Nous voilà de nouveau réunis, presque au complet (seul Alain manque à l’appel, retenu par les charmes orientaux), pour une nouvelle soirée de dégustation concoctée par notre Maître de cérémonie Patrick, dans cette fabuleuse ambiance que nous propose son théâtre.
A LPV Vaucluse, on ne le cache pas, on aime « jouer » autour de nos dégustations. L’abus de chaussettes (propres !) pour couvrir nos flacons est alors d’usage lors de nos rencontres, avec à la clé, très souvent, un « petit jeu ludique » source de bonnes rigolades.
Cette fois-ci, Maître Pat’ nous propose une semi-aveugle sur le thème des vins du Rhône septentrional (j’en salive encore !!).
Nous avons donc au départ les cuvées, appellations, Domaines et millésimes des 8 vins dégustés (4 blancs et 4 rouges), à nous individuellement (nous sommes 7 à amicalement nous « affronter ») de les remettre dans l’ordre de dégustation, Patrick jouant le rôle d’arbitre (il est le seul à connaître à l’avance les 8 vins et à décider de l’ordre de service).
Voici les vins dégustés, ici dans l’ordre décroissant de leur millésime :
En blanc :
- Condrieu – Domaine Christophe Pichon – 2014
- St Joseph Les Royes – Domaine Courbis – 2013 (indication donnée : dominante Marsanne)
- St Joseph Sous l’amandier – Domaine Christophe Curtat – 2011 (indication donnée : dominante Roussanne)
- Crozes-Hermitage Petite ruche – Chapoutier – 2011
En rouge :
- Crozes-Hermitage Roche Pierre – Domaine Belle – 2006
- Cornas Les Eygats – Domaine Courbis – 2004
- St Joseph Les Royes – Domaine Courbis – 1998
- Côte-Rôtie Maison rouge – Domaine Vernay – 1997
Les CR de dégustation ci-dessous sont issus dans un premier temps des échanges communs (pas question de se mettre chacun dans son coin avec son carnet et son crayon ! On est là avant tout pour échanger nos impressions) sur une approche analytique de type VOG. Dans un second temps, je me permets ici de mettre en avant mes propres remarques, de façon plus émotionnelle et plus en lien avec le challenge… et avec quelques métaphores footballistiques en cette veille d’Euro !!
Voici les commentaires sur les vins blancs dans l’ordre de dégustation :
Vin 1 :
Robe : pâle et limpide, pas de trace d’évolution
Nez : discret. Cédrat, amandes pour certains
Bouche : de beaux amers, amandes et pomme verte. Peu de fraicheur
Perso : la robe peu colorée me pertube un peu… Bouuuhhh, je suis malheureux, je n’aime pas lorsque je n’arrive pas à « sentir » le vin !! En effet, sur celui-ci, je suis incapable de ressentir une quelconque émotion le nez dans le verre. J’ai beau chercher… Rien… Ca ne va pas être simple à le « positionner » dans « la liste des 4 » celui-là, en tout cas, pas en attaque, mais plutôt en défense … En bouche, là, ça parle plus. Je suis marqué par les beaux amers du vin, sur l’amande fraiche, mais toujours un peu déçu par le manque de fruits et de fraicheur. Je réserve mon jugement (c’est quand même le premier vin), mais je penche plutôt pour une dominante Marsanne (discrétion aromatique, amertume…).
Vin 2 :
Robe : jaune paille, un peu plus soutenu que le premier vin
Nez : très expressif, brioché/pain grillé
Bouche : fruits jaunes, vanille, de la fraicheur et de la matière.
Perso : les premières larmes dans mon verre me parlent plus que sur le premier vin. Ça a l’air plus gras (ou moins fluide) que le précédent. Ahhh enfin, un nez qui parle !! Et qui parle bien !! Quelle belle expression, avec un bel équilibre fruits jaunes/vanille (même si perso je juge l’élevage encore un peu trop présent), difficile de « décoller » son nez du verre ; moi, à ce niveau déjà, ça me suffit ! Je fini par le passer en bouche, et celle-ci reste fidèle à ma sensation olfactive. On tient là notre « milieu de terrain », qui n’hésite pas à distribuer de façon équitable à droite et à gauche, entre la mirabelle et la vanille, mais aussi devant, par une belle longueur en bouche. Il y a du métier là, avec un vin qui a du relief. Marsanne ? Roussanne ? Personnellement je ne distingue pas les marqueurs de la Roussanne (mes références en ce domaine se limitant au C9DP 100% roussanne)… Ni de la Marsanne d’ailleurs (mais je connais moins) ! Wait and drink…
Vin 3 :
Robe : très pâle, voire blanche, translucide
Nez : abricot, pêche, romarin
Bouche : propre, un peu timide
Perso : « Eh Pat’ ! Tu m’as servi de l’eau pour rincer mon verre ? ». « Non non, c’est le troisième vin ». « Okkkééé… ». Bon, on passe vite au nez et à la bouche. Pas mal ! Moi j’aime (les copains sont moins expressifs), et c’est clairement les arômes du Viognier qu’on a là, même si personnellement (je ne suis pas fan de ce cépage), je suis agréablement surpris par la justesse de ses arômes, juste ce qu’il faut pour apporter ce côté gourmand sans en être écœurant, et pour ne pas me déplaire, une certaine fraicheur en fin de bouche. Bref, très digeste. Pour moi, c’est « le petit jeune » de l’équipe, plutôt exotique (issu de la diversité comme on dit), celui que l’on met sur le banc des remplaçants mais qui, dans quelques années, aura vraiment sa place comme titulaire. Vu les réactions des copains, je pense qu’on est quasi tous d’accord sur l’identité de ce vin.
Vin 4 :
Robe : plus soutenue que les vins précédents, petit reflet cuivré
Nez : mirabelle, amande, abricot sec,
Bouche : ample et grasse, élevage discret
Perso : à la vue, je juge avoir affaire à un vin avec un peu d’âge. Ça se confirme en bouche, avec une pointe d’élevage bien digéré. Ce vin est très proche à mon sens du 2ème dégusté, avec pour points communs l’amande et les fruits jaunes. Difficile de se faire une idée sur son origine… Si je trouve le vin n°2 plus équilibré, ce dernier vin me séduit par son aromatique plus prononcée (abricot sec) et que je trouve assez proche de certains C9DP à dominante roussanne (avis qui n’est pas partagé dans le groupe), et je trouve de plus son élevage plus intégré. Ce vin n’est pas « mieux » que le n°2, mais « plus prêt » à mon sens. On tient là notre défenseur qui a « de la bouteille », le sage de l’équipe, le Capitaine, et qui est prêt à terminer sa carrière en apothéose.
Résultats :
- Vin 1 : Crozes-Hermitage Petite ruche – Chapoutier – 2011
- Vin 2 : St Joseph Les Royes – Domaine Courbis – 2013 (indication donnée : dominante Marsanne)
- Vin 3 : Condrieu – Domaine Christophe Pichon – 2014
- Vin 4 : St Joseph Sous l’amandier – Domaine Christophe Curtat – 2011 (indication donnée : dominante Roussanne)
3 sur 7 participants ont trouvé l’ordre exact. Il y a eu débat sur l’aromatique Marsanne / Roussanne tant les 2 St Joseph étaient proches… Peut-être l’influence de l’élevage ?
On attaque les rouges (commentaire dans l’ordre de dégustation) !
Vin 1 :
Robe : jeune, pourpre
Nez : du fruit, finement lardé, poivre doux, un peu de bois pour certains
Bouche : encore un peu tannique, élevage encore marqué, fumé, olive, un peu court, mais c’est frais. « Il ne lui manque pas grand-chose ».
Perso : la robe délivre peu d’indications… Le vin ne semble pas avoir 20 ans… Mais la robe n’est pas non plus « violacée », mais d’un joli pourpre. Au nez, c’est par contre assez typique des jeunes syrah, avec une dominante sur le poivre doux et le fumé. Personnellement, je ne sens ni l’élevage, ni la violette (même en fond de verre). C’est bon, plutôt classique et bien fait, sans plus.
On va dire que dans l’équipe, c’est le petit gars toujours présent, qui fait son taff sans esbroufe, le bon copain avec qui on aime bien faire la 3ème mi-temps.
Vin 2 :
Robe : évoluée
Nez : violette, fruits rouges légèrement confiturés, une pointe réglissée
Bouche : noyau de cerise, amertume en fin de bouche, tanins fondus, « légèrement sur la retenue ».
Perso : ahhh là il y a un peu plus de monde ! Je me sens tout à fait dans mon élément, une syrah avec du volume, mais avec aussi de l’élégance. Ce n’est pas à mon sens un vin d’une grande finesse, mais on, tient là un vin abouti, à maturité, qui a su gommer ses excès avec le temps. Très bien ! Pour moi, c’est notre « avant-centre », le n°9 virevoltant il y a quelques années, et qui a su avec le temps compenser sa perte « d’explosivité » face au but par un jeu plus subtil, plus classe.
Vin n°3 :
Robe : très claire, transparente, légèrement cuivrée (à l’image d’un vieux Barbaresco)
Nez : le cuir, le poivre blanc
Bouche : végétale (vert), asséchante, un peu fluide.
Perso : pffff ce n’est pas de la syrah, ça ! Quelle robe !! Intrigante… En tout cas, très loin de mes références en Rhône Nord. C’est surement un des deux millésimes les plus anciens (mais on n’a pas encore dégusté le dernier…). Au nez, cela se confirme, avec essentiellement des arômes tertiaires de musc, de cuir… En bouche, c’est très fluide (peu de mâche), végétal et asséchant (perso je lui trouve des points communs avec certains Bordeaux sur ces deux dernières caractéristiques). Je lui trouve aussi beaucoup plus de finesse que le vin précédent, même si au final, je préfère le style du n°2. Mais c’est très bon aussi !
Bon comme un gardien de but expérimenté qui a su se rendre indispensable dans ses cages, et atypique comme le sont souvent les grands gardiens.
Vin n°4 :
Robe : sombre, opaque
Nez : mure, cassis, très sudiste, compoté
Bouche : torréfié, du volume, un peu de sucrosité
Perso : oulah !! Un vin qui respire le soleil, d’une grande densité, avec des arômes de fruits noirs qui tranchent avec les vins précédents. J’aime ces arômes empyreumatiques que propose ce vin. Même s’il est moins digeste que les trois autres, je pense qu’avec la daube de joue de bœuf de Patrick, il va « matcher » ! Un vin pour les grands garçons, petite nature s’abstenir ! On a là notre défenseur « rugueux sur l’homme », à la Di Méco, celui-qui te découpe en deux sans faire dans la dentelle, mais qui au final, reste un bon gars que tu aimes fréquenter, appréciant son côté franc et direct.
Résultats :
- Vin 1 : Crozes-Hermitage Roche Pierre – Domaine Belle – 2006
- Vin 2 : St Joseph Les Royes – Domaine Courbis – 1998
- Vin 3 : Côte-Rôtie Maison rouge – Domaine Vernay – 1997
- Cornas Les Eygats – Domaine Courbis – 2004
2 sur 7 participants ont trouvé l’ordre exact. La Côte-Rôtie est venue perturbée quelque peu l’analyse, ainsi que l’effet millésime. Certains ont été étonnés par la capacité de garde du St Joseph de Courbis.
Résultats finaux :
Seuls 2 des 7 convives ont eu les 8 vins dans le bon ordre. Les quilles étaient toutes excellentes dans leur style, et nous avons été une nouvelle fois conquis par les Saint Joseph (en découvrant notamment leur aptitude au vieillissement) et par la production de Laurent et Dominique Courbis.
Les vins ont été appréciés ensuite pour accompagner notre repas préparé par Patrick’s family, notamment une daube de joues de bœuf aux tagliatelles, superbement parfumée (j’en ai encore l’eau à la bouche !). Patrick, la recette !!!!
Et pour finir, rien de telle qu’une petite douceur, le « pirate » du soir, avec un Barsac crème de tête du Château Caillou de plus de 40 ans (1975).
Quelle soirée mes amis !!
« Il n’y a pas de théâtre sans fraternité » – Louis Jouvet.
(Citation à ne pas confondre avec « où sont les femmes ? » de patrick Juvet)