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L'Homme, cet animal social (version 2021)

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L'Homme, cet animal social a été créé par Eric B



P... plus de deux mois sans pouvoir se voir, ce fut long. Et en même temps, cela permet d'autant plus d'apprécier l'amitié qui nous lie et ne s'est pas démentie tout au long de ce confinement imposé. Quotidiennement, nous avons partagé nos coups de coeur musicaux, ce qui a permis de faire de belles découvertes. Mais tout de même, se voir, échanger de vive voix, partager des bons plats arrosés de vins ad hoc, c'est tout de même autre chose !

Notre "petite bande" s'est donc réunie mardi dernier. A l'instar des trois mousqueraires qui étaient en fait quatre, notre quatuor se l'est joué quintette : j'avais en effet invité Philippe Redon, l'homme qui nous a régalé à trois reprises dans son restaurant avant que cette saleté de virus interrompe le rythme – un repas était prévu le lendemain de l'annonce du confinement. Autant nous avons une certaine habitude des tables étoilées, autant c'était la première fois qu'un (ancien) chef étoilé déguste notre cuisine d'amateurs. Ça vous met une petite pression...



Patrick s'est chargé comme souvent de l'apéritif. Nous avons pu constater qu'il maîtrisait toujours l'art de la gougère. Il avait également confectionné des aumonières de jambon cru. Il fallait les manger en une seule bouchée pour que le contenu ne se renverse pas – en pensant à envever le cure-dent : ce serait couillon d'aller à l'hôpital pour une broutille pareille. Surprise, ça croque et libère de fines saveurs grillées : ce sont des éclats de noisettes légèrement torréfiées.


Philippe, même si je lui avait dit de venir les mains dans les poches, avait amené un cake salé aux graines et au fromage. Il était à la fois croustillant et moelleux, avec des sensations très différentes à chaque bouchée, en fonction des graines ingérées. Coup de coeur pour le carvi qui m'a ramené en Alsace 25 ans plus tôt.



Tout cela état accompagné d'une bulle aux notes de fleurs blanches et d'agrumes, avec une touche de craie humide. La bouche est vive, précise, avec un tactile délicat, presque crémeux, et une fraîcheur désaltérante. La finale tonique et salivante est sans concession, marquée par son terroir calcaire. Un vin parfait pour l'apéritif, qui irait certainement très bien aussi avec des huîtres ou un tartare de poisson aux agrumes. On pressent un blanc de blanc champenois : c'est est bien un puisque nous avons affaire à Champagne Brut extra de Pierre Gimonnet & Fils (4 ans sur lattes, tout de même : cela explique la finesse des bulles).



Nous poursuivons avec l'entrée de Stéphane : asperges blanches et vertes enrobées de fines lamelles de rhubarbe, suffisamment fines pour ne pas écraser leurs compagne d'un jour, avec un jus d'agrumes réduit à l'acidité vivifiante, juste adouci d'un peu de beurre. Et puis quelques petits pois jouant les figurants décorateurs*, mais aussi les clins d'oeil involontaires au dessert qui s'annonce...

* mais pas que : leur croquant printanier et leur sucre naturel sont les bienvenus !



Le vin servi avec le plat présente une robe dorée. Le nez, dominé par les terpènes d'agrume, laisse peu de place au doute : c'est du riesling ! La bouche démarre très bien, alliant une belle tension à une matière ronde et mûre, pour ensuite s'affaisser un peu, avec l'apparition de notes d'encaustique et de miel. La finale tente une relance sur l'amertume de l'orange confite, mais l'on sent tout de même que le vin manque de reprise. Il aurait été sûrement plus à son avantage il y a cinq ans Il faut dire que ce Clos Mathis d'André Ostertag est un 2007. Pour un vin de treize ans, il s'en sort pas si mal.



Olivier, notre hôte, avait préparé un navarin d'agneau, un plat parfaitement de saison, autant pour la viande que pour les légumes. Vous remarquerez encore la présence de petits pois. Serait-ce l'influence de Cyril Lignac qui réussit à en mettre quasiment dans toutes ses recettes ? En tout cas, c'est très (très) bon : cela fait du bien parfois de revenir aux grands classiques de la cuisine. Surtout lorsque vous passez votre temps à explorer les chemins de traverse.
Je ne parlerais du vin servi sur LPV, puisqu'Olivier a choisi une cuvée que je commercialise. Mais je peux vous dire que je ne l'ai pas du tout reconnu, et que je n'aurais jamais deviné le millésime et la région.



Nous passons directement au dessert sans passer par la case fromage, et c'est très bien ainsi, car il est copieux. Difficile de donner un titre à ma dernière création.Allez, on va appeler ça "Hommage au printemps". On y trouve une mousse au persil, un granité à la livèche, un sorbet à l'oseille, un crémeux d'avocat au citron vert, des mini-meringues à la stevia et au citron, des petits pois, de la rhubarbe, des tiges des fenouil, des bébés courgettes, de la mâche, du citron confit, une vinaigrette au miel et aux agrumes, du cerfeuil ... et de la poudre de petits pois. Le plus étonnant, c'est que c'est d'une grande cohérence, et même pas bizarre (en tout cas, à peine). Les agrumes dominent, avec une mosaïque de saveurs végétales et de nombreux textures. On ne sait ce que la prochaine bouchée réservera...



Le Riesling Kabinett 2012 du Dr Thanisch (enfin de sa veuve) se marie au-delà de toutes mes espérances avec ce dessert. C'en est une forme de clone liquide qui non seulement rentre en fusion totale, mais pousse encore plus loin les curseurs de la fraîcheur et l'acidité, avec une pureté cristalline bouleversante. Pour résumer ... ça déchire !



Formatés par deux mois de consignes gouvernementales, nous avons résisté à la tentation de nous étreindre. Cela n'a pas affecté le bonheur totale de se retrouver. Ce que ça fait du bien d'échanger et de festoyer ensemble. Ça devrait être obligatoire et remboursé par la sécurité sociale. Prochaine rencontre de la bande le 21 juin. J'ai hâte, comme dirait l'ami Stéphane ;-)

Eric
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29 Mai 2020 10:54 #1

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Réponse de KosTa74 sur le sujet L'Homme, cet animal social

Le dessert peut vendre du rêve avec tous les ingrédients qu'il y a dedans ...:woohoo:

Curieux de savoir s'il y a un goût qui se démarque ou si le tout se fond harmonieusement ensemble ...

Recette tirée de quelque part ou mariage qui est venu comme ça ?

Romain
29 Mai 2020 12:26 #2

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Réponse de Frisette sur le sujet L'Homme, cet animal social

Ton dessert, ça me fait penser un peu à un Gargouillou monochrome.

Flo (Florian) LPV Forez
29 Mai 2020 12:34 #3

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social

Recette tirée de quelque part ou mariage qui est venu comme ça ?

Inspiré d'un dessert mangé chez AT à Paris : oseille /livèche/avocat



Ton dessert, ça me fait penser un peu à un Gargouillou monochrome.

Il y a de ça ;) J'avais envisagé à un moment de rajouter de la fraise ou de la framboise. Et puis je me suis dit "non, que du vert".

Eric
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29 Mai 2020 13:36 #4

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Réponse de hyllos sur le sujet L'Homme, cet animal social

Le dessert m'impressionne énormément. Bravo !

Site perso (non commercial) www.wineops.fi/?page...
29 Mai 2020 13:42 #5

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Réponse de Eric B sur le sujet La recette du "gargouillou vert"

Voici la liste des différentes préparations dans l'ordre où il faut les préparer.

Sorbet à l'oseille

Faire un sirop avec

30 cl d'eau

200 g de sucre

100 g de glucose

2 g de poudre de caroube

Porter à ébullition, puis laisser refroidir une nuit au frigo.

Le lendemain, le placer dans un mixer avec une trentaine de feuilles d'oseille et 3 g de Vitamine C (acide ascorbique). Mxer longuement. Puis placer en sorbetière.

Poudre de petis pois

Faire blanchir trois minutes 300 g de petits pois dans de l'eau additionné d'une cuillère à café de bicarbonate de soude. Les mettre dans une passoire et les refroidir à l'eau courante. Puis les étaler sur une plaque et les enfouner environ 6 h à 80 °C. A la cinquième heure, ajouter une branche d'estragon pour qu'elle sèche également. Ouvrez de temps en temps pour laisser s'échapper l'humidité.

Mixer les petits pois secs et l'estragon avec 30 g de sucre et 2 g de sel. Tamiser et placer dans une boîte hermétique.

Meringues au citron et à la stevia

La stévia que j'utilise est à base de feuilles de mon jardin qui ont séché au four. Rien à voir avec la poudre blanche purifiée que l'on trouve en supermarché. Si vous n'en avez pas, remplacez-la par du thé Matcha. Si vous n'en avez pas, par de la poudre de petits pois, tiens.... Mais dans ce dernier cas, ça veut dire que vous ne pourrez pas faire cuire vos meringues en même temps que vos petits pois.

Il faut :

2 blancs d'oeuf

70 g de sucre

3 pincées de poudre de stévia

4 gouttes d'huile essentielle de citron (ou le zeste d'un citron bio)

Battre les blancs avec 1/3 du sucre. Rajouter le deuxième tiers à mi-parcours et le troisième lorsque les blancs sont montés. Ajouter la stévia et le citron.Mélanger.Mettre en poche avec une douille unie de 5 mm de diamètre. Et faire des petites meringues sur une plaque recouverte de papier sulfurisé. Faire cuire 2 h à 80 °C.

Granité à la livèche

Faire blanchir 30 secondes un petit bouquet de livèche. Le passer rapidement dans l'eau glacée. Faire tiédir 30 cl de lait fermenté (ou de yaourt) pour faire fondre 70 g de sucre. Puis mixer fortementavec la livèche essorée. Filtrer avec une passoire fine et placer dans un bac plat au congélateur. Gratter régulièrement dans les heures qui suivent la prise en glace pour faire des paillettes.

Mousse au persil

Porter à frémissement

25 cl de crème liquide

15 cl de lait

80 g de sucre

1 petit bouquet de persil

2 gouttes d'huile essentielle de citron

Puis laisser tiédir 1 h. Mixer, puis filtrer et placer en siphon avec une cartouche Agiter et mettre au frais dès que possible.

Citrons confits

Découper deux citrons comme lorsque vous enlevez les segments d'un agrume. Couper les extrêmités, vous posez le citron sur l'une de ses bases plates, et ôter l'écorce et la peau blanchâtre en même temps (ne pas jeter !). Puis récupérer les segments en ôtant les pépins, mais aussi le jus (penser à bien presser la membrane résiduelle car elle contient pas mal).

Ôter également la membrane accrochée aux morceaux d'écorces. Blanchissez ces derniers 3 fois (départ eau froide). Enlever le ziste au couteau qui se retire facilement. Puis couper les zestes en petite brunoise et mettez-les dans une casserole avec le jus, les segments, 50 g de sucre et 3 g de sel, et de l'eau à hauteur. Faire cuire doucement 25 mn sans couvrir (surveiller.

Mousse d'avocat au citron vert

Mixer un avocat avec 5 cl de lait concentré, 5 cl de jus de citron vert et le zeste du même citron. Ajouter éventuellement un peu d'eau pour assouplir.Mettre en poche à douille (5 mm).

"Jardinière de légumes"

Elle est composée de :

150 g de petits pois blanchis 4 mn à l'eau bouillante

1 avocat coupé en brunoise

2 très petites courgettes taillées en brunoise

de la moelle de tige de fenouil taillée en brunoise (remplace par fenouil tout court)

2 cuill à soupe de citron confit

1 cuill à soupe d'huile d'olive fruité vert

1 cuill à soupe de sirop d'agave

Bien mélanger. Placer au frais.

Mâche en vinaigrette

Faire une vinaigrette avec

5 cl d'huile d'olive verte

2 cl de jus de yuzu (ou citron)

1 cuill à café de miel

La mélanger avec quelques poignées de mâche

Montage

Mettre de la mousse de persil au fond de l'assiette.Poser dessus de la jardinière. Placer ici et là quelques merinues et points de crème d'avocat. Recouvrir (pas totalement) de granité. Déposer une quenelle de sorber à l'oseille. Entourer le tout de mâche. Saupoudrer de poudre de petits pois (je n'ai rien dû oublier...).

Eric
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02 Jui 2020 07:13 #6

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)



Après deux mois et demi d'intense frustration où je n'ai cuisiné que pour moi-même – et je ne peux pas dire que je me gâte particulièrement même si je me refuse à manger mauvais – cela relève de la nécessité intérieure de mettre les petits plats dans les grands et de passer 2 jours aux fourneaux pour concocter un vrai repas qui réjouira des amis gastronomes. C'est long, fastidieux. Ça ne se passe pas toujours exactement comme vous le souhaiteriez. Mais c'est aussi excitant, trépidant, avec des brefs moments jubilatoires. Et surtout, vous vous sentez vivant comme jamais. Cela dit, non, je n'ai pas du tout envie d'être cuisinier professionnel : seule l'exploration culinaire m'intéresse. Et mon plus grand plaisir est de passer à table avec mes amis, de manger et boire avec eux, ce qui est difficilement envisageable au restaurant.



Lorsque j'avais lancé l'invitation à Patrick et Valérie, ils m'avaient demandé s'ils pouvaient apporter quelque chose. Je leur ai proposé de se charger du vin de l'apéro avec l'accompagnement de leur choix. Cela me donnerait plus de temps pour faire le reste du repas. L'accompagnement s'est avéré nettement plus travaillé que ce que je pouvais imaginer puisqu'il était composé de trois mises en bouche. Dans le sens des aiguilles d'une montre, il y a un fromage blanc aux herbes et noix, puis du fromage de chèvre / tomates confites / fruits secs et enfin du saumon mariné aux agrumes en feuille de brick (mangés dans l'ordre 3/1/2).

Et puis donc la bulle amenée par Patrick : un Champagne Augustine Brut de Paul Hazard (vallée de la Marne) composé de 45 % pinot noir, 30 % de pinot meunier et 25 % de chardonnay. Il a été conservé 5 ans en cave après son achat. Nous avons donc affaire à un champagne séveux/vineux aux bulles délicates, caressantes, rafraîchi et vivifié par le chardonnay qui n'a pas perdu de son peps, sur une aromatique de poire mûre et de fruits secs. C'est très bien équilibré, avec une finale tonique, finement crayeuse, donnant envie d'en boire une seconde gorgée, puis une troisième... Belle découverte !



Etait-ce lundi la "journée mondiale des verrines" sans que l'on m'ait averti ? Toujours est-il que voici la mienne : des crevettes sauvages prises en gelée, en compagnie de carottes, poireaux, pois gourmands et coriandre. Les crevettes ont été préalablement cuites à basse température (46.5 °C) pour conserver leur texture délicates. La gelée est un mix de bouillon thaï et de dashi puisqu'on y retrouve de la bonite séchée, du kombu, du crabe, de la crevette, des feuilles de combava, du mirin, de la coriandre, de la citronnelle, du gingembre et citron vert (très peu de chaque, ce qui fait que ça reste subtil et harmonieux)

Pour l'accompagner, un Mosel Riesling Wiltinger 2017 de Van Volxem. Ce n'est pas marqué "trocken" sur l'étiquette, mais ce vin devrait pouvoir rentrer dans cette catégorie, ayant 12 % d'alcool et a priori très peu de sucres résiduels. Le nez évoque les fruits exotiques, la citronnelle et l'écorce de mandarine. La bouche est tendue par un fil invisible – l'acidité n'est quasiment pas perceptible – avec une matière pure , aérienne, qui envahit le palais d'un voile de fraîcheur, toujours sur ces notes de citronnelle et de mandarine – un peu de pêche jaune, aussi. La finale savoureuse mêle l'astringence du pomélo à l'amer de la bigarade, et l'impression de croquer dans un ananas frais, le sucre en moins, avec une persistance sur la citronnelle.



Nous avons poursuivi avec un chaud froid de volaille, sucrine snackée et légumes printaniers. On ne le voit pas sur la photo, mais je versais ensuite un coulis de sucrine à l'oseille et à l'estragon d'un vert lumineux. Le chaud froid est une évocation d'enfance. Je me rappelle en avoir fait un lorsque j'étais ado en suivant une recette de Françoise Bernard. Ça devait être la première fois que j'utilisais de la gélatine. Celui-là est plus sophistiqué, puisque le coeur est composé de chair de poulet cuite à 62 °C, d'une mousseline de volaille à l'estragon, de citron confit et d'une brunoise de champignons de Paris mi-cuits. Puis il y a une "coque" à base de fond blanc de volaille et de gélatine, striée d'une "peinture végétale" à base de mâche, oseille et persil. Les oignons sauciers ont mijoté plusieurs heures dans un fond "brun" de volaille.

Nous avons d'abord bu un vin amené par Gilles, un Carignan blanc 2014 de Sainte-Lucie d'Aussou. La robe est or pâle. Le nez évoque le beurre frais (un côté bouton d'or), le citron confit et la craie humide. La bouche est tendue sans être raide, d'une grande fraîcheur aromatique et structurelle, sans le moindre signe d'évolution pour ce vin de six ans. La matière est dense et douce, avec une profondeur minérale. La finale mâchue mêle la craie au citron confit, avec une persistance sur le cédrat. Très joli vin !

Puis nous avons dégusté le vin prévu pour le plat, un Sancerre Chavignol 2017 du domaine Delaporte : la robe est un peu plus pâle. Le nez plus discret part également sur le citron, mais en version zeste, la pomme mûre et la Bergamote de Nancy. La bouche est plus élancée et tonique, tout en présentant paradoxalement une matière plus mûre et moelleuse.Mais rapidement, le terroir de Chavignol prend le dessus, et le vin se transforme en "jus de cailloux". Je ne m'attendais pas une telle expression du minéral sur le "petit vin" du domaine. La finale est un hymne au pomelo, autant dans son amertume/astringence que par son aromatique. C'est gourmand et juteux, très frais. Que du bonheur. Pour ne rien gâter, l'accord avec le plat est très réussi.



Ceux qui me suivent réguilièrement reconnaîtront peut-être la porcetta que j'avais servie en décembre dernier. C'est normal : c'est la même. Je l'avais faite avec une poitrine entière de 2.5 kg. J'avais donc un reste que j'avais mis sous-vide au congélateur. Je me suis contentée de la décongeler, de la saupoudrer de la chapelure aux olives noires que j'avais faite à l'époque (également conservée sous-vide) avec en plus un peu de sucre rapadura. Je l'ai passée sous le grill à 275 °C. Elle est accompagné de dés d'aubergines cuits au four et d'un jus de porc réduit aux herbes que j'ai mijoté la veille. Pour finir, j'ai fumé à l'instant chaque assiette avec des aiguilles de sapin pour avoir une petite touche résineuse.

J'ai choisi de servir un vin italien, histoire de faire un accord "local" : c'est un Langhe Freisa 2018 de Giacomo Fenocchio. Je l'avais trouvé fermé et un peu dur à l'ouverture, ce qui lui a valu quelques heures de carafe. La robe est grenat profond. Le nez est dominé par le cerise rouge, complétee par la fraise confite, le poivre et la terre fraîchement retournée La bouche est fraîche, tonique, avec une matière juteuse, fruitée, mais qui a toujours une petite raideur de tanins limitant un peu le plaisir. Avec le gras de la poitrine, ceux-ci se fondent et ça va tout de suite mieux. Le côté austère de l'olive noire et de l'aubergine font ressortir encore plus le fruit. Un mariage bénéfique pour le vin, et qui ne nuit pas au plat.



La transition du salé vert le sucré m'inspire ces plats hybrides associant fromage et fruit. Le convive perd un peu ses repères, et ce n'est pas pour me déplaire. D'autant qu'au final, la tablée est toujours unanime. La première photo montre ce qu'il y en dessous de l'émulsion de tomme de brebis : des cerises bigarreau dénoyautées et cuites juste deux minutes pour éviter qu'elles ne se dégradent, saupoudrées d'un peu de sucre et de paprika fumé et arrosées d'un trait de jus de citron. Les bols sont servis comme sur la photo du milieu, avec de la tomme de brebis rapée à l'instant sur l'émulsion. Puis je verse alors le coulis de cerises, aromatisé au cacao et au paprika fumé. J'ai fait le choix de ne pas servir de boisson avec, jugeant que le contenu du bol se suffisait à lui-même.



Le vrai dessert est composé de fraises, de citron confit, de palet breton au citron, de meringues à la fraises, d'une glace au basilic et d'un coulis de fraises. Il y a du croquant, du fondant, du croustillant, du fruité, de l'acidulé... avec des sensations différentes selon ce que vous avez dans votre petite cuillère.

Je ne commenterai pas le vin servi sur LPV ; je le commercialise (même si c'est dans ce cas précis un millésime un peu plus ancien).



Pour terminer le repas, j'ai préparé un petit hommage à l'After Eight, avec des petits pots en chocolat contenant une mousse cacao/menthe selon la technique d'Hervé This (sans crème, ni beurre, ni oeuf).Léger et rafraîchissant !

Ce genre de moment nous montre après coup à quel point il pouvait nous manquer lors du confinement. On en a envie de plein d'autres. Ca tombe bien : je recommence avec d'autres amis dans un peu plus d'une semaine...

Eric
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04 Jui 2020 18:48 #7

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Réponse de Fredimen sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

Eric, une question me taraude tel le ver dans un vieux meuble ; si je porte de vin de l'apéro, tu peux cuisiner stp ? (tu)
04 Jui 2020 19:03 #8

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Réponse de didierv sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

C'est très joliment présenté Eric.
Apétissant

Didier
04 Jui 2020 19:18 #9

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

Fredimen écrit: Eric, une question me taraude tel le ver dans un vieux meuble ; si je porte de vin de l'apéro, tu peux cuisiner stp ? (tu)


Oui, avec plaisir :)

Eric
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04 Jui 2020 19:30 #10

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Réponse de Fredimen sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

Y'a un truc à creuser là :)
04 Jui 2020 19:36 #11

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Réponse de Delphinette sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

Ta recette de sorbet n'est pas équilibrée en extrait sec tu as du avoir du mal à le faire durcir en le turbinant .

I feel a supersonic give me gin and tonic...
04 Jui 2020 21:38 #12

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social (la suite)

Et pourtant non.

Eric
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05 Jui 2020 05:27 #13

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social (suite de la la suite)


J'avais décalé ma semaine de travail d'une journée (dimanche -> jeudi) pour avoir le vendredi et le samedi pour préparer le repas du dimanche suivant. Le menu n'est pourtant pas à rallonge, mais il fourmille de plein de petits détails qui demandent du temps, beaucoup de temps. On me dira que je n'ai qu'à faire plus simple. Eh bien non, ce n'est pas envisageable si je veux embarquer mes invités dans un voyage sensoriel dont ils ressortent avec plein de petites étoiles dans les yeux. Il faut donc aller de surprise en surprise, avec des sensations inattendues, des mets et des vins qui se transcendent mutuellement, le tout dans un crescendo qui doit faire que vous ne regrettez pas le plat précédent. Pour ce repas, j'ai poussé le détail jusqu'à faire le pain – des ciabattas aux graines – et les pralines servies avec le café. Faut ce qu'il faut...

Mes invités du jour étaient des membres du club oenophile de Saint-Yrieix que j'anime chaque mois depuis bientôt 8 ans. Je ne les avais pas vu depuis le 12 mars et ils commençaient à me manquer. Ce repas était l'occasion de les revoir et de leur faire découvrir mon univers culinaire. Allez, on embarque pour le voyage !...



J'avais fait plusieurs fois une entrée intitulée "toute l'Italie dans une assiette". J'ai poussé le curseur encore plus loin en miniaturisant le plat qui devient "toute l'Italie dans une boulette". On retrouve quasiment tous les ingrédients du plat d'origine en une seule bouchée, générant une cascade de saveurs qui ne semble plus pouvoir s'arrêter : courgette, basilic, tomate et aubergine séchées; olive verte et noire, parmesan, pignon de pin, anchois, jambon San Daniele, bresaola, origan... L'autre "boulette" est une tomate cerise (non cuite) enrobée d'un caramel croustillant recouvert de graines de sésame blond, de sésame noir, de chanvre, et des noisettes grillées concassées. Ce qui est intéressant, c'est le contraste entre le juteux de la tomate et le croquant du caramel, le sucré de ce dernier et le salé des graines.

Une bulle aurait été difficile à accorder avec ces mises en bouche. J'ai donc servi un rosé Sous les micocouliers 2017 du Mas de la Séranne, contenant pas mal de mourvèdre et complété par du cinsault. Sa vinosité et ses notes épicées/corsées avaient le répondant nécessaire.



L'une de mes obsessions actuelles – plutôt tendance, il est vrai – est le travail sur les légumes : leur donner le rôle principal dans un plat et faire totalement oublier l'absence de viande ou de poisson, finalement pas si incontournables que ça.

Cette variation sur le champignon de Paris peut être considérée comme mon "plat signature". Elle est pour moi ce qui symbolise le mieux mon travail : prendre un champignon à 4.50 € le kg et le rendre aussi excitant qu'une morille ou une truffe. Il faut pour cela extraire tout en douceur, puis réduire, sécher, filtrer, et refiltrer. Il est nécessaire de s'y prendre deux jours à l'avance, mais cela en vaut vraiment la peine. C'était la 4ème fois que je le faisais, et je suis toujours autant émerveillé du résultat final (la recette est entièrement expliquée ICI ). Il y a de l'onctueux, du moelleux, du croustillant, du croquant, du grillé, de l'acide... avec un étonnement à chaque bouchée.

L'idéal, c'est un vieux Chablis qui "mousseronne". Mais bon, je n'en ai pas tant que ça en stock. J'ai donc servi un vin blanx arménien : Voskehat 2012 d'Armas Estate. Il "mousseronne" comme un Chablis, avec des notes de citron confit, de miel et de sous-bois d'automne. La bouche allie rondeur et fraîcheur, avec une grande douceur tactile (comme l'espuma de champignon, tiens). L'accord avec le plat est superbe.



Ce vrai-faux risotto au fenouil peut aussi être considéré comme un "plat signature" si ce n'est qu'il ne cesse d'évoluer avec le temps. Nous en sommes à la version n°4 qui diffère en deux points avec les précédentes :

Il n'y a carrément plus du tout de riz dans la recette : la crème qui enrobe les "grains" de fenouil n'est composée que de fenouil, de lait et de crème liquide.

Une glace fait son apparition, créant un chaud-froid intéressant : c'est une crème glacée (lait/crème/jaunes d'oeuf) parfumée aux graines de fenouil torréfiées.

J'ai ressorti un vin qui m'avait enthousiasmé il y a cinq ans. J'en avais mis quelques unes de côté : c'est un Côtes de Provence Nowatt 2012 de Dupéré-Barrera (Rolle et Ugni blanc). On retrouve la grande tension qu'il avait dans sa jeunesse, mais dans un style plus évanescent. Le vin s'est épuré en gardant sa trame minérale. Le plat fait ressortir ses notes naturelles anisées. On retrouve aussi de la fleur de tilleul et du zeste d'agrume. L'accord avec le plat est parfait.



J'aurais pu continuer avec un plat autour du chou-fleur, de la carotte ou de la pomme de terre, mais je me suis dit que tout de même, il fallait passer un moment aux choses sérieuses avec cet agneau en trois cuissons : Les côtelettes cuites rosées, la poitrine aux épices cuite 45 heures (sic) à 75 °C puis passée sous le grill, et l'épaule (dans le rouleau) cuite 7 h à 120 °C. Au centre, une courgette de nice dorée et fondante.

J'ai découvert le vin en même temps que mes invités. Je n'en avais acheté qu'une bouteille par curiosité chez un caviste bordelais : c'est un Nebbbiolo 2013 de La Cetto (Mexique). J'avais goûté plusieurs fois leur petite syrah qui est assez spectaculaire dans son genre (sans être trop à mon goût) mais le cépage italien m'intriguait. Je n'ai pas été déçu : on a bien le fruit intense et la fraîcheur du nebbiolo, tout en ayant une matière plus mure et concentrée. Jeune, le bois devait être bien présent, mais avec le temps il s'est bien fondu. L'ensemble est vraiment cohérent et n'a que peu d'équivalent dans le monde du vin (je ne veux pas dire que c'est le meilleur, mais que je ne connais aucun vin qui lui ressemble). Il allait aussi bien avec la côtelette rosée que la poitrine longuement confite.



Cela fait plusieurs années que j'ai arrêté le plateau de fromages – trop compliqué en terme d'accords – pour le remplacer par un "hybride" qui tient autant du fromage que du dessert. Cela permet de faire une transition en douceur entre salé et sucré, le plat conjuguant (sans excès) les deux. Cette fois, j'ai marié un sorbet aux poires (maison, très peu sucré) avec de la fourme d'Ambert que l'on retrouve aussi en émulsion dans le cornet.

Je les ai mariés avec un Vouvray moelleux 1997 du domaine Freslier qui est relativement peu sucré et très frais, sur une aromatique de coing confit et d'écorce d'orange. Il n'écrasait pas du tout les différents éléments du plat tout en apportant un joli contrepoint sucré/acide au salé/gras du fromage et de l'émulsion.



Pour finir, un dessert autour de l'abricot et de la pistache. Comme il était difficile de trouver des abricots qui n'ont pas la dureté de balles de golf, je me suis rabattu sur des abricots secs que j'ai réhydratés avec du nectar d'abricot et du jus d'agrumes. La recette du gâteau à la pistache, à l'huile d'olive et aux agrumes est disponible ICI. La glace ultra-moelleuse à la pistache qui a fondu à vitesse grand V est à base de lait concentré sucré (ça ne fait pas de cristaux, mais ça ne tient pas au chaud...).

Je l'ai accompagné avec un Monbazillac cuvée Madame 2004 du château Tirecul la Gravière. C'est un millésime plutôt faible pour cette cuvée, mais il est tout de même plus concentrée que 99 % des Sauternes des meilleures années. L'intensité et l'onctuosité en bouche sont assez impressionnantes tout en étant équilibrées par une belle acidité. Comme l'aromatique est très marmelade d'abricot et agrumes confits, cela matche très bien avec le dessert.



La photo est de l'année dernière, mais j'ai refait des "capsules nespresso", fourrées à la ganache au café (donc juste la version "noire". Mais j'ai encore du chocolat Ruby pour faire des roses...).

"Un feu d'artifices de saveurs" a dit Patrick. "Un émerveillement des papilles" a ajouté Claudine. Qu'écrire de plus, à part mission remplie :)

Eric
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18 Jui 2020 19:43 #14

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Réponse de Fredimen sur le sujet L'Homme, cet animal social (suite de la la suite)

Je suis bouche béé, mon invitation a du se perdre, encore une fois.

Question Eric ; pour toi la cuvée Madame à attendre, où à boire ? J'en ai une en cave.
18 Jui 2020 20:44 #15

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Ça peut tenir encore 30 ans sans problème.

Eric
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18 Jui 2020 20:46 #16

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Réponse de Fredimen sur le sujet L'Homme, cet animal social (suite de la la suite)

Merci pour ton retour.

Et félicitations pour ces merveilleux accords.
18 Jui 2020 21:19 #17

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Réponse de Eric B sur le sujet L'Homme, cet animal social (version 2021)



Notre bande d'amoureux du vin et de la gastronomie s'est réunie pour la première fois depuis fin octobre : quelques heures avant le début du confinement, nous avions fait alors un superbe repas chez Philippe Redon . Cette fois, nous avons repris nos habitudes : chacun contribue en apportant un vin et un plat (en se mettant d'accord au préalable sur qui fait quoi – c'est pas l'anarchie). Et nous avions un invité qui a eu le droit d'arriver les mains vides : Philippe Redon, qui nous a maintes fois régalés.

Les fois précédentes, je m'étais chargé des desserts. Cette fois-ci, j'ai voulu changer en m'occupant de l'apéro. C'est une sorte d'hommage à la coupelle de fruits secs grillés/salés. Mais aussi une occasion d'utiliser un moule en silicone que j'ai acheté il y a deux mois, permettant de faire des trompe l'oeil. Il y a donc des amandes non émondées et grillées/fumées. Des amandes émondées et grillées puis recouvertes d'une fine chapelure croustillante et aromatisée (qui tient grâce à du blanc d'oeuf). Et deux fausses amandes : du foie gras fumé au bois de cerisier et aromatisé avec du gras de poitrine fumée (et recouvert d'une fine poudre de noisette et de jambon cru déshydraté/grillé) ; et un "biscuit moelleux" à base de brioche toastée, de crème fraîche, d'oeuf, de noisettes grillée et de jambon cru déshydraté/grillé. L"idée est de surprendre le dégustateur à chaque bouchée. Il ne sait pas à l'avance le goût et le texture qu'aura cette amande, qu'elle soit vraie ou fausse.

C'était l'occasion de goûter la troisième cuvée de Follet-Ramillon que j'avais achetée. Après Les Pinots et Harmonie, voici Terroirs. C'est un assemblage des trois cépages classiques de Champagne, provenant de différents secteurs du domaine. C'est une base 2013 avec des vins de réserve de 2011 et 2012. Il est élevé près de six ans sur lattes.

La robe est dorée, avec de très fines bulles pas envahissantes. Le nez est fin et complexe, sur les fruits blancs rôtis au beurre, la bergamote, les fruits secs grillées et la viennoiserie qui sort du four. La bouche est ample, aérienne, très fraîche, avec une belle tension qui ne vous lâche plus, et une matière fine, élégante, aux bulles délicates. Si le nom n'avait pas été déjà pris, cette cuvée aurait pu s'appeler Harmonie. La finale fraîche tonique, mêlant harmonieusement acidité, amertume et astringence, sur le citron confit, la craie humide et le pomelo, confirme mes bonnes impressions. C'est pour moi la meilleure des trois cuvées que j'ai pu boire. Elle a vraiment tout ce que j'aime dans un champagne. Je fais un tour rapide sur le site du producteur pour voir le prix de celle-ci : 18.50 €. Simplement hallucinant...



Nous poursuivons avec un double carpaccio de Saint-Jacques préparé par Patrick : à gauche, à la truffe râpée à la dernière minute ; à droite, agrémenté d'une "vinaigrette" aux fruits de la passion et à l'huile d'olive, et de fruits secs grillés. Une petite pincée de piment d'Espelette, également, qui reste (heureusement) d'une grande discrétion. La truffe, délicate, respecte plus le goût intrinsèque de la noix, sa sucrosité. Avec le fruit de la passion et les fruits secs, la Saint-Jacques est plus limitée à sa texture sensuelle, ce qui est déjà très bien. Je dirais même qu'au final, mon coeur penche plus sur la version de droite.



Le vin servi a une robe jaune paille. Le nez est subtil et profond, sur la pomme tapée, le coing, la frangipane, mais aussi la truffe, la craie humide, les épices. La bouche est à la fois ample et élancée, déployant une matière mûre au toucher moelleux, et possédant une fraîcheur, évitant de recourir à une acidité saillante.La finale possède une fine mâche crayeuse, gourmande, dominée par le coing confit – et une touche de pomme chaude. Mais le plus impressionnant, c'est qu'une fois le vin avalé – ou recraché – arrive un citron crépitant sur toute la langue, rappelant la poudre magique de votre enfance (en tout cas la mienne). J'ai rarement ressenti cela aussi intensément sur un vin. Tout le monde part sur un chenin de Loire. Je propose Huet. D'autres un Anjou, comme un Savennières. C'est bien un Vouvray sec de Huet : Clos du Bourg 2010.



Puis Olivier C, notre hôte, sort du four une épaule d'agneau de 14 h (7 h à 80 °C, 7 h à 120 °C) accompagnée d'un excellent jus à base d'un bouillon de pot au feu préalablement réalisé (et congelé), enrichi d'une partie des légumes de cuisson (mixés avec). La purée de pommes de terre est également irréprochable. Simplicité apparente d'une grande efficacité.



Il nous sert un vin à la robe grenat translucide. Le nez est fin, sur les fruits rouges confits, le laurier et les épices douces. La bouche est ronde, ample, déroulant une matière finement veloutée, au fruit pur, droit, et d'une grande fraîcheur aromatique (menthol, poivre cubèbe). La finale est riche et savoureuse, bien épicée, tout en gardant ce menthol en final, complété par le poivre. Je partais sur un Rhône Sud. Perdu, c'est un Languedoc Pézenas que j'avais offert à Olivier il y a 2-3 ans : Terres mêlées 2015 de la Font des Ormes.



Nous passons aux fromages amenés par Stéphane : gouda nature, gouda au cumin et mimolette



La robe est orangée et trouble. Le nez est frais et très expressif, sur l'abricot, la rose, la fleur d'oranger et les épices de Noël. La bouche est éclatante de fraîcheur – impression renforcée par un léger perlant – avec une matière pulpeuse, gourmande, au fruit intense. L'aromatique monte encore d'un cran en finale, soulignée par de nobles amers, avec une longue persistance sur la rose et les épices. J'aime beaucoup, et l'accord avec les fromages est réussi. Au départ, je penchais pour un muscat, mais finalement, le gewurztraminer me paraît plus évident. C'est en effet un Gewurztraminer de macération sec 2015 de Pierre Frick.




Pour finir, un gâteau noisette/mandarine amené par Olivier R.




Voilà à quoi il ressemble une fois coupé. Il était franchement extra, avec un praliné tout doux une mandarine affirmée, pas trop sucrée. Et l'accord avec le vin était magnifique. On l'aurait cru fait exprès pour.



Le vin, en direct de la cave d'Olivier R, a une robe hallucinante, entre le vermillon, l'or et le cuivre. Le nez est à la fois intense et délicat, sur le caramel, l'orange confie, la figue sèche, la noisette... La bouche vous saisit par sa fraîcheur dès l'attaque pour gagner ensuite en ampleur, déployant une matière voluptueuse d'une grande pureté aromatique. On sent que c'est vieux, mais c'est en même temps d'une jeunesse éblouissante. La finale est encore plus décoiffante, dominé par l'écorce d'orange confite que vous avez l'impression de croquer, avec un persitance sur le praliné et les épices. Quel bouquet final ! J'avoue que cette fraîcheur m'a fait penser à un madère. Et comme Olivier a pas mal de vins étrangers liquoreux bizarres dans sa cave, j'imaginais une appellation improbable. Eh bien pas du tout : c'est un Sauternes 1er GCC 1979 du Château la Tour Blanche. Respect !



En after, il y avait un chocolat blanc croustillant au thé matcha et quatre agrumes fait par vore serviteur (recette ICI ). La plaquette a vécu 10 minutes...

Eh bien, c'était tout pour aujourd'hui. Chacun a pu rejoindre ses pénates avant 18 h. J'espère que nous pourrons renouveler bientôt un tel moment, car on voit bien à quel point ça nous avait manqué !

Eric
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24 Jan 2021 19:36 #18

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Réponse de Jean-Bernard sur le sujet L'Homme, cet animal social (version 2021)

Chapeau pour le visuel de ton entrée!

JB
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24 Jan 2021 20:25 #19

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