Mes errements (docteur, est-ce le début de l'ivresse?) m'ont conduits à
Margaux, joli village féodal du Médoc.
D'un coté la France d'en haut: chateaux (jolis, ma foi), 4x4 mercédés ou
grosse berline allemande discrète. De l'autre, la France d'en bas, petites
maisons paysanne en pierre avec chai attenant(bien sur), Citroà«n C15 ou
tracteur.
Dans ce monde bien ordonné, il y a quelque chose de rassurant: chacun est à
sa place (non mais, il ne manquerait plus que ça qu'il y en ait un qui
veillent changer de place).
Très timide de nature, je n'ai pas osé frappé à la porte du chateau, des
fois qu'ils me chassent. En revanche, j'ai demandé mon chemin en frappant à
plusieurs masures et quel ne fut pas ma surprise : les trésors n'étaient pas
où je croyais. Comme le disait Alballadéjo: "les mouches ont changé d'ânes".
Première halte à Macau, chez Guy de Bortoli au chateau Moutte Blanc (enfin
Chateau... cour de ferme, plutôt, le terme Chateau est trtès galvaudé dans
le bordelais)
Tout petit domaine cultivé comme un jardin: soin constant à la vigne:
travail du sol, pas de chimie, vendange manuelle en petite cagette,
vinification soignée sans excés de soufre. Peu de bois neuf.
Terroir situé sur les palus (argileux) non-inondables proches de la Garonne
qui donnent le Bordeaux supérieur et croupe de graves proche de l'AOC
Margaux pour le Haut Médoc.Vieilles vignes de plus de 60 ans en majorité
dont du petit verdot très bien situé et qui murit superbement.
Les vins devraient être déclassés en vin de table tellement ils sont bons!!!
Les Moutte Blanc Bordeaux supérieur: j'ai apprécié la sève, la fraicheur du
fruit, les tanins moelleux et la structure de très bons vins de garde.
Elegance et fraicheur. Superbe vin à acheter en magnum pour s'en régaler
dans 5 à 7 ans.
La Coste Bleu issu de jeunes vignes est très agréable en 2001.
Le Moisin 2001 est la cuvée pur petit verdot: super cuvée dont les tanins de
fin de bouche confirme le potentiel de garde . Quand ils se seront fondus,
place au fruit bien plein, à l'amplitude et à la longueur.
Enfin la cuvée Marguerite Déjean 2001: nez magnifique de complexité mélant
les fruits rouges et noirs, léger boisé bien fondu, bouche moelleuse et
longue: l'élégance d'un Margaux en haurt-Médoc (Il est d'ailleurs question
de classer ce terroir).
Le tout accompagné de la simplicité et la gentillesse de Guy de Bortoli.
On continue vers Margaux. Toujours dans la catégorie des sans-grades, je
pousse la porte de la famille Chardon.
Régisseur du Chateau Palmer de père en fils. Leur chai est enclavé dans le
coin du Chateau en arrivant à Palmer. Mr Yves a pris sa retraite en 96 et
continue à cultiver ses 3 ha de Margaux (eux aussi enclavés dans les terres
de palmer) situés sur Cantenac et Issan, avec Claude son frère. Ils se
partagent le revenu des 17000 bouteilles.
Mr Yves me fait visiter le petit chai en m'expliquant comment il fait son
vin et l'élève le plus naturellement possible en fûts de chêne pas neuf
qu'il remplace au fur et à mesure. Sa description sent bon la terre, la
paysannerie avec ce que cela représente de meilleur: l'écoute de la nature,
il me décrit son terroir de croupes de graves parmi les meilleures de
Cantenac et d'Issan héritée par la famille des propriétaires successifs de
Palmer pour bons et loyaux services et achetés au temps où personne n'en
voulait. Il me montre son stock: un fond de chai vide, ça part comme des
petits pains.
Je comprend pourquoi en dégustant.
Son vin lui ressemble, issu de très vieilles vignes de merlot pour 50% , il
est très élégant, peu boisé et moelleux à souhait. En 2001, plus plein qu'en
2002 (brut de cuve) mais le fruit sincère est là .
Reflet du vigneron et du terroir: C'est de la franchise et de l'élégance en
bouteille pour un prix d'un médiocre cru classé.
Je quitte Mr Yves , je tourne à gauche sur la D2 dans le centre de Margaux ,
je longe Lascombes et tombe sur Eric Grangerou qui m'entraine au fond de son
jardin.
Il possède quelques parcelles de palus argileux classées en Bordeaux
supérieur en bordures de la Gironde et des vignes en appellation Margaux
très bien situées près de Chateau Margaux, labégorce et Lascombes.
Il fait ses malo en fûts et cela se sent immédiatement.
Le Bordeaux sup Monplaisir 2001 est très agréable et le sera encore
davantage quand le boisé se calmera. Vin très fruité aux tanins présents
mais ronds.
Le Margaux Chateau les Eyrins 2001 est le résultat d'un assemblage de 75% de
cabernet sauvignon, 22% de Merlot et 3% de petit verdot. 80% de bois neuf
(chêne de l'Allier): grand vin, bien boisé, nez très aromatique, boisé
certes mais pas agressif, attaque franche, bouche moelleuse et fruitée,
finale longue et persistance , le boisé n'est jamais dérangeant bien que
très présent: belle bouteille de garde à prix d'ami. toute petite
production.
Je continue mon périple vers le nord et m'arrète à Soussans chez Madame
Renon qui possède avec son époux les 5ha du chateau la galiane et les 5ha du
chateau Charmant. Elle me reçoit chez elle (jolie maison de campagne en
pierres)
Je n'ai pas apprécié Chateau Charmant malgré la fraicheur de son fruit, je
l'ai trouvé simplet sans profondeur ni complexité. (Cela n'engage que moi,
bien sur).
En revanche , j'ai apprécié la profondeur, la complexité de La Galiane en 99
et 2000. Le 2000 y ajoutant de la mâche, une plus grande persistance et une
bouche plus longue.
Merci Mme Renon pour votre accueil.
Pour conclure, la France d'en bas a du bon voire du beau pour un prix encore
accessible, la gentillesse et l'authenticité en plus .
Pardon pour ce CR qui est plus une impression de ballade.
A+
JP Duvergé