Pour ce WE œnophile annuel à Bourges de mon fils et de ses copains, la journée a été bien remplie après une nuit très courte : lever à 9h pour partir à 10h et arriver à temps pour une très chouette dégustation au
domaine du Pré Semelé
, puis déjeuner à
La Côte des Monts Damnés à Chavignol
, mini-dégustation chez Mathieu Delaporte (pas pour moi, il faut tenir sur la longueur…
), balade au-dessus du village avec toujours de très belle vues et retour sur Bourges pour dégustation dans ma cave autour du tonneau.
Quoi, pas de tonneau cette année ? Ben non, la distanciation ne le permet pas… ce sera la salle à manger… Foutu(e) Covid !
Mais dégustation, oui !!!
Et toujours assez éclectique…
Cette année j’ai voulu assouplir la règle, en n’imposant pas de trouver un cépage principal sur deux car je pensais que l’épreuve serait plus difficile que d’habitude. Eh bien non, ils ont encore fait fort !
Il faut dire qu’ils ont eu un renfort de poids, en la personne de Vincent : un copain de mon fils, même ancien colocataire, mais aussi LPVien (VincentJ) ; bon, après un démarrage en trombe comme une Ferrari en novembre 2019, avec des CRs sur des vins italiens, c’est moteur cassé depuis… Mais j’ai pu tester le lascar tout le WE et je peux vous assurer qu’il en connait un rayon ! Ceci étant il n’a jamais cherché à prendre le leadership et c’est collectivement qu’ils m’ont étonné. Il est vrai que quand ils trouvaient le cépage, lui trouvait le domaine…
Eric Rodez – Champagne Grand Cru – Cuvée des Grands Vintages
Le domaine, situé à Ambonnay, travaille en biodynamie et les vignes sont âgées en moyenne de 42 ans.
Il s’agit d’un assemblage de 70 % pinot noir et 30 % chardonnay, et également d’un assemblage de 23 % de 2010, 21 % de 2009, 19 % de 2008, 12 % de 2006, 18 % de 2005 et 7 % de 2004.
Ce vin n’a pas fait de fermentation malolactique et le dosage n’est que de 2,5 g à une date de dégorgement de septembre 2018.
Le vin a été servi directement de la bouteille (équipée d’une chaussette) immédiatement après ouverture.
L’or de la robe est ambré.
Le nez d’une belle intensité exhale des fruits secs et des fruits jaunes, de la brioche, un zeste d’agrumes et une touche crayeuse. Un nez très classique de belle facture.
La bouche est large, pleine et assez aromatique, mais aussi nerveuse par son acidité élevée. La bulle se révèle active sans être agressive et la finale longue et ciselée dévoile quelques fins amers.
Un Champagne de caractère, qui manque un peu de confort, mais manifestement de gastronomie.
Très Bien + si, comme moi, on apprécie ces Champagne de forte personnalité
Les classiques galettes de pomme de terre l’attendrissent et le civilisent un peu et lui sont donc d’une aide précieuse (3, 5 / 5).
Domaine Marie-Thérèse Chappaz – Valais – Grain Arvine – La Louye – 2014
Epaulé pendant une bonne heure puis carafé pendant une petite heure.
La robe présente un or clair.
Le nez intense explore la gamme des fruits exotiques avec plutôt de la papaye et du fruit de la passion, relevé par une touche de clou de girofle et enrobé par une note vanillée.
L’attaque est bien perlante puis c’est la rondeur toute en puissance contenue qui prend le relais avant une finale très dynamique car l’acidité prend alors le dessus, la finale étant un peu trop marquée par l’amertume.
Très Bien +
Les tartelettes au parmesan et aux échalotes signent un bien bel accord (4 / 5) en gommant l’amertume au profit de la salinité du vin.
Domaine Jacques Vincent – Reuilly – Gris – 2007
Carafé juste avant service.
L’ami Jacques nous fait toujours goûter un vieux Reuilly à la fin des dégustations du dimanche matin. En ayant conservé une par millésime, j’ai donc essayé de piéger les jeunes…
La robe est couleur corail.
Bien intense, le nez développe encore des petits fruits rouges, sur la framboise, et s’enrichit de notes tertiaires sur la noix. L’ensemble est assez inattendu, complexe et enchanteur.
La bouche surfe encore sur une vague gourmande, longue et tendue, le rancio n’étant pas encore vraiment apparu.
Très Bien pour ce vin à boire pour lui tout seul.
Domaine Sarda-Malet – Côtes du Roussillon – Terroir Mailloles – Blanc – 2008
Les vignes
sont étaient
plantées sur une terrasse du quaternaire composée de güntz rouge et de galets roulés. L’assemblage se compose de 50 % de roussanne, 40 % de marsanne et 10 % de grenache blanc. Le rendement est de 15 hl/ha (!). La fermentation avec des levures indigènes puis l’élevage se sont déroulés dans des fûts, pour moitié neufs et pour moitié d’un an et en cuve.
Epaulé pendant une bonne heure puis carafé pendant une heure et demie.
L’or de la robe est bien ambré.
Le nez étonne par sa puissance, sa luxuriance avec presque un côté décadent, l’aromatique étant composée de fruits exotiques et d’épices.
La bouche est à l’avenant, énorme d’amplitude, de densité et de sapidité. On a une sensation de sucre alors que le vin est sec, et une acidité salvatrice permet de redresser cet ensemble qui aurait été bien lourd sans sa présence. L’alonge se fait d’ailleurs autant par les extraits secs du vin que par l’acidité.
Un vin un peu « too much » dans le style de Peyre-Rose en Languedoc, à ne pas mettre dans la bouche d’un pdf.
Très Bien (+)
Des rillettes de sardine lui permettent de s’affiner un peu, mais pas tant que cela car sa force emporte tout (3 / 5)
Domaine Louis Carillon & Fils – Puligny-Montrachet 1er Cru – Les Champs Canet – 2007
Epaulé pendant deux petites heures puis carafé pendant une heure.
La robe arbore un bel or encore bien brillant.
Le nez intense fait la part belle aux fruits, qu’ils soient blancs, jaunes ou secs. Il se teinte d’une touche vanillée mais également d’autres sur la croûte de fromage et la craie que l’on n’attendait pas sur cette appellation.
Il y a tout ce qu’il faut là où il le faut en bouche : un beau gras, une bonne vivacité, de superbes saveurs à l’élevage bien fondu, une finale longue et précise finement saline.
Très Bien ++ / Excellent pour ce presque grand vin à qui il ne manque qu’un peu de complexité et un peu plus de profondeur pour mériter ce qualificatif.
Une marinière de poissons fait un très beau mariage (4 + / 5), à la fois en saveurs et en texture, avec ce très beau vin.
Château des Tours – Côtes du Rhône – 2012
La composition comprend 65 % de grenache, 20 % de syrah et 15 % de cinsault.
Epaulé pendant une bonne heure puis carafé pendant deux bonnes heures. C’est insuffisant par rapport aux préconisations d’Emmanuel Reynaud mais le seul défaut ayant été son caractère alcooleux, je ne suis pas sûr que cela aurait changé grand-chose.
La robe bien claire n’est ni jeune ni évoluée.
Très intense, le nez embaume le cocktail reynaudien : fraise, rose, épices, écorce d’orange et touche poivrée.
La bouche est sur une dualité contradictoire entre charpente et alcool d’un côté et fruité charmeur et buvabilité d’un autre. La finale joue plus sur la finesse.
Très Bien +(+) car on prend quand même son pied avec ce vin.
Il réussit un bon accord (3 / 5) en proposant une opposition plus qu’un partenariat à une terrine d’oie forte en goût.
Domaine de la Grange des Pères – IGP Pays d’Hérault – 2012
L’assemblage se compose de syrah, mourvèdre, cabernet-sauvignon et counoise.
Epaulé pendant deux heures et demie puis carafé pendant une petite heure.
La robe assez sombre ne montre pas de trace de jeunesse ni d’évolution.
Très expressif et complexe, le nez se base sur des fruits noirs d’une belle élégance et virevolte de la menthe réglissée au cuir noble en passant par le maquis. Tout le monde est sous le charme !
La bouche lui rend la pareille en jouant la carte de la finesse et de la fraîcheur. Elle ne manque pour autant pas de structure, s’habille d’un grain serré et soyeux à la fois, de tanins amicaux et d’une finale à l’austérité classieuse.
Excellent
La terrine de lapin, elle-même délicate, exacerbe son élégance et réalise un superbe mariage (4 + / 5).
Château Langoa Barton – Saint-Julien – 2003
L’assemblage comporte 70 % de cabernet sauvignon, 20 % de merlot, 8 % de cabernet franc et 2 % de petit verdot.
Epaulé pendant deux heures et demie puis carafé pendant une grosse heure.
La robe sombre fait encore plutôt jeune !
Le nez d’une belle intensité fait la part belle aux arômes empyreumatiques (graphite, fumé, balsamique) sur un fond de fruits de fruits noirs (cassis) et de touches animales.
La bouche est dense et sérieuse, notamment par un trait de vert prononcé, mais on aperçoit une ouverture plus gaie avec des saveurs chocolatées. Dans la finale de bonne tenue c’est le côté végétal qui l’emporte sans que ce soit désagréable.
Très Bien +
Sans surprise, le vin s’accorde très bien (4 / 5) avec des côtelettes d’agneau grillées, le côté végétal disparaissant.
Château de Beaucastel – Châteauneuf-du-Pape – Rouge – 2011
L’assemblage se compose des treize cépages autorisés dont 30% mourvèdre, 30% grenache, 15% syrah, 10% counoise, 5% cinsault et 10 % du reste.
Epaulé pendant deux heures et demie puis carafé pendant deux petites heures.
Assez sombre, la robe est encore jeune.
Le nez intense et profond présente une superbe finesse et délivre un message d’épanouissement en associant un très beau fruité à des épices douces, un soupçon de cuir venant apporter une touche plus aboutie.
Ample et corsée, d’une grande force, mais d’une force tranquille, la bouche est cohérente de bout en bout. Son aromatique fruitée et réglissée est mise en valeur par une belle fraîcheur réjouissante et un toucher de taffetas, avec juste une pointe alcooleuse. La rémanence est incroyable !
Excellent (+)
Encore un mariage magnifique (4 + / 5) avec un effiloché de cuisse de canard à la maltaise, les textures serrées du vin et du plat se répondant parfaitement et la légère note capiteuse s’évanouissant comme par miracle.
Domaine Marcel Deiss – Alsace Grand Cru – Altenberg de Bergheim – 2008
Le vin est issu d’une complantation des grands cépages alsaciens et il possède environ 80 g / l de sucres résiduels.
Epaulé pendant quatre heures et demie puis carafé pendant une demi-heure.
La robe est parée d’un bel or ambré.
Très intense et complexe, le nez exhale une aromatique chatoyante et changeante, avec d’abord des fruits exotiques et de la mandarine puis du miel et des épices, mais une note pétrolée n’est pas loin et ressort également.
La bouche est parfaitement équilibrée, d’une belle aromatique qui répond à celle du nez, d’une grande acidité mobilisatrice et à la sucrosité parfaitement intégrée (où sont passés les 80 g ? La moitié a disparu !). La persistance est appréciable sur une finale toute en finesse.
Très Bien ++
Associé à des fromages à pâte persillée, l’accord est très moyen (2,5 / 5) avec une fourme d’Ambert qu’il domine de la tête et des épaules, meilleur (3 + / 5) avec un bleu de Gex car le match est plus équilibré. Mais c’est avec un chèvre frais à la papaye que le vin va trouver un beau compagnon de route dans la même gamme aromatique (3,5 + / 5).
Domaine François Pinon – Vouvray – Goutte d’or – 1989
Ce vin acheté au domaine début août de cette année comprend 80 g / l de sucres résiduels et 4,8 g / l d’acidité totale.
Epaulé pendant cinq heures puis carafé juste avant service.
L’or de la robe est vraiment très ambré.
Puissant, époustouflant, démonstratif, baroque ! Le nez est superbe, utilisant de plus un spectre aromatique très large avec des fruits confits, de la pâte de coing, de la pomme, des épices, du miel et même de la truffe.
La bouche possède une belle densité, de la liqueur mais pas trop, des saveurs presque aussi riches qu’au nez et une énorme vivacité. La persistance magnifique permet d’en profiter plus longtemps.
Excellent
Après la déception sur un moelleux de la cuvée « Novembre » du millésime 2002, je suis conquis par ce vin !
Malheureusement la tarte aux pommes vergeoise qui l’accompagne est beaucoup trop sucrée pour le vin. L’accord n’est pas bon (2 / 5), seule la pomme permettant de faire un lien mais le vin est envahi par le sucre de la tarte. Pas grave : un verre d’eau puis on a droit à un deuxième dessert avec le vin bu pour lui tout seul.
Et voili-voilou, c’est tout pour cette fois-ci.
Je me suis aperçu a posteriori que j'avais servi deux mêmes vins il y a trois ans (Langoa et Beaucastel) mais ils n'ont pas eu l'air de trop se plaindre...
Au fait, le verdict ? Eh bien ils ont trouvé huit cépages majoritaires sur onze ! Ils ont raté la petite arvine (deux ou trois en avaient entendu parler…), la syrah de la GdP (mais en hésitant entre mourvèdre et cabernet-sauvignon, les deux qui suivent dans l’ordre des pourcentages) et les cépages du Deiss (partis sur chenin).
Bon, je vais donc devoir me les farcir l’année prochaine… A bientôt les (moins) jeunes !
Jean-Loup