2001, L'ODYSEE DU VIN
Je préviens tout de suite que le titre n'annonce pas une horizontale de 2001 mais mon nombre de messages au compteur après cette publication.
Samedi dernier nous étions invités chez Gérard qui recevaient également ses enfants ne résidant plus dans la région.
Une belle soirée en perspective.
Décollage dès notre arrivée avec un premier blanc qui va nous surprendre.
Domaine Ganevat: Les chamois du paradis 2012
Un nez de chardonnay que l'on place immédiatement en Bourgogne.
Très belle fraicheur, citronné, légères notes d'élevages.
C'est vif en bouche, un léger manque de matière mais plaisant en apéro.
Gérard m'a donné le fond de la bouteille que j'ai fait gouter le lendemain à un beau-frère allergique aux vins du Jura.
A l'aveugle il trouvait que mon chablis était un bon vin !
C'est bon mais je ne ferai pas un détour de 50km pour aller en acheter.
Cela étant le lendemain midi le vin n'était pas dénaturé et semblait identique à la veille.
Domaine Roulot, Meursault Narvaux 2011
Un nez déroutant, c'est minéral mais surtout marqué par les agrumes, du pamplemousse rose et particulièrement de la mandarine.
Une bouche tendue, tout en longueur avec une très belle finale.
Un vin d'une redoutable pureté dans un style très marqué et pourtant je ne l'ai pas reconnu à l'aveugle.
J'étais dérouté par les arômes d'agrumes rouges que je n'avais encore jamais perçus sur un vin blanc de Meursault.
Chaussette levée, c'est évident que c'est un parcellaire de chez Roulot !
Domaine Coche-Dury, Meursault 2007
Un nez qui m'envoie directement dans les récits d'Oliv avec ses alamis.
Si ça c'est pas un coche d'avant 2009 !!!!
Une signature jyhèfcochdurienne qu'il est impossible de manquer.
Ce grillé noble qui complexifie des notes de poires bien mûres et de bergamote.
Je ne trouve pas le vin trop minéral.
Qu'est-ce que j'aime ces effluves de céréales grillées qui ne dominent pas mais qui s'expriment en nuance.
La bouche est riche, ample, avec une finale qui tire en longueur.
On prend notre temps pour savourer cette excellente cuvée.
On imagine bien que c'est un beau 1er cru et quelle surprise à la levée de la chaussette.
Tant de qualités dans un "simple" village. Gérard croit se souvenir que ce doit être un Narvaux.
Gaétan trouve que ce 2007 est supérieur au 2010 que nous avions bu ensemble auprès d'un clocher il y a 2 ans.
L'âge des vins n'est pas le même non plus et cela semble confirmer les propos de ceux qui répètent que les vins de chez Coche sont souvent ouverts trop tôt.
Quoi qu'il en soit, nous ne nous ferons pas prier pour accepter un 2ème service. La bouteille sera assez vite à sec et je laisserai à ma femme le privilège de finir mon verre que Gérard m'avait généreusement réapprovisionné. La passion du vin s'exprime pleinement dans ces moments où le plaisir est partagé.
Mais c'est pas le tout, c'est qu'il y a encore un blanc à venir.
Domaine François Carillon, Chevalier Montrachet 2011
Dans un premier temps le nez reste fermé.
Aïe, alors qu'on se doute que Gérard a dû sortir un truc à nous faire décoller, j'espère que ce n'est pas le dernier Soyouz qui va nous mettre la tête dans le désert Kazakh.
Le vin va s'ouvrir peu à peu mais les arômes restent discrets.
Par contre en bouche on perçoit tout le potentiel de ce vin.
C'est d'une grande amplitude mais encore loin du feu d'artifice et de la finale en queue de paon que l'on pourrait espérer.
Le vin semble comprimé, en retenue.
Assurément une bouteille au grand potentiel mais méritant de patienter encore plusieurs années en cave.
Cette série de blanc fut très pédagogique.
Bu seul, j'aurais pu dire que le Meursault de Coche vaut un grand cru.
Mais lorsqu'on lui en met un en face, on peut percevoir la différence de structure.
Cela dit si je pouvais en choisir un pour mon prochain repas de fête, je prendrais le Meursault qui est en pleine apogée.
Nous avons aussi compris qu'il ne faut pas ouvrir les grands crus blancs avant leurs 10 ans.
Gérard tenait à me faire découvrir un Chevalier suite à ma mésaventure avec un 2007 oxydé.
Il se doutait toutefois que le vin ne nous dévoilerait pas toutes ses qualités à ce stade.
Domaine Méo-Camuzet, Clos Vougeot 2008
Une belle fraicheur, ça pinote bien sur les petits fruits rouges, griottes et groseilles.
Gaétan perçoit des épices alors que je reste sur un vin fruité.
La bouche est délicate tout en restant harmonieuse grâce à des tannins fins.
Gouleyant a un caractère un peu péjoratif quand on parle de grand cru, pourtant c'est bien le mot qui me vient à l'esprit.
Ca se boit facilement, l'acidité n'est pas envahissante et bien au contraire sert de colonne vertébrale pour porter le vin dans une finale agréable qui ne fatigue pas le palais.
Comme c'était un cadeau qu'elle avait fait à son père, la fille de Gérard aura le mot de la fin à propos de cette bouteille: "Alors elle est pas si mal ma 2008
"
Domaine Hudelot-Baillet, Bonnes Mares 2007
Un nez plus chaleureux avec des fruits noirs qui dominent les rouges mais l'ensemble est d'une jolie complexité.
C'est plus riche, réglissé avec des notes de badiane.
Je pense tout de suite à un 2009
En bouche c'est plus large que le précédent. Un peu plus rond avec des tannins fondus tout en gardant une belle tonicité pour faire durer le plaisir sans aucun creux en milieu de bouche.
Un excellent vin qui doit être à son apogée et prouve une nouvelle fois que les 2007 sont très bien en ce moment.
Château Grand Puy Lacoste 1989
Un nez typique de cabernet et je dis aussitôt que ce doit être un rive droite avec une forte proportion de cabernet.
Gérard me regarde avec étonnement.
C'est vrai pourquoi chercher midi à 14h ou un piège là où il y a tout simplement l'évidence d'un beau médoc.
Les arômes de cassis et les notes de tabac blond auraient dû m'envoyer directement à Pauillac.
La bouche soyeuse avec une puissance sans la moindre pointe d'astringence conforte l'idée qu'il doit s'agir d'un grand millésime.
Le vin bien que très bon et sans défauts ne procure toutefois pas une grande émotion car il reste assez monolithique.
C'est d'autant plus difficile pour lui que nous avons dans l'autre verre un rive droite ( là j'en suis sur) qui s'annonce un cran au dessus.
Mais tel le monolithe de Stanley Kubrick qui traverse les temps, ce GPL semble indestructible.
Gérard m'avait laissé le fond de la bouteille (2,5 verres).
24h plus tard le vin avait gagné en complexité avec des notes de graphite, un peu plus de tabac et une bouche toujours aussi agréable.
Enfin le dernier verre bu le surlendemain midi gagnait encore au nez et en bouche sans donner de signes de fatigue.
Un vin que j'ai trouvé très bon le samedi soir mais franchement excellent par la suite.
Ah les Pauillac, mes premiers amours avec le vin ... j'aime y revenir quand ils sont à ce niveau.
Château Léoville Las Cases 1988
Une robe profonde.
Un panier de fruits rouges, du cassis, une pointe de café, un peu de tabac, ça tire légèrement sur la boite à cigare mais pas trop, il faudra sans doute encore plusieurs années avant que le tertiaire ne domine l'ensemble. C'est finement épicé. Diablerie, c'est sacrément gourmand.
Pour moi il n'y a aucun doute, c'est un grand rive droite de 90 ou 95.
Gérard me dit que c'est pourtant un médoc.
Je lui réponds qu'il doit y avoir une grosse proportion de Merlot (je me rattrape comme je peux) et son gendre confirme qu'il y en a 21% après une petite recherche sur le net.
La bouche est ample, soyeuse, profonde avec une finale très longue sur le cassis.
Une telle qualité vient forcément d'un 1er GCC.
Et là je ne me trompe pas puisqu'il s'agit bien du dernier promu dans le
dernier classement connu des vins du médoc
.
Il s'agit d'un achat primeur et Gérard n'a jamais été déçu par les bouteilles de cette caisse.
Je comprends mieux qu'il ait trouvé la 79 en dessous de ce qu'il connait de ce château.
Domaine de la Grange des Pères 2010
C'est mon apport car les enfants de Gérard ne connaissaient pas.
Des arômes typiques d'un vin sudiste avec toutefois également une perception d'alcool un peu forte que je n'avais pas sur 09 ou 11.
Gaétan trouve assez vite, il faut dire que ma cave est pauvre en vins de cette région.
Mes souvenirs sont moins précis mais je garde l'idée que cette bouteille n'était pas prête à boire et mérite encore de la garde.
Domaine de Souch, Jurançon vendange tardive 2004
On termine avec un vin légèrement sucré. Là on est sur que ce n'est pas un Sauternes
C'est fin avec une belle longueur, ça passe encore bien en fin de repas mais si ce vin ne fatigue pas trop les palais, ils sont tout de même déjà fatigués par tout ce que nous avons gouté avant.
Difficile de donner un avis tranché sur ce vin dans ces conditions. Je pense qu'il serait plus adapté pour un repas plus classique dans lequel il ne sera pas précédé par 9 autres bouteilles.
Paradoxalement je me demande si la puissance d'un Sauternes ne serait pas préférable à la fin d'une telle dégustation pour parvenir à surmonter les qualités des vins précédents.
Retour sur terre, la tête pleine de bons souvenirs
Le lendemain j'étais en forme sans aucune gueule de bois ce qui semble prouver qu'il est préférable de boire beaucoup de bon qu'un peu de mauvais
Encore merci à Gérard et ses enfants pour leur accueil et leur générosité.