Bonjour,
Nous avons récemment fait une dégustation de Bordeaux 2011. Les vins ont été remplis environ 1,5 à 2 heures à l'avance dans de petites bouteilles, et ensuite dégustés à l'aveugle. On savait quels vins étaient inclus, il n'y avait pas de tri thématique, l'ordre était complètement aléatoire.
Les vins étaient tous d'un niveau bon à très bon, tous d'une qualité assez homogène, sans véritable abaissement ou augmentation. Les vins sont assez tanniques, bien que leur extraction soit plutôt douce à mon avis. Les tanins sont mûrs, ni amers ni verts, mais séchants.
Il y a beaucoup d’anthocyanines et les vins sont intensément colorés. Par rapport aux autres années, les vins ont peu d'extrait et donc pas de réelle impression de douceur. Le fruit est à peine mûr et peu expressif, et je pense aussi aromatiquement peu présent. L'arôme des poivrons verts (isobutylméthoxypyrazine), suggérant un manque de maturité dans le Cabernet, mais non présent de façon notable.
* Chateau Beau-Sejour Becot - Saint-Émilion Premier Grand Cru Classé - 2011:
14vol%; 70% Merlot, 25% Cabernet Franc, 5% Cabernet Sauvignon
Rouge foncé avec un peu de violet.
Au nez délicatement dosé, cassis, mûre, un peu de griotte. Tabac, cuir, terre et bois brûlé. Le fruit est frais et clair, globalement attrayant.
Le 2ème jour sans fruit, renfermé, seulement genièvre et herbes séchées (clou de girofle, laurier).
Acidité fraîche. Corps moyen, assez doucement extrait, sec et pas particulièrement riche en extraits. Tanins plutôt doux, légèrement acidulés au début, plutôt croquants à l'air. Griotte, groseille, une touche de genièvre. Arômes subtils de torréfaction foncée (chocolat noir, café). Plutôt court, pas très profond, avec de l’air un peu plus long et légèrement en éventail.
Complètement renfermé le 2ème jour, revêche et acidulé. Rien à identifier derrière le mur de tanin.
très bon
Aromatiquement pas très complexe et pas très clair. Attrayant en termes d'intensité, mais encore assez renfermé. Les tanins un peu plus grossiers que ces du vin suivant de Saint-Emilion:
* Château Beauséjour - Héritiers Duffau-Lagarrosse - Saint-Émilion Premier Grand Cru Classé - 2011:
14.5vol%; 80 % Merlot, 20 % Cabernet Franc
Rouge foncé avec un peu de violet.
Au nez très réservé /renfermé. Fruits rouges avec griotte et groseille, floral et menthe. Poussière, chocolat au lait et caramel.
Une certaine délicatesse, un peu plus ouvert le 2ème jour.
En bouche, une acidité vive, parait un peu immature. Corps moyen, faible volume, extrait moyen. Rien ne s'oppose à l'acidité et aux tanins fins et séchants, déséquilibré, aigrelet. Groseille et griotte à peine mûre. Minimalement plus ouvert le 2ème jour, l'acidité mieux intégrée, le fruit fin et charmant mais aussi peu présent. Tanins très fins et doux, mais en abondance.
renfermé
Le vin semble extrêmement jeune, comme s'il venait d'être mis en bouteille. Toujours de couleur violette et aucun signe de maturité. Actuellement très refermé et pour moi pas à évaluer.
Par rapport au Beau-Séjour Bécot, les tanins sont plus fins, plus d’acidité et celle plus fraîche, une moindre maturité.
Le vin suivant provient de la même équipe (Thienpont / Derenoncourt) comme le HDL. Les deux vins avaient beaucoup de dépôt très fin.
* Château Larcis Ducasse - Saint-Émilion Grand Cru Classé - 2011:
14.5vol%; 85 % Merlot, 15 % Cabernet Franc
Rouge foncé avec un peu de violet.
Au nez, cerise fraîche, fruit rouge, en plus quelques mûres, un peu de menthe. Le bois est bien dosé, café, tabac, fumée, caramel, quelques toasts brûlés. Impression générale plutôt fraîche, intensité et précision agréables.
Acidité douce avec fraîcheur. Corps moyen à fort, un peu plus riche en extrait. Les tanins souples et l'acidité donnent au vin une bonne structure, il paraît doux et revigoré. Fruit absolument charmant (cassis, mûre fraîche), en plus café et chocolat. Longueur moyenne, semble assez renfermé.
probablement très bon
Les tanins sont très fins et doux, très similaires au HDL, je pense qu'on remarque la même équipe. Le vin n'est pas très expressif, peu de fruit. Les tanins sont présents et légèrement séchants, manquant ainsi l'impression de profondeur fait également défaut ici (comme le HDL).
Les trois vins de Saint-Emilion ont une acidité assez fraîche. 2011 le Merlot avait un pH moyen très bas de 3,2 (en comparaison, dans les cinq dernières années environ 3,4). Par conséquent, le fruit est frais, rouge et à peine mûr. Les trois vins semblaient encore très jeunes, ce qui se remarque également à leur couleur violette. Je me suis demandé si cela ne pouvait pas aussi être un effet du Merlot. Le
vin suivant, cependant, est également composé principalement de merlot et ne montre pas cela.
* Château Montrose - La Dame de Montrose - Saint-Estèphe - 2011:
13vol%; Cabernet sauvignon: 28%, Merlot: 72%
Rouge grenat foncé.
Au nez groseille, sureau, myrtille, un peu végétal. En plus de tabac, de menthe et de chocolat au lait. Aromatiquement, je ne trouve pas cela si attrayant.
Acidité modérément fraîche en bouche, un peu plus mûre. Corps plus fort et riche en extraits. D'abord assez peu structuré, avec de l'air les tanins fins et légèrement croquants apparaissent et assurent une bonne structure et une impression de fraîcheur supplémentaire. Une certaine tension dans le vin, pas de caractère doux. Cèdre, conifère, épicé (girofle), un peu de cassis, chocolat noir.
Longueur moyenne.
Le 2ème jour, les tanins sont très présents, ont tendance à renfermer.
bon
Au niveau aromatique, le fruit diffère sensiblement des vins de Saint-Émilion, malgré les 72% de merlot. Pas douce non plus, mais avec tension et un peu de rusticité. Une certaine densité aromatique est présente, pas avec tellement de fruit, mais avec quelques arômes marqués de chaleur ou d'oxydation tertiaire.
* Château Grand-Puy-Lacoste - Pauillac - 2011:
13.5vol%; 78% Cabernet Sauvignon - 22% Merlot
Rouge grenat foncé.
Au nez impression masculine: cuir, menthe, tabac, cassis et un peu de bois brûlé. Avec de l'air aussi du caramel et du café, le nez devient assez multicouche et complexe.
Acidité douce, légèrement fraîche. Corps moyen à fort, riche en extraits. Des tanins fins, mûrs et délicatement extraits donnent une structure délicate et tendue. Beau fruit, charmant et clair (cassis, mûrier, mûre), cèdre, caramel et bois brûlé. Avec l'air, cela semble assez complexe.
Beau et limpide avec une bonne longueur.
très bon
Le vin donne l'impression d'avoir eu parmi les autres le plus de temps en barrique. Mais il est toujours en équilibre. Le vin semble encore très jeune, mais il est tout à fait accessible maintenant. Le vin suivant a également été élaboré avec la participation du consultant œnologique Eric Boissenot:
* Château Haut-Bages Liberal - Pauillac - 2011:
13vol%; 75 % cabernet sauvignon, 25 % merlot
Rouge grenat.
Au nez floral, rouge-fruité (groseille, cerise séchée), menthe, un peu de poussière et une note claire de mine de crayon. Avec des notes grillées à l'air (café).
Légère acidité et fraîcheur. Corps moyen, extrait délicatement, sec, extrait moyen. Tanins fins à grain fin, bonne structure. Aromatique agréable et clair, cassis et fruits rouges, plus cendre et mine de crayon. Caractère frais, léger, peu complexe, mais assez distinctif avec une bonne longueur. Renfermé le 2ème jour.
très bon
Facile à localiser à l'aveugle à Pauillac avec la note de mine de crayon frappante. Les deux vins se sont fait remarqués à la dégustation par leur élégance et leur équilibre. De nombreux vins n'ont pas réussi de créer actuellement une impression de profondeur et de complexité en raison de leurs tanins séchants; mais ce sont ces deux-là qui ont le mieux réussi. Le Grand-Puy-Lacoste a une présence plus puissante et masculine, est plus dense et plus substantiel, les tanins un peu plus croquants. Le Haut-Bages-Liberal est plus fin (aussi les tanins) et plus élégant, a une belle clarté.
J'ai aimé les deux, en ce moment je préférerais le HBL.
* Chateau Lagrange - Saint. Julien - 2011:
13vol%; 62% Cabernet Sauvignon, 32% Merlot, 6% Petit Verdot
Rouge grenat.
Au nez cèdre, tabac, menthe au nez. En plus cerise, groseille, plutôt rouge-fruité. Intensité agréable, frais et doux, très classique. Teinté légèrement plus chaude.
Acidité douce et légèrement fraîche. Corps plus léger à moyen, extrait assez doux, peu d'extrait, déjà légèrement dilué. Fruit attrayant, beau et clair (cassis, un peu de cerise) avec une maturité agréable. Aussi quelques herbes séchées et du clou de girofle. Peu de tanins séchants. Gagne un peu de longueur et d’'intensité, avec l'air, tend à être plutôt refermé.
Bon à très bon
Pas si facile à évaluer, actuellement pas très accessible, mais je ne fais pas vraiment confiance à ce vin pour avoir un meilleur avenir. Il est quand même un peu mince et présente également quelques arômes oxydés, que ce soit à cause du stress thermique de la vigne ou de la maturité. Je pense que la première hypothèse est plus probable, le bouchon était en parfait état.
* Château du Tertre - Margaux - 2011:
13vol%; 60% Cabernet Sauvignon, 20% Cabernet Franc, 10% Merlot and 10% Petit Verdot
Rouge grenat foncé.
Au nez quelque fruit mûr (mûrier) et pas mal de barrique grillée foncée (bois brûlé, cendre, caramel), n'a pas l'air si noble. Un peu végétal et un peu de la viande. Meilleur le 2ème jour, le bois plus intégré, pas d'arômes végétaux. Au lieu de cela de violette et de cerise.
Je l'aime bien.
Acidité plus douce et modérément fraîche. Corps plus fort, plus d'extrait, sec, douceur minimale dans le cœur. Les tanins sont attrayants, doux, mais aussi avec un certain croquant, bonne structure. Cassis mûr, cerise, mûre, assez intense et fruité. Beaucoup de barrique (café, cendre, chocolat). Longueur moyenne.
bon à très bon
Concernant le fruit, le vin n'est pas particulièrement mûr, mais plus mûr que tous les autres de la dégustation. Aussi assez riche en substance. Le premier jour, la barrique, qui ne semble pas si noble au nez, m'a un peu rappelé le Spätburgunder allemand avec ses notes végétales. Mais ceux-ci s'estompent, la barrique s'intègre mieux et la forte proportion de Petit Verdot ressort clairement avec des violettes et des cerises. Le vin est un peu plus grossier dans sa nature que la plupart des autres. A l'exception de La Dame de Montrose, les autres vins paraissent plus fins.
Quelle est donc mon impression générale maintenant? Les vins étaient agréables à boire, mais aucun d'entre eux n'était vraiment attrayant. Les vins ont très peu de fruit et n'ont pas tellement de substance que je pourrais penser, qu’il y a encore beaucoup de fruit en réserve. Mais l'utilisation du bois est très bien adaptée à ce manque de substance et de fruit, ils semblent équilibrés pour la plupart. Tous les vins semblent manquer de complexité, les tanins séchants leur enlevant longueur et profondeur. Je suis un peu inquiet de savoir si cela se rattrapera encore, et je doute un peu, qu'il y ait suffisamment de fruit avant que les tanins ne soient dégradés. J'ai préféré les deux Pauillac, mais le Larcis Ducasse me rend aussi un peu curieux de savoir comment il évoluera à l'avenir.
Le millésime est également marqué par des conditions climatiques extrêmes. Chaleur et débourrement précoce au cours de la première moitié de l'année, puis croissance et maturité ralenties par le froid et le manque de soleil de juillet. D'une part, on remarque, en flashant encore et encore, de la chaleur dans les arômes. D'autre part, on remarque le fruit frais, et surtout dans le Saint-Émilion, une acidité marquante due à la faible maturité. Dans la plupart des vins, j'ai aperçu un arôme de menthe, une note que je sens rarement, peut-être un effet du millésime. J'ai continué à déguster les vins tout au long de la semaine. Aucun ne s'est développé avantageusement. Le fruit a continué à reculer, les arômes étaient épicés-chauds, également légèrement oxydés et médicinaux. Les tanins peu charmants; courts, sans profondeur dans la structure.
La densité aromatique des vins est faible, les vins ne sont pas très expressifs. Avant et pendant la véraison, en juillet, le nombre d’heures d'ensoleillement a atteint le plus bas niveau record. Je suis enclin à utiliser cela comme une hypothèse pour l'origine.
Cheers -- Ion