On ne m'enlèvera pas de l'idée que parmi les vins qui m'ont le plus marqué, et qui continuent à me marquer régulièrement, on trouve naturellement ceux de Ganevat...
Samedi dernier a été l'occasion de revisiter certains vins arrivés dans la cave, plus quelques vieilles connaissances...Nous étions en jour racine, autant dire que j'appréhendais un peu l'exercice, mais mes craintes n'étaient pas fondées. Je crois, simple intuition, que les hautes pressions sont un élément favorable pour la dégustation de tels nectars...
Nous avons commencé la soirée avec un
Savigny-les-Beaune 1er cru les Lavières 2019 du domaine Chenu, tout simplement excellent, gourmand, fruité, léger et aérien, un terroir que j'adore.
Et puis le très grand spectacle a commencé...
Poulsard 2019 cuvée de l’enfant terrible, terroir de marnes grises et blanches
La robe est celle d’une gelée rose très claire, transparente avec des reflets orangés, légère et diaphane. Le nez est un ravissement sur le bouquet de fleurs, le pétale de rose, l’églantine, avec des nuances d’orange sanguine, d’angélique, de groseilles de confiture de fraises et de petites baies. C’est un nez somptueux de complexité et d’une grande fraîcheur. La bouche est concentrée malgré sa légèreté. Elle respire la pureté et la droiture. Les notes florales sont archi-présentes, des fleurs faites liquides pourrait-on dire, avec des petits fruits. Grande finale subtile, pleine de fraîcheur. Le vin ne titre que 11.2 degrés d’alcool. Splendide vin aérien et éthéré.
Trousseau plein sud 2020, marnes grises et éboulis venant de la roche calcaire de Chalandigna
La robe est d’un rouge rubis clair, elle est plus soutenue, avec des reflets rose, lumineux. Le nez de ce Trousseau est d’une grande délicatesse. On a pêle-mêle du floral, du fruit, des fraises écrasées, même une note de menthe qui vient rafraîchir l’ensemble. La bouche reflète cette fraîcheur avec de la cerise charnue, la tige du bigarreau, la fraise des bois. La longueur de ce vin est évanescente, l’alcool y est superbement intégré, c’est long en bouche et le paysage mental du sol, de la terre avec un éboulis de graviers au-dessus est en adéquation.
Pinot noir Cuvée Julien 2020, terroir argilo-calcaire
A l’œil, ce vin se présente avec un rouge rubis magnifique, étincelant qui s’assombrit au centre du verre. Ce vin tout en dentelles, tout en délicatesse, est aérien, léger. Le nez mélange des cerises, un trait végétal, du floral. En bouche, il est comme porté en lévitation, avec des nuances de roses rouges, de confiseries, de crises fraîches burlat. C’est délicieux et subtil. L’image mentale fonctionne ici aussi avec la rectitude du calcaire.
Chardonnay vieilles vignes 2018 Les Varrons, terroir d’argiles de décalcification
Cette parcelle des Varrons est intéressante, car il s’agit d’un plateau sur la commune de Rotalier avec un système viticole qui fonctionne différemment. La couche supérieure est composée d’argiles de décalcification issues de la décomposition des calcaires. La robe est juste somptueuse, d’un doré soutenu tirant vers l’ambre qui fait penser à un jus de pommes sombres. Le nez est beurré, avec même du beurre de noisettes, des poires mûres, des fruits à coques, des herbes aromatiques, des fleurs, c’est varié et c’est extrêmement complexe. La bouche est un puits de saveurs mêlées, de pommes fraîchement coupées, de noix vertes, tirées par une grande fraîcheur. Ce vin a la densité d’un liquoreux, il est puissant, marin, océanique. Il vient avec un tirant d’eau majeur, il emporte tout avec son acidité, c’est un navire énorme qui laisse un sillage absolu en bouche. Quelle bouteille ! On imagine mal qu’on puisse avoir quelque chose de plus somptueux…et pourtant !
Chardonnay Les Grands Teppes vieilles vignes, 2015
Ce vignoble de marnes rouges et de graviers est situé à la frontière des communes de Vercia et de Rotalier, dans la continuité du plateau des Varrons, mais avec une déclivité. Il est orienté sud-ouest. Ce vin est tout simplement une ode à la lumière. La fabuleuse fluorescence qui se dégage de sa robe jaune or liquide est déjà en soi une prouesse, qui est d’ailleurs souvent la marque des grands vins en biodynamie, qui semblent chargés d’une incroyable énergie intérieure qui se projette alentours. De fait, le passage olfactif est une magie absolue. On a un foisonnement de notes iodées et coquillées, une impression marine très forte en entrée, puis cela évolue vers les fruits mûrs, les épices, les poires et des notes de cédrats et citrons confits du plus bel effet. Ce millésime est solaire et cela se ressent sans que la fraîcheur des parfums en soit affectée. A chaque retour, on a quelque chose de différent et de multiple. En bouche, on passe par un rouleau légèrement perlant avant d’accéder au grand large, dans une géniale impression de plénitude. Les agrumes confits, les herbes aromatiques, le côté phosphoré s’emboîtent dans la salinité et l’acidité haute, donnant un liquide aussi long que large, qui danse sur un fil. Une synthèse improbable de plusieurs vignobles qui trouve à s’exprimer. Est-ce qu’il peut encore y avoir quelque chose de plus ultime que ce vin blanc-là ?
Les Vignes de mon Père 2008, Savagnin ouillé de 130 mois
Ce vin est issu du coteau des Chalasses, sur la commune de Vercia, fait d’argile limoneuse à forte charge caillouteuse issue des calcaires du Bajocien, le tout sur un sous-sol de marnes du Lias (comme à Château-Chalon). La comparaison est d’importance car si on devait résumer ce vin absolument somptueux, ce serait l’impression de boire un vin jaune vieilli presque 11 ans en fûts, mais avec un ouillage ! De fait, il concentre les caractéristiques d’un vin oxydatif et d’un vin ouillé dans une synthèse éblouissante ! Il ne me semble pas avoir rencontré un nez aussi complexe et changeant. C’est d’abord le côté oxydatif qui ressort avec des notes maltées et céréalières de levures et de boulange, de noix fraîches et de maïs. On est tenté de prendre une première lampée pour trouver une bouche d’une absolue gourmandise, alors que le registre est essentiellement minéral. J’ai noté levures liquides pour indiquer que le vin n’a probablement pas du tout subi de filtration mais même cette sensation levurienne devient gourmande. Les champignons, le curry, la noix verte tissent un décor de péplum où l’acidité, la minéralité, la longueur deviennent superlative. Et ensuite, sur un second passage, c’est plutôt les caractéristiques d’un vin ouillé qui prennent le dessus, avec les citrons confits, le jus de pomme camphré, les notes de miel d’acacia, un côté eau de roche vraiment touchant. La densité minérale de ce vin est hallucinante. Il est à lui tout seul une expérience absolument unique ! Vertigineux, vraiment…
Je n'ai pas pris de notes détaillées sur le
Pinot noir les Chonchons 2020 que nous avons ouvert en fin de soirée, mais il a semblé excellent à tout le monde, un vrai vin de copains, mais avec la délicatesse subtile et le fruité délicieux des rouges du domaine...bien que ce soit une cuvée négoce.
A bientôt sur Vignalis, avec quelques photos en plus
www.vignalis.com/fr/...
Bon week end à tous !
Julien