Les quiches
Je les ai préparées le matin même à 7h00 du mat'. Je me suis dit qu'il fallait que je fasse un truc à grignoter avant d'attaquer le véritable repas, histoire de faire patienter mes invités. L'appareil est le même pour les trois quiches : fromage blanc, oeuf et parmesan rapé. Seule la garniture change.
Il n'y avait pas d'accord recherché ici. J'avais cette bouteille de Bergerac dans mon frigo. Il était très bon, mais un vin plus jeune et plus vif aurait été nettement mieux. Mais ce n'était pas très important. À mes yeux, cela ne faisait pas partie du repas...
Les médaillons de langouste
Là, par contre, le plat a été fait exprès pour cette vieille bouteille de GC de Krug que je commence à bien connaître.
L'émulsion est une infusion dans du lait de soja (truc de Thierry Marx pour faire des émulsions moussant naturellement) de brioche au beurre, de noisette grillée, de bacon, et de bouillon de crustacé d'Ariaka. Elle a été filtrée, puis il y a eu juste du beurre "noisette" qui a été rajouté. Elle a été préparé il y a plusieurs semaines et mise au congélateur.
La chapelure est à base de brioche au beurre, de bacon et de noisettes grillés. Préparée le même jour que l'émulsion et mis sous vide.
Des petits champignons de Paris ont été coupés en deux dans l'épaisseur et snackés dans une poêle très chaude (avec du Micryo – beurre de cacao) plus résistant aux hautes températures que le beurre).
Il y avait aussi de fins copeaux de jambon cru légèrement fumé.
Pour les médaillons de langouste, je vous renvoie à ce didacticiel très bien fait de Chef Simon :
chefsimon.lemonde.fr...
Il est arrivé que la GC soit un peu fermée à l'ouverture. Or je l'ai débouchée au dernier moment. Ouf, elle se goûtait super bien. Elle ne faisait pas du tout son âge vénérable, Elle avait du punch et une fine acidité, et une aromatique d'une grande complexité se recoupant avec celle du plat. La bulle était d'une finesse superlative.
La truite fumée
Je pensais d'abord faire du saumon à basse température, mais en terre limousine, à part du saumon d'élevage norvégien, il n'y a pas grand chose. Un magasin créé par des paysans locaux propose de la truite provenant d'un élevage en Dordogne. J'ai goûté la version nature et "fumée", et j'ai beaucoup aimé la seconde, très peu salée et délicatement fumée, avec une chair à la fois dense et tendre.
Le magasin proposait aussi les oeufs du même poisson. Je me suis dit que c'était un peu les "petits pois" du poisson, avec la forme du légume et la couleur du poisson
Le petit pois me parlait autant pour son côté croquant/sucré que sa couleur verte, contrastant avec l'orange. Ayant découvert les pousse de petits pois dans certains restaus branchés, je me suis lancé dans la culture de légumineuses. J'ai fait des tests préliminaires pour voir le temps qu'il me faudrait pour avoir la taille idéale. Il faut 15 jours. Plus tôt, elles sont plus courtes et plus dures, alors qu'en s'allongeant, les extrémités sont plus tendres. Le goût est celui du petit pois avec un côté végétal un peu plus prononcé.
Avec son acidité, sa chair juteuse et craquante, le pomelos rose m'apparaissait complémentaire autant avec le saumon qu'avec les petits pois. J'ai fait aussi du pomelos confit (voir
ICI
la recette d'Anne-Sophie Pic) qui adoucissait le frais, et qui me semblait – à juste titre – bien coller avec un Savennières évolué.
"Cerise" sur le gâteau, j'ai découvert les groseilles de mer sur plusieurs sites de produits gastronomiques. Je me suis dit
"soyons fous, tentons l'expérience". C'est très croquant, avec un goût iodé prononcé, Soyons honnête, ça n'apportait pas grand chose à l'ensemble.
Au départ, je pensais arroser cette assiette "froide" (excepté les petits pois) avec un jus chaud de petits pois parfumé au oignons et lard fumé (qui était déjà fait et congelé). Lorsque j'ai goûté le vin la veille au soir du repas, je me suis rendu compte que le végétal de la sauce ne conviendrait pas au vin riche, mûr, très marqué par les agrumes confits (mais avec une superbe acidité). J'ai donc préparé un bouillon de crustacé (toujours Ariake) dans lequel j'ai fait infuser du zeste rapé de pomelo, du pomelo confit, du citron confit, de la pâte de yuzu, un peu de vanille et du gingembre frais rapé. Lorsque ça m'a paru top, j'ai filtré le bouillon, et mis dans une boîte hermétique au frais.
L'accord était juste magique, le bouillon étant un jumeau très troublant du vin. Peut-être mon plus bel accord jamais réalisé.
Le pigeon
Les pigeons ont été acheté le mercredi dans la même boutique de producteurs que la truite. A peine revenu à la maison, j'ai levé les filets et les ai mis sous vide avec une feuille de cigare (Partagas) posée sur le côté chair (le vin servi me rappelant ce cigare). Les cuisses ont été salées, poivrées et confites deux heures à 80 °C dans de la graisse de canard ayant déjà servi à confire des cuisses de canard. Les carcasses ont servi à préparer un jus corsé.
Je voulais une purée de céleri plus typé qu'une purée classique. J'ai donc détaillé la boule en gros cube que j'ai fait cuire en mode "pommes de terre" dans mon four à vapeur qui rôtit tout en injectant de la vapeur d'eau, préservant ainsi l'humidité du légume. L'extérieur était bien doré et l'intérieur très tendre. Je les ai mixés avec du lait chaud et du beurre. Le résultat était extra (je recommencerais !)
Le coulis de framboise est un mélange de framboises mixées (et filtré pour éliminer les pépins), avec un tout petit peu de chocolat noir 81 %, de fond de volaille et de la sauce des échalotes confites du plat suivant. Mais vraiment très peu. Je tenais à ce que le fruit s'exprime au maximum.
On ne le voit guère sur la photo, mais il y a aussi du grué de cacao torréfié et haché.
Les girolles ont été poêlées au beurre jusqu'à ce qu'elles s'attendrissent (mais pas trop)
L'idée des "particules croustillantes" était d'évoquer les sous sols de forêt à l'automne avec les feuilles mortes qui partent en morceaux. Les plus claires était à base de fond de volaille et de cèpes (jus légèrement épaissi à la maïzena et séché étalé sur une plaque au four 20 mn à 160 °) et les plus sombres à la framboise et au cacao (pas sucré).
Les filets ont été sortis de leur sachet 20 mn à l'avance. Ils ont d'abord cuit côté peau (3 mn), puis du côté chair (1 mn) avant de reposer 5 mn dans du papier alu, suivi d'un rapide coup de chauffe avant de le mettre en assiette.
Les cuisses ont doré 1/4 d'heure dans une poêle bien chaude pour qu'elles aient une peau croustillante (une tuerie!)
Le Bourgogne avait une texture soyeuse, presque arachnéenne, avec un fruit expressif et des notes fumées/cacaotées. L'accord avec la chair délicate du pigeon était extra.
Le boeuf
Pour moi, le boeuf est ce qui va le mieux avec le Bordeaux. Je voulais incorporer la truffe au plus profond de la viande. D'où mon idée de faire un "tartare au couteau" avec la viande et d'y mélanger moultes copeaux de truffe d'été. Par contre, ca n'était pas évident à cuire, car la chair n'était pas super tassée. Mais bon, c'était tout de même suffisant.
J'ai remplacé les pains du "burger" par de la pomme de terre. Cela a nécessité pas mal d'essai pour obtenir une bonne texture à la fois moelleuse à l'intérieut et croustillant à l'extérieur. La bonne combinaison fut 20 mn à la vapeur + 30 mn au four au four classique à 220 °C (en retournant au bout de 20 mn).
Les échalotes ont confit très lentement dans un mélange purée de cassis + fond de veau.
Une sauce au cassis a été aussi élaborée à base de purée de cassis + vin rouge + fond de veau +beurre + un tout petit peu de chocolat noir.
Le Margaux était d'une grande finesse, avec encore un beau fruit et de la fraîcheur à revendre. L'accord se faisait bien, même si ce n'était pas le plus émouvant.
Le "fromage"
A l'étage inférieur, une crème de parmesan faite avec 50 cl de lait de soja à 80 ° + 200 de parmesan fraîchement rapé, mixé ensemble avec 3 g de gomme de xanthane. Puis assaisonnée avec de la poudre de colombo et du cumin torréfié (produit génial de Ducros).
Au dessus, des noix concassées et cuites au four 12 m à 190 °C .
Et encore dessus, un vieux comté (je ne connais pas l'âge exact, on me l'a apporté sans me le préciser)
L'accord avec le Château Chalon était à pleurer. Le vin était d'une finesse extraordinaire et en même temps d'une puissance aromatique assez énorme.
Le dessert
Il a été fait exprès pour le Ben Ryé que je connais plutôt bien.
Le gros challenge était de trouver des bons abricots. Cette année, ce n'est pas facile... J'en ai seulement trouvé des corrects. Ils ont été préparés trois jours à l'avance avec une cuisson progressive (courte à chaque fois, suivi d'un repos au frais). Cela les a amélioré considérablement.
Le pain de Gênes est un assemblage de pâte d'amande de qualité (50 % d'amandes) d'oeuf et de pâte de pistache (et seulement 20 g de farine).
Le touron liquide est vendu en pot par l'un des meilleurs fabricants, Coloma Garcia. C'est assez génial (juste amande + miel de fleur d'oranger).
La glace pistache est maison. C'est comme une crème anglaise (sauf que le lait est remplacé par de la crème fraîche) avec de la pâte de pistache, turbinée et mise au congélateur.
L'accord avec le Passito était somptueux (et n'avait pas un côté "too much sugar" )