, la présence de BAMA m’a permis d’apprécier par contraste tous les bénéfices d’un élevage en fûts pour la structure et l’intensité du vin. In fine, cela me semble juste que Bordeaux continue à élever ses vins de telle manière : le temps me semble leur donner nettement raison.

Note pour les accords : ce sont probablement le Lafite, le VCC ainsi que le SHL qui se sont le mieux accordés avec le bœuf, l’onctuosité de la chaire du rôti remplaçant sur la finale la relative sécheresse des vins. Le PC vit très bien tout court.
Le BAMA a bien fonctionné avec le plateau de fromage mais son manque de structure a rendu son accord écœurant avec le bœuf (trop large et mou).

Vin n°8 : LVMH – Sauternes 5 NM
14°. Le Sauternes pour les employés de LVMH. Ce sont des assemblages de 3 années de jus issus du vignobles d’Yquem, en nette majorité les jeunes vignes. Dixit l’apporteur c’est un assemblage de jus de 2014 à 2016 et mis en bouteille en 2019 dans le cas d’espèce.

Robe qui a très légèrement évolué en prenant une teinte tout à fait dorée mais avec encore beaucoup d’éclat et de transparence. Nez floral (fleurs jaune), épices, jus d’orange ; dans l’ensemble une palette aromatique de « couleur » claire pour un vin à botrytis.
En bouche, la curiosité vient d’une certaine impression amylique, façon flan ou riz au lait avec une dominante de fleur d’oranger. Cela ressemble un peu à l’achta du glacier Bachir rue de Rambuteau à Paris. C’est doux de texture, gourmand et accessible.
Un Sauternes sur l’élégance et la sapidité avec des arômes très frais mais sans la profondeur et la complexité des meilleurs 1GCC de l’appellation comme Coutet, Sigalas-Rabaud ou Lafaurie-Peyraguet.

Vin n°9 : Passito de Pantarellia DOC, Donnafugata – Ben Ryé 2019
14,2°. Muscat d’Alexandrie passerillé sur claie. Environ 190g/L de SR & 7,3g d'acidité.  Fiche technique.

Robe acajou légèrement opaque et très jolie. Nez totalement baroque d’abricot confit et d’épices qui envoient en Orient. En bouche, c’est exubérant, délirant, et cela passe en force sur la même palette aromatique. Hédoniste en diable, le vin se cueille sur le moment. Cela n'a rien à voir avec le Sauternes ou même un Jurançon concentré.
Notre hôte qui ne connaît pas la modération dans ses coups de cœurs en a 24 dans sa chambre au trésor et les sort pour lui-même quand il veut se faire plaisir mais surtout pour faire plaisir en société : gare à ceux qui ne prennent pas la foudre avec ce vin, c’est risquer le courroux de Jean !

Le bilan d’une chouette soirée ponctuée de francs éclats de rire est que Bordeaux en rouge, c’est vraiment top en leur laissant le temps. Nous sommes conscient de redécouvrir l'eau chaude.

Sven. Curieux de tout, prédilection pour les vins blancs légers et européens. Toujours prendre une saine distance avec mes CR. Amateur d'ironie, surtout à l'égard du bourgogne et du vin rouge en général ;).
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02 Jui 2024 16:55 #2
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Réponse de bonaye sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

Voici un bel exemple de CR didactique et d’atmosphère. 
Bravo  !
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02 Jui 2024 18:00 #3

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Réponse de Zapata sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

Une bien belle soirée en vérité

J'en retire plusieurs petites observations.

Les vins Parkerisés, on en a abondamment parlé sur LPV, ils ont existé et Smith Haut-Laffite 2010 en est effectivement un bel exemple.
De fait, plus un vin de nez que de bouche, j'ai noté "cuit au chaudron", "sucrailleux"...c'est d'une opulence qui fait vite saturer les papilles, je n'avais pas envie de m'en resservir.

Antithèse du précédent, dans un contraste saisissant, Vieux Château Chauvin 1998 appartient à un type de Bordeaux qu'on ne croisera plus dans les millésimes récents hélas...12.5° d'alcool au compteur, nulle sensation de chaleur excessive, le tout dans un grand millésime mûr en rive droite, ce vin d'une fraîcheur étonnante n'est même pas encore totalement à boire car les tanins peuvent encore acquérir davantage de soyeux. En revanche, je n'ai pas senti de sécheresse. C'était un achat coup de coeur après une dégustation horizontale des 1998 où il avait tenu la dragée haute à Vieux château Certan, l'Evangile et consors...pour un prix bien plus modique, et il a tenu ses promesses au vieillissement. Il brille par son équilibre et son harmonie, mais encore une fois, il appartient déjà à un type de crus du passé.

Pas fan de la Fleur Pourret 2019, excessif en alcool, et malheureusement représentatif de ce que les Bordeaux récents offrent dans le verre...on cherche en vain la fraîcheur et le vieillissement n'y changera probablement rien.  

En revanche, j'ai adoré Pontet-Canet 2011, même si l'alcool se faisait également sentir...un petit degré de plus cela change tous les équilibres d'un vin...mais ici la classe de l'élevage bien intégré et la justesse de la vinification l'emportent dans un millésime caractérisé de "classique" qui recèle probablement de bien beaux crus à re-découvrir, après les excès médiatiques et tarifaires de 2009 puis de 2010. 

Merci encore pour cette belle soirée !

Caramba !
Zapata

JMN
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02 Jui 2024 18:02 #4

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Réponse de Eric B sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

J'ai tendance à penser que si le BAMA avait été servi en début de série plutôt que vers la fin, les perceptions auraient été assez différentes. 

Eric
Mon blog
02 Jui 2024 19:42 #5

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Réponse de legui sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

Manque l’année du BAMA

Guillaume
02 Jui 2024 20:08 #6

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Réponse de Ilroulegalet sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

J'ai tendance à penser que si le BAMA avait été servi en début de série plutôt que vers la fin, les perceptions auraient été assez différentes. 

Très certainement Eric. La production de ce château est tellement particulière que le vin se démarquera toujours mais je n'ai pas pour autant envie de décréter que c'est mieux, et que ça représente l'avenir. C'est très bien qu'il soit là, et fasse de cette façon mais je ne pense pas que l'effet séquence le dévalue : BAMA est fondamentalement un effet séquence en quelque sorte.

A titre personnel, le nez m'a traumatisé par exemple, et je n'ai pas trouvé de finesse particulière ou de l'élégance même si ça pète évidemment le fruit. Et comme le vin en matière de corps était tout aussi charpenté et charnu que le reste de la sélection, je ne vois pas bénéfice particuliers à un passage en premier. De toute façon, ce sera toujours clivant, c'est hétérodoxe et reflète bien les pratiques de son propriétaire après tout.

En tout cas, un très grand merci à l'apporteur et c'était une super expérience de le goûter.

Manque l’année du BAMA (legui)

C'était un 1998, c'est corrigé merci.

Voici un bel exemple de CR didactique et d’atmosphère. (Bonaye)

Merci beaucoup, ça fait plaisir.

Sven. Curieux de tout, prédilection pour les vins blancs légers et européens. Toujours prendre une saine distance avec mes CR. Amateur d'ironie, surtout à l'égard du bourgogne et du vin rouge en général ;).
02 Jui 2024 21:12 #7

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Réponse de choubi38 sur le sujet LPV Paris Nord-Est, Mai 2024 : Bordeaux

Etant l'apporteur du BAMA, j'ai pu le goûter, le matin, à l'ouverture, puis en fin d'après-midi. A table, je n'ai pas reconnu le vin, l'acidité qui lui apportait fraîcheur et structure avait complètement disparu. Ce qui est étrange, c'est que plus tard, en regoûtant le vin, je l'ai retrouvé. Un mystère pour moi, palais saturé, effet de séquence,... je ne sais pas ce qu'il s'est passé.


Ce n'est pas trop grave, j'en apporterai une autre à une prochaine dégustation pour essayer de convaincre mes camarades ou peut être que j'apporterai un bordeaux nature vieilli en amphore, on verra !

Dans tous les cas, cela a été une très belle soirée. Encore merci à Jean de nous avoir reçu et de m'avoir fait découvrir les cocos au pâté, à Sven pour l'excellent CR et merci à tous les participants pour leurs apports, la bonne humeur et les jolies découvertes bordelaises.
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03 Jui 2024 07:43 #8

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LPV Paris Nord-Est, Juillet 2024 : Zapata ouvre sa cave pour franchir le cap !
 

Quand Zapata est né, le plus jeune président de la République à l’époque venait d’être élu. Toujours vert et évergète, Zapata nous a proposé de nous recevoir et de déboucher certaines pépites à maturité de sa cave pour l’occasion. Nous ne nous sommes pas fait prier et cette soirée sera totalement à l’aveugle pour nous à l’exception de notre amphitryon. Les éléments du repas ont été réalisés par chacun des invités en coordination avec le maître des lieux. Les bouteilles passaient 1 à 1 avec la préparation adéquate gérée par Zapata. Pour vous mettre au parfum, 9 gros calibres sont passés – avec un clin d’œil pour chacun -, l’intelligence collective de 6 amateurs acharnés a fait du petit bois de l’aveugle en trouvant très rapidement les vins (à une seule exception racontée plus loin) et de nombreuses saillies et éclats de rires ont alimenté la tradition de LPV Nord-Est.

Apéritifs : Saumon sauvage, blini, assortiment de tarama (truffe d’été, wasabi/tobiko, 70% œufs de cabillaud fumés).
Entrée : Mousseline de sole, bisque de crevettes grises pour la sauce.

Vin n°1 : Bourgogone, Chablis, Domaine Vincent Dauvissat – Chablis Grand Cru « Les Preuses » 2009
13°.  Le Terroir des Preuses  est un climat d'environ 10 ha exposé Sud/Sud-Ouest sur un sol argilo-calcaire de couleur majoritairement brune. Vieilles vignes des années 70, élevage sous bois avec du fût neuf d'après mes recherches. 2009 fut un millésime très chaud en France de manière générale.

Robe dorée, transparente dénotant peu/pas d’évolution. Bouquet de « climat frais » : citron jaune zesté, cailloux mouillés froid, iode/huître, herbe coupée. Bouche qui est un « idéal platonicien » du Chablis dixit Jean, et qui fait consensus : on a là tous les marqueurs du Chablis dans une version parfaitement équilibrée et calibrée : l’acidité tranchante véhiculée par une aromatique iodée et marine entourée par un léger gras qui donne la gourmandise. Longue finale pierreuse avec une relance folle.

L’âge et le millésime sont tout de même un coup de tonnerre puisque le vin ne porte aucun stigmate ni ne présente d’évolution.

Vin n°2 : Jura, Domaine Ganevat – Chalasse Les Marnes bleues 2014
12°. Vin ouillé. 100% savagnin vert sur sol de marnes bleues. Environ 18 mois d’élevage sous vieux bois. 

Robe un peu plus dorée et concentrée. Nez très stimulant, superbe, complexe et minéral portant une palette un peu plus orange que le précédent mais convoyant la même impression d’énergie débordante.
Là encore, la trame est clairement bâtie sur une haute acidité mais bien mûre qui confine presque au jus de pamplemousse légèrement sucré. Longue finale toujours porté par l’acidité combinant pamplemousse et pomme verte bien plastronnée par une matière suffisante. 
Zapata insiste sur la perception d’un sol vivant qui permet une telle complexité dans le vin.

Vin n°3 : Bourgogne, Domaine Jean-Claude Bachelet – Chassagne-Montrachet 1er Cru « La Boudriotte »
13,5°. Le site du domaine ne présentant plus la référence, il semblerait que ce soit un climat bas de coteau de vielles vignes de 40 ans.

Robe grasse et pleinement dorée. Un nez indiquant sans ambiguïté un chardonnay de style beaunois : fleurs blanche, clémentine, yuzu tenant la part belle à du caramel et du beurre de baratte frais. Bouche à l’avenant, très agréable avec une belle largeur mais bien orientée par une acidité certes inférieure aux deux vins précédents qui donne forme au vin. Belle fraîcheur, pas de trace d’oxydation ou de caramel écœurant. Seule une finale moins longue et moins complexe que ses compères trahit un pedigree inférieur.

Stéphane dont c'était l'appeau l'a pleinement apprécié

Point accord : Globalement tous les vins blancs ont bien fonctionné tant avec l’apéritif que l’entrée. Le Bachelet obtient un léger avantage avec la mousseline (superbe préparation !), notamment sur le toucher de bouche à mon humble avis tandis que le Ganevat fonctionne particulièrement bien avec le tarama wasabi/tobiko.

Tous les vins ont fait l’unanimité quant à leur qualité, indépendamment des préférences individuelles avec comme vainqueur moral le Dauvissat qui a représenté pour tout le monde l’archétype rêvé du Chablis.

Passage au rouge pour accompagner le plat principal cuisiné par mes blanches mains : confit de rôti de longe de porc basque Kinto AOP, sauce à la groseille & pommes de terre rôties.

Vin n°4 : Bordeaux, Pauillac, Château Mouton-Rothschild 2002
13°.  Fiche technique du 2002 en provenance du domaine !  Faible rendement en raison d'une chaleur tardive et de la sécheresse, 77% de CS, 12% de Merlot, 10% CF et 1% de Petit Verdot.

Robe dense et noire. Bouquet puissant et très aristocratique qui m’indique un cabernet-sauvignon. D’autres hésitent avec une syrah rhodanienne concentrée : bois sombre, cèdre, fruit noir, largeur et quant-à-soi. La bouche est curieusement digeste malgré l’intensité de saveur dominé par le café et la mûre pour moi. Les tanins sont fondus même si présents et imposent un volume en bouche marquant. L’impression globale est celle d’un régiment de cavalerie qui trace sa route en passant sur le corps de tout obstacle sans en être perturbé.

Pauline & Timothée ont été ravi du clin d'oeil.

Vin n°5 : Bourgogne, Morey-Saint-Denis, Domaine des Lambrays – Clos des Lambrays 2010
13,5°.  Infos du domaine.  50% de bois neuf, sols marneux en haut, plus argilo-calcaire en bas.

Robe dense (mais moins que le Mouton) et noire (moins compacte tout de même). Bouquet d’une grande élégance et complexité dominé par le fruit noir tangentant le fruit rouge avec des notes de sous-bois. La bouche est d’une plus grande finesse que le vin précédent, caressante, aérienne et soyeuse. Finale de ronce et de petits cailloux passés au pilon.

Le groupe s'accorde unanimement, c’est vraiment super bon et on se régale. Le vin a par ailleurs du potentiel, Julien le trouvant encore un peu serré en finale notamment. Jean a été aux anges et époustouflé !

C’est ce vin qui a fourvoyé toute la troupe à l’exception d’un seul. En effet, le consensus ferme qui a in fine abouti à un vote solennel penchait pour un C9P de style Reynaud ou une grenache transcendée. Jean nous a offert une saillie qui fait désormais partie de la légende « Moi, fondateur de LPV Pinot Noir me trompe certainement en assurant que ce vin n’est pas un PN. Foi de pinotphile, ceci n’est pas un PN ! »

Les arguments étant la couleur de la robe, une aromatique trop fruits noirs et trop de puissance pour être un PN. Etant le mouton noir sur ce vin, convaincu par une intuition forte et rapide que c’était un PN, mes arguments étaient que la robe n’était pas déterminante, beaucoup de PN du nouveau monde ayant des robes concentrées et que bien au contraire ça me rappelait des Gevrey-Chambertin ou des Vosnes-Romanées qui faisaient « la gueule ».

En effet, l’intuition avait fait surgir à mon esprit ces deux éléments : Daniel Ravier du domaine Tempier parlant de son Cabassaou qui fait « la boule » ainsi qu’un Gevrey-Chambertin à 250€ goûté à la New Cave qui m’avait fait sourire en songeant que je ne trouvais ni la puissance d’un cab ni la finesse d’un PN dans ce vin.

Point accord : contrairement à Jean qui trouve l’accord entre le pauillac et le plat excellent, c’est pour moi clairement le PN qui tire pleinement profit du plat. Le porc, persillé et rendu d’un fondant incroyable par la cuisson basse température n’a pas la mâche et la densité de texture d’un bœuf pour répondre à la densité du bordeaux. De plus, la remarquable sauce à la confiture de groseille (grande réussite) a une plus grande proximité aromatique avec le PN facilitant le pont qu’avec les saveurs empyreumatiques du pauillac.

Ce Clos des Lambrays avec le plat a sans doute aucun représenté l’acmé de la soirée et a eu pour conséquence de transformer le rouge suivant en bouteille sacrificielle.

Vin n°6 : Rhône Septentrional, Clape – Cornas 2006
13°. Cuvée mythique de l'appelation avec un élevage en foudre sur la rive droite du Rhône.

Robe d’une noirceur et compacité insondable. Bouquet de syrah de « mauvais » caractère : camphre, suie, ventre de lièvre, cerise kirschée. En bouche, on devine rapidement Cornas avec ce côté sombre, c’est gris, et pourtant une fraîcheur qui rend l’ensemble à l’opposé d’une confiture ou d’une terrine. Cette acidité donne forme et structure au vin en donnant de la relance. Finale encore légèrement astringente qui augure un potentiel d’amélioration certain. Même difficulté pour l’accord que le bordeaux : c’est trop puissant pour ce confit de porc.

Philippe s'en est délecté avec un sourire communicatif.

Plateau de fromage : Brillat-Savarin truffé, « bouillette » (fromage de chèvre au romarin) ainsi qu’un comté fruité affiné par la fruitière sur requête de Zapata, originaire de la région.

Vin n°7 : Jura, Stéphane Tissot - Seis 2009
13°. 100% Savagnin ayant passé plus de 6 ans sans ouillage sans pour autant prendre le voile.

Robe orangée et grasse. Nez très singulier et original dont l’honnêteté doit reconnaître qu’il est plus proche du traumatisme olfactif que l’originalité des senteurs du sous-continent indien. Stéphane est particulièrement ébranlé par ces effluves qui mélangent boucherie et club d’équitation.
En bouche, c’est très original et surtout très bon. Cela ressemble à un savagnin ouillé pour 80% avec un peu de sotolon et de noisette. J’y ai également trouvé un apport sur la texture du vin, soyeuse et caressante qui m’a fait évoquer le Ganevat Vignes de mon père dégusté dans les mêmes lieux en novembre.

Vin n°8 : Jura, Stéphane Tissot – Vin Jaune W 2014
14°. C’est un vin jaune élevé en fûts de whisky de la Maison Couvreur.

Robe nettement plus intense dans le doré que la précédente. Bouquet puissant, raffiné et complexe portant pourtant les marqueurs de vin jaune les plus typiques, étonnant parce qu’il y a quand même des fruits frais se mêlant au reste. En bouche, on peut faire un parallèle avec la couleur blanche, qui est le mélange des 7 couleurs primaires : c’est délicieux, évident comme c’est un vin jaune mais sans le côté clivant. Difficile de mettre des mots sur des arômes en particulier mais il en ressort de ce vin jaune une gourmandise indéniablement supérieure à ses semblables sans pour autant les trahir. Même Philippe apprécie sincèrement cette bouteille alors que les vins oxydatifs ne sont vraiment pas sa tasse de thé.

L’accord avec le comté 24 mois est aussi scolaire que sublime bien sûr.

Dessert : un tiramisu extrêmement maîtrisé par Pauline, la plus fine toque du plateau capable de réaliser les pâtisseries.

Vin n°9 : Allemagne, Moselle (Mittelmosel), Weingut Joh. Jos. Prüm – Graacher Himmelreich Riesling Spätlese 2003
8,5°. Le domaine ne dévoile pas les analyses mais a la réputation d'être bas dans les degrés Oechles. Avec le taux d'alcool sur l'étiquette, on peut estimer les SR à 45-50g/L avec une acidité à 8 environ. Le Himmelreich est positionné comme 2ème cru de la gamme avec un sol un peu plus profond et une exposition un peu plus fraîche que le Wehlener Sonnenuhr voisin qui est le porte-drapeau.

Robe transparente à peine dorée à la lumière. Dès le premier nez, le riesling allemand saute à la figure et c’est donc un appeau à moi . C’est mon quart d’heure de gloire pour faire mon analyse à voix haute, la troupe ayant mis le clignotant à droite.

Bouquet extrêmement élégant d’eau de roche/citronnade avec des fleurs blanches ainsi que des fruits exotiques sous formes de baies acides plutôt que charnues (jabuticaba plutôt que mangue). L’attaque trahit par sa gourmandise la présence de SR qui sont totalement intégrés aux arômes de fruits du nez. Par la suite, une acidité très mûre analogue à celle du Ganevat apparaît, coupe comme un jet d’eau haute pression cette gourmandise et accélère le long d’une finale longuissime portant du fruit, un l’éclat revigorant et un petit trait d’amertume digeste.

J’adore et ça ne pèse pas sur le ventre qui a bien gonflé, les limites de la gourmandise ayant été franchies depuis longtemps.

Dans une aveugle à l’improviste, sans contexte aucun, j’aurai arrêté mon choix sur un Mittelmosel de Traben-Trarbach pré-2010 même si j’ai initialement pensé à un Egon Müller Scharzhofberger pour l’apparition de cette acidité mûre gigantesque.

Finalement, mon dernier mot fût pour un JJ Prüm Whelener Sonnenuhr Spätlese 2002 pour deux raisons : la fraîcheur globale du vin dans son aromatique (élimination de 2003), et la présence d’un trait d’amertume élégant le long de la finale que j’associe plus au WSH, trouvant généralement que le Himmelreich garde un fruit exotique charnu plus expressif en finale.

Point accord: Le Tiramisu était génial, gargantuesque et on a réussi à le finir sans se forcer. Comme souvent, le Prüm rallie par son élégance et son extrême finesse qui ne tire pas la couverture à soi même s’il n’y a pas de mariage proprement dit.

Une soirée vraiment marquante d’amateur de vin où nous avons eu le bonheur d’avoir de grands pedigrees à la hauteur dans le verre, et donc nous établir un parangon pour chacun des styles respectifs. Le partager en chouette compagnie l’a rendu encore meilleure.

Mon palais à blancs fut comblé et je retiendrais tout particulièrement les brillantes prestations des vins jurassiens avec le magnifique vin jaune « W ». Quant au PN, ce genre de prestation me fait pleinement prendre conscience que son culte ne provient pas d’une hallucination collective même si je n’ai pas de regrets ni d’ambiguïté quant à mes préférences (vive le riesling Prädikat et les blancs de manière générale !).

Encore un immense merci à Julien !

Sven. Curieux de tout, prédilection pour les vins blancs légers et européens. Toujours prendre une saine distance avec mes CR. Amateur d'ironie, surtout à l'égard du bourgogne et du vin rouge en général ;).
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21 Juil 2024 16:38 #9
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Bon anniversaire Julien ! 
Et viva Zapata ! 
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21 Juil 2024 17:13 #10

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CR: Clos des Lambrays 2010

La dégustation à l'aveugle demeure un magnifique exercice d'humilité. Ainsi lorsque le flacon mystère nous fut présenté à la suite du Mouton Rothschild 2002, l'amoureux de la Bourgogne que je suis a hésité entre un pinot et un grenache reynaudien... pour finalement pencher en faveur d'un Pignan de millésime frais, tant la fraise ressortait !!! Mais en me prononçant pour un Reynaud, je savais que du coup le si délicieux flacon mystère ne pouvait être qu'un pinot noir...

Ce Clos des Lambrays (le premier de ma carrière d'amateur) a représenté pour moi le clou de cette soirée mythique. Gourmandise, équilibre, allonge, distinction, émotion, tout y est. Son bouquet est d'une grande poésie, entre fraise écrasée, myrtille, rose, ronce et sous-bois. La bouche m'a frappé par l'absolu soyeux de son toucher et son caractère aérien et caressant - chambollesque pourrait-on dire... Elle est superbe d'équilibre, de fraîcheur et de gourmandise avec ses saveurs de petits fruits rouges. L'élevage discret confirme que ce 2010 joue le registre de la finesse plutôt que la puissance. Sa finale savoureuse évoque la ronce et l'eau de roche. L'ensemble est de grande classe et fait encore jeune.

Encore un grand merci à notre hôte de nous avoir conviés à l'aider à franchir ce cap d'une si belle façon !
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21 Juil 2024 17:14 #11

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2010  non seulement cela fait jeune mais c'est jeune !

Gilles
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21 Juil 2024 21:12 #12

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Merci à tous pour ce bel effort de rédaction et de partage.
Juste un commentaire sur le Seis 2009 de Stéphane Tissot, il a un nez absolument proche d'un Fino ou d'un Jerez Andalou !
La proximité stylistique de ces vins est bluffante...personnellement j'adore mais c'est vrai que la tablée l'a peu apprécié en tant que tel...

Caramba !
Zapata

JMN
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24 Juil 2024 15:22 #13

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Bonsoir, je voudrai remercier particulièrement le galet mobile pour la précision de ses commentaires, qu'il les ait rédigés seuls ou collégialement. Chaque gorgée semble partagée quand on a terminé ce long compte rendu. C'est à la fois concis, détaillé et émotionnant. Bref je rêverai d'avoir le 10ème de ces qualités analytiques qui ne tombent jamais dans la caricature en restant compréhensibles par tous les amateurs ! Vraiment, merci.

"Je me demande si la mort vaut la peine d'être vécue". Frédéric Dard.
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28 Juil 2024 20:09 #14

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Ah mais quand ledit galet ne tombe pas dans ses travers cuistresques, ses écrits sont tout à fait louables.

Hélas, c'est rare.

Michel
28 Juil 2024 21:10 #15

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Ah mais quand ledit galet ne tombe pas dans ses travers cuistresques, ses écrits sont tout à fait louables.

Hélas, c'est rare.

La première phrase, OK. La deuxième, le principe de Starbuck aurait pu s'appliquer : tu bénéficies déjà d'une certaine impunité pour te moquer de beaucoup de monde sous couvert de tes mots d'esprit et des contrepèteries mais tu dépasses aussi parfois les bornes (comme avec JoeLeCocker qui n'a pas mérité les piques dans l'autre fil).

Sven. Curieux de tout, prédilection pour les vins blancs légers et européens. Toujours prendre une saine distance avec mes CR. Amateur d'ironie, surtout à l'égard du bourgogne et du vin rouge en général ;).
28 Juil 2024 21:47 #16

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Bullshit, je ne me moque méchamment de personne

Quant aux bornes, tu franchis allègrement celle de l'exosphère

Michel
28 Juil 2024 22:30 #17

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Modérateurs: GildasPBAESMartinezCédric42120Vougeotjean-luc javauxstarbuck