En 1895, une guerre d'indépendance oppose les Cubains, assistés par les Américains, aux Espagnols. Après la victoire, comme il fallait s'y attendre, Cuba passe sous la tutelle officieuse des USA. La République de Cuba est proclamée, les USA se retirent officiellement du pays mais conservent la mainmise sur ses affaires intérieures.
Quand Castro arrive au pouvoir, de nombreux producteurs sentent le vent tourner et choisissent de s'exiler. C'est ainsi que Punch (fondée en 1840, essentiellement pour le marché britannique, par Miguel Lopez, d'après le nom d'un journal satirique londonien très en vogue à l'époque), part s'installer au Guatemala et crée Macanudo (Fantastique en quechua). Par la suite, la marque échoit dans le giron de Temple Hall, à Kingston, numéro 1 du cigare en Jamaïque.
En 1969, la General Cigar Company s'offre Temple Hall. Le légendaire Alfons Mayer, originaire de Cuba et mort en 2006 (à 79 ans) d'une tumeur au cerveau, donne ses lettres de noblesse à la marque. Il restera fidèle au cigare toute sa vie, allant jusqu'à créer sa propre marque (avec l'appui de la GCC) après sa retraite, passant le plus clair de son temps au Club Macanudo de New York à évoquer le passé en sirotant du rhum et grillant des puros.
Les cigares 100% jamaïcains sont aujourd'hui assez rares (Barrington House, Royal Jamaica), mais pour en avoir fumé pas mal lors de mes fréquents voyages en Allemagne (je pense notamment aux cigares signés John Aylesbury, qui produisait aussi d'excellents puros brésiliens), je peux vous garantir que ça valait le déplacement (et pourtant je ne suis pas fan de reggae).
Bref. En 1971, sous la houlette de Ramon Cifuentes de Partagas, General Cigar lance un nouveau Macanudo à base de tabacs dominicains, jamaïcains et mexicains. La cape de trois ans d'âge (chose rare pour l'époque), bien grasse, en provenance des plantations du Connecticut de la famille Cullman, propriétaire de la GCC, développe des saveurs sucrées propres à séduire l'amateur texan et le producteur hollywoodien. En 2000, après des années de bons et loyaux services, l'usine de Kingston ferme ses portes et la production s'installe République dominicaine, autre terre promise du puro caribéen.
Le Macanudo Maduro Diplomat est (comme son nom l'indique, le format diplomat ou ambassador renvoyant généralement à ce type de perfecto assez spécifique, un peu rondouillard, je pense notamment au Leon Jimenes Double Maduro) un excellent cigare de fin de repas, rond et équilibré, un peu animal, à siroter avec un bel armagnac pas trop sec ou un ron anejo de 10 ou 15 ans d'âge (Botran, par exemple, ou Embargo Esplendido). La prise en main d'un cigare, sa façon de bouger, rouler sous les doigts, se déplacer, son toucher, font partie des plaisirs de l'amateur. A ce titre, le format ambassador est un des plus agréables qui soient.