Des évènements récents m’amènent à méditer sur deux réflexions de femmes.
La première est actrice. Précoce, elle débutait sa carrière dans « Jeux interdits ». Présente à une célèbre émission de radio classique, elle expliqua simplement comment l’art ne prenait sens que s’il donne lui-même sens à la vie.
La seconde est vigneron en Jurançon. Loin d’être flattée par l’emphase de ma plume égarée à trop chercher l’émotion ressentie à la dégustation des ses vins, en conclusion de ses vœux en retour, elle me répondit ceci:
- « En effet, quoique vous en disiez tous sur "passion du vin " et autres super bible, un vin c'est le " fruit de la vigne et du travail des hommes" à boire sans en attendre plus qu'il ne peut vous donner.
bises »
Et voici que moi-même, un peu en retrait de LPV et des activités viniques, je redécouvre quelques amabilités sur un fil consacré à Dauvissat.
Copié-collé :
« Des fois, parfois, certaines fois je m’interroge sur la toxicité de certaines interventions sur LPV.
Toujours je me questionne sur ce qui peut motiver des saillies violentes et des joutes stériles dans les échanges entre acteurs de ce forum et des fois, parfois, certaines fois, souvent, toujours les mêmes….
Je ne les invite pas à questionner les réflexions de ces deux femmes, (femmes et vigneronnes si peu respectées par certains sur ce site et, parfois, certaines fois, souvent, toujours les mêmes….) ;
En premier parce que le vin n’est pas art, tout juste procure-t-il parfois du plaisir et une infime part de sens à nos vies.
Ensuite parce que les goûts, construits sociaux et culturels ne peuvent être érigés en vérité absolue pour une société, pas d’avantage par quelques hommes fussent-ils les plus passionnés ou par d'autres qui ont le plus de temps à perdre en futilités.
Je ne les renvoie pas d’avantage à l’humilité des vignerons et vigneronnes qui mettent eux même des limites aux fruits de leur passion et de leur travail. Leurs journées de 24 heures, comme une règle à 24 degrés est là divisée utilement entre travail, loisirs un peu, devoirs et sommeil sans avoir à se perdre en duels et querelles.
Un vin est à boire sans en attendre plus qu’il ne peut nous donner….et c’est déjà pas mal. C'est encore mieux quand il reste symbole, symbolum, ce qui rassemble !
C’est aussi ce que je pensais aux alentours du 25 janvier, date de réunion de la deuxième session LPV Tomasi, le péril jeune et les popi’s.
Le thème avait été fixé : « Les chardonnay de Bourgogne en confrontation avec le Jura ».
Un seul absent de marque remplacé par une guest star, un ami de longue date, journaliste gastronomique depuis peu dans une grande radio de service publique.
Une vraie opportunité de carrière prête à être (re)lancée au midi de sa vie.
Le garçon est espéré par les jeunes, il est connu des plus anciens qui ne sont pas du genre en s’en laisser imposer y compris par le son assourdissant des trompettes de la renommée.
L’homme est bon vivant. Ses passions du vin et de la gastronomie, son côté self made man atypique, anormal et marginal l’ont plus souvent conduit en galères et famines qu’au pinacle du journalisme, de l’édition et des médias.
Mais voilà que son talent éclate au grand jour sans que je le sache n’écoutant pas la radio le dimanche à l’heure de télé foot.
Au même moment, je le sollicite pour un grand projet à ma taille, c’est à dire lilliputien, et microscopique au niveau de la sphère évènementielle et médiatique.
Depuis septembre, de repas à mes frais entre deux trains en rendez-vous manqués ; de dégustations en entretiens téléphoniques ; de promesses en désillusions ; l’été indien a fini par ressembler à un hiver sibérien. Une chaude amitié refroidie en relation glaciale. Tout cela, un soir de dégustation, un 25 janvier avorté, pluvieux, entre Neuilly et le Palais des congrès.
Voici donc, que rendez-vous est fixé à 19h porte maillot depuis 48 heures.
Le matin même, je reçois confirmation de sa présence. Il viendra, seul et sans une goutte de liquide. J’ai l’habitude, même s’il prétexte ne pas avoir eu le temps de faire de la spéléologie dans sa cave et avoir peur de secouer le vin. J’apprécie la formule, même si les tannins et les dépôts ne se bousculent pas dans les vieux chardonnays.
Seulement voilà, pas de nouvelles jusqu’au soir malgré mes appels répétés et mon insistance à lui expliquer la nécessité d’être impérativement à Garches à 19h40 pour récupérer une petite qui nous vient du bout de la ligne de Saint Nom la Bretèche avec consommés, pâtés, grives, volailles, entremets, glaces et biscuits pour nos agapes.
Tant pis, je pars et me rends au rendez-vous sans certitudes, aimable et serviable, mais avec un départ de feu gastrique et un début d’échauffement que je prends pour un excès de chauffage à l’intérieur du gros 4x4 pas écolo.
19h débarquant des studios d’enregistrement ou de plateaux télé, notre homme se manifeste.
« On se retrouve où ? ».
Descendant du LEM porte maillot, en mode lunaire pour les tous jeunes, l’homme prend conscience de l’espace et des défauts de notre civilisation en matière de transport et de pollution en tout genre.
Moi prudent, j’évite le tour de la place, les passages en force, les gros culs arrêtés devant les petits culs de l’Est, les voitures hésitantes, les deux roues frénétiques, les livreurs chinois, nippons et italiens, le palais, les départs, les touristes, les retours, ceux qui entrent et ceux qui sortent, la police, l’ambulance et le corbillard comme dans une fameuse aventure de Monsieur Devos.
Je me gare sagement au dessus du périphérique, aux taxis, devant le métro, à 50 mètres d’Eurocave que je fixe comme point de jonction entre nos deux divisions. Là où même un petit gars du Larzac, antimilitariste, retrouverait sa chèvre égaré, notre journaliste depuis l’endroit se perd à l’opposé côté sablons.
15 mn plus tard, en dépit de quelques précisions, l’homme désorienté s’éparpille à nouveau cette fois vers le palais des congrès où ne se joue plus Starmania.
Il est 19h25, « On court les uns après les autres ; on se déteste, on se déchire ; on se détruit, on se désire. Mais au bout du compte, on se rend compte, qu'on est toujours tout seul au monde ».
Je craque,
- Il me dit n’avoir pas le sens de l’orientation
- Je lui réponds ne pas avoir envie de lui acheter une boussole, ne pas vouloir le prendre par la main
- Me dit qu’il ne va pas entamer une relation professionnelle sur ce mode
- Lui répond que l’on est entre amis juste pour le plaisir d’une dégustation, qu’il a pris le cigare ou le melon, (là j'avoue, je n'aurai pas du dire ça!)
- Me répond qu’il part direction Saint Lazare, ET téléphone maison, retour en Normandie...
Je ne crois pas à la résurrection d’une amitié assassinée, lui lance un dernier tu me casses les c…….. obscène mais moins que la vraie vulgarité qui consiste à aborder toutes nos rencontres par un clinquant Monsieur prénom, cher ami, et à fonctionner ensuite par opportunité et intérêts.
Vu du côté de mes invités, je rentrais ainsi seul en notre petite chaumière, seul, et passablement tendu.
Le temps était gris, le cheese-cake stressé, Le Tomasi comme à son habitude d’humeur moqueuse, notre très charmante claire en chaperon orange et bottes de cuir des plus sexy…. tous les ingrédients d’un diner à scandale étaient réunis.
Heureusement la rondeur éternelle de Phillippe B, la souplesse toute en contorsions de notre ami Renzo, un champagne Blanc de Blanc et des gougères fraîches, croquantes et tendres comme la peau et la chaire de notre cuisinière favorite allait laver l’affront et réchauffer l’ambiance. Hélas sans jamais pouvoir rattraper le retard pris en ce début de soirée.
Monsieur Moroni : Dis donc Tomasi toujours en retard ...
Tomasi : J'ai ma réputation monsieur.
Les vins :
- Champagne Agrapart « 7 crus »
- Domaine La croix Montjoie, Bourgogne Vézelay, Mathieu et Sophie Woillez, l’élégante 2009
- Chablis, de Moor, le vendangeur masqué, Butteaux 1er cru 2009
- Chablis, Vaucoupin 1er cru, Oudin, 2002
- Chablis, 1er cru Montée de tonnerre, Raveneau, 2003
- Bourgogne, Haute côte de Beaune, bellis perennis, Naudin-Ferrand, 2009
- Saint Aubin, La princée, Hubert Lamy 2009
- Meursault, 1er cru Genevrières, domaine François Jobard, 2001
- Rully, 1er cru la pucelle, Jacquesson, 2008
- Pouilly Fuissé, La verchère, Martine et Daniel Barraud, 2008
- Vin de Table, chardonnay, Philippe Jambon
- Côtes du Jura, Grusse en Billat, Ganevat, 2009
- Côtes du Jura, Grandes Teppes, Ganevat, 2008
- Côtes du Jura, Chamoix du paradis, Ganevat, 2004
- Côtes du Jura, Grandes Teppes, Ganevat, 2005
- Arbois pupillin, Overnoy, 2003
Les plats
- Gougères
- Dorades au four et poivrons méchouia
- Plateau de fromage et son époisse livré post mortem avant la nuit des morts vivants
- Glace au Grand Marnier façon Maison Claire
- Mousse au chocolat maison tout sauf claire
- Cheesecake bourguignon 4/4 ashkénaze 1/4 sur fond délicieusement sablé
COMPTE RENDU A SUIVRE
cheese:)