Et quelle visite !
Il s’agit de la première étape du WE œnophile annuel que mon fils et ses copains passent à Bourges et alentours. Cette année ils m’ont demandé une visite à Pouilly-Fumé : suite à une bonne expérience de sa cuvée Tradition sur le millésime 2016 relatée plus haut dans ce fil, j’ai eu envie de mieux connaître ce domaine.
Nous sommes accueillis par Cathy de manière fort sympathique et Valérie la vigneronne nous rejoint rapidement. Les échanges seront nombreux, certains très techniques, d’autres hors sujet
, mais toujours dans une ambiance très chaleureuse
.
Le domaine comprend environ 20 ha, la majorité sur Pouilly, avec une petite partie sur les côteaux de La Charité, la parcelle ayant été acquise il y a 25 ans. Les ventes se font à 80 % à l’export, comme c’est le cas pour la plupart des domaines de Pouilly-sur-Loire et de Sancerre, mais le domaine tient à garder sa clientèle française, notamment particulière.
Partons donc pour une exploration assez complète de la gamme.
Pouilly-sur-Loire – La Centenaire – 2017
Les spécialistes (donc tous les LPViens !
) savent qu’il s’agit d’un monocépage chasselas puisque l’AOC est Pouilly-sur-Loire et non Pouilly-Fumé.
Le nom de la cuvée vient de l’âge des vignes qui sont en franc de pied, par marcotage.
La robe est paille, très claire.
Bien intense, le nez exhale des arômes de fruits très mûrs tels que la banane, la pomme ou encore la poire.
La bouche est plus sage et rectiligne, assez simple mais franche. Elle se montre saline et plutôt courte. J’ai ressenti cette salinité sur quasiment tous les vins, plus ou moins. Cela provient sans doute du terroir de marnes kimméridgiennes, plus ou moins associées à du calcaire selon les parcelles.
Assez Bien +
Lors de la discussion, Valérie nous fait part des conditions climatiques extraordinaires (au sens premier du terme) du millésime 2018, notamment depuis le début de l’été, très chaud et quasiment sans pluie. Pour appuyer ses dires elle nous montre une grappe de chasselas non vinifiée : certains grains sont roses et non jaune ambré comme c’est le cas d’habitude pour du chasselas en surmaturité.
Pouilly-Fumé – Tradition – 2017
Cette cuvée phare est issue de l’assemblage final de différentes parcelles, toutes élevées en cuves séparément pendant 4 à 5 mois avec un léger batonnage.
La robe est paille.
Le nez est très intense et aromatique, combinant de belles senteurs fruitées (fruits blancs et agrumes) et florales.
L’attaque est ronde, la belle matière fruitée est assortie en milieu de bouche d’une bonne vivacité et la persistance remarquable, surtout en comparaison du Pouilly-sur-Loire, se termine sur une finale saline.
Bien +(+)
Pouilly-Fumé – Clos des Chaudoux – 2016
Le vin de cette cuvée parcellaire (en coteaux, exposition sud-ouest) a fait l’objet d’une macération pelliculaire pendant 10 h et d’un élevage sur lies pendant 10 mois en cuves avec batonnages réguliers.
La robe est plus soutenue, entre paille et or.
Très expressif, le nez allie des arômes de fruits blancs et d’angélique ainsi qu’une note mentholée.
La bouche est pleine, la matière plus dense, l’aromatique moins classique. Une certaine tension ressort en finale avec toujours un côté salin.
Bien + mais à ce stade j’ai légèrement préféré la cuvée Tradition, ce qui n’a pas été le cas de tous.
Pouilly-Fumé – La Léontine – 2016
Cette cuvée tire son nom de l’arrière-grand-mère qui avait lancé le domaine Pour la petite histoire elle ne s’appelait pas Léontine mais elle était la femme de Léon !
Elle est issue d’un assemblage de différentes parcelles, mais d’une sélection de raisins, et fait l’objet d’un élevage pendant 10 à 12 mois dans des fûts de plusieurs vins.
La robe est d’un or clair.
Bien ouvert, le nez offre des notes pâtissières prenantes, d’autres miellées, sur une base de fruits blancs.
La bouche est charpentée, grâce à sa matière dense mais aussi à l’élevage que l’on ressent nettement. L’ensemble devrait se fondre d’ici un à deux ans. La belle longueur fait apparaître une fraîcheur bienvenue.
Bien +(+)
Pouilly-Fumé – Les Filles – 2016
Cette cuvée est réalisée à partir de raisins cueillis en surmaturité, avec un élevage hybride, la majorité du vin en cuves ou en tonnes (demi-muids de 600 l anciens), assemblés avec un fût neuf.
La robe est d’un doré clair.
Le nez d’abord discret s’ouvre à l’aération dans le verre. D’une belle élégance, il présente une aromatique expressive et avenante de fruits blancs très mûrs et de miel.
La bouche est concentrée, pas très large mais d’une superbe longueur, sachant rester sapide de bout en bout.
Bien ++ / Très Bien
IGP Côtes de La Charité – Les Montées de Saint Lay – Chardonnay – 2016
L’élevage se fait pendant un an dans des tonnes anciennes.
La robe est d’un or moyen.
Très intense, le nez associe arômes de pâtisserie et notes de fleurs blanches.
La bouche est moins démonstrative, toute en fraîcheur et en longueur. C’est sur la finale que les arômes, notamment anisés, reprennent le dessus.
Bien
IGP Côtes de La Charité – Les Montées de Saint Lay – Pinot Beurrot – 2016
Le Pinot Beurrot désigne, comme en Bourgogne, le Pinot Gris. La vinification est d’ailleurs proche de celle de certains vins bourguignons et très éloignée de celle des gris de Reuilly, plus proches par la distance.
L’élevage se fait pendant un an dans des tonnes anciennes.
La robe est d’un or soutenu.
Le nez très ouvert développe des arômes prégnants de fruits blancs, en particulier de poire.
La bouche se montre très friande et harmonieuse, entre un fruité gourmand, une belle fraîcheur et une longueur honnête.
Valérie : « Moi, j’aime bien le beurrot ». Et nous aussi…
Bien +
Vin de France – L’aDorée – 2014
Il s’agit d’un demi-sec - moelleux élaboré à partir de raisins de sauvignon qui avaient 15° de potentiel. Valérie a alors décidé de bloquer la fermentation alcoolique à 13,5 ° et de conserver environ 25 g de sucres résiduels.
L’or de la robe est bien dense.
Le nez est très intense, presque puissant, et enchante par son aromatique complexe : le miel est bien présent, des notes truffées et d’autres fumées viennent embellir un fond très fruité, à la limite des fruits exotiques.
La bouche possède l’équilibre d’un demi-sec proche d’un moelleux d’un beau chenin de la Loire, mais avec une aromatique différente, que je ne saurais qualifier car peu rencontrée jusqu’à présent. La finale élancée laisse une bouche empreinte de ce fruité sans aucune lourdeur. Etonnant mais très bon !
Bien ++
Nous partons ensuite visiter le chai. Celui-ci n’a que trois ans et a été conçu sur deux étages, avec utilisation de la gravité pour limiter les pompages du vin.
Le pressoir pneumatique et une cuve.
Quelques cuves.
C'est l'occasion de goûter à une cuve de Pouilly-Fumé 2018 dont la fermentation est à peine terminée.
Le fruité éclatant et dense laisse augurer d'un très beau millésime, surtout que l'on peut faire confiance à Valérie pour aller chercher suffisamment d'acidité pour l'équilibrer.
Les « tonnes », demi-muids de 600 l.
Quelques fûts dédiés à certaines parcelles.
Nous nous quittons après deux heures non sans immortaliser ce bon moment.
Mais nous partons avec deux beaux cadeaux sous forme de bouteilles qui seront bues le lendemain à table.
Pouilly-Fumé – Clos des Chaudoux – 2006
La robe présente un or très marqué, presque ambré.
Le nez est sur la retenue mais en allant le chercher on y décèle une belle complexité olfactive avec des fruits jaunes, des arômes miellés et une panoplie d’épices.
La bouche est ronde et assez riche, tout en gardant une belle vivacité, très patinée en structure comme en arômes, avec une persistance très correcte et une bonne tenue en finale.
Une cuvée de sauvignon certes évoluée, en rien comparable avec sa petite sœur plus jeune de dix ans, mais évidente pour qui apprécie les blancs du Centre Loire à maturité.
Bien ++ / Très Bien
L’accord est bon (3+ / 5) avec un poulet à l’estragon, l’acidité de la sauce relançant bien la structure du vin.
Pouilly-Fumé – Clos des Chaudoux – 1999
La robe est un copier-coller : or très marqué, presque ambré.
Le nez est d’entrée nettement plus ouvert, avec la même aromatique, complétée par quelques notes de fruits secs.
En revanche la bouche se montre sous un jour plus strict, d’un profil rectiligne et tendu, avec une fine amertume en finale.
Un vin de forte personnalité.
Bien ++
Il gagne en rondeur lorsqu’il est associé à un vieux comté (accord 3,5 / 5).
Un grand merci à Valérie et à Cathy pour ces deux beaux cadeaux et surtout pour leur accueil chaleureux !
Jean-Loup