Visite du domaine les Jardins de Babylone vendredi dernier, avec un ami amateur en vacances dans le secteur.
Un coup de fil au domaine et Guy Pautrat accepte de nous recevoir le lendemain.
Comme souvent dans le vignoble de Jurançon, on commence par s'arrêter pour admirer le paysage.
Ensuite, il nous reste à trouver Guy. Nous avançons dans le domaine et pouvons admirer un magnifique hémicycle en terrasse.
Le patron arrive dans son engin mi-quad/mi voiturette de golf. La discussion commence et il nous explique que l'hémicycle en terrasse est le coeur historique du domaine, avec des vignes de petit manseng.
En plus de cet hémicycle déjà existant lors de l'achat du domaine, 2 autres parcelles ont été plantées ou replantées avec les cépages camaralet, lauzet et courbu.
Devant notre intérêt pour la vigne, Guy nous propose de faire un tour des vignes. Nous voilà donc partis dans la voiturette tout terrain pour affonter les fortes pentes des coteaux où se trouvent les parcelles. Les sols sont argileux, avec de nombreux galets. Le sol est travaillé au pied des vignes mais entre les rangs c'est enherbé (et semé d'avoine ou de luzerne pour les vignes en terrasses).
Après la visite des vignes, passage au hangar pour voir le matériel agricole. Point de bio ni de cheval ici, le matériel est mécanique ici. En descendant au chai, on s'arrête 2 minutes au hangar à cuves. 3 belles cuves inox (dont j'ai oublié la contenance) sont là. On y reviendra plus tard pour goûter ce qu'il y a dedans. Mais la dégustation va commencer au chai, sur les fûts.
Premier vin, le jurançon sec 2015, sur 3 fûts différents (3 demi-muids). Expérience très intéressante!
Le sec est fait à partir de 60% de camaralet, 20% de lauzet et 20% de courbu (et un petit peu de gros manseng). Ce qui en fait d'ores et déjà une curiosité, sans point de comparaison pour moi, puisque aucun jurançon sec n'a ce type d'assemblage dans ce que je connais. Il est élevé 11 mois en fût puis plus d'un an en cuve avant embouteillage.
Jurançon sec 2015, premier fût
le nez est très floral, sur les fleurs blanches, dans la gamme aubépine, chèvrefeuille, fleurs de printemps. La bouche est épurée, avec une belle tension et des amers un peu trop présents à mon goût (mais j'ai une faible tolérance sur ce point). Complètement différent des jurançons secs que je connais bien (Camin Larreydia, Clos Lapeyre, Clos Thou, Bellegarde, etc..)
Jurançon sec 2015, deuxième fût
dès le nez c'est complètement différent; c'est fruité, ca sent les agrumes (citron, madarine) avec un petit côté ananas/exotique. En bouche, le fruité est là aussi, bien porté par la tension avec une matière fraiche et salivante. C'est très bon. Ça me fait penser à d'autres jurançons secs cette fois-ci.
Jurançon sec 2015, troisième fût
dans ce troisième fût, on retrouve un vin floral, mais pas amer, et perlant cette fois-ci! C'est déroutant et il s'agit pourtant du même jus qui a été mis dans ces 3 fûts.
Après cette expérience riche en surprises et sensations, nous remontons voir les cuves, pour gôuter cette fois la sec 2014.
Jurançon sec 2014
Tiré sur la cuve. De suite, c'est plus austère, à la fois au nez et en bouche. C'est sec, avec un côté fumé. Il y a une belle minéralité, on n'est pas sur un registre fruité du tout. Il y a de la mâche. C'est bien en place, alors que le 2015 sur fût paraissait encore un peu destructuré. Après aération, la côté fumé s'atténue. C'est bon, mais je ne ferai pas des folies pour en acquérir (sans même parler du prix).
Il est temps de passer à la dégustation du moelleux (100% petit manseng). On est toujours au cuvier.
Jurançon 2013
Sur cuve. Robe jaune légèrement dorée, brillante, moyennement intense. Il y a une belle liqueur (75g de sucre résiduel après "enquete"), une grosse acidité qui compense, ce qui donne un vin assez aérien et digeste. Pas un monstre d'exhubérance, mais quelque chose de sympa. Note 3,5/5 (=Bien+/TB-).
Jurançon 2014
Sur cuve. Robe d'un beau jaune dorée, bien plus intense que sur le 2013. Le nez est expressif et la bouche est bien concentrée, avec un joli gras (85g) compensée par une belle acidité. Au niveau aromatique, on est sur du petit manseng classique: fruits confits, pain d'épices, beurre, coing, passion, abricot... Et c'est très long en bouche
Très beau vin. Note 4/5
Il nous reste à goûter le moelleux 2015 sur fût. Nous voilà donc repartis vers le chai. La encore, 3 fûts à comparer, expérience rare....
Jurançon 2015, premier fût
Sur demi-muid (600 L). Là, on goûte et on se dit: ouaouh! C'est ciselé, avec un joli côté aérien et un équilibre magistral. Par comparaison avec les 2 millésimes précédents, je situe le sucre vers 80g. Tout faux, on est à 120g, mais c'est équilibré par une juste acidité qui masque ce sucre. La fermentation a été stoppés volontairement. Du coup, on a un vin qui titre 10°5. On aime beaucoup, et Guy Pautrat a l'air satisfait de ce millésime et de cette tentative de contenir le degré. Note 4,5/5 (Très bien + / excellent -).
Jurançon 2015, deuxième fût
Sur demi-muid (600 L). Le tonnelier est différent, mais le vin se goûte pareil que sur le premier fut.
Jurançon 2015, troisième fût
Sur cigare (300 L). L'équilibre et la longueur sont bien là, mais le vin parait plus sur la retenue au niveau de l'intensité aromatique.
Sur ce moelleux 2015, la variation d'un fût à l'autre est bien moindre que pour le sec 2015. Je ne sais pas si on peut en conclure quelque chose, en tout cas c'est toujours instructif.
2 bonnes heures se sont écoulées, il est temps de libérer notre hôte, qui nous a permis de passer un moment comme l'aime tous les passionnés du vin.
Et pour moi, il est l'heure d'aller me coucher, je me suis encore laisser emporter dans un compte rendu jusqu'à point d'heure...
Oenophilement
Bibi