Comme chaque année depuis une dizaine d'année, j'aime passer le week end de la vente des vins des Hospices (3ème dimanche de Novembre, à ne pas confondre avec le Beaujolais qui lui arrive le 3ème jeudi!) à Beaune pour goûter les différentes cuvées des Hospices et surtout participer à la dégustation organisée au Palais des Congrés par le Comité de Viticulture pour la présentation du millésime 2006. Je n'ai malheureusement pas les "contacts" nécessaires pour participer au fameux diner "Bouchard" évoqué par F. Mauss et F. Audouze qui avait lieu à cette occasion à Beaune.

Certes les vins ne sont pas finis (en fait ils commencent à peine leur élevage!) mais c'est une bonne occasion pour se faire une idée de la qualité globale du millésime et de ses grandes caractéristiques. Loin de moi l'idée d'en tirer des vérités mais je veux juste partager mes impressions :

Le Millesime 2006 :

- Rouge :
Hétérogénéité nettement plus forte qu'en 2005. Les bonnes cuvées montrent une belle qualité de fruit avec une jolie acidité avec des tanins relativement présents. Les cuvées les plus faibles arborent des goûts metalliques voire animaux (de trâces de pourri parfois) et finissent souvent par une certaine sechéresse (trop de boisé par rapport au fruit) ou un coté cerise à l'eau de vie (alcooleux). Les couleurs ne posent en général pas de problème. Bref c'est moins riche et moins gourmand que 2005 et surtout beaucoup plus hétérogène. Par contre il y a de la matière qui ne demande qu'à être arrondie aprés les malos et l'élevage en priant que cela ne "dessèche" pas certains vins. J'ai préferré la côte de Nuits à la côte de Beaune.

- Blanc :
Se goute nettement mieux que les rouges à ce stade. Les vins sont presque tous "clairs". Ils présentent une belle vivacité en attaque, une jolie acidité balancée par du gras bien présent en bouche. C'est flatteur et, pour les meilleurs, complexe. On a envie d'en boire! Certes on trouve des cuvées trop acide (verte!) mais globalement le millésime me semble de bonne qualité. Une mention particulière pour les Meursault, les St Aubin et les grands crus (grands terroirs) sur Puligny & Chassagne.

Dégustation aux Hospices de Beaune :

Je ne suis pas un fan des vins des Hospices auxquels je reproche souvent leur sur-extraction, leur boisé asséchant et leur manque de finesse. Je ne sais pas s'ils s'en sont rendu compte ou bien s'ils ont voulu anticiper une année plus faible en fruit, en tout cas c'est la première année que certains vins voyaient des fûts de 2 vins au lieu des sacro-saints fûts neufs!

Je ne vais pas détailler les 40 cuvées! Certaines n'ont pas d'intérêt (ceux qui ont déjà gouté la longue litanie des Beaune sur-extraits dans les 2 premières lignes droites me comprendront !) et d'autres se goutaient fort mal (réducteurs).

Les cuvées que j'ai préferrées :

Beaune "Hugues et Louis Bétault" : Le meilleur Beaune à mon goût. Attaque fruité sur le cassis, belle vivacité. longueur moyenne et finale sur le réglisse. Tanins présents mais fins. 13

Volnay "Muteau" : Attaque douce et élégante. Joli fruité Framboise. Développement linéaire et longueur moyenne. Légère amertume en finale (tanins ou boisé?) 13+

Volnay Santenots "Jehan de Massol" : Belle attaque dense et concentrée. Explosif et fruité (fruits noirs). Une touche légérement métallique et une belle finale longue et élégante. Un joli vin. 15

Volnay Santenots "Gauvin" : Une attaque un peu moins franche que le précédent. Le vin est moins vif et explosif. Le fruité est plus simple et plus facile. Joli structure. 14

Pommard "Dame de la charité" : Vin plus massif et terrien. Attaque plus ronde, fruits noirs, un peu animal. Seule cuvée marquée par la vanille du bois. Joli dévelopment en bouche. 14

Corton "Charlotte Dumay" : attaque massive, dense, fruitée; Manque un peu d'élégance et de complexité mais beaux arômes de fruits rouges. Finale de réglisse et zan classique pour le crû. Jolie longueur. 15

Corton "Docteur Peste" : Très belle attaque franche. Fruité explosif (fruits rouges). Complexe, long et belle minéralité en finale. J'aime beaucoup. 16

Mazis Chambertin "Madeleine Collignon" : On change de registre. C'est complexe, long, dense, structuré, minéral et persistant à souhait. Le meilleur vin rouge! 17

Meursault-Porusots "Humblot" :
Belle attaque vive, rondeur, gras, notes agrumes, belle longueur. 15

Meursault-Genevrières "Philippe le Bon" :
Attaque serrée, dense. Beau developpement complexe. Notes de . Tres belle persistance. Superbe comme d'habitude pour ce crû. 17

Meursault-Charmes "Bahèzre deLanlay" :
Attaque plus molle. manque un peu de vivacité. gras et jolie longueur. 16

Corton-Vergennes "Paul Chanson" :
Attaque un peu floue, manque de profondeur et de longueur en bouche. Je n'ai jamais été fan de ce crû. 14

Corton Charlemagne "François de Salins" :
Légèrement réduit. On sens par contre une grosse matière avec beaucoup de gras et une jolie complexité. 16+

Batard Montrachet "Dame des Flandres" :
Attaque stricte et austère. Fermé. très grosse densité en bouche. Vin tout en tension.long tendu complexe. Sera grand! 18

Encore une fois ce ne sont que des impressions (forcément imparfaites) sur des vins en cours d'élaboration, goutés une seule fois au fût. Je serais intéressé d'avoir l'avis d'autres personnes ayant gouté ces cuvées.

Xtof

Compte tenu du nombre d'échantillon testé, je ne vais pas faire un CR détaillé pour chaque vin. Je vais donc les regrouper en 3 familles selon ma perception de leur potentiel d'évolution. Ceci n'est bien entendu pas un classement direct entre les vins mais simplement le reflet de comment je les ai gouté.

Rouges :

Trés joli potentiel : X(
Chambertin Rousseau
Echezeaux Prieur
Echezeaux Arnoux
Musigny Prieur
Lavaux St Jacques Denis Mortet
Corton Bressandes Follin Arbelet

A surveiller :
Chambertin Trapet
Charmes Chambertin Charlopin Parizot
Gevrey 5 terroirs Denis Mortet
Echezeaux Dom Perdrix
Grands Echezeaux Drouhin
Bonnes Mares Roumier (réduit)
Corton Bressandes Prieur
Corton Bressandes Tollot Beaut
Volnay Clos des Ducs Angerville
Volnay 60 ouvrées Pousse d'or
Beaune Grèves Tollot Beaut
Volnay Clos des Chênes Lafarge

Déception (à regouter) :
Gevrey clos St Jacques Rousseau
Chambertin Clos de Beze Damoy
Chapelle Chambertin Drouhin Laroze
Clos St Denis JP Magnien
Clos de la Roche M Magnien
Pommard Epenots Joillot
Pommard Perrières JM Gaunoux
Corton Vigne aux Saints Louis Latour
Echezeaux Nudant

Blancs :

Trés joli potentiel :X(
Meursault Tessons Roulot ++
Meursault Meix Chavaux Roulot
Meursault Caillerets Coche Dury +++
Meursault Genevrières Latour Giraud
Meursault Genevrières Bouchard
St Aubin Chatenière H Lamy
St Aubin Chatenière M Colin
Corton Charlemagne Bonneau du Martray
Corton Charlemagne Bouchard
Montrachet G Amiot (habituellement c'est bof!)
Batard Montrachet M Morey (+++)
Puligny Clavoillon V. Leflaive
Puligny Perrières Carillon
Chevalier Montrachet Bouchard
Beaune Clos des Mouches Drouhin

A surveiller :
Meursault Coche Dury
Meursault Charmes Buisson Charles
Meursault Charmes Latour Giraud
Chassagne Maltroie Niellon
Chassagne Vergers M Morey
St Aubin Meurgers dents de chien Larue
Corton Charlemagne d'Ardhuy
Puligny Combettes Sauzet
Chevalier Montrachet J Chartron
Beaune champs Pimonts Prieur

Déception (à regouter) :
Meursault Charmes Girardin
Batard Montrachet Coffinet
Corton Charlemagne Louis Latour
Corton Charlemagne Juillot
Bienvenue Batard Montrachet Guillemard-clerc

Xtof

Après avoir discuté par ci par là de ce dernier millésime ce week end, il semblerait que les locaux soient en général très optimistes sur les blancs en 2006, un peu moins concernant les rouges, dans lesquels il y a apparemment pas mal de tri à faire. Je ne les ai personnellement pas dégustés (pas eu le temps d'aller au palais des congrès), donc il ne s'agit que de "bruits de la vigne" en attendant mieux, plus tard.

Pierre

Pierre,

Nous revenons d'un voyage en Bourgogne.

Les faits indéniables sur 2006 : juillet caniculaire, août pluvieux et froid, septembre qui a redressé un peu le navire.
Autant dire que la vigne a subi pas mal de perturbation : maturation difficile, traitement de la pourriture ...

A titre d'exemple, le domaine Joblot à Givry a vendangé du 11 au 23/09,
le domaine William Fèvre a vendangé à Chablis du 11 au 22/09.
Dans ce dernier domaine, notre hôte nous a même avoué n'avoir pas eu besoin de la table de tri car les raisins étaient très beaux.
Même son de cloche au domaine Bernard Morey à Chassagne.

On parle de blancs à la belle maturité avec des d° parfois supérieurs à 2005, avec de belles acidités. Et des rouges plus que corrects.

Franchement, tout ça me semble intéressant

Mais ... le résultat se jugera dans le verre et, en ce qui me concerne avec tout le discernement possible.

En tous cas, le message était tout aussi clair de la part des viticulteurs : ce sera réellement un millésime de vigneron.

Quant à sa qualité, je pense qu'il est bien trop tôt pour se prononcer.
Je retiens que chacun des vignerons avec qui nous avons discuté a dû opérer des choix pas toujours faciles et que l'année est très loin d'avoir été aussi idéale que 2005.

Olivier

Effectivement, en discutant avec M. de Nicolay (dom. Chandon de Briailles), la réflexion est venue que, contrairement à 2005 dans un certain nombre d'appellations, 2006 n'était pas du tout un millésime "chaise-longue". Beaucoup de perturbations, je crois me souvenir que le domaine a eu recours au tri à la vigne, mais pas partout. De toute façon, mes réflexions ne venaient que des discussions que j'ai eues avec des cavistes de Beaune et quelques producteurs ce week end. On se retrouve dans un an ou deux pour les premières impressions personnelles et "recoupées" :)o

Pierre

"Quant à sa qualité, je pense qu'il est bien trop tôt pour se prononcer. "

Olivier;

Ce week end a l'expo des vins de Beaune d'apres ce que j'ai bu pour les rouges il n'y a pas besoin de photographie au poteau d'arrivée..En ce qui me concerne j'ai arreté les rouges au bout d'une heure, préférant me concentrer sur les 2005, voire les 2003 disponibles.

Pour les vins blancs c'etait un peu mieux, mais je n'ai pas eu de choc gustatif évident en ce qui me concerne. Les producteurs de blancs avaient beaucuop présenté de 2004 aussi, le niveau était a peu près equivalent me semble-t-il.

A part qq brillantes individualités pour 2006, tout ça ne m'a pas semblé très mur pour schématiser.

YR

Pierre,

C'est bien en ce sens que ma réflexion complétait la tienne.

YR,

A part qq brillantes individualités ...

Je souscris totalement à ces propos, ce sera effectivement un millésime de tri dans tous les sens du terme, à la vigne mais surtout en bouteille

A titre d'info, la seule cuvée dégustée sur 2006 est celle du domaine Méo-Camuzet, un peu par accident (cfr. mon CR) et je pense qu'il faut aussi laisser les malos se faire pour rejuger ensuite les vins.

Olivier

YR,

D'accord avec toi sur les rouges. Moi aussi j'en ai eu un peu marre de gouter les rouges. Alors je suis vite revenu aux blancs.

Par contre je suis resté sur les 2006 uniquement car je dois dire que j'ai du mal à passer alternativement de vins "avant malo" à des vins post "malo". Je préferre me mettre une fois pour toute dans un des scénarios.

Pour ce qui est des blancs, ils vont perdre fatalement une partie de leur vivacité avec la malo. J'espère seulement qu'ils ne seront pas un peu trop "grassouillet". Si je ne m'abuse, 1983 avait vu aussi des attaques de pourritures similaires (même si la maitrise oenologique est nettement meilleure aujourd'hui). Et il y a eu des très jolies choses en blancs 1983 (mais très peu en rouges !) ....

Xtof

XTOF,
Je te rejoins sur ton commentaire de dégustation des vins des hospices. Concernant la notion de "sur-extraction" dont tu parles je pense qu'il faut surtout parler cette année de concentration ; à savoir que les rendements dans les vignes des Hospices sont particulièrement bas (environ , je pense, aux alentours de 35 hecto/H). Dans un style concentré, je pense que le millésime 06 me semble avoir été bien négocié par R.Masse. On aime ou on aime pas, et c'est vrai que l'on pourrait reprocher un certain manque de finesse , mais je trouve que cette année malgré une prise de bois assez rapide en général sur les rouges, les vins des hospices ne m'ont pas paru (pour une fois) sur-boisés. Les vins sont bien équilibrés , et quelques cuvées sont quand même d'un niveau assez impressionnant compte tenu du millésime . Les blancs par contre, excepté le Bâtard et les Charlemagnes , m'ont semblé cruellement manquer de tension minérale !(mais à revoir; je pense qu'il restait un peu de sucre dans quelques cuvées).