Bonsoir !
Amour de Deutz 2000
C'était vendredi dernier l'anniversaire de mon épouse et je l'ai donc emmenée au restaurant "Chez les Anges" qui se situe avenue de la Tour-Maubourg dans le septième arrondissement de Paris, établissement qui permet d'apporter son vin contre un droit de bouchon de 20€ par bouteille. J'ai donc réservé pour nous deux, et j'ai apporté l'Amour de Deutz 2000 en question ainsi qu'un Léoville Las Cases 1999 qui est commenté dans la rubrique idoine. J'ai choisi ces deux vins car j'avais envie de les boire, pour faire plaisir à mon épouse, bien sûr, et aussi pur accompagner le menu que j'avais choisi qui est "le choix des Anges", un menu dégustation surprise mais dont on m'avait dévoilé quelques composantes afin d'aiguiller mon choix de vin. Ces commentaires sont retranscrits de mémoire, n'ayant pas pris de notes le soir même.
Nous arrivons donc le soir, les bouteilles sont déjà là depuis 14h, elles ont été ouvertes et goûtées par moi et le sommelier pour vérifier que tout allait bien, et ce fût le cas !
On nous installe à une petite table dans la veranda, il y fait bon mais pas trop chaud, il y a de l'espace entre nous et la table voisine, nous sommes bien. Arrivent de belles olives charnues, des petits radis et des bâtons de carotte crue, c'est "l'apéritif" alors que le champagne fait son chemin jusqu'à nous. Cet apéritif est en fait servi à chaque table, quelque soit la commande, d'où le peu de cohérence avec l'Amour de Deutz, mais passons. On se concentre alors sur le champagne qui arrive, et qu'on nous sert judicieusement en des verres et non des flûtes.
Il présente une jolie robe dorée pâle, la bulle est fine mais la mousse chante. C'est une invitation à humer l'effervescence iodée du breuvage où le beurre frais se marie aux fruits blancs et à la fleur, fleur que je situerais quelque part entre l'acacia et le chèvrefeuille. Moins envoûtant mais aussi frais que le chèvrefeuille. Bref, le nez est fin, frais, fringuant ! La bouche, que je m'attendais à trouver toutefois assez ronde tant le côté beurré m'avait sauté aux narines, est elle aussi fraîche et fringante, elle est vive même. La salinité est en accord avec l'acidité qui portent le fruit frais longtemps dans la bouche. La mousse est onctueuse et peu envahissante, le vin est vineux, mais pas dans le sens de l'élevage comme parfois. C'est vraiment plus un comportement.
Nous le découvrons ensuite sur la mise en bouche qui est une terrine de lapin aux herbes et cela révèle encore le côté salin du vin, titillant même son côté très aromatique. L'accord n'est pas mauvais, mais est un peu en force. Le champagne, par sa mousse, couvre la terrine, puis celle-ci développe son côté parfumé aux herbes, puis le champagne redouble de salinité. C'est un peu trop combatif et manque de cohérence.
L'Amour 2000 trouvera nettement plus sa place et sa raison d'être avec un peu moins de fraîcheur et surtout des langoustines vivantes juste poêlées au beurre. Là, on découvre un grand accord évident, certes, mais qui magnifie le chardonnay, révélant le brioché qu'il retenait encore timidement il y a peu, tempérant son iodé. L'onctuosité redouble sans aucune lourdeur, la simplicité fait foi et marque ce moment du sceau d'un plaisir naturel et courtois. Courtois ? Oui ! Car chaque élément va rendre à l'autre sa part de grandeur en lui empruntant tout ce qui lui manque pour rentrer dans un jeu de complémentarité exemplaire.
Puis, sans aucunement s'ennuyer de ce doux breuvage, nous le terminons (eh oui ! à deux, la bouteille paraît même petite) sur le poisson, une ballottine de lotte légèrement épicée accompagné d'une tombée d'épinards et d'une salade dont j'ignore le nom et qui se situe gustativement entre les chicons et la romaine. Elle est elle aussi un peu cuite et apporte la touche d'amertume qu'il faut sans être trop croquante au regard de la chair du poisson qui doit rester la texture la plus marquante. L'accord est intéressant mais n'égale pas l'efficacité du précédant, c'est un peu dommage. Les épinards sont très bons, goûteux, et plaisent au champagne, mais les épices, notamment le cumin et le paprika qui sont saupoudrés sur la lotte le malmènent un peu. J'essaye, pour l'expérience, avec le Léoville Las Cases 1999 que j'ai prévu pour la suite et c'est nettement plus amusant, sans être non plus au top.
Après le poisson, il nous reste un fond de verre chacun qui patientera car nous avons envie de rouge !
Que dire, donc, de cet Amour de Deutz 2000 ? C'est qu'actuellement, il est très élégant et assez aérien, qu'il lui faut des choses simples et fraîches, évidentes. Si les langoustines ont été un compagnon idéal ce soir, je ne doute pas que d'autres fruits de mer fins (certaines huîtres, des noix de Saint Jacques, un homard) lui soient aimables tant qu'ils seront cuisinés simplement. En effet, c'est un vin fin et délicat, il ne faut pas le brusquer mais le porter. Il est vraiment
bon, voire très bon !
La suite s'est bien déroulée aussi, l'agneau était l'ami naturel du Saint Julien, et les desserts ont été dégustés pour eux, car à deux, nous avons bu sept quarts de bouteille !
Bonne soirée,
Nathanaël, pas déçu !