Visite et dégustation au domaine Benoît Dorsaz
A l’occasion d’un court séjour en Haute-Savoie, j’avais pris rendez-vous pour le jour pluvieux de la semaine, mais Benoît Dorsaz m’avait prévenu qu’il serait pris et nous serions reçus par son épouse. C’est donc Maryline qui nous accueille pour notre troisième visite en dix ans à ce petit mais beau domaine.
Comme la pluie annoncée n’est pas là, nous sortons immédiatement pour localiser une partie des vignes. Le domaine ne compte que 5 ha (c’est un choix réfléchi de ne pas s’étendre plus), répartis sur différents secteurs, mais tous à Fully ou dans des communes limitrophes, ce qui limite les déplacements.
Depuis le domaine, on voit bien le secteur des Perches, vignoble historique du domaine, mais la photo de ce secteur a été prise plus tard, d’un peu plus près. Les 2 ha de Benoît Dorsaz sont constitués de loess avec quelques moraines posées sur un fond de gneiss et exposés plein sud. Les rangs de vignes sont perpendiculaires à la pente pour faciliter le travail tout au long de l’année et retenir la terre grâce à des murets.
Le secteur des Follatères est lui un peu plus en aval par rapport au Rhône, là où celui-ci passe de la direction ouest à la direction nord, ce qui confère un micro-climat très particulier (les « folles terres » !). 1,5 ha sont exploités ici, pour partie en coteaux (loess) et pour partie sur la partie plate de la vallée (mélange de limon et de loess), avec une orientation sud-ouest. Les rangs de vignes sont en partie parallèles à la pente et en partie l’épousent pour respecter les valeurs paysagères du site.
Trois autres secteurs complètent le vignoble : Plamont, Rossetan et Chavannes.
Seulement 5 ha mais une douzaine de cépages (!) : fendant (chasselas), petite arvine et viognier en blanc, cornalin, humagne, syrah, pinot noir, gamay, merlot, cabernet franc, galotta et gamaret en rouge ! Les vignes sont enherbées en partie. La certification en agriculture biologique a été obtenue en 2016, avec le label "BioSuisse" qui porte à la fois sur la viticulture et la vinification. La viticulture est également réalisée en biodynamie mais sans chercher de label.
Nous rentrons pour voir quelques installations.
Nouvelles cuves inox pour la vinification de rouges
Opération d’entonnage de vin rouge
L’objectif de Benoît Dorsaz étant d’obtenir des vins plus sur la finesse que la puissance, la vinification est adaptée en conséquence pour chacun des cépages. Ainsi des remontages et des pigeages sont réalisés sur les rouges mais avec parcimonie. Les élevages se font sous bois pour la gamme « Quintessence » mais le pourcentage de bois neuf reste limité.
Enfin nous rejoignons la belle salle de dégustation pour goûter à quelques cuvées emblématiques du domaine.
Mais d’abord quelques données sur les millésimes récents :
- En 2017 la moitié des vignes ont gelé dans le secteur plat des Follatères.
- 2018 a vu l’attaque du mildiou comme un peu partout en France, mais cela a bien été maîtrisé.
- 2019 également, avec en plus de l’oïdium ; en revanche peu de pourriture contrairement à d’autres voisins. Maryline nous explique que c’est grâce au mode de viticulture. De plus le tri des grains à l’arrivée à la cave est très sévère.
Petite Arvine de Fully – Les Perches – 2018
Les vignes ont été plantées il y a quinze ans.
Les vendanges se font en deux tries (parfois trois selon les années !) pour gagner en maturité de fruit. La vinification est réalisée en cuves, pendant six mois.
Robe paille.
Nez très intense et bien aromatique, sur des arômes d’abricot très présents complétés par quelques notes florales.
La bouche est habillée d’un léger gras et dévoile une aromatique bien riche. Une bonne acidité l’anime et la porte jusqu’à une chouette finale saline.
Bien ++ / Très Bien
Petite Arvine de Fully – Quintessence – 2017
Les vignes ont entre 35 et 40 ans d’âge.
Pendant un an, 75 % sont élevés en barriques de grande contenance (de 300 à 500 l), allant du bois neuf à des barriques de trois vins. Les autres 25 % sont élevés en cuves puis l’ensemble est assemblé et vieilli six mois de plus en cuves.
Robe se situant entre paille et or.
Le nez explose littéralement sur l’abricot et l’ananas, les fruits jaunes plus généralement. Une touche boisée se fait sentir ainsi qu’une note mentholée.
La bouche se montre ample et concentrée, d’une aromatique dense où l’élevage est encore bien sensible. Une grande acidité dynamise le tout et allonge la finale qui se révèle également saline.
Très Bien + mais à attendre quelques années pour en profiter au mieux !
Cornalin – Quintessence – 2017
Il s’agit d’un assemblage des secteurs des Perches, Rossetan et Chavannes.
Après égrappage, la fermentation et la macération durent un mois. L’élevage a lieu pendant un an en barriques (très peu de fûts neufs) puis six mois en cuves.
Robe moyennement sombre, aux reflets très nettement violacés.
Nez bien intense, très fruité, avec de la réglisse et une touche vanillée.
La fraîcheur en bouche est très belle, donnant un fruité acidulé, sur la cerise de Montmorency. De petits tanins légèrement saillants participent au soutien et à la persistance du vin.
Très Bien
Syrah de Fully – Quintessence – 2017
La vigne est issue de sélections massales de la serine, variété de syrah, en provenance directe de vignes de Bernard Grippa.
Un tiers est vinifié en vendange entière, pour une fermentation et une macération d’un bon mois.
L’élevage a lieu pendant un an en barriques (20 % de fûts neufs) puis six mois en cuves.
La robe est sombre et a déjà quasiment perdu ses reflets de jeunesse.
Le nez d’une grande intensité fait très « syrah » : belles épices, poivre, lardé. Mais pas trouvé de violette…
La bouche dense possède un grand fruit et fait preuve d’une superbe élégance. Une belle vivacité et une très longue finale épicée sont d’autres atouts indéniables.
Très Bien +(+)
Un grand merci à Maryline pour son accueil et le temps passé avec nous, et également à Benoît, venu nous saluer malgré ses contraintes du jour, pour son remarquable travail !
A la sortie de la cave, je vous conseille (en fait c'est Maryline qui conseille et je confirme !) un déjeuner à l'hôtel - restaurant de Fully : en période de chasse, c'est super, et en dehors de cette période cela ne doit pas être mal non plus...
Jean-Loup