Soyons fou ! Rebondissons à l'article signalé par Oliv ( ICI ) et ouvrons donc ce sujet qui ne manquera pas de susciter la polémique, j'en suis convaincu.

Reprenons...
La question porte sur la pertinence du goutage de la bouteille commandée au restaurant par le sommelier. A ce sujet les questions annexes ne manquent pas : le sommelier a-t-il le droit ou le devoir de gouter ? Quelle est la quantité acceptable qu'il peut être autorisé à prélever ? Le client a-t-il son mot à dire ? J'en passe.

Mon humble avis sur la question est la suivante : le sommelier a le devoir de s'assurer que la bouteille qu'il sert n'a pas de défaut (en dehors de l'aspect strictement commercial, c'est quand même son métier !). Je pense qu'il serait néanmoins de bon ton qu'il en demande l'autorisation au client. Au cas où le client refuse la bouteille, le sommelier est en droit de gouter lui aussi pour s'assurer du problème. Quant à la quantité, mon expérience de dégustation m'a appris qu'il n'est pas nécessaire de prendre plus de 3cl en bouche pour apprécier les défauts éventuels, quantité à mes yeux plutôt négligeable. Je sais, ça fait environ 5% du volume de la bouteille mais je préfère penser au 95% restants.

Pas mieux. Le client doit avoir la possibilité de refuser ce service (car c'est bien un service).
Mais n'oublions pas que 90% de la clientèle est incapable de déceler un défaut dans un vin.
Le problème n'existe que dans de très rare cas ou un sommelier peu scrupuleux voit dans la commande d'une belle bouteille par une table l'occasion de se rincer à l’œil... Là cela devient un problème aussi bien pour le client que pour le restaurateur dont c'est le devoir de veiller au professionnalisme de ses employés.

Gautier

François,

d'une manière générale, quand les bouteilles proviennent du restaurant, je suis d'accord avec ce que tu suggères.

En revanche, quand on peut apporter ses bouteilles au restaurant, je trouve normal que le sommelier puisse gouter. Il s'agit alors plus d'une sorte de partage et que d'une tache technique visant à déceler un défaut dans le vin. Le sommelier doit toutefois savoir rester à sa place et se contenter de gouter (à moins que les convives ne l'invite à se servir plus). J'avais été ulcéré par le sommelier d'un hôtel-restaurant parisien dans lequel quelques LPViens et moi avions fait un diner au "casting" plutôt sympa. Il avait alors, notamment, siroté plus de Krug 79 que de raison...

Importante précision apportée par Nicolas.
J'ajoute que dans ce cas, je propose généralement au sommelier de se joindre à nous plutôt en fin de service et en ayant gardé des fonds de bouteille afin de le laisser travailler.

Gautier

Nicolas, Gautier, je partage votre avis. Le vin doit être un vecteur de partage.

Marrant que le NY Times illustre cet article sur la détection des bouteilles défectueuses par une bouteille de Nicolas Joly...

Sur le fond de la question : la plupart des défauts ne se détectent-ils (ou au moins se pressentent) pas au nez? Dès lors, il ne semble pas nécessaire de goûter systématiquement, mais quand il y a suspicion, non? (ceci si on considère que le seul rôle du sommelier est de détecter les bouteilles à défaut, ce qui constitue l'angle d'approche de l'article, et qui me semble assez restrictif...)

Mathieu

Pour sentire le defaut il est plus simple de le sentir sur un verre que sur un goulot de bouteille.
Personnelement, je serais plus dérangé par le fait qu'on sente le vin dans mon verre que de "perdre" quelques cl...

Gautier

> Signalons une petite anecdote qui m'est arrivée en
> compagnie d'Oliv et de ces dames.
>
> Au "Bistrot d'à Côté" à Levernois, je goute le
> vin. Malheureusement, (contre-avis d'Oliv qui me
> confirme dans mon jugement) le verdict est sans
> appel ! Bouchonné ! J'appelle la serveuse qui
> emporte la bouteille pour une "contre-expertise"
> par le sommelier de "Levernois".
>
> Echange immédiat sans discussion. La grande
> classe.

Bruno,

Ca me semble on ne peut plus normal, non ?

Oui, moi aussi... En général quand cela m'arrive, je reste prudent mais le sommelier ou patron du restaurant à qui je demande une contre expertise est plus direct et indique que le vin est carrément imbuvable... Kai ou Cru à Paris pour ne citer qu'eux sont deux resto qui ont immédiatement changé la bouteille !

Pour les grandes tables, que le sommelier goûte ne me choque guère.
Ce qui m'agace, c'est ceux qui en font des tonnes ou ont l'air blasé.

Ephemerophyte écrivait:

---

> Mais n'oublions pas que 90% de la clientèle est
> incapable de déceler un défaut dans un vin.
>
> Gautier

La règle ne devrait-elle donc pas être que le sommelier propose systématiquement au client s'il souhaite goûter ou que le sommelier lui-même goûte ?
Mais si cette pratique n'existe pas (enfin, je crois), c'est sans doûte lié à un problème d'amour propre des clients : certains pourraient être gêné car c'est un aveu de leur part qu'ils n'y connaissent pas grand chose !

Quant aux pratiques, j'ai vu de tout :
- le sommelier qui ne goûte pas.
- le sommelier qui goûte dans une autre pièce avant d'apporter la bouteille (si c'est 3cl, rien de choquant pour moi).
- le sommelier qui goûte non loin de la table, au niveau de la desserte, avant de nous servir.
- le sommelier qui demande s'il peut goûter (hypothèse où une bouteille un peu rare est apportée par le client).

Dans un restaurant toscan -Le vigne, pour ne pas le nommer-, j'ai eu affaire à un sommelier qui a:
1) aviné son verre
2) gouté le vin
3) aviné la carafe -je lui avais demandé pour faire respirer le vin italien commandé-

Tout est louable dans la démarche mais je dois confesser que les trois opérations ont quand même pas mal entamé la bouteille et m'ont laissé un léger goût de frustration.

Arnaud

Bonjour,

Il y a aussi le sommelier qui vous fait goûter, à qui vous dites que la bouteille a un défaut et qui après l'avoir goutée aussi essaye de vous persuader qu'il n'y en a pas....

Je l'ai vécu.

Cordialement.

Philippe.

Dans ce cas bruno, je pense que je quitte le restaurant. Je suis d'accord avec michel: cela me parait normal. La seule différence est que ce n'est pas le "bouchon", donc un non connaisseur peut considérer que c'est le "gout normal" de la bouteille, mais dans ce cas il n'est pas patron d'un restaurant..

Arnaud.

Vivi,

Les bouteilles bouchonnées sont remplacées dans tout restaurant digne de ce nom

J'ai jamais eu trop de problème sur l'échange de bouteilles à défaut!

C'est plus le seau à glace pour le rouge qui me pose souvent problème!

Un seau à glace pour du rouge...vous êtes sûr:S et tout ça avec un regard réprobateurs.

Alfonso

Quel regard aurait-il eu si on lui avait demandé du Sprite pour mettre dans le vin blanc.... ? (anecdote véridique et vécue à la table d'à côté)

mgtusi écrivait:

---

> Vivi,
>
> Les bouteilles bouchonnées sont remplacées dans
> tout restaurant digne de ce nom

Et c'est la Loi (seulement si on n'en a pas bu la moitié ! - code de la consommation) !

Dans un resto parisien du 14eme spécialisé dans les poissons...

En phase de rigueur budgétaire, je prends le premier prix : Triennes Viognier. J'ai déjà bu ce vin dans d'autres millésimes : celui-ci a manifestement un problème. Le garçon goûte et me dit qu'il est parfaitement normal et identique à ce qu'il en a gouté récemment. Il accepte néanmoins de remplacer la bouteille mais me met en garde sur le fait que les autres seront pareilles (logique !). J'ai opté pour une autre bouteille du même vin qui était étrangement beaucoup mieux que la première...

C'est toujours agréable d'être pris pour un idiot tout en n'ayant pas de prise puisqu'il acceptait de changer la bouteille même sous un prétexte qu'il contestait.

Benji

Et c'est la Loi (seulement si on n'en a pas bu la moitié ! - code de la consommation) !

Ce que ne dit sûrement pas la loi, c'est comment déterminer le caractère bouchonnée d'un vin.

Toujours le même problème classique de la définition patent au droit.

mgtusi écrivait:

---

> Ce que ne dit sûrement pas la loi, c'est comment
> déterminer le caractère bouchonnée d'un vin.
>
> Toujours le même problème classique de la
> définition patent au droit.

Hé oui... malheureusement... à moins d'inventer un TCA-mètre de poche !
(rappel : Le goût de bouchon est essentiellement dû à la présence de 2,4,6-trichloroanisole (TCA))

Nicolas G

Et à partir de quel seuil de présence de TCA décide-t-on qu'une bouteille est bouchonnée....

"Le goût de bouchon est dû à la présence de 2,4,6-trichloroanisole (TCA) ou dans quelques rares cas, à la présence de molécules similaires, également chlorées. Les vins bouchonnés présentent des concentrations moyennes en TCA de 8 nanogrammes par litre mais, cette molécule est décelable dès 5 nanogrammes par litre, voir 2 ou 3 nanogrammes pour un nez entraîné."

source : fr.wikipedia.org/wik...

Nicolas G

Dans un étoilé de l'Essonne, mon expérience était moins agréable que la tienne Bruno : nous commandons un Puligny. Le sommelier présente la bouteille puis va la déboucher ; je regarde l'opération du coin de l'oeil et là, je remarque que le sommelier sent le bouchon, fronce les sourcils, sent à nouveau le bouchon puis m'apporte la bouteille pour me faire gouter. Déjà au nez, j'ai commencé à avoir un gros doute qui s'est très vite confirmé en bouche... je me tourne vers le sommelier pour lui faire part de mon impression et là le sommelier me répond :"ah oui, j'ai eu un doute en débouchant la bouteille !".
Quelle classe... bien tenté en tout cas...

FRGO écrivait:

---

> Quant
> à la quantité, mon expérience de dégustation m'a
> appris qu'il n'est pas nécessaire de prendre plus
> de 3cl en bouche pour apprécier les défauts
> éventuels, quantité à mes yeux plutôt négligeable.

J'ai une anecdote à propos des 3 cl de François.
J'étais une fois dans un restaurant étoilé et j'avais apporté une bouteille de champagne Egly-Ouriet.
A un moment donné, je me mets à discuter du champagne avec le chef sommelier et alors que je relevais son caractère vineux, il me dit qu'il avait justement essayé d'expliquer ce que cela signifiait à trois serveurs à qui il a fait goûter mon champagne.
C'est véridique !

12 cl de perdus.... désolé Julien

Les restaurants changent quasiment tout le temps les bouteilles bouchonnées, mais très souvent en grommelant. Une fois on m'a dit sur un ton de défi : "ah non Monsieur, c'est impossible !" ce qui a rendu la fin du repas assez gênante.

Donc il faudrait :

1) que le resto change la bouteille
2) qu'il le fasse de bonne grâce.

Quant au sommelier, vous est il arrivé qu'il goûte le vin et que vous, vous le trouviez bouchonné. Dans ce cas là, quelle a été votre réaction ?

Par ailleurs, on parle de bouchon, mais quid des bouteilles qui ont d'autres défauts ? C'est toujours difficile à expliquer au restaurateur qui n'y connaît rien ...

Gastronomix écrivait:

---

> Dans un restaurant toscan -Le vigne, pour ne pas
> le nommer-, j'ai eu affaire à un sommelier qui a:
> 1) aviné son verre
> 2) gouté le vin
> 3) aviné la carafe -je lui avais demandé pour
> faire respirer le vin italien commandé-
>
> Tout est louable dans la démarche mais je dois
> confesser que les trois opérations ont quand même
> pas mal entamé la bouteille et m'ont laissé un
> léger goût de frustration.
>
> Arnaud

Quand j'étais sommelier j'avinais très souvent la carafe à l'office avec un autre vin afin de ne pas "léser" mon client sur qulques centilitres.

Fabien ~ Ca c'est pro.

Greg ~ Ca m'est arrivé il n'y a pas très longtemps. Le sommelier goute, me sert, je goute... pas de problème au nez mais une sensation légèrement métallique en bouche qui rend la finale assez déplaisante. Bref, rien à voir un Meursault digne de ce nom. Je le signale, le sommelier regoute et confirme. Le vin est parti en carafe, regouté une heure après et même conclusion. Mais nous n'avons pas attendu une heure pour avoir une autre bouteille, tout à fait correcte celle-là.

Dans un registre différent et pour soulever un autre problème ; pas si éloigné que ça de la discussion ouverte par François.

Pour fêter l'anniversaire de mes parents, ma soeur et moi les invitons dans un restaurant Rouennais de bonne réputation.
Cuisine familiale, produits de saison et de la région ; l'enseigne est connue pour avoir une jolie cave.

Les menus sont présentés. Il est possible d'avoir du vin au verre, mais en semaine uniquement. Bon... On prendra une bouteille de champagne pour l'apéritif. Le millésime voulu étant indisponible, nous nous reportons sur une autre référence.

Je demande la carte des vins. Le patron, président de l'association des sommeliers de Haute-Normandie, me présente un livret d'une vingtaine de pages. Je déchante vite, la mention "épuisé" étant accolée à la plupart des vins !

Franchement, s'il avait fallu retirer toutes les références indisponibles, la carte des vins n'aurait tenu que sur, allez, 4/5 pages. Quel intérêt faire figurer sur la carte des vins indisponibles ? Je n'ai pas compris, j'ai trouvé ça indigne d'une des meilleures adresses de Rouen. Et j'en ai finalement déduis que cette carte est révélatrice d'un établissement qui se meurt gentiment, d'un "patron" n'ayant plus que sa gloire passée comme fonds de commerce. C'est, finalement, pathétique.

Et pour en revenir au sujet, lui aussi a prélevé ses quelques centilitres sur chacune des bouteilles commandées pour s'assurer que les vins n'étaient pas défectueux. Et ça, je pense que j'aurais pu m'en rendre compte tout seul...

Je n'y remettrai plus les pieds.

Vincent

Vincent: "Je n'y remettrai plus les pieds"

Pourquoi? Pour les cl prélevés par le sommelier? La carte des vins non remise à jour? Autre?

Cordialement