Domaine de Dernacueillette - Le Vin 2010
Je me dois de partager ici ma rencontre inoubliable avec un vin totalement original. De ces vins qui vous ouvrent soudainement, à la première gorgée, des horizons gustatifs nouveaux.
Non, je n'avais encore jamais rien bu de tel.
La robe est pourpre intense, très jeune. Assez sombre.
Le nez est très atypique, étonnant. Des fragrances presque entêtantes de coulis de petits fruits noirs, rehaussées de notes de myrte, et d'un trait vert, frais, végétal et floral. C'est vraiment un nez surprenant, de grande ampleur aromatique, persistant.
La bouche est dans la continuité du nez, de grande ampleur, sur un fruit exubérant (le coulis de mûre) finissant sur une note fraîche et végétale/florale. Presque une petite impression d'eucalyptus en finale. Le volume est impressionnant, le vin insolemment jeune, sur un registre aromatique vraiment très original. Si je ferme les yeux, ce vin m'apparaît comme un vin de fin d'été, m'évoquant les dernières chaudes journées de septembre. Je me promène sur un chemin de pierres chaudes (il y a une forte minéralité dans ce vin) bordé de ronces et de framboisiers, sous la lumière orangée de la fin d'après-midi. Sur ces arbustes qui envahissent les bordures, les fruits trop mûrs tombent sur le sol et s'écrasent sous mes pas. Le sol est jonché de tâches pourpres. Je m'approche d'un roncier pour cueillir une mûre sauvage. Je vois sous la haie des petits brins d'origan et de menthe sauvages. Je croque dans la petite mûre dont les grains sont couverts de ces poils qui apportent cette touche végétale aux fruits de la ronce.
Voilà à quoi ressemble ce vin.
Je regarde l'étiquette. Corbières? Ouais... pourquoi pas. J'aurai assurément placé ce vin dans le sud, mais pas ici, pas à 15 km de Cucugnan! Je n'avais jamais trouvé cette fraîcheur végétale/florale associée à la minéralité de la bouche sur un vin de cette appellation. Je regarde à nouveau l'étiquette de plus près et j'y lis: "Guillaume Boussens - Vigneron d'altitude". C'est donc ça. C'est donc ce terroir des Hautes Corbières, ces vignes plantées là à 600 m qui, associés au travail non interventionniste remarquable du vigneron, sont à l'origine de mon interdiction. Je viens de découvrir là un terroir exceptionnel et le baptême gustatif que m'a offert cette bouteille restera inoubliable.
Commentaire général: Superbe. L'alliance de cette puissance aromatique très pure sur le coulis de mûre et de la fraîcheur végétale/florale de la finale ne ressemble à rien de connu dans l'appellation. C'est donc à ce jour le plus grand Corbières que j'ai bu, sans la moindre hésitation. Ceci étant dit, j'apporterai juste une petite nuance: le vin est à mon goût beaucoup trop jeune... C'est un petit bébé dont j'imagine sans peine l'immense potentiel de garde Il va falloir être patient et avoir les nerfs solides pour regoûter ces vins à parfaite maturité...
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