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Quelques vins (beaucoup !) bus dans un appartement privé

  • François Audouze
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Quelques vins (beaucoup !) bus dans un appartement privé a été créé par François Audouze

Je me présente à 17 heures à l'appartement pour ouvrir mes bouteilles mais aussi éventuellement d'autres. J'ouvre le Brane Cantenac 1921 d'un niveau mi-épaule et le bouchon paraît comme brûlé. L'odeur sentie par le goulot est assez torréfiée. Est-ce que le vin va s'épanouir ? Je ne sais pas. L'Arche Vimeney cru classé de sauternes 1921 au niveau dans le goulot et d'une couleur merveilleuse exhale un parfum d'agrumes délicats. Il ne posera aucun problème. J'ouvre aussi La Tâche 1986 que j'ai apportée. Le parfum bourguignon est d'une rare subtilité. On me demande d'ouvrir certains apports qui arrivent au compte-goutte dont le Screaming Eagle que nous sommes allés chercher dans la cave d'Ed. J'ai demandé à Ed d'en goûter un peu à l'ouverture. J'ai fait un vœu, car c'est la réalisation d'un rêve.

Du fait de l'abondance, mes descriptions des vins seront plus que succinctes, et je ne suis pas sûr que l'ordre des vins soit le bon.

Pour l'apéritif, nous commençons par un Chateauneuf-du-Pape Cristia Vieilles Vignes magnum 2006 qui est joyeux, réjouissant, faisant plaisir à boire dans sa jeunesse.

Il est suivi d'un Chateauneuf-du-Pape "Pure" domaine de la Barroche magnum 2005 que je trouve particulièrement brillant. Il est remarquablement bien fait.

Nous passons à table et nous goûtons deux vins blanc américains : le Marcassin Hudson Vineyard Carneros Chardonnay 1993 et le Marcassin Gauer Vineyard Alexander Valley Chardonnay 1993. Le premier a un léger défaut qui exacerbe son côté américain, alors que le second est délicieux, sans lourdeur, avec beaucoup de charme, sans les excès habituels des chardonnays américains.

Le Meursault Perrières Jean François Coche Dury 2002 est pour moi un modèle de fraîcheur et d'expression alors qu'Hervé Bizeul préfère le deuxième Marcassin.

Le Chateauneuf-du-Pape Lou Destré d'Antan Christian Barrot 1976 est une merveille de Chateauneuf-du-Pape. Il a un équilibre et un charme qui m'ont convaincu, comme le Chateauneuf-du-Pape Domaine du Pégau 1997 aux aspects bourguignons d'une rare délicatesse. Sur des langoustines cuites à la perfection, ces vins se sentent bien.

Le Vosne-Romanée Les Chaumes domaine Méo-Camuzet 1996 joue un peu en dedans à côté de ces Chateauneuf-du-Pape.

A l'arrivée du bar je demande de l'indulgence pour le Château Gruaud Larose 1921 dont le parfum est un peu torréfié. Quelle n'est pas ma surprise de voir que le vin n'a pas du tout en bouche le torréfié que je craignais. La couleur est divine, sans le moindre tuilé et en bouche le fruit est envahissant, fruit rouge d'une grande précision. Je pense "ouf" pendant que mes convives sont surpris de la présence de ce grand vin. L'accord avec le bar se trouve naturellement.

J'en profite pour servir mon autre vin, La Tâche domaine de la Romanée Conti 1986 au nez d'un charme extrême. Sentir ce vin, c'est ouvrir la porte du domaine comme on ouvre la caverne d'Ali Baba ou l'armoire de ses souvenirs. Alors que j'avais adoré la Romanée Conti 1986, si j'aime La Tâche de la même année, je ne ressens pas autant que je souhaiterais l'émotion de La Tâche. C'est un grand vin mais avec une vibration un peu atténuée.

Laurence pense que ce serait le moment de boire un Chateauneuf-du-Pape sans étiquette et sans année, à la forte poussière opacifiant le verre, qui doit être des années 60 et provient de ses grands-parents. Hélas, le vin est bouchonné et malgré mes espoirs, ne reviendra jamais à la vie.

Nous goûtons maintenant en intermède un Meerlust Rubicon Afrique du Sud magnum 1984 et Ed nous raconte la rareté de son origine. Ce vin est solide, carré mais assez simple d'expression.

Nous faisons un intermède à l'aveugle avec Les Sorcières du Clos des Fées, Côtes du Roussillon 2010. J'avais bu ce vin lors des primeurs à Bordeaux. Il s'est développé et est d'une grande sincérité.

Nous entrons maintenant dans le monde des vins à forte charpente et au degré d'alcool important. La Petite Sibérie Côtes de Roussillon Villages magnum 2004 est un vin que j'apprécie dans sa jeunesse pour un final d'une fraîcheur mentholée. Hervé Bizeul est fier que son vin ait un fort cousinage avec le Screaming Eagle cabernet sauvignon Napa valley 2003 qui titre 14,6°. Ce vin a le plaisir généreux d'une Mouline 2005. Il est puissant, au fort fruit noir et poivre, mais son final frais signe un très grand vin. Il est plus complexe que la Sibérie, mais les deux ne se nuisent pas.

Viennent ensuite de nouvelles raretés: Sine Qua Non "the 17th nail in my cranium" syrah Californie 2005 qui titre, excusez du peu 15,8° et le Sine Qua Non "a shot in the dark" syrah Californie 2006 qui titre 15,5°. Il est certain que ces vins généreux sont plaisants à boire. Mais on est entraîné dans une direction qui n'est pas la mienne, où l'excès de fruit et d'épices peut devenir monotone. Sur le délicieux filet de bœuf ces vins sont à leur aise et le mariage se fait bien.

Il est temps de goûter l'Arche Vimeney Sauternes 1921. C'est un agréable sauternes fort aimable, mais qui n'a pas la complexité du Caillou 1921 bu tout récemment. Il est acceptable mais sans histoire, malgré sa belle couleur et son parfum d'agrumes. Il joue mezzo voce.

Hervé a apporté une belle curiosité : un Sémillon Lagarde de Mendoza Argentine 1942. La bouteille porte le n° 17. Pour une curiosité, c'en est une. Le vin s'est oxydé et évoque les vins jaunes du Jura. Il brille surtout par son originalité et accompagne bien des tranches de comté.

J'ai apporté en cachette le vin que j'avais ouvert à Rennes lors de la découverte du vin de 1690. C'est un madère d'une bouteille très ancienne que je date de 1780 à 1840. Il a une force alcoolique extrême qui fait penser à certains qu'il s'agirait d'un whisky. Mais plusieurs convives confirment l'hypothèse madère. Il a un peu perdu de son fruit, mais il a encore une force persuasive extrême.

Si je devais décerner des brevets aux vins de ce soir, je les donnerais à : 1 - Chateauneuf-du-Pape Domaine du Pégau 1997, 2 - Chateauneuf-du-Pape Lou Destré d'Antan Christian Barrot 1976, 3 - Château Gruaud Larose 1921, 4 - Meursault Perrières Jean François Coche Dury 2002, 5 - Screaming Eagle cabernet sauvignon Napa valley 2003. Mais tous méritaient leur présence à ce beau dîner.


Cordialement,
François Audouze
29 Mai 2011 02:06 #1

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Réponse de Hervé Bizeul sur le sujet Re: Quelques vins (beaucoup !) bus dans un appartement privé

Je suis invité par un client américain, grand amateur de vin, extrêmement passionné, passionnant et sympathique, qui réunit dans son appartement parisien des vignerons qu'il aime, pour un repas informel et détendu autour de quelques vins cultes.

Je ne sais pas vraiment ce qu'on va boire, je sais son épouse fan de la petite Sibérie et voyage donc le matin même avec un magnum de 2004. Je découvre au dernier moment que François Audouze sera là, alors je cherche dans ma cave un vin ancien qui pourrait l'amuser et qui supportera la voyage. Un Sémillon 1942 de Mendoza, acheté au domaine il y a bien longtemps et que je pensais liquoreux devrait pouvoir tirer son épingle du jeu. Bon, c'est raté. Le reste est fort réussi.

J'arrive vers 20 heures, tout le monde est là, la cuisine embaume et tout le monde a plutôt l'air gai : on va boire sans trop se prendre la tête, ça me va... Il y a surtout des vignerons de CDP, véritable concentré de France dans la France. Je crois que j'aime les gens de là bas autant que les vins de là bas ;-)

Je reprend la liste des vins dans le bon ordre ;-), mais il n'y avait que peu d'erreurs dans le descriptif de François. En plus, ça me fait gagner un temps précieux... La cuisine est superbe, parait simple mais a demandé un travail colossal de préparation, assurée par le futur second de Thierry Marx à Paris. Les produits, à la base, sont exceptionnels. L'ambiance est chaleureuse. Il n'y a pas d'ordre, c'est décousu, on dirait un truc d'étudiant alors que nous allons boire quelques uns des vins les plus célèbres du monde. Personne ne semble s'occuper de la température des vins, ni de la décantation, ce qui m'étonne un peu.

Pour l'apéritif, nous commençons par un Chateauneuf-du-Pape Cristia Vieilles Vignes magnum 2006, sans qu'on sache vraiment pourquoi. C'est sans aucun doute le meilleur 2006 Châteauneuf gouté à ce jour (par moi..), le vin a tout, et surtout beaucoup de Grenache. Nez, soyeux, volume, longueur, il caresse le gosier et nous réjouis. 3° de température en moins et on aurait bu que ça. Mais bon, j'en ai déjà trop bu... On parle de 2006, totalement éclipsé par 2005 et 2007 et ça me donne envie de m'y repencher sérieusement : les vins sont merveilleux en bouteilles et on doit encore en trouver à des prix raisonnable, vu que Bob avait gardé ses 100 pour 2005 et 2007.... Dominique nous rejoint et sera ma voisine de table, de quoi passer une bonne soirée...

Il est suivi d'un Chateauneuf-du-Pape "Pure" domaine de la Barroche magnum 2005, un des vins préféré de Bob qui en boit dès qu'il peut au restau ;) et l'a de nombreuses fois récompensé par un 100. Je l'ai mieux gouté auparavant en bouteille. Le vin est trop chaud, il aurait du être décanté et du coup, il est juste exceptionnel alors qu'il aurait pu être... inoubliable. Moins soyeux que Christia au niveau texture, plus "grenache traditionnel", il a en revanche une palette aromatique incroyable, changeante et complexe et une longueur phénoménale, la plus importante, indiscutablement, de la soirée, plus même que la petite Sibérie ce soir là, ceux qui ont gouté comprendront. C'est très très bon, mais pas dans le bon timing. Je me jure de le regoûter plus tard, et puis, bien sûr, j'oublie, alors, là, je suis pas content. Il est mémorisé dans ma petite tête car au delà d'un très bon vin, il a une personnalité propre, ce qui n'est pas courant. C'est comme son papa, Julien, en grande forme ce soir là ;-)

Nous passons à table et nous goûtons deux vins blanc américains : le Marcassin Hudson Vineyard Carneros Chardonnay 1993 et le Marcassin Gauer Vineyard Alexander Valley Chardonnay 1993. Le premier possède une très légère déviation liègeuse détectée par Yvan qui ose s'exprimer sur le sujet, ce que personne n'ose faire, parce que c'est si faible que je pense que seuls des pro peuvent y être sensibles. Ce n'est pas du TCA mais une influence du liège autre, plus discrète, qui empêche le vin de se développer. Il n'est pas conforme, mais au restaurant, c'est le genre de vin qui peut vous causer une grosse, grosse engueulade avec le sommelier qui peut ne pas être d'accord avec vous. Il est tout à fait buvable, mais, du coup, le Gauer lui met une grosse claque. C'est la première fois que je bois un Marcassin Chardonnay et je suis totalement sous le charme : c'est mûr, certes, mais pas plus qu'un Montrachet de la Conti, et c'est à la fois riche et frais, tout en retenue, fruit compact mûr mais pas trop, boisé bien intégré, encore explosant de jeunesse, parfait pour une petite baguette fraiche et du beurre cru de Bordier.... C'est un très grand vin, parce qu'il est très bon, d'une part, parce qu'il a, là encore, une personnalité propre. J'en reboirai volontiers...

Le Meursault Perrières Jean François Coche Dury 2002 est dans une phase de totale fermeture. Le vin est désuni, manque un peu de maturité (surtout après les autres...), a peu de fruit et une acidité mordante. On est pas sur plaisir, contrairement à un meursault générique 1998 bu il y a peu et qui là, aurait pu lutter. Mais bon, il est difficile de lutter contre la légende, alors, je me tais. Pas persuadé que le temps va arranger les choses, Meursault n'étant pas Chablis Grand Cru...

On patiente avec un Meerlust Rubicon Afrique du Sud magnum 1984, chargé d'histoire pour notre Ed. Fait pendant l'apartheid, le vin est bluffant de jeunesse, encore noir, extrêmement fumé au nez, assez soyeux mais assez court. On est assez dur avec lui. Yvan s'amuse à proposer une dégustation comparative avec les des CC de Bordeaux du même millésime. Sur un morceau de viande grillée, on lui aurait fait sa fête et j'en garde pour ma part un très bon souvenir.

Le Chateauneuf-du-Pape Lou Destré d'Antan Christian Barrot 1976 est un Châteauneuf comme on en fait plus, "à l'ancienne". Sans doute peu égrappé, acidité corrigée, peu de cuvaison, peu de remontage, peu d'élevage et peut-être pas totalement de 1976... Mais il y a prescription et on regrette souvent cette époque quand on boit certains CDP actuels... Peu de texture, couleur moyenne mais nez superbe, complexe et complet; la bouche déçoit un peu par rapport au nez. C'est néanmoins bourré de charme, effectivement, et surtout de personnalité, avec des fins de bouche assez fraîches et des gammes aromatiques fraîches et attirantes. On parle boutique, avec le producteur, et de la manière dont on faisait le vin à l'époque, pour le meilleur et pour le pire. Là, c'était pour le meilleur. Mais on est dans le bon, l'émotif, le charmant, pas dans le grand, et ça n'empêche pas d'apprécier. On change de registre avec le Chateauneuf-du-Pape Domaine du Pégau 1997 que Laurence a apporté. Dans ce vin, il y a tout, et surtout l'immense talent d'une vigneronne qui sait lequel de ses vins allait se présenter au mieux ce soir là : et bien c'est lui. Le vin a toute la délicatesse et le charme du Grenache à maturité, dans la vigne et dans le temps, il fait l'unanimité avec ses notes compotes, ses poivres divers et variés, sa bouche caressante et tout simplement délicieuce. Ce n'est pas le plus truc ni le plus machin, c'est le meilleur, ce jour, là, point.

Les langoustines de compétition ne sont sans doute pas non plus un compagnon parfait, sur le gingembre, les épices, le combava, et c'est pareil sur le Vosne-Romanée Les Chaumes domaine Méo-Camuzet 1996 qui n'est pas à sa place ce soir là, au niveau du menu : le vin est austère, assez fermé, de grande qualité mais à contre-pied. Pas de chance pour Yvan...

François sert le Château Gruaud Larose 1921, au nez qui évoque les notes fumées du vin sud africain. Surprise, effectivement, c'est le nez, simplement, et en bouche, le 21 tient la route pendant vingt bonnes minutes, se permettant même de nous suprendre part quelques tannins encore perceptibles. La couleur est assez soutenue pour un vin de cet âge (J'ai peu bu de 21), le fruité sympathique, la bouche agréable et la finale douce et fine, mais avec encore du fond. C'est un beau vin ancien. Le bar est le meilleur que j'ai mangé cette année et, très étonnament, sa chair à la texture très particulière (il est très frais...) se marie bien avec le... Brane-Cantenac. Car moi, il m'a semblé boire un Brane Cantenac, mais bon, j'étais peut-être déjà allumé ;-)

Arrive La Tâche domaine de la Romanée Conti 1986. Euhh. Je repense à la discussion sur les les vins autrichiens, la dégustation aveugle, etc... Personne ne semple impressionné. Et personne ne se répand en dithyrambes. Le nez est somptueux, comme souvent sur les vins de la DRC, mais il faudrait s'isoler et se concentrer pour en saisir la quintessence. En bouche, c'est un pinot noir pas très concentré, assez fin, pas très long. Personne ne défaille, mais disons qu'il y autour de la table des gens habitués à boire du lourd et à qui il en faut plus pour se déjuger devant une étiquette. Bon, mais je n'y reviendrai pas. A mille lieux des 1990, au top de mon panthéon personnel en ce moment..

Laurence nous offre un vin ancien, bouchonné depuis toujours, dommage... François pense qu'en lui laissant du temps, il va se refaire... J'ai oublié ma baguette magique, alors, bien sûr, ça ne change pas...

j'avais mis deux quilles de Sorcières du Clos des Fées 2010 et j'ai bien fait. Le vin est bien sûr plutôt de la France d'en bas ;-) mais il explose de fruit et nous rince la bouche. 15 minutes après, Claudine me tend le fond d'un verre : réchauffé, le vin a perdu la moitié de ses qualités : de bons verres, la bonne température, on boit deux fois meilleur pour le même prix.... Grande sincérité me plait assez ;-)

Le Screaming Eagle cabernet sauvignon Napa valley 2003 est indiscutablement un grand vin. Ce n'est pas aussi démonstratif que je l'imaginais, au final, et le vin m'évoque après coup l'adjectif "classe". Le vin a de la classe, de la complexité, de la retenue aussi et une très belle épine dorsale de tannins d'une grande élégance. Voilà typiquement le vin qui m'aurait piégé dans la dégustation LPV de Saint-Emilion tant il n'est pas typé "nouveau monde". Laurence Féraud donne l'idée de mettre la petite Sibérie à côté, j'adhère à l'idée que je n'aurais pas eu spontanément. Mais du coup, un peu frais à l'ouverture, le magnum est fermé à double tour, le vin ne minaude pas ce soir là mais, l'un à côté de l'autre se mettent presque en valeur l'un l'autre. C'est très étonnant, en fait, et le duo fonctionne bien, l'un plus sur les épices, l'autre sur le fruit noir, les deux longs et frais malgré la richesse alcoolique. Intéressant.

Les deux Sine Qua Non "the 17th nail in my cranium" syrah Californie 2005 et "a shot in the dark" syrah Californie 2006 sont deux vins assez hallucinants, en cela que malgré leur richesse, leur densité, leur complexité, ils restent stupéfiant d'équilibre. La patte du vigneron est évidente, très intrusive, mais le tout est remarquablement fait, à la hauteur du prestige et du prix de ces vins, tout à fait uniques et exceptionnels. Les USA ont sur se créer de grands vins cultes autochtones et pas sur du vent : les textures sont formidables, extrêmement serrées et compactes, sortes de liqueurs tapissant le palais de tannins soyeux, crémeux et raffinés. Mais c'est très, très, très, très concentré et, même si c'est particulièrement réussi dans le genre, en boire une bouteille à deux me semble relever de la punition et non du plaisir. On était 16, une bouteille, c'était bien...

Le Sauternes Arche Vimeney 1921 n'a que peu d'intérêt. Le sucre résiduel s'est effacé, les traces d'oxydations sont trop présentes, le vin ne devait pas être terrible au départ, le temps n'a rien arrangé et vu ce qu'il y a sur la table à finir, ce serai du vice que d'y revenir. C'est bien sûr toujours émouvant de penser que 1921 est l'année où on a inventé "la Vache qui rit", celle du premier vol en hélicoptère ou de l'exécution de Sacco et Vanzetti, mais à part ça, je passe...

J'ouvre mon 1942 qui se révèle être un Sémillon "comme un vin jaune". Pour une surprise, c'est est une, et surtout une déception. Comme tous les vins oxydé, son immense qualité est d'être oxydée, ce qui pour tous les autres vins est un défaut. Je le sers sans conviction, les amateurs s'extasient, les autres, dont je suis, se désolent, même avec le Comté, délicieux mais trop affiné pour le vin au point qu'on a même pas le mariage espéré...

Bon, je me refais une petite lichette de Christia 2006, en douce, sur le fromage, avec le Pégau, ce sont les deux vins de la soirée...

François nous raconte son voyage à Rennes et sa découverte du vin de 1690. On est pas vraiment concentré et un peu chaud, et puis on est du Sud, et encore jeunes et fougueux, alors, on se conduit pas bien et on est un peu dissipé. François nous rappelle à l'ordre vite fait bien fait (désolé, François...) et c'est vrai que la bouteille est jolie. Et puis 1690, c'est un année importante pour Claudine, celle ou Henry Habert de Vauboulon est nommé nouveau gouverneur de la Réunion et où il commence à vouloir lever des impôts auprès des quelques familles de l'ile et à se disputer avec le père Hyacinthe, ce qui ne sera pas sans conséquence sur l'avenir de l'ile Bourbon ;-). Mais à part ça, le vin est un vin oxydé, qui ressemble à un vin oxydé, 20, 100 ou 400 ans plus tard...

Il est tard, on a trop bu, très bien mangé et je suis prêt désormais à payer cher quelques vins américains si l'occasion se présente. Merci Ed !
29 Mai 2011 17:32 #2

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Merci à vous deux, ces deux avis mis en parallèle sont très instructifs.

Luc
29 Mai 2011 17:40 #3

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Très belle sélection de vins avec tout l’hétéroclisme que j’apprécie. Mettre à coté deux Marcassin et un JFCD ou un Screaming Eagle et une Petite Sibérie, voilà des bonnes idées. J’espère que l’on aura un petit commentaire d’Hervé, et s’il y a une petite histoire sur ce Lagarde 1942 ça peut être chouette. François, merci pour ce CR.

Att.

Fabien.
29 Mai 2011 17:41 #4

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Hervé, ce n'est pas le vin de 1690 que tu as goûté, mais un Madère qui a un bon siècle de moins. Il est donc madérisé et non oxydé ;)

Eric
Mon blog
29 Mai 2011 17:44 #5

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Le commentaire d'Hervé est arrivé avec que je poste mon message sans que je le vois. Merci, superbe dégustation et trés bons commentaires de vous deux.

Att.

Fabien.
29 Mai 2011 17:47 #6

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Merci à vous deux, ces deux avis mis en parallèle sont très instructifs.

Tout à fait (tu)

D'ailleurs, Hervé, si tu pouvais aller désormais à chaque soirée où va François, nous t'en serions très reconnaissants ;)

Eric
Mon blog
29 Mai 2011 17:49 #7

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Lors d'un lointain séjour en Af du Sud j'ai bu beaucoup de Meerlust Rubicon qui était le vin favori de nos amis locaux .
Les vins étaient jeunes mais vraiment délicieux et en adéquation avec la beauté du domaine .
Dernièrement j'ai ouvert un 1993 irrémédiablement bouchonné. Je n'ai donc pas pu juger les qualités au vieillissement :(
29 Mai 2011 21:15 #8

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Pour les Pérrières 2002, l'été dernier il s'était montré bien de son terroir, la rectitude profonde avec finesse et élégance, mais aussi un quart de tour fermé. C 'est vrai qu'on est loin du style d'un village ou d'un Chevalière 2002 très expressif aussi bu l'année dernière.

Intéressant les 2 CRs, on imagine bien le dîner bruyant et désordonné, c'était des Bacchanales? :D

Damien
29 Mai 2011 22:04 #9

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Bonjour Herve,

Je te rejoins sur Sine Qua None dont j''ai la chance (depuis la fameuse dégustation de St Emilion d''ailleurs) d''être allocataire, une texture incroyable, grosse concentration, beaucoup de complexité mais difficile de boire toute la bouteille si on est peu nombreux car la concentration fatigue, c''est un peu comme un Porto.
J''ai pas encore bu ces 2 bouteilles qui dorment en cave. Je ne pensais pas encore les boire avant quelques années, qu'en penses tu?

Merci et amities,
Didier
PS: Comme tu le sais si tu passes sur Boston, fais moi signe.
29 Mai 2011 23:54 #10

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  • François Audouze
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Réponse de François Audouze sur le sujet Re: Quelques vins (beaucoup !) bus dans un appartement privé

Hervé,
Merci pour ce très beau compte-rendu.
Il y a pas mal de jugements communs, les miens étant moins argumentés que les tiens, mais dans la même direction.
La gestion des températures était très difficile à faire. Je n'ai pas osé mettre des vins dans le minuscule frigo, car souvent, ça les rétrécit.

Eric, merci pour la vacherie ;)


Cordialement,
François Audouze
30 Mai 2011 01:00 #11

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La photo de mon avatar a été prise lors d'un repas à la bodega Lagarde (Lujan de Cuyo).

Att.

Fabien.
30 Mai 2011 02:21 #12

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Très agréable de slalomer entre vos deux CR, messieurs! Merci pour l'effort de rédactionnel et pour le partage de cette belle soirée aux accents forts particuliers : du bricolage... de très haute volée, de la bonne franquette... articulée par de méticuleux artistes... ça avait l'air très bien!
Cheers!

"Damien pour ce soir, va nous chercher une bouteille de précision à la cave."
Ma grand mère, 89 ans.
30 Mai 2011 10:14 #13

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Ok c'est osé et futile voire pire mais la proximité des mots me fait sourire :

"On patiente avec un Meerlust Rubicon Afrique du Sud magnum 1984, chargé d'histoire pour notre Ed. Fait pendant l'apartheid, le vin est bluffant de jeunesse, encore noir, ..."

Plus sérieusement j'ai beaucoup aimé les 2 récits .

Olivier Dranesas
30 Mai 2011 12:59 #14

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Vraiment instructif les deux CR par des personnalités différentes.
Les avis ne sont pas si éloignés en essayant de lire quelque peu entre les lignes.

Didier

Didier
Oenophile, personne qui prend la vie du bon coteau.
30 Mai 2011 19:56 #15

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Juste pour raconter l’histoire d’un des vins de ces deux très beaux CR.

Le domaine Lagarde avait pour coutume comme il était courant dans la région il y a pas mal d’année de couper leur vin rouge avec 5% de vin blanc pour le rendre plus suave et donner une meilleur stabilité à la couleur. Les années considérées comme exceptionnelles Lagarde élaborait un sémillon en vendange tardive à cette fin. Un tonneau de 1.800 litres sur le millésime 1942 a été gardé (oublié ? et retrouvé en 1975), puis fini d’être embouteillé en 1990. En effet, ce vin est une curiosité.

Att.

Fabien.
04 Juil 2011 01:16 #16

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  • François Audouze
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Merci de cette précision qui fera plaisir à Hervé qui avait déniché cette curiosité.


Cordialement,
François Audouze
04 Juil 2011 10:22 #17

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Génial!
On ressent l'ambiance de la soirée en plus.

Cordialement,
04 Juil 2011 14:46 #18

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Si les avis se ressemblent, c'est qu'il me manque au moins le décodeur pour lire ceux d'un des deux rédacteurs ... Joli parallèle en tous cas.

O.
07 Juil 2011 12:00 #19

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Hervé disait:

Chateauneuf-du-Pape Cristia Vieilles Vignes magnum 2006, sans qu'on sache vraiment pourquoi. C'est sans aucun doute le meilleur 2006 Châteauneuf gouté à ce jour

J'ai relu ce post par hasard, je confirme tout le bien qu'écrit Hervé de ce vin, issu d'un domaine produisant des vins exceptionnels depuis 2005.
Un domaine qui me parait injustement absent d'LPV.

Stéphane
25 Sep 2011 18:29 #20

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