Dépêche AFV en date du 01.04.2016.
C'est une découverte rarissime que vient de faire un conservateur de la Bibliothèque nationale en faisant des recherches sur l'art de vivre au 17e siècle. En effet, un manuscrit inconnu de Jean de La Fontaine, probablement une œuvre de jeunesse, a été découvert dans un livre d'apparence anodine oublié dans les kilomètres de rayon que compte le prestigieux établissement.
"Je lisais un ouvrage sur la question du vin dans la vie des Belges, vaste sujet s'il en est, lorsque m'est apparu ce billet écrit sur papier et plié en trois plis égaux. Je ne pensais pas y découvrir quelque chose de probant mais, derrière l'écriture appliquée, c'est bien une fable qui est apparue. Je me suis immédiatement entretenu de cette découverte avec les plus grands spécialistes de la question et le document a pu être identifié comme écrit par Jean de la Fontaine. C'est du moins que ce semblent valider les initiales JF qui paraphent le manuscrit.
Ce genre d'événement arrive rarement dans la vie des conservateurs ou des universitaires. La dernière découverte fut un fragment d'une partition inachevée de Mozart. La découverte de cette fable est d'autant plus exceptionnelle que l'on pensait tout savoir du célèbre poète" a confié l'heureux inventeur.
Le manuscrit, dont nous reproduisons ci dessous l'intégralité, est toujours en cours d'authentification.
Dans une basse-cour, diversement peuplée,
Paradait chaque jour le plus beau des poulets.
Assez régulièrement venait à disserter,
Ce fier et bon client, aimant se faire châtier.
Brillantes étaient ses plumes, charmant était son chant,
De l’aurore à la lune, allait, se pavanant.
Le farouche animal, de vin aimait parler,
Evoquant, sur la toile, flacons et belles soirées.
Il promettait le Graal lors de ses grands dîners,
Expliquant, non sans mal, le bon dans le mauvais.
Il connaissait les Grands et toutes leurs merveilles,
Et, contre compliment, bu toutes leurs bouteilles.
« De ce monde n’est point ! jugèrent les gens d’ici.
Et sa belle livrée n’est pas de nos habits !
Mais si son chant est doux et peut nourrir nos cœurs,
Qu’il reste parmi nous jusqu’à sa dernière heure ».
De lui, parlait le Paon. Et de sa vie passée.
A la cour des puissants s’invitait tous les jours.
Mais si chaque impétrant écoutait son discours,
Coqs et poulets bien vite en furent lassés.
Voyant en l’animal, un simple beau parleur,
Les châtelains sans mal le conviaient à bonheur.
Flagorneur à toute heure et flatteur à l’envi,
Pour son plus grand bonheur, bien vite fut admis.
Chantant leurs louanges contre quelque nectar,
Le Paon était aux anges entouré de guépards.
Nombreux voyaient en lui un simple roturier,
De ceux que l’on nourrit en se pinçant le nez.
Les petits, quant à eux, à temps se rendirent compte,
Que gestes et mots mielleux n’en faisaient pas un comte.
Lassés de ses paroles, de ses discours figés,
Ils prirent leur envol, le laissant étonné.
« Comment pourrais-je vivre, sans quiconque à flatter ?
N’y a-t-il donc personne qui veuille m’écouter ?
Moi Paon, qui ai tout vu, tout bu, tout entendu !
On me laisserait nu, seul avec mon vécu » ?
Perdu dans la basse-cour, les plumes toutes crottées,
Le Paon sentait le jour de sa mort arriver.
Ne pouvant s’y résoudre - et comme à l’habitude -
Alla chercher au foudre le goût d’un vin plus rude.
« Mieux vaut déclencher l’ire de tous mes congénères,
Plutôt que de mourir oublié de cette terre ».
Il ouvrit une bouteille, d’un âge fort avancé,
Lui trouvant mille merveilles bien qu’elle fut oxydée.
« Je tiens-là le flacon qui me rendra ma gloire » !
Sans question se poser, ni même cacher son fard,
Il se dit qu’en toute chose, lui seul prévalait,
Et que sa seule prose, prestige lui redonnerait.
Mais si les beaux parleurs sont parfois écoutés,
Orgueil et vanité finissent par lasser.
Il fit encore un temps manière d’illusion,
Mais le mal était fait, comme sa réputation.