Domaine Alphonse Mellot – IGP des Côtes de la Charité Les Pénitents blanc 2017
- Gabriel : Moriendi, tu as encore péché...
- Moriendi : Oui Saint Gabriel et je ne le regrette pas. Ou si peu. Disons que j'aurais pu boire un vin encore meilleur, car n'est-ce pas la quête de tout amateur de vin, boire la bouteille ultime ?
- Gabriel : N'ajoute pas le péché d'orgueil et la vanité à ton péché de gourmandise.
- Moriendi : Ok, ok mais puis-je me permettre de faire remarquer à votre excellence angélique que sans le clergé et son obsession pour le pinard la France viticole n'en serait pas là et que mon âme n'aurait peut-être pas été tentée ?
- Gabriel : Tordre l'histoire pour incriminer de pauvres moines qui se contentaient d'assurer les moyens de leur subsistance pour la plus grande gloire de Dieu n'est pas très fair-play. Es-tu donc incapable de reconnaître que tu peines à dominer tes appétits ?
- Moriendi : C'est pas faux même si c'est un peu un coup bas de votre part ô parangon de vertu. Après tout je ne suis qu'un homme et donc sujet à la tentation. On peut même dire que c'est précisément ma susceptibilité à la tentation qui me définit. Si votre patron avait voulu que moins de pécheurs encombrent les guichets de son administration, il aurait pu nous faire un peu plus incorruptibles.
- Gabriel : Et t'ôter ainsi ton libre arbitre ? N'est-ce pas cela qui te fait homme ? N'est-ce pas cette liberté de suivre les enseignements de Dieu qui te définit, plus encore que la tentation, ce concept flou dont tu te gargarises un peu facilement ?
- Moriendi : Certes votre Seigneurie céleste mais n'est-ce pas vous qui avez inventé le concept marketing ultime : la rédemption. Je peux ainsi pécher autant que je veux, j'ai toujours une chance de m'en tirer, comme dans les mauvais films hollywoodiens : une simple confession sur mon lit de mort et hop à moi les félicités célestes.
- Gabriel : C'est un peu plus compliqué que cela. Au purgatoire, il faut d'abord remplir le formulaire 34B4 en cinq exemplaires qu'il faut ensuite faire tamponner par les autorités compétentes dont les services de Michel, ce qui n'est pas une mince affaire car il passe le clair de son temps à pourfendre des dragons plutôt qu'à gérer son administration, avant de passer un examen de morale auquel beaucoup sont recalés.
- Moriendi : C'est bien compris cher sémaphore de sagesse. Je vais donc faire pénitence et gravir à genoux ces fameuses côtes de la Charité en me fouettant le dos et en récitant une prière à la gloire du dieu chardonnay.
- Gabriel : Epargne-moi les blasphèmes faciles. Dis-moi plutôt, ce breuvage valait-il que tu mettes ton âme en danger ?
- Moriendi : Oui et non ô censeur des moeurs. Ce n'était certainement pas l'ambroisie dont se régalaient les dieux de l'Olympe, pardon pour cette référence douteuse, mais c'était un vin bien fait, chaleureux comme un camarade de pénitence et gourmand comme le frère Tuck. Gai, franc, vif, un peu simple : le voilà tout entier en peu de mots.
- Gabriel : C'est le portrait tout craché de nombreux anges de ma connaissance. Mais je m'égare. Moriendi, tu réciteras dix Avé Maria et tu feras cinquante pompes car un corps sain fait toujours plaisir à voir. Et j'espère ne pas avoir à tamponner un 34B4 à ton nom, alors tiens-toi à carreau.