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Une visite au Domaine Macle
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Le soleil d'automne pointe enfin ses rayons salvateurs sur le Jura, révélant un paysage magnifique, illuminé par la beauté flamboyante et chamarrée des dernières feuilles de vignes attendant l'hiver et le vert tendre des prés qui parsèment le bocage.
C'est au sommet de la région, perché sur le pic de Château Chalon, au cœur d'un village magnifique que nous avons rendez-vous avec la famille Macle, un domaine créé en 1850 et que Jean Macle a su mener pendant 35 ans au firmament des plus grands vins blancs de France.
C'est désormais Laurent, son fils, qui a pris le relais, assumant la tâche ardue d'être la sixième génération de Macle présents sur ces sols pentus et âpres.
Dans ce mouvement d'altitude et de profondeur bien à l'image des vins du domaine, aussi aériens que telluriques, Laurent Macle nous invite sans tarder à plonger dans les entrailles du rocher et à rejoindre la cave !
Au cœur du rocher de Châton Chalon, Laurent Macle assure la relève.
Les 12 hectares du domaine sont répartis en 8 plantés en Chardonnay et 4 en Savagnin. Il suffit de monter à la table d'orientation tout au bout du village et de parcourir les routes qui l'enserrent pour comprendre la spécificité de ce terroir de marnes et d'éboulis de falaises, pour percevoir combien la pente est rude et le positionnement en cirque peut aider à la maturation du raisin !
Laurent Macle nous emmène dans un long parcours dans les entrailles du domaine, nous parcourons en sa compagnie les magnifiques caves fraiches du XVIème siècle et qui comprennent plusieurs centaines de fûts dans lesquels le mystère de la prise de voile s'opère.
Les vins sont entonnés après fermentations alcoolique et malolactique dans des fûts nettoyés et mèchés. Aucun levurage n'est effectué pour accélérer la prise de voile, seules les levures présentes en cave joueront leur rôle, à leur rythme et avec leur part de mystère.
Les vins sont régulièrement goûtés au moyen du dzi, cette petite pièce en corne percée et équipée d'une chevillette qui fait usage de robinet et qui permet d'éviter l'utilisation de la pipette en verre. Cette dernière aurait pour effet de crever le voile et donc de risquer d'exposer le vin à une oxydation trop rapide ou pire, à une contamination bactérienne qui pourrait l'abîmer définitivement.
Le style d'élevage oxydatif recherché est bien plus ici la finesse et l'élégance que la puissance du seul "goût de Jaune".
Chardonnay ouillé en cours d'élevage, une création de Laurent Macle.
Les caves du domaine sont fraiches et avec une amplitude thermique moins importante que celle rencontrée par exemple chez
Jacques Puffeney
. Elles participent donc directement de la prise d'un voile très fin et d'un goût de jaune moins marqué que sur le secteur d'Arbois où les vins sont régulièrement plus puissants, moins élégants parfois.
Pour la première fois dans l'histoire du domaine, un Macle s'essaie au
Chardonnay Ouillé !
Le vin est ciselé, fin, construit sur une belle trame fraiche et de belles notes grillées. Laurent nous confie que son père a goûté ce vin une fois... et n'y est plus revenu depuis !
Pas assez typique, sûrement ?
Pas toujours facile d'assumer le poids d'une succession, moi, je vous le dis ! (
)
Vue sur Ménetru depuis le rocher & sur la reculée de Baume les Messieurs
La cuvée
Côtes du Jura Chardonnay en élevage oxydatif est un petit bijou de fraicheur et d'élégance. Le vin est gras et long, sur une acidité magnifique qui porte véritablement le vin.
Plus de concentration sur les cuvées classiques de
Côtes de Jura (80% chardonnay / 20 savagnin) où l'on retrouve cet équilibre construit autour d'une trame tendue et enrobé par des notes oxydatives complexes et finalement assez discrètes, bien plus sur les épices que sur la seule noix et ses habituelles déclinaisons.
2006 semble un millésime en l'état plus gourmand,
2007 peut être plus austère ayant en revanche selon moi un supplément de race, porté par une acidité qui m'a semblé plus structurante.
Laurent Macle nous demande si nous souhaitons goûter les rouges que le domaine vinifie pour ses repas et ceux de ses vendangeurs et qui ne sont pas commercialisés. Le
Poulsard m'a beaucoup plu, par ses belles notes de fruits rouges poivrés au nez et une évidente gourmandise en bouche. Le
Trousseau en revanche renardait sévèrement et, gouté ainsi en cave fraiche, m'a donné l'impression d'un vin relativement sec.
Château Chalon 1976 et Vieux Comté
Le
Château Chalon 2003 est un vin à l'aromatique fine, comme sur tous les vins du domaine que j'ai pu boire jusqu'alors, sur des notes de curry et de noisettes grillées.
Sa matière est grasse mais bien relancée par une acidité équilibrée. Je n'ai pas suffisamment d'expérience pour juger de l'influence des particularités du millésime sur cette cuvée.
Si des vieux clients du domaine ont goûté ce vin, je serais très intéressé de connaître leurs impressions sur ce point.
Laurent Macle a eu la grande gentillesse d'ouvrir pour nous un
Château Chalon 1976 !
Le nez est renfrogné, paraissant contrit, sur des notes de renfermé, quelque chose qui m'évoque le soufré. Laurent Macle regrette de ne pas avoir passé ce vin en carafe.
La bouche est droite et concentrée, sur un équilibre de dentelles qui s'accorde magiquement avec les (
[size=x-small]comment me contenter d'une ?![/size] lamelles de vieux comté que le domaine a prévu à notre intention. L'ensemble joue clairement sur le registre de la finesse et du vin de gastronomie, le prisme d'accords potentiels étant d'ailleurs impressionnant !
Le
Macvin qui conclue cette dégustation est un délice d'arômes, sur le raisin de corinthe et les épices, avec une intégration remarque du marc qui évite la rusticité, voire la brutalité en finale trop souvent perçue sur ce vin de liqueur.
Encore une fois, il est à signaler la qualité incroyable de l'accueil dans ces vignobles jurassiens.
Même dans ce domaine réputé, régulièrement valorisé par la critique mondiale, du temps nous a été accordé pour répondre à nos questions et ce, avec tolérance et simplicité.
Beaucoup de modestie émanait des explications techniques et culturales que nous avons partagées, humilité face aux mystères du vin mais aussi face à sa commercialisation, les Macle tenant à conserver une très large majorité de clientèle particulière et à les accueillir au domaine.
Le Jura est une terre qui a sa temporalité propre, un univers mystérieux où les vins mettent leur temps à se faire pour n'ensuite plus complètement en subir les outrages et où le respect de valeurs que notre monde d'immédiateté jugera surannées n'est pas un vain mot.
Je n'oublierai pas comment M. Macle, malgré d'évidentes difficultés de santé, a tenu à se lever pour nous remercier chaleureusement de notre passage au domaine...
Un merveilleux souvenir que cette visite !
Oliv
Dégusté lors du séjour :
Mont d'Or au four ([size=x-small]encore un ![/size]
) - Chardonnay oxydatif 2005
Côtes du Jura Chardonnay 2005
Un vin fabuleux, assurément une de mes bouteilles de l'année et peut être le plus bel accord sur le Mont d'Or au four.
Le nez est un bijou de finesse et d'élégance, sur de merveilleuses notes complexes où se mêlent les épices, le curry, la noisette grillée et des arômes de poires.
La bouche est somptueuse, toujours sur cette finesse incroyablement racée. L'acidité est remarquablement intégrée, le vin est gras et d'une élégance remarquable.
Il répond idéalement au fromage fondu en jouant sur le registre du contrepoint, son acidité rafraichissant le palais, son corps sachant se jouer de la texture fondante !
Un très grand moment de bonheur !
Merci Damien !
[size=x-small]Et
Merci Pierre
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Crédit photos
Damien Bourdon