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Repas dégustation autour de grands blancs

  • Eric B
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Repas dégustation autour de grands blancs a été créé par Eric B

L'histoire démarre en fin d'année dernière : TIMO me contacte pour m'annoncer une bonne et une mauvaise nouvelle(s) : la bonne, c'est que cela fait une décennie qu'il s’intéresse au vin, et que j'en suis l'un des deux déclencheurs (via mon blog). Pour marquer ces 10 ans d'une pierre blanche, il souhaite m'inviter à une dégustation exceptionnelle. De la bonne découle une mauvaise raison à cette invitation : s'il doit servir une grosse quinzaine de vins blancs à vocation gastronomique à une dizaine d’amateurs un peu furieux, il va falloir des assiettes qui tiennent la route. Est-ce que j'accepterais de m’y coller ? Mais sinon, il ne m'en voudra pas : il m'invitera quand même et nous le ferons dans un restaurant.

Présenté comme cela, il m'était difficile de refuser. J'ai accepté de suite. Restait à trouver une date qui convienne à tous, les vins, leur ordre de dégustation en trouvant des paires qui aient du sens (car on n'allait pas faire 15 plats...). Tout ça a bien pris deux mois, et le jour du repas/dégustation est finalement arrivé samedi 23 mars. J'écris ce texte dans la foulée, car n'ayant pris aucune note, je profite que ce soit encore clair dans mon esprit.

Avec le Champagne Initial d'Anselme Sélosse, j'avais préparé un classique de mon "répertoire" que je sais bien fonctionner avec ce type de vin : des rouleaux de speck garnis avec de la pomme rôtie au beurre, de la noisette grillée, de la brioche croustillante et du foie gras mi-cuit. Rien qu'au nez fin et complexe, le VO vous séduit : pomme chaude , viennoiserie, fruits secs grillés… C'est plutôt classique, mais la différence c'est qu'on est dans la retenue élégante. L'on retrouve le même esprit en bouche : c'est très traçant – mais un traçant classe, pas du tout agressif – avec une matière ample et aérienne, enveloppante, et des bulles d'une grande délicatesse – tout en pulsant bien. La finale prolonge la dynamique tout en restant dans l'élégance, et toujours cette belle et obsédante pulsation des bulles qui persiste longuement. Vraiment très beau ! L'accord avec les rouleaux fonctionne comme prévu. Une belle entrée en matière.

Pour les deux vins suivant, un Meursault Bouchères 2008 de Morey-Blanc et un Vieilles vignes de mon père 2004 de Jean-François Ganevat, j'ai fait un revival d'un plat que j'ai fait 2-3 fois adapté à ces vins. Dans cette variation sur le champignon de Paris, il y a un "risotto" de champignons, un gelée de champignon, une chantilly de champignon, de la poudre de champignon torréfié, et puis – au dessus – du sarrasin japonais grillé, de la noisette, de la poudre de brioche, et en dessous, un lemon curd (peu sucré), des dés de brioche croustillants, du citron confit. Cela peut paraître beaucoup, mais c'est en fait très cohérent, car on retrouve toute la palette aromatique des deux vins.

Avant la dégustation du plat, le Meursault fait plus 2009 que 2008 : le nez est sur la brioche et la noisette, avec des notes grillées assez marquée que l'on retrouve dans une bouche moelleuse, un lourdaude, manquant particulièrement de tension. À l'inverse, le Savagnin de Ganevat affiche des notes citronnées et minérales. La bouche est tendue comme un arc par une acidité vivifiante avec une matière fraîche, sapide, réussissant à être la fois dense et digeste.

Le plat change la donne : le Meursault trouve cette tension qui lui manquait et perd son grillé fatigant. Il amène beaucoup plus de plaisir. Ce qui est étonnant, c'est que l'effet est opposé avec le Vieilles vignes de mon père : l'acidité est beaucoup moins agressive, et le vin gagne en rondeur, sans perdre toutefois sa belle énergie. À ce moment-là, les deux vins sont à égalité en terme de plaisir.

Une fois le plat fini, on se retrouve dans la situation d'origine, avec un Meursault ramollo…

Bref, le genre d'expérience qui montre tout l'intérêt de bons accords mets & vins.

Pour la nouvelle paire, un Pouilly-Fumé Silex 2005 de Didier Dagueneau et un Chablis 1er Cru Butteaux 2008 de Raveneau, j'ai également adapté une recette que j'avais faite le 31 décembre : le poireau brûlé façon Eric Fréchon. J'ai remplacé l'huître par de la truite salée/fumée cuite à basse température et des oeufs de saumon, tout en gardant le citron confit et les chips d'algue.

C'est un peu un bis repetita de la situation précédente, même si moins extrême. Le Pouilly est plus frais et tonique que le Chablis, avec un sauvignon qui ne "sauvignonne" pas du tout. Il pourrait presque passer pour un Chablis, tiens ;-) S'il est déjà bon bu seul, le plat lui apporte une plus grande ampleur et accentue ses notes fumées, le faisant passer de très bon à excellent. Le Raveneau est plus rond, encore marqué par son élevage en barrique, mais il y a une sacrée matière derrière, d'un impressionnante densité. Au point où elle masque totalement son acidité, pourtant présente. LE plat la fait un peu ressortir, tout en atténuant l'élevage. Mais malgré tout, le Silex gagne le match haut la main.

De nouveau un plat inspiré par Eric Fréchon, si ce n'est que le chef du Bristol utilise du vrai caviar. Là, c'est du faux, car on ne bosse pas chez Rothschild ! Ce sont des pâtes en forme de perles, cuites dans un fumet de poisson, teintées à l'encre de seiche et aromatisées à l'huile de noisette, à l'huile essentielle de citron, une touche de fumée et agrémentées de citron caviar pour avoir du craquant. En dessous, comme dans la recette de l'autre Eric, il y a une purée de pomme de terre au haddock … et de l'esturgeon fumé (car ça coûte moins cher que le caviar), mais aussi du citron confit.

Deux nouveaux vins rentrent en lice : une Coulée de Serrant 2007 et un Palette blanc 2008 du Château Simone. Je ne sais pas pourquoi, mais la Coulée de Serrant a été rapidement identifiée par les convives (tout était bu à l'aveugle). Ce n'est pas la pire bouteille que j'ai bue du domaine, mais loin de la plus grande. On est sur une aromatique de Chenin un peu trop mûr – coing, miel, encaustique – et sur un vin plus fatigué qu'il ne devrait l'être. Le plat l'améliore et peut mais ne fait pas de miracle.

La Coulée de Serrant a au moins un mérite : elle sert de faire-valoir à Simone qui affiche de la fraîcheur et de la tension, une matière séveuse pleine de charme. Elle est encore presque trop jeune, elle. L'alliance avec la purée fumée/citronnée est superbe. Un des beaux moments de la soirée.

Le plat suivant, Eric Fréchon n'aurait pas osé le faire : c'est un rôti de lotte cuit dans une peau de poulet (du terre/mer), histoire de changer du lard fumé ou du jambon cru. Il était accompagné de pleurottes, de panais rôti, de pois gourmands et de coques. La sauce crémée, également terre/mer mariait le jus de coque au jus de poulet/champignon (et un peu de yuzu).

L'histoire a tendance à bégayer, avec un affrontement qui s'avère inégal, alors que beaucoup auraient parié l'inverse sur le papier.D'un côté, un Hermitage blanc Rocoules 2006 de Marc Sorrel, de l'autre une Altesse 2009-2010 de Michel Grisard. Le premier fait surmûr, miellé, avec une rondeur moelleuse un peu fatigante, car il n'y a aucune acidité pour la compenser. Le second a tout d'un grand vin : puissance, ampleur, générosité, énergie ...et fraîcheur. Il explose TOUT ! Déjà seul, il est excellent. Avec le plat – et particulièrement la sauce, il devient grand !

Il n'y avait qu'un seul vin pour accompagner ce plat minimaliste (par faute de temps et d'organisation): le Clos de Monsieur Noly 2005 du domaine Valette. Nous n'avions pas trouvé de challenger pour l'affronter. Cela a permis de se concentre sur l'accord avec ces quelques oignons cuit longuement dans le jus du poulet et le ris d'agneau poêlé. Aux dires des convives, c'était le plus bel accord de la soirée tant la fusion se faisait entre les deux. Timo, en humant le verre de Noly, a lâché "ça sent la soupe à l'oignon!", et je vois particulièrement ce qu'il veut dire : cette odeur d'oignon caramélisé et de jus de volaille rôtie avec une touche de madère pour corser le tout. L'aller-retour était assez saisissant : on se demandait si on ne buvait pas le plat et mangeait le vin...

Sinon, le vin était fougueux, intense avec une belle matière entre séveux et moelleux. La finale sur les fruits secs et un subtil rancio persistait longuement.

Ce sont les deux vins qui vont être servis qui m'ont inspiré ce "fromage" : ce cornet contient une "chantilly" de scarmoza fumée, des dés de pomme rôtie, de la noisette grillée, des petits cubes de pains d'épices croustillants.

Nous avions eu la diagonale Nord-Ouest /Sud-Est avec la Coulée de Serrant et Simone. Voilà la diagonale Nord-Est /Sud-Ouest (relatif) avec le Mambourg 2004 de Marcel Deiss et l'Oro 2003 de Peyre-Rose. Les deux présentent des similitudes – une certaine oxydation/évolution (plus marquée sur Oro) – mais aussi des différences : le Mambourg a plus de fruit (poire, mirabelle) et plus de fraîcheur. L'Oro a plus de volume, de richesse, mais peut lasser plus rapidement Perso, je préfère le Mambourg, mais les avis étaient partagés. Sans trop de surprise, l'accord fonctionnait très bien.

Il n'y avait au départ qu'un seul vin blanc de prévu : un Riesling Vendanges Tardives Cuvée Sophie 2007 de Barmes-Buecher. D'où ce baba aux fruits exotiques et "chantilly" coco/gingembre/citron vert. Mais un invité en a amené un deuxième qui s'avèrera être un Disznókó Tokaji Aszú 5 Puttonyos 2008. Il était nettement plus riche, plus oncteux, et heureusement plus acide. L'équilibre était bien là. Mais son aromatique, très marquée le rôti du botrytis, ne collait pas franchement avec le dessert. Pas bien le grave : il suffisait de le boire après, en vin de méditation. Par contre, le Riesling était remarquable de fraicheur, avec un sucre bien intégré. ll se mariait avec le dessert sans l'alourdir, comme l'aurait fait un riesling mosellan.

En after, il nous a été servi à l'aveugle un vin rouge au nez très bordelais (cigare, cèdre) mais à la bouche étonnament fine et fraîche. On sent qu'il a un certain âge, tout en restant fringuant. Il réussit l'exploit d'être très bon, alors que son ordre de service n'était pas idéal (euphémisme). C'est un Château Musar 2001 (vin libanais contenant 1/3 de cabernet sauvignon, 1/3 de cinsault et 1/3 de carignan. Vignes à 1000 m d'altitude. On comprend mieux son nez bordelais, sa finsesse et sa fraîcheur).

Merci à Timothée pour son accueil et cette dégustation qui s'avéra passionnante, même si quelques bouteilles y ont laissé des plumes. On s'en souviendra longtemps !

Eric
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25 Mar 2019 08:48 #1

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Réponse de jean-luc javaux sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Superbe Eric.
Du beau et grand travail que de trouver des plats "top" pour une telle variété de vins!
Chapeau!

jlj
25 Mar 2019 09:48 #2

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Réponse de H. Seldon sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Eric,
quel travail et quelle écriture de Cr : merci pour la lecture !
Seb

Notation : Moyen : les vins sans intérêt ; Assez bien : vins à boire pour la curiosité ; Bien : bon vin, à faire découvrir ; Très bien : vin remarquable ; Excellent : vins de très haut niveau, une rare réussite; Splendide : grand vin qui justifie le temps passé ici !
25 Mar 2019 13:25 #3

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Réponse de MB sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Merci Eric pour ce CR toujours aussi alléchant. Pour la "caviar", on y croirait !

Amicalement. Maxime
25 Mar 2019 14:00 #4

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Réponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Bravo Eric, c'est du grand art !
Au four(neau) et au moulin (à papiers) ...

Jean-Loup
25 Mar 2019 15:12 #5

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Réponse de TIMO sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

AÎe aïe aïe, il est rapide!!!
Je m'y mets ce soir! :)

TIMO
25 Mar 2019 15:31 #6

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Réponse de dt sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Très belle sélection à la fois dans les vins et dans le choix du menu. Tout fait envie !

L’altesse de Michel Grisard, c’est un assemblage des millésimes 2009 et 2010 ?
Je ne connais pas ce vin mais la description donne envie de le découvrir...

Denis
25 Mar 2019 15:43 #7

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Réponse de TIMO sur le sujet Repas dégustation autour de grands blancs

Les vins ne sont pas dégustés à l'aveugle pour ce qui me concerne.

Le Sélosse Initial (dégorgé en 2016) s'est montré remarquable.
Tout est parfaitement dessiné sur cette bouteille, le nez comme la bouche se lisent avec une grande facilité.
Pourtant c'est complexe et terriblement gourmand. Une bouteille de haute précision.

Sur la paire Vignes de Mon Père 2004 de JF Ganevat et le Meursault Bouchères 2008 de Morey-Blanc, on a deux beaux vins très différents.
Le Jura présente un nez explosif, une bouche très droite, limite rigide. On retrouve bien le profil de cette cuvée dans sa dynamique, sa longueur, son énergie mais qui manque je pense d'un peu de profondeur... surtout que cette bouteille passe quelques semaines après un 2002 de la même cuvée qui s'était révélée grandiose.

Le Bouchères est un peu embourbé dans ses arômes lactés qui manquent de finesse. L'air lui fait du bien cependant. La bouche est belle, comme l'a indiqué Eric elle se révèle avec le plat, avec pour le coup pas mal de profondeur et un joli déroulé. L'ensemble est d'un classicisme bien beaunois.

La variation de champignon est très très bonne!!
L'accord avec le Ganevat est aidé par le citron. J'ai préféré avec le Meursault qui matche bien avec le champignon, la crème de scarmozza.

La paire Silex 2005 de Dagueneau et Chablis Forêt 2012 de Raveneau est assez déséquilibrée.
Silex est carrément grand. Intensité, précision, évolution parfaite. Là encore on avait eu la chance de déguster cette même cuvée en janvier (même année) mais on gardait un côté exotique plus présent. Ici on est sur la roche, une belle rondeur. La formule est facile mais comme rarement je trouve que cette bouteille transpire son terroir.

En face, le Chablis du coup est bien plus discret. Comme le dit Eric, le vin semble engoncé, compacté. Sans doute que plus d'ouverture et surtout quelques années en plus lui aurait permis de vraiment s'exprimer car il y a du vin. Dommage de se retrouver face à un tel partenaire. Déception car j'espérais tant croiser enfin un Raveneau plus mature que ceux qu'il m'a été donné de boire... :unsure:

Le poireau parfaitement confit est un régal. L'accord est validé avec les deux vins.

Le premier grand écart de la soirée avec la paire Coulée de Serrant 2007 et Chateau Simone 2008
Baroque dans son évolution, très très aromatique mais avec une belle trame minérale qui fait vivre le vin en bouche. J'ai sans doute été gêné par le fait de connaître le vin. Au final belle bouteille sur le moment, impression confirmée le lendemain d'ailleurs. Elle a sans doute été avantagée par sa paire aussi...

Chateau Simone (encore un vin bu récemment avec le groupe) s'est montré assez faible par rapport à ce que j'attendais. L'aromatique m'a paru un peu limitée, la bouche plus expressive sur les goûts, bien tendue mais manquant de chair. Je crois avoir été un peu gêné par de l'amertume en finale. Bouteille faiblarde à mon avis.

Le plat est d'une grande gourmandise, la purée fumée rebondissant sur le "caviar".
L'accord se fait plus sur le Simone dans les notes empyreumatiques.

La paire de la soirée, c'est celle-ci : Hermitage Rocoules 2006 de Sorrel et Altesse 2009-2010 de Michel Grisard
Tout les opposes et pourtant qu'elle bonheur d'avoir déguster ces deux vins en parallèles.
Rocoules le nez est superlatif : hyper aromatique, hyper expressif, hyper complexe, hyper précis. Le vin déménage. En bouche je retrouve cet équilibre des grands hermitage que j'ai pu croiser avec une acidité faible mais un jeu de texture unique. Lorsque j'ai la puissance, la densité et la fluidité combinées comme cela je tombe!! Et la finale n'en finit plus. Perso je suis en apnée! :)

Grisard c'est tout l'inverse : une grande fraicheur au nez, du caillou, du végétal. Très belle complexité.
La bouche c'est de l'énergie pure, avec une très belle acidité et une belle profondeur, de la netteté.
Là aussi, un "vin de souffle"!! :)
C'est lumineux!!

Ah!!! J'ai bien la pêche après cette superbe paire! ::turn::
Comme pour Silex, je trouve que ces deux vins sont une superbe expression de leurs terroirs.

La lotte qui accompagne est d'une grande gourmandise. La finesse du terre-mer est très bien dosée.
L'accord marche mieux avec l'Altesse qui s'amuse de la texture rebondie du poisson et de son enveloppe.

Le vin tout seul, le Clos de M. Noly 2005 du domaine Valette avec le ris d'agneau aux oignons : attention!! Grand moment de gastronomie!!!
Le vin est barré comme un Clos : de la volatile, des notes oxydatives légères qui donne dans l'épice, du chardo évolué qui rajoute du crémeux. La bouche est ample, d'un texture drapée mais tonifiée par l'acidité "à la ouf".
Longueur aromatique, retour salivant. J'adore!!

Le plat c'est grand de simplicité et d'efficacité!! C'est beau, ça sent bon, les goûts sont tops, les textures harmonieuses! Bravo!! Et en plus on est sur l'accord parfait!
L'épice du vin, sa volatile, poussent encore le plat plus loin avec de l'énergie. Le plat renforce la gourmandise du nez et des textures du vin.
Voilà. Encore bravo!

La paire du fromage sera le deuxième grand écart de la soirée avec le Mambourg 2004 de Deiss et le Oro 2003 de Peyre Rose.
Le Mambourg me faisait un peu peur mais finalement il s'en tire très bien avec une évolution maitrisée. Il y a du fruit mais aussi de la finesse et de la complexité dans ce vin. En bouche le jus manque peut être un peu de tenue mais on garde de l'équilibre et la cohérence.
Après les bouteilles précédentes bouteilles on baisse nettement d'un cran mais joli plaisir tout de même.

Oro m'a bien plu mais plus sur l'idée que sur le plaisir immédiat.
Je n'ai pas trouvé les notes oxydatives mais plutôt minérale/fumée, avec du fruit jaune, du fruit sec avec de l'élégance.
Etonnante de fraicheur, surtout vu l'année, la bouche me semble très équilibrée, avec un beau touché mais un manque de délayé.
Après il y a clairement du vin!

Les deux matchent bien avec le fromage, en point de liaison la fumée.

Prévue seule la Cuvée Sophie 2007 de Barmes-Buecher sera accompagné par un vin hors-thème :O! B) le Tokaji Aszú 5 Puttonyos 2008 de Disznókó (Merci Loïc!)
Plus trop de souvenir précis à ce stade ;)
Mes impressions seront plutôt basées sur l'accord que j'ai préféré avec le riesling plus aérien, moins chargé en sucre. Le Tokaij m'aurait sans doute fait meilleur impression sur un programme moins chargé.
Le dessert est au poil : fraicheur et légèreté.

L'idée de cette soirée est née à la dégustation de plusieurs cuvées qu'on retrouve ici : Vignes de Mon Père, Clos de M. Noly, Altesse, Oro, Silex... L'envie de boire l'un avec l'autre, puis avec l'autre etc...
Tout cela aboutit à ce Tour de France bien incomplet (Roussillon, Condrieu, Chateauneuf, Jurançon, Muscadet, Bordeaux) avec parfois des choix "par défaut" (Simone, Morey-Blanc)

Globalement on est pas mal :) avec peu de déceptions et de belle réussite. Comme je l'ai noté plusieurs fois, ces grandes cuvées m'ont paru régulièrement illustrer leur terroir avec beaucoup de lisibilité. Evidemment, cela aurait été encore plus intéressant à l'aveugle B)

Merci beaucoup à Eric pour le repas, fidèle à sa réputation! Chacun autour de la table s'est régalée des plats mais aussi des accords.

Et merci aux copains, car beaucoup de ces vins, ce sont eux qui me les ont fait découvrir. Et les partager à nouveau avec eux aura été un plaisir, comme à chaque fois!

TIMO
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28 Mar 2019 00:50 #8

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  • Eric B
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Cette entrée est un clin d'œil à une recette d'Éric Fréchon dans une version cheap, car je n'ai pas les moyens de servir 50 g de caviar par invité . Après, il faudrait goûter les deux en parallèle pour vérifier si les pôvres y perdent vraiment : mon succédané est composé de multiples ingrédients qui finissent par le rendre plus complexe que des œufs de poisson salés.

Le caviar

Au départ, j'avais envisagé de remplacer le caviar par des lentilles Béluga, comme le fait par exemple François Gagnaire. J'ai testé, et n'ai été convaincu ni par le goût ni par la texture. J'ai également testé les perles du Japon : c'était encore pire ! Et puis je me suis souvenu que j'avais fait un vrai-faux caviar avec des pâtes "millet" d'Alpina Savoie en 2006. Je n'ai pas réussi à retrouver ce produit sur Limoges. Je me suis donc rabattu sur les Tendres Perles de Tipiak qui ont donné ma foi un bon résultat.

Afin d'avoir un résultat optimal et homogène, il faut les cuire comme un risotto en ajoutant progressivement du bouillon et en mélangeant constamment.

Le bouillon est une sorte de dashi : dans un litre l'eau, j'ai mis deux feuilles de kombu, une poignée de copeaux de bonite séchée (katsuoboshi) et un sachet de dashi au crabe. J'ai porté à ébullition puis coupé le feu et laissé infuser 20 mn. Ce n'est pas la peine de le colorer avant cuisson, car le noir pénètre à peine dans les pâtes. Autant ne le faire qu'une fois celles-ci cuites : ça évite de gaspiller de l'encre.

Puis j'ai mis 200 g de pâtes dans une casserole, mis du bouillon à hauteur et commencé à chauffer en mélangeant.Lorsque les pâtes ont absorbé presque tout le bouillon, il faut en rajouter. Et continuer ainsi jusqu'à ce qu'elles soient cuites (une bonne dizaine de minutes). Il faut ensuite les rincer sous l'eau froide dans une passoire afin de retirer tout l'amidon (pour qu'elles ne collent pas entre elles) et que la cuisson soit stoppée.

On peut alors commencer le travail de faussaire…

Pour la couleur, j'ai ajouté deux cuillers à café d'encre de seiche.

Pour le brillant et le goût, 3 cl d'huile de noisette grillée.

Pour la fraîcheur aromatique, une dizaine de gouttes d'huile essentielle de citron et 3cl de jus de citron.

Pour le croquant et le goût, le contenu d'un citron caviar.

Pour un léger goût fumé, 1 cl de fumée liquide de bois de cerisier.

Selon votre goût, vous pourrez doser ces différents ingrédients. Il faut qu'au final, le résultat soit convaincant. Jusqu'au moment de le servir, le stocker au frais dans une boîte hermétique.

L'écrasée de pomme de terre

Afin que l'écrasée soit profondément imprégnée du goût haddock, j'ai fait infuser la veille celui-ci avec le beurre. Pour cela, j'ai mis 200 g de haddock dans une casserole avec 120 g de beurre. J'ai monté la température jusqu'à 75 °C, puis j'ai couvert et laissé tiédir. Et mis alors le tout dans une boite hermétique jusqu'au lendemain.

Une heure avant le repas, j'ai fait cuire 1.2 kg de pommes de terre (non épluchées) dans de l'eau salée. Je les ai pelées à chaud et écrasées à la fourchette. Je les ai mises dans grande casserole pour les chauffer à sec pour éliminer un maximum d'humidité. Puis j'ai ajouté le beurre et le haddock progressivement, ainsi que 100 g d'esturgeon fumé (optionnel). On peut rajouter un peu de lait pour l'assouplir. Ne la saler qu'en toute fin, car le haddock et l'esturgeon sont salés. J'ai également ajouté de l'écorce de citron confit préparée selon cette recette .

Il n'y a plus qu'à répartir l'écrasée dans les boîtes métallique et à placer dessus le caviar froid. Servir de suite.

Eric
Mon blog
06 Avr 2019 17:40 #9

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Bravo Eric .En tout cas la photo est très belle et la présentation vraiment ressemblante .
J'ai eu la chance de goûter cette création originale d'Eric Frechon : c'est vraiment un plat extraordinaire . Et je précise tout de suite que je ne suis pas un fan de caviar qui n'est certainement pas mon produit de luxe favori .
Mais dans ce cas , l'utilisation qu'il en fait et l'alliance avec sa purée de pomme de terre est une perfection absolue . C'est la première fois dans un plat ou je me dis que le caviar , habituellement ajouté pour faire monter l'addition , n'est pas inutile .:)
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06 Avr 2019 21:00 #10

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Je plussoie, Raymond, ce plat est la première et seule fois où j’ai trouvé que le caviar apportait quelque chose à un plat.

Jean-Paul
07 Avr 2019 19:44 #11

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