J'ai parfois l'impression que l'on s'égare un peu en comparant les Bordeaux avec des vin new-style hyper-concentrés.

Même certains producteurs du Bordelais se laissent prendre à  ce jeu de la concentration et de la puissance pour essayer de rivaliser avec ces vins sur leur propre terrain. Je pense qu'ils font fausse route.

Influence de Parker ? peut-être, mais je n'en suis pas si sûr. Je ne pense pas que les consommateurs soient des imbéciles et qu'ils suivent aveuglément tout ce qu'on leur dit. Je crois plutôt à  un phénomène de mode, qui passera comme toutes les modes. Maintenant, le consommateur recherche prioritairement des vins puissants, charnus, concentrés et riches. Ces vins séducteurs provoquent des sensations immédiates, intenses et facilement accessibles au néophyte. Demain, on en reviendra probablement à  des vins plus digestes, élégants et fins.

Tout cela pour dire que l'on oublie trop souvent que l'une des caractéristiques essentielles des vins de Bordeaux est la finesse. Ainsi, dans le grand millésime 2000, malgré la belle maturité de la vendange, les vins restent élégants, équilibrés, avec des tannins mûrs et fins, à  la trame très serréem, mais ils ne sont pas du tout confiturés ou lourds. La matière est crémeuse, mais sans excès de richesse. On est bien loin du côté surmûr, puissant, alcooleux et extrême de certains vins new-style.

Pour moi, un Bordeaux qui n'a pas de finesse n'est plus vraiment un Bordeaux. Il ne faut évidemment pas seulement de la finesse, j'aime aussi le fruit, la structure la concentration et la puissance aromatique, mais la finesse doit être au rendez-vous, sinon, il me manque quelque chose.

Qu'en pensez-vous ?

cordialement

Yves Z

Yves,

Autant de talent dans la réthorique après une soirée comme celle que nous avons passée hier soir !!!! J'en reste bouche bée....

Et en plus, pour une fois, je suis d'accord avec toi, entièrement d'accord !!!

Ne comparons pas les Bordeaux avec les vins du nouveaux monde, à  la concentration extrème et rappelons nous quand même que les seuls vins que nous pouvons boire à  plus de 50 ans d'âge sont les Bordeaux. Il y a certainement une raison à  celà  non ?

Tu as bien raison, quand le millésime s'y prête, il n'y a guère d'endroit où le cabernet sauvignon s'épanouà¯t davantage, conférant, en dehors de la finesse qui bien sûr est une caractéristique des grands Bordeaux, de la classe.
La grande question reste l'équilibre, ce juste milieu, ou plutôt cette complémentarité entre finesse et puissance. Ces deux notions ne sont pas antinomiques.
La puissance sans finesse c'est grossier.
J'ai bien l'impression que cet équilibre n'est atteint dans le bordelais que dans les très grands millésimes comme semble l'être 2000, comme l'a été 90, 82 ou 83 à  Margaux. 96 et 86 me semblent être des grands millésimes, mais plus marqués par une certaine austérité qui d'ailleurs n'est pas contradictoire avec la finesse. Il ne faut pas dans ces cas la que cette fermeté ne masque ce bel équilibre; c'est ce que j'ai entendu dire de certains 75 sans l'avoir jamais éprouvé encore.
La question se situe, à  mon avis, autour de la maturité du cabernet sauvignon, tardif. Certains climats plus chaud le font certes mûrir plus souvent mais pas avec cette perfection atteinte, qui plus est, sous un climat qui est à  Bordeaux, très franchement océanique dont l'équivalent n'est pas si facile à  trouvé, conjugué avec ces terroirs de graves caractéistiques du Médoc.

Yves,

Que dire de plus! Elégance, soyeux, finesse c'est Bordeaux. Il est vrai que le new style vient d'une surextraction, surmaturité pour faire des vins puissant très agréable dès leur jeunesse sur le fruit, c'est la demande du consommateur fastwine :-). Je pense que si Bordeaux suit, et cela serait dommage en effet, c'est lié à  la competition ambiante. Mais les GCC sont à  l'abri de celle-ci au moins pour le moment.

Amicalement,
Didier

Yves,

Pour moi aussi, la finesse dans un bordeaux est essentielle mais comme le souligne Jérome, l'équilibre, le compromis finesse/puissance est capital.
Un vin possèdant beaucoup de finesse mais manquant de corps, de volume, d'intensité ne peut, à  mon sens, être considéré comme un grand vin.
Et puis il y a aussi deux finesses, celle du bouquet et celle de la texture.
J'avoue que pour l'instant, le nez des vins issus du cabernet, du merlot et du pinot noir me conviennent mieux que le coté épicé et animal des vins de syrah, carignan, etc...
L'exemple qui me vient immédiatement à  l'esprit est le Clos des Cistes du domaine Peyre Rose qui pour moi a presque tout d'un grand vin .... seul le bouquet me semble manquer légèrement de subtilité. Mais après tout, tout n'est qu'une question de goût personnel. Cette dernière phrase voulant tout dire et rien dire à  la fois .....

Ce qui est sûr, c'est que TOUS les vins devraient tendre vers plus de finesse et de subtilité, il n'y a en jamais trop ! ;-)

Amitiés,
M@nuel.

Manuel,

Je suis d'accord, un Bordeaux qui n'a pas de corps et de volume n'est évidemment pas satisfaisant à  mes yeus.

Je voulais surtout dire que le finesse est une caractéristique des Bordeaux que l'on a un peu tendance à  oublier, à  mon avis.

Les Bordeaux sont des vins charnus et concentrés certes, mais aussi avec beaucoup d'élégance et de finesse. Ce ne sont pas des vins que l'on peut comparer en opulence, en richesse de fruit et d'alcool, de même qu'en concentration avec les vins new-style, mais en matière d'élégance et de finesse, ils les dépassent généralement. En capacité de vieillissement aussi, comme le soulignait à  juste titre Paski55.

Le miracle bordelais, c'est, dans les grands millésimes c'est vrai, précisément cet équilibre fabuleux entre le fruit, la fraîcheur, la concentration, la puissance, l'élégance et la distinction, qui exprime cette harmonie unique et subtile entre la virilité et l'élégance, entre la puissance et la finesse.

amicalement

Yves Z