Une après-midi de rêve à Mareuil-sur-Ay, en compagnie de Charles Philipponnat
Avec ma femme et deux ami(e)s sommeliers, nous nous sommes rendus lundi après-midi à Mareuil-sur-Ay pour une visite de la maison Philipponnat. Nous étions attendus par Charles Philipponnat en personne, un homme charmant, extrêmement sympathique et d’une grande humilité. Il nous a accueillis comme des rois et nous avons passés cinq heures en sa compagnie, riches d’enseignements à tout point de vue.
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En arrivant dans le majestueux hall de la maison…
…on nous installe dans un confortable salon et on nous offre une coupe de champagne rosé : la
Cuvée "1522", Premier Cru, Brut Rosé Millésime 2003
Cette cuvée rosée, que j’apprécie beaucoup en blanc, est pleine de charme et d’élégance. On est d’abord séduit par sa jolie robe vieux rose aux reflets légèrement orangés. Puis on découvre un champagne avec une belle matière en bouche, sur des notes florales et des fruits rouges très expressifs. Un très beau rosé !
Très bien+ (16+/20)
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Nous partons ensuite faire le tour des lieux dont voici quelques photos :
La cuverie :
Le vendangeoir :
Le chai :
Les caves, longues de 2,5 km je crois :
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S’en est suivi une formidable dégustation, en commençant par trois jolies cuvées :
Royale Réserve, N.D Non Dosé
(base vendange 2006 + 25% de vins de réserve, dégorgé en sept. 2006)
Le nez est sur le fruit jaune, assez expressif. En bouche, c’est droit, nerveux, avec beaucoup de fraîcheur. On a une dominante de fruits blancs (poire, pêche) avec des notes fumées et une pointe d’épices en fin de bouche.
Je trouve ça bon, mais je me demande si je ne préfère pas la version dosée.
Bien (13,5/20)
Cuvée "1522", Grand Cru, Brut Millésime 2002
(tirée en mai 2003, dégorgée en sept. 2008, dosée à 4 g./L.)
C’est une cuvée que j’ai beaucoup appréciée sur le millésime 2000. Je trouve que le 2002 se livre moins facilement bien que ce soit également une belle réussite. Le nez est assez frais, sur des notes légèrement fumées. La bouche est tendue et mûre sur une dominante de fruits blancs. On a un très léger boisé et des notes subtilement poivrées en fin de bouche.
Très bien + (16,5/20)
Clos des Goisses, Brut 2000
(1/3 CH, 2/3 PN, pas de fermentation malo-lactique, dégorgé en août 2008, dosé à 4,5 g./L.)
C’est un champagne qui me donne toujours beaucoup d’émotion à la dégustation. J’aime d’abord ce nom, qui signifie en vieux patois picard quelque chose de pentu, de travers. Puis le vignoble du Clos, qui s’étend sur 5,5 ha à quelques pas du siège de la maison, est magnifique, sur sa pente abrupte à 35-40°C, tout juste face au canal de la Marne.
Le champagne est doté d’une belle robe jaune or. Le nez est très expressif, sur des notes de fruits bien murs. En bouche, on a une belle élégance et une grande finesse de bulles. Il y a du gras, de la minéralité mais aussi du fruit mur. Je le trouve peut-être encore un peu jeune ou du moins je pense qu’il a encore beaucoup de belles choses à dire !
Excellent (17,5/20)
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Puis la dégustation s’est poursuivie par une série de vieux millésimes très intéressante. La maison Philipponnat a en effet encore quelques beaux vieux flacons conservés sur lies dans ce qu’ils appellent "le Caveau du Trésor". Rien que le nom laisse rêveur ! La guerre est malheureusement passée par là et les plus vieux millésimes ne remontent qu’aux années 40.
Mon grand plaisir a été de voir Charles Philipponnat faire le tour des lieux pour chercher le "Trésor" qu’il allait nous faire l’honneur de réveiller pour nous !
Grand Blanc, Brut LV 1985 (LV pour Long Vieillissement, dégorgé en juin 2007)
(100% CH)
Ce champagne a un nez sur le fumé, le grillé, légèrement tourbé, avec de la vanille et un côté iodé.
En bouche, on a une belle vinosité mais sur des arômes d’évolution assez marqués (champignon, humus notamment). Ce champagne fait clairement son âge, voire plus et je regretterais peut-être un manque d’élégance et de complexité.
Très bien (16/20)
Alors que le 1985 a clairement pris un peu d’âge, les quatre 1982 qui suivront seront d’une grande jeunesse ! Ce millésime est impressionnant de ce point de vue. Je l’avais déjà constaté avec un Dom Pérignon 1982 cet été. C’est ma femme qui a été gâtée car elle est née cette année là.
Grand Blanc, Brut LV 1982 (dégorgé en janv. 2010)
(100% CH, dosé à 4,5 g./L.)
Je trouve le nez d’une belle complexité avec de l’abricot, des fruits de la passion, des épices, un côté herbacé et mentholé également.
En bouche, c’est assez droit, franc, avec une belle fraîcheur pour un champagne de 28 ans. On retrouve les arômes herbacés et mentholés du nez. La finale est cependant bien plus courte que le précédent. Richard Juhlin n’a jamais été séduit par ce champagne, ce qui n’est pas mon cas.
Excellent + (18/20)
Clos des Goisses, Brut LV 1982 (dégorgé en juin 2009)
(50% PN/50% CH, dosé à 4,5 g./L)
Un Clos des Goisses sur le millésime 1982 ! On ne peut pas me faire plus plaisir. La robe de ce champagne est étonnamment claire en comparaison des deux Grand Blanc, il n’y a quasiment aucune marque d’évolution. Le nez est légèrement fumé, avec des notes de fruits secs. La bouche est très marqué bois de santal, vanillé, très légèrement boisé. Un très grand Clos des Goisses… avec beaucoup de finesse et d’élégance. La bouteille avait déjà quelques jours. A l’ouverture, le vin a dû être phénoménal !
Exceptionnel (19/20)
La bouteille suivante sera l’Elue du "Caveau du Trésor"…… un autre Clos des Goisses 1982 ! C’est le type de comparatif que l’on ne peut pas faire à la maison : exactement le même vin, sur le même millésime… à la différence que celui-là a été tout juste dégorgé et non dosé !
Clos des Goisses, Brut LV 1982 (dégorgé devant nous par Charles Philipponnat)
(50% PN/50% CH, Non dosé)
La robe est toujours aussi claire. On retrouve le vin précédemment dégusté… mais il se différencie par sa franchise, son attaque, sa fougue. On a quelque chose de plus droit, avec une minéralité que je trouve mise en avant dans celui-ci. Il est alors moins dans l’élégance et c’est ce qui le rend pour moi moins grand.
Excellent (18/20)
Nous finirons par une quatrième cuvée de ce même millésime.
Réserve Millésimée, 1982 (dégorgé en août 2007)
(au moins 75% de Pinot noir complétés par du Chardonnay, Dosé à 4,3 g./L.)
Là encore, la robe est étonnamment claire, légèrement "plombée" (= un peu grise). Le nez est surprenant, déroutant, très expressif sur le cassis, la mûre, la myrtille. Cela fait un peu bonbon, mais c’est superbe.
En bouche, on a une explosion de tous ces fruits noirs avec un champagne très expressif. Il a une belle rondeur et de la fraîcheur. C’est un joli coup de cœur… pour sa typicité !
Excellent + (18+/20)
Nous sommes repartis de cette rencontre des étoiles pleins la tête… et séduits par ce grand Monsieur et ses vins remarquables !
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Julien