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2009 vs 2010: une différence de style?

  • bibi64
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2009 vs 2010: une différence de style? a été créé par bibi64

Dégustation thématique sur la différence de style des vins rouges entre les millésimes 2009 et 2010.
Les 2 sont a priori de grands millésimes ayant fourni des vins rouges taillés pour la garde. La perception un peu diffuse que nous avons dans notre groupe de dégustation, c’est que 2009 a produit des vins plus ronds et mûrs, solaires, alors que 2010 a produit des vins plus sur la fraicheur et sur le fruit. Le mieux est de vérifier cela en dégustation.

Pour cela, nous avons comparé sur ces 2 millésimes 6 vins issus de 6 grandes régions viticoles de France, tout en nous intéressant au climat qui a régné sur ces régions ces années-là.

Préambule sur mes notations :
0 = raté
1 = médiocre
2 = correct
3 = bon
4 = très bon
5 = excellent
avec des demi points, des + et des – qui permettent d’affiner le jugement et de classer les vins entre eux.


1er match : Rhône Nord, Côte Rotie La Brocarde du domaine François Villard


Cuvée parcellaire assez confidentielle (1200 bt en 2016), issue du lieu dit La Brocarde à Ampuis.
Encépagement 87% de Syrah, 13% de Viognier.
Exposition sud. Sols de schistes quartzeux.

CR: Côte Rotie La Brocarde 2009
Ce 2009 est parée d’une robe pourpre.
Le nez est ouvert, sur les fruits cuits, les fruits rouges confiturés, un peu de cuir, un léger fumé et une note herbacé. Un léger jus de viande complète le tableau.
En bouche, l’attaque est souple et fraiche. La matière est en ½ puissance, élégant, avec une belle fraicheur et même un petit côté acidulé. Les arômes qu’on y trouve sont les mêmes qu’au nez, avec en plus des notes de garrigue et un peu de réglisse.
La finale est sur des arômes mûrs et est associée à une belle longueur.
Conclusion : très bon vin, élégant, frais dans son équilibre et mûr dans ses arômes. Prêt à boire.
Note : 4-/5

CR: Côte Rotie La Brocarde 2010
Le 2009 présente une robe pourpre assez similaire à celle du 2009.
Le nez est en revanche assez discret et laisse filtré des arômes d’orange amère (façon triple sec), de fruits cuits, avec un peu de café et quelques notes herbacées.
L’attaque est souple et fraiche. C’est une bouche tout en élégance, à un point que c’en est presque un peu discret. On retrouve les arômes du bouquet mais on décèle aussi des fruits noirs et rouges mûrs, des épices et du café.
La finale fraiche est dominée par des aromes de fruits cuits et d’orange amère, et s’étire très longuement, plus que sur le 2009.
Conclusion : incrachable, très bon mais léger.
Note : 4-/5

Ces 2 vins ont un lien de parenté évident, avec leur fraicheur et leurs notes herbacées pas forcément typiques des côte-rôtie. Le 2009 paraît un peu plus solaire dans les arômes, mais pas forcément dans l’équilibre (les 2 vins présentent une belle fraicheur et de l’élégance).

2e match : Bourgogne, Pommard 1er cru clos de la Commaraine, Maison Louis Jadot


Vignoble de 4 ha orienté plein Est. Le sol y est profond, bien drainé en surface avec une partie de source en sous sol. Les cailloux sont nombreuxVinification en cuve après égrappage, 3-4 semaines, puis élevage en fûts de chêne pendant 15 à 18 mois.

CR: Pommard 1er cru clos de la Commaraine 2009
La robe est pourpre et de faible intensité.
Le nez est assez ouvert, sur les fruits cuits, le café, le cuir et un petit côté ronce.
L’attaque est ample et fraiche. La matière est belle, ample, puissante, suave et présente une légère amertume qui s’intalle rapidement et reste jusque dans la longue finale. Malgré les arômes assez nobles (la retro confirme le nez), cette amertume apporte une petite austérité qui diminue le plaisir.
Conclusion : c’est bon, puissant, assez suave, mais un peu austère aromatiquement.
Note : 3+/5

CR: Pommard 1er cru clos de la Commaraine 2010
La robe de ce 2010 est identique à celle du 2009 : pourpre et de faible intensité.
Le nez est ouvert et élégant : léger boisé, framboise, cuir, fruits cuits.
L’attaque est souple et fraiche. La matière est belle, bien fraiche (plus que sur le 2009). Ce plaisir tactile est malheureusement contrecarré par les arômes : en plus de ceux du nez, on trouve de nombreuses notes herbacée (façon Chartreuse).
La finale est fraiche (presque trop !) et un peu asséchante. Belle longueur.
Conclusion : c’est ample, frais, mais assez austère. Bof au vu du pedigree.
Note : 3-/5

Sur ce pommard, la différence d’équilibre est perceptible avec un 2009 assez suave et un 2010 plus frais. Les 2 vins sont bons mais ont été les parents pauvres de cette dégustation. On attend plus de gourmandise et de plaisir pour une cuvée de ce calibre agée de 7 et 8 ans.

3e match : Rhône sud, Chateauneuf-du-pape La cuvée du Lion, Domaine Tour St Michel


Cuvée faite à partir de raisins de plusieurs lieux-dits. Les sols contiennent de nombreux galets roulés typiques de l’appellation.
Encépagement 75% de grenache, 20% de Syrah et 5% de mourvèdre.Vendanges manuelles, éraflage 100%, macération longue, extraction douce.
Élevage 80% en cuve béton, 20% en barrique de 2 ans..

CR: Chateauneuf du pape La cuvée du Lion 2009
La robe est pourpre.
Le nez est très expressif, sur le poivre, les fruits cuits, le viandox et un peu de pruneau. On pressent déjà une certaine évolution.
L’attaque est ample et souple. La matière est ample, rond, mûr, mais avec une bonne fraicheur malgré tout. La retro permet de retrouver les arômes du nez, mais le pruneau y est plus affirmé et on trouve aussi du café et de la cerise à l’eau de vie. L’ensemble est gourmand et fruité, jusque dans la finale très longue
Conclusion : c’est très bon, dans un style mûr et déjà évolué.
Note : 4/5

CR: Chateauneuf du pape La cuvée du Lion 2010
La robe est pourpre.
Le nez est ouvert, mais d’abord sur des notes étranges d’hydrocarbure (essence). Ensuite, on dégage des fruits noirs et une note herbacée sur la ronce.
L’attaque est ample et fraiche. La matière est ample, élégante et suave. Les arômes sont dominés par les fruits noirs mûrs et la garrigue (plus de trace d’hydrocarbures, sauf à la fin, dans le verre vide), c’est très grenache. La finale est fraiche et élégante, avec une belle longueur.
Conclusion : c’est très bon, plus aérien et moins fruité que le 2009. Encore jeune.
Note : 4-/5

Ces 2 vins sont bien différents, le 2009 est beaucoup plus évolué que le 2010, tout en étant aussi dans un style plus rond.

4e match : Loire, Chinon Les Varennes du Grand Clos, domaine Charles Joguet


Terroir silico-argileux et silico-calcaire, situé sur la rive gauche de la Vienne, à Sazilly.
4,5 ha de cabernet franc plantés entre 1962 et 1976. Rendement moyen de 40 hl/ha.
Elevage en fûts de chêne pendant 15 à 16 mois selon le millésime.

CR: Les Varennes du Grand Clos 2009
Ce 2009 présente une robe bordeaux-pourpre.
Le nez est ouvert, intense, sur les fruits noirs mûrs, les épices, le cuir et la pomme cuite.
L’attaque est souple et fraiche. C’est une bouche puissante, ample, tannique, mais assez gourmande et portée par une belle fraicheur. La retro est sur le cuir, le jus de viande et les fruits noirs compotés..
La finale fraiche, assez élégante, et associée à une bonne longueur.
Conclusion : très bon vin, ample, mûr, tannique. Une belle expression mûre du cabernet franc.
Note : 4/5

CR: Les Varennes du Grand Clos 2010
Ce 2010 a une robe encore jeune, sur le bordeaux.
Le nez est ouvert, sur le café, le caramel (élevage à digérer ?), le fumé et les fruits noirs.
En bouche, c’est ample et frais dès l’attaque. La matière ample est portée par des tanins bien présents et montre un côté terreux. L’équilibre est bon, sur la fraicheur. La retro souligne d’emblée la présence de poivron, puis de fruits noirs et des notes d’élevage (café, fumé).
La finale est fraiche et tannique, avec une bonne longueur.
Conclusion : c’est un vin encore jeune, qui doit encore se fondre. Devrait bien évoluer avec l’âge selon moi.
Note : 3,5/5

Sur ces 2 Chinon, la comparaison de millésime montre surtout une évolution plus rapide du 2009 qui est prêt à boire (sans se presser) alors que le 2010 doit encore se fondre. Côté arômes, 2009 paraît plus solaire que 2010 qui est encore sur des aromes variétaux du cabernet franc.

5e match : Bordeaux, Chateau Lagrange St Julien 3e cru classé


Sol silico-graveleux: deux croupes de graves orientées nord-sud. Sous-sol argilo-calcaire Elevage en fûts de chêne (60% neufs) pendant 20 mois.
Cépages :
2009: 76% Cabernet Sauvignon,, 24% Merlot
2010: 65% Cabernet Sauvignon, 28% Merlot, 7% Petit Verdot

CR: Château Lagrange 2009
La robe est bordeaux-pourpre pour ce 2009.
Le nez est ouvert, sur l’humus, le café, le grillé et les fruits noirs mûrs. Il est gourmand et donne envie de goûter.
L’attaque est ample et suave. Il y a une belle matière, ample, ronde, bien équilibrée, avec des tanins déjà fondus. La retro est sur la vanille, le caramel, le café, les fruits noirs et le graphite.
La finale est fraiche et élégante, sur le graphite, la mure et le café, et est associée à une très belle longueur.
Conclusion : c’est très bon, assez gourmand et fondu, encore un peu jeune (notamment les notes d’élevage).
Note : 4+/5

CR: Château Lagrange 2010
La robe est bordeaux.
Le nez est ouvert et gourmand, sur les fruits cuits, l’humus et la vanille.
L’attaque est ample et ronde. La matière est puissante, ample, fraiche, avec des tanins un peu anguleux. La retro confirme le nez et permet d’ajouter le café à la liste des arômes.
La finale est fraiche et tannique, sur le café et quelques notes lactées.
Conclusion : un vin trop jeune (tanins et élevage à fondre), avec de l’avenir.
Note : 4-/5

Ces 2 vins sont puissants et portés par un élevage poussé. Il est difficile de savoir si les différences aujourd’hui sont dues au millésime ou à une différence d’élevage. Le 2009, quoique encore un peu jeune, est déjà agréable à boire, alors que le 2010 est dans sa prime jeunesse et pas très affable actuellement.

6e match : Madiran, Montus Prestige, Château Montus


Sol: fortes pentes recouvertes de galets roulés, sous-sol d'argiles brunes et orangées en strates.
Exposition: sud
Cépage : 100% tannat
Élevage : 14-16 mois en fûts neufs

CR: Montus Prestige 2009
La robe est bordeaux-noir, très profonde.
Le nez est ouvert, sur les fruits cuits et quelques notes herbacées.
L’attaque est ample et fraiche. C’est un vin massif, tannique et frais. La retro est sur les fruits noirs mûrs, le chocolat et un peu le café.
La finale est fraiche et tannique. Très grande longueur en bouche.
Conclusion : un vin puissant, tannique, mûr aromatiquement. A attendre
Note : 3,5+/5

CR: Montus Prestige 2010
Tout comme pour le 2009, la robe est bordeaux-noir, très profonde.
En revanche, le nez est assez fermé. Il en filtre quelques notes de café, de fruits noirs et d’eau de vie.
L’attaque est ample et fraiche. La matière est belle, ample, relativement veloutée (pour un madiran). Il y a une belle fraicheur et des tanins fondus. Aromatiquement, c’est assez gourmand, sur les fruits noirs mûrs et des notes lactées qui perdurent jusque dans la belle finale très longue.
Conclusion : un beau vin, ample, puissant, assez fondu, avec un grand avenir.
Note : 4+/5

Comme pour les 2 Côte Rotie, ces 2 madiran ont un lien de parenté évident, illustré par la robe, la puissance et les arômes. Cependant, aujourd’hui le 2010 est déjà très bon, assez fondu, alors que le 2009 demande encore à se fondre. C’est l’inverse de ce qu’on a constaté sur les Lagrange.

Au final, ces 6 matchs ont confirmé que 2009 et 2010 ont produit de grands vins rouges aptes à une longue garde, cette garde garde paraissant même parfois obligatoire pour espérer goûter les vins sous leur meilleur jour.
La perception que nous avions d’un millésime 2009 plus rond et plus solaire et a été partiellement confirmée seulement. Dans les 2 millésimes les équilibres sont bons, je n’ai pas ressenti de manque de fraîcheur en 2009. En revanche, dans la plupart des 6 matchs, les arômes des 2009 ont paru plus mûrs (fruits mûrs, voire confiturés). Les 2009 ont aussi paru plus évolué, plus prêts à boire.
C’est un peu ce qui est illustré dans le tableau ci-dessous qui reprend les préférences des 16 dégustateurs :



Mais ce que je retiens en premier lieu, c’est que la plupart de ces vins sont encore trop jeunes et qu’il faudrait refaire l’exercice dans 10 ans pour mieux juger les différences de millésimes.

Oenophilement
Bibi
Les utilisateur(s) suivant ont remercié: oliv, letournaisien, Moriendi, TIMO, Selassie, Vaudésir, MathiasB, Frisette, starbuck, jd-krasaki, Damien72, papa31, DaGau
19 Mar 2018 22:02 #1

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Réponse de rkrk sur le sujet 2009 vs 2010: une différence de style?

Dégustation très intéressante car on a rarement l'occasion de goûter les deux millésimes côté à côté sur les mêmes cuvées.

Je me rappelle qu'avec LPV Versailles on avait goûte Clos Puy Arnaud ( voir ici ) et que la différence était énorme (en faveur du 2010).

Ralf

Amateur depuis 30 ans, sur LPV depuis 16 ans, caviste depuis 3 ans
28 Avr 2018 18:28 #2

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Modérateurs: GildasPBAESMartinezCédric42120Vougeotjean-luc javauxstarbuck