Quelques impressions d'un diner récent au domaine de Trévallon, organisé par Idealwine. Le moment étant peu propice à la prise de notes, je relaterai des impressions globables de dégustation.
Je tiens à remercier Ostiane Icard de nous avoir ouverte les portes d'un domaine pour lequel j'ai toujours eu un attachement particulier, et de nous avoir reçu avec bienveillance et pédagogie.
Nous commençons la visite par celle rapide du vignoble, sur la partie située en façe du chai. Le soleil couchant sur ce parterre de vigne confère une grande sensation de plénitude. Cela nous permet de se rendre compte que celui-ci a été créé de toute pièce il y’a plus de 50 ans dans une zone forestière, sur des sols calcaires.
La conduite des vignes a toujours été biologique et certain principes de la biodynamie y sont appliqués. Le travail au sol est mécanique mais le domaine fait de plus en plus appel à des chevaux, notamment sur les parcelles les plus délicates à travailler. Concernant l’emplacement des vignes, la situation géographique dans le nord des Alpilles, combinée à la forêt qui entoure le domaine et agit comme un clos, permet une protection climatique certaine permettant d’éviter des degrés de maturité trop poussé. Cependant, réchauffement climatique oblige, la tendance future serait à une utilisation plus importante du Cabernet Sauvignon dans les rouges, de l’ordre de 55/45 ou 60/40 pour garder une certaine fraicheur qui est un des marqueurs de Trevallon. J’ai posé la question concernant la création éventuelle de parcellaire en rouge, qui n’est pas à l’ordre du jour. Trevallon est, et a toujours été un assemblage, et enlever certaines parcelles reviendrait à dénaturer l’essence même du vin.
Nous passons ensuite au chai où nous commençons par la dernière mise du blanc 2022, pas encore mis en bouteille. N’ayant jamais gouté de blanc du domaine, j’avoue être surpris par le nez qui me transporte loin des Alpilles. La première impression est celle d’un fin élevage à la bourguignone avec des notes de grillés, avant qu’une seconde aromatique porté par le fenouil et l’anis ne pointe le bout de son nez. En bouche, le vin présente déjà une belle densité et une complexité appréciable, quoiqu’encore porté par l’alcool qui ressort. Pour le rouge 2021, l’aromatique est déjà précise et gourmande sur un fruité rouge et de fines notes fumées, mais les tannins pas encore prêt et rendent la bouche inconfortable.
Viens ensuite l’apéritif accompagné du Blanc 2021 qui présente des caractéristiques très similaire au 2022 dans un ensemble plus homogène, et réalise un accord de haut vol avec un maquereau à la flamme, la densité du vin répondant parfaitement au caractère du poisson.
Le Blanc 2015 nous est servi avec un plat de poisson (dont j’ai oublié le type), agrémenté d’un jus aux écrevisses. Le nez porte encore les traces de l’élevage avec des notes de grillées qui commencent à s’intégrer, et un fruit plus posé et délicat avec des notes de fenouil frais et d’amande. La bouche possède un léger gras et garde une certaine fraicheur, réalisant un joli accord avec le plat.
Place aux rouges sur 2020, 2017, 2015 et 2001, tous ouvert en début d’après-midi. Le 2020 et le 2015 présentent des profils vraiment similaires, sur un fruité rouge et un aspect un peu confituré pouvant avoir été favorisé par une température de service trop chaude, associé à des fines notes épicés et de fumé. Bien que jeune, je dois avouer que ça se boit déjà très bien, le 2020 présentant une densité importante là ou sur le 15 on entrevoit un vin plus assagi avec des tannins légèrement poudrés. L’accord avec un agneau rosé accompagné d’artichauts est très réussi.
Le 2017 quant à lui intouchable est cadenassé à double tour en dépit d’un carafage. Peu aromatique, dur et astringent, il est dans sa phase de fermeture.Viens ensuite le 2001 qui aura été servi seul juste avant le dessert, ce qui peut être regrettable.La conservation parfaite au domaine nous donne un vin d’une jeunesse ébouriffante, à des années lumières des 2000 que j’ai bu et qui étaient bien plus évolués. Le fruit noir est omniprésent, un poil confituré mais bien équilibré par du tabac blond, un fin boisé noble, de belle élégance. La bouche s’articule autour d’une colonne vertébrale puissante mais possédant des tannins fins et poudrés évoquant un toucher de taffetas. Il semble parti pour une éternité tant il est insolent de jeunesse.
Ce repas aura été riche d’enseignements, avec des vins blanc marqués (selon mes impressions) par un élevage "à la bourguignone" (ce qui personnellement ne me dérange pas) et évitent l’écueil de la lourdeur. Concernant les rouges, ils se sont tous présentés sous une filiation indéniable mais j’avoue avoir été surpris par un aspect un peu confituré sur l’ensemble des vins qui ne m’avait jamais marqué jusque-là, pouvant être imputé à une température un peu trop élevée et des verres un peu petit, si l’on veut chipoter. J’en retiens que le Trevallon rouge peut être apprécié jeune sur le fruit avant de se refermer dans les 3 à 7 ans je pense, mais devrait quand même être attendu minimum 10 ans avant pour pouvoir en apprécier son potentiel.
J’en ressort très heureux d’avoir pu visiter un lieu empreint d’histoire, et d’avoir pu apprécier les vins et ressentit les ondes vibrantes qui planent sur ce domaine.