Faire une verticale d’un des trois meilleurs domaines à mon sens de l’appellation Moulin à Vent sur 13 millésimes, d’un domaine ancien et installé du Beaujolais, est un luxe dont je ne pouvais faire l’impasse tant j’aime les vins d’Eric Janin et ai eu l’occasion d’adorer quelques millésimes ancien de son père Paul.
La modestie et la simplicité de ce vigneron pointilleux, excellent dégustateur doutant toujours de sa production, méritait une revue de détail, qui fût une première pour le vigneron, auprès des amateurs du Cave SA pour lui apporter un satisfecit que le vigneron lui-même n’imaginait sûrement pas à ce niveau.
Les conclusions plus qu’enthousiastes de grands amateurs de finesse bourguignonnes expliquant qu’avec de tels vins il devenait absurde de continuer à acheter des vins 10 fois plus chers mais pas plus grands, a fait rougir Eric Janin, mais l’a je l’espère conforté dans le chemin qu’il poursuit dans sa quête de production de grands Moulin à Vent traditionnels du Beaujolais.
Ce soir, c’est la cuvée du clos du tremblay que nous avons dégustée, vin issu de lieux-dits de 1,5 hectares (dont 1,1 ha de vignes de 80 à 100 ans) qui est bien sûr vinifié en macération semi-carbonique (donc vendange entière) après des macérations de 12 à 14 jours, puis élevé en vieux foudre.
Ce vin issu de sols granitiques sablonneux avec quelques veines d’argiles rouges est produit de façon individuelle depuis le millésime 1991, auparavant, toute la production du domaine entrait dans un seul Moulin à Vent (avec les Vignes du Domaine du Tremblay et les Vieilles Vignes de Greneriers, les deux autres cuvées actuelles).
La verticale s’est effectuée des millésimes les plus récents vers les plus anciens, et j’avoue que ce fût une réussite tant la pureté et précision des premiers n’ont pas écrasé les fantastiques plus anciens millésimes.
Les 12, 11, 10 et 09 ont été carafés 3 heures, tous les autres millésimes ouverts 3 heures avant et les 91, 90 et 85 décantés à la dernière minute.
Une dégustation unique, sûrement la plus belle à laquelle j’ai eu la chance de participer par son homogénéité à très haut niveau (4 grands vins et 3 en devenir sur 13 vins bus) et que je relate ci-après avec un immense plaisir :
Moulin à Vent Domaine Janin « Domaine des Vignes du Tremblay » 2012
[size=x-small]Vendange entière à 80%[/size]
Ce millésime difficile où Eric Janin a décidé de ne produire qu’un seul Moulin propose un nez ouvert et précis sur le poivre, la cerise, les épices puis à l’aération sur les agrumes, le pamplemousse.
La bouche possède un beau volume, un équilibre respecté même si les tannins sont encore sensibles. La densité est moyenne, c’est encore primaire mais la gourmandise est au rendez-vous jusque dans la persistance finale correcte. Se boit avec plaisir.
Bien ++.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2011
Nez plus profond et classe avec une pointe de volatile sur le floral, la framboise, frais et mentholé.
La bouche est pleine aux tanins fins et délicats dans un beau volume. Fraîcheur et suavité sont au rendez-vous de ce millésime mûr et on salive en particulier dans la finale persistante acidulée sur la framboise. Vraiment très bon.
Très Bien (+).
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2010
Nez mûr et complexe de cacao, poivre, épices douces, de tabac dans un ensemble frais et à l’aération qui bouge beaucoup sur la cerise noire, réglissé, la violette. Grand nez de vin jeune.
La bouche à l’attaque sur le tabac possède un fruit croquant aux tannins imperceptibles tant la suavité accompagne un équilibre magistral. Bien que le volume et la fraîcheur perçue soient importants, le vin reste aérien au palais, d’une digestibilité redoutable avec une belle persistance finale épicée et fraîche. Fond de verre balsamique, de framboise. Dur à cracher. Futur grand vin.
Très Bien +/Excellent.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2009
Nez plus compact, riche et moins délié sur le chocolat, la menthe, l’after eight. Le second nez réglisse sur des notes balsamique et reste élégant.
La bouche grasse est dense, riche, large avec de la mâche, mais sans lourdeur aucune, ce qui est un véritable tour de force. Les tannins importants sont encore sensibles, la matière étant imposante et encore un peu monobloc, mais on sent un vin au potentiel énorme pas encore complètement poli. L’équilibre reste remarquable. Finale très longue pour ce vin au profil très différent du 10. Fond de verre sucré, mentholé. Superbe.
Très Bien +.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2008
[size=x-small]Eraflé 100%.[/size]
Le nez est au départ plus terne mais sait rester délicat à l’aération sur d’assez jolies notes florales, de cerise et mentholées.
La bouche est délicate, mûre, gourmande même si un peu ferme mais sans maigreur. Le volume est correct avec une acidité intégrée mais on sent quand même les limites du millésime. Finale à l’allonge correcte salivante et poivrée. Ça reste bon avec toutefois un effet de séquence marqué.
Bien +(+).
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2005
Nez de menthe, de pêche rôtie, c’est très mûr et chaleureux. A l’aération des notes de tabac et d’épices douces s’exprime comme dans les millésimes chauds.
La bouche surprend par sa différence avec le nez. Elle est particulièrement gourmande et fraîche, salivante dans un très beau volume. La suavité et l’équilibre idéal rendent ce vin incrachable. Belle persistance finale épicée avec un pointe de volatile. Fond de verre en retenue réglissé. Un vin encore d’avenir déjà très bon.
Très Bien +.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 2003
Nez très évolué et tertiaire sur la noix, les fruits secs, les épices orientales puis à l’aération sur le bois exotique, la boite à cigare.
La bouche est grasse, glycérinée mais sans déficit de fraîcheur aux tannins un peu secs. Pourtant elle possède du charme, c’est beaucoup de parfum avec une finale persistante et chaleureuse dans le bon sens du terme sur les épices orientales. Fond de verre superbe sur le raisin de corinthe, les épices orientales. Un vin qui fait plus âgé que son âge mais dont il est difficile de prédire l’avenir tant il semble figé. J’ai aimé.
Très Bien.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 1999
Nez d’épices douces, de zan, réglissé. A l’aération on sent la richesse du millésime sur le chocolat, la cerise confite.
La bouche est à l’image du nez, riche, chaleureuse, mais sans équilibre précaire pour autant ce qui est l’une des forces du gamay bien vinifié. Le volume est important mais ça manque de précision, c’est moins énergique et moins classe avec une finale balsamique et chocolatée à la volatile sensible et manquant d’élégance, même si ça reste bon. Fond de verre de perception sucrée.
Bien ++.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 1996
[size=x-small]2 bouteilles sur 3 n’étaient pas nettes.[/size]
Le verre de la troisième bouteille est précis, floral, profond, mentholé, sur le musc et l’encens. Très joli.
La bouche est fraîche et délicate, elle conjugue précision aromatique, élégance et une impression tactile facile qui la rendent difficile à cracher. La gourmandise est au rendez-vous et si le fond est celui d’un millésime difficile, son épanouissement et sa longue finale florale le rendent irrésistible. Superbe.
Très Bien +.
Moulin à Vent Domaine Janin « Clos du Tremblay » 1995
Le nez est frais et complexe, il faut aller le chercher sur le menthol, les fruits secs, les épices orientales, l’encens, les feuilles mortes, les fruits exotiques. Un nez envoûtant et suave.
La bouche est encore un cran au dessus par son délié, sa fraîcheur, sa suavité. L’équilibre est remarquable, le vin est plein d’énergie dans un volume conséquent, un pur délice. La finale est très persistante, réglissée, kirschée, celle des très grands vins. Fond de verre fabuleux sur la rose fanée, l’encens, les épices orientales, mentholé. A son optimum à mon sens.
Excellent (+).
Moulin à Vent Domaine Janin 1991
Nez frais et mentholé avec un trait vert. Le vin a besoin d’air, il est alors profond, complexe sur les épices douces, l’encens. Grand nez.
La bouche est encore ultra jeune et puissante, d’un volume ahurissant qui emplit la bouche de saveurs et arômes de tabac, thé, fumé. La suavité est géniale jusque dans la finale très longue. Un vin somptueux qu’on peut encore attendre tant il est jeune avec un fond de verre diabolique sur la boite à cigare, balsamique, la framboise. C’était ma troisième rencontre avec ce vin, et seule la première bouteille m’est apparue totalement à point. Grand vin.
Excellent.
Moulin à Vent Domaine Janin 1990
Le nez est encore plus ouvert que le 91, plus évolué aussi, mais d’une complexité ahurissante difficile à décrire. Les feuilles mortes se disputent à la cannelle, la grenadine, les herbes aromatiques, le bois exotique, dans un ensemble d’intensité fabuleuse. On monte encore d’un cran.
La bouche est une merveille glissante, suave, glycérinée et d’une fraîcheur diabolique signe d’un équilibre parfait. Beaucoup d’extrait sec dans ce vin où tout est à sa place et où il devient difficile de se concentrer avant de le boire. C’est complexe, aérien, volumineux, il a tout ce que possèdent les vins d’exception. La finale est interminable avec un fond de verre intense sur le balsamique, les épices, le tabac et les agrumes. Hors norme.
Exceptionnel.
Moulin à Vent Domaine Janin 1985
Le nez est singulier, d’un registre différent et plus monolithique que les vins précédents, mais très avenant sur des notes de café, de moka, de capucchino très intenses. A l’aération cela se complexifie sur des notes réglissées, de fumé, de bois de santal et d’agrumes.
La bouche à l’attaque sur le café est très grasse et dense pour un vin de 30 ans. Elle est ultra salivante, très intense, impactante sur le palais. C’est là aussi un modèle d’équilibre qui fait bien plus jeune et qui s’étire jusque dans la finale de persistance immense et salivante sur le café et les agrumes. Fond de verre monstrueux qui démontre que le vin est loin de son apogée sur l’encens, les agrumes, le fumé, le tabac et résineux. Encore un grand vin.
Excellent.