Salon des vins de Loire : honni soit qui mal y boit.
Lundi 4 février. Pass au cou, carnet dans la poche, verre en main, Moderator1 et moi entrons dans l’immense bâtiment qui accueille, durant deux jours, le salon des vins de Loire.
Réservé aux professionnels, cet événement attire une foule considérable : vignerons, restaurateurs, négociants, cavistes, étudiants… Parmi ces derniers, de très nombreux jeunes adultes, reconnaissables à leur barbe bien taillée, leur chemise cintrée, le jean slim à l’ourlet retroussé, l’absence de chaussettes et les éternelles Stan Smith d’un blanc éclatant.
Dans ce défilé d’uniformes, deux personnages se singularisent. Le cheveu gris, la moustache fringante, trapu, l’œil vif, Jean-Luc POUTEAU repère très vite les belles robes grenat à reflets mauve des cabernets francs « nature ».
De son côté, plongé dans son verre, la narine agressive et l’auriculaire en érection, Olivier POUSSIER paraît un peu perdu : comment accorder le cab’ franc nature déniché par Jean-Luc avec un vol-au-vent de pousse-pieds au yuzu ?
Nous ne connaîtrons jamais la réponse puisque Moderator1 et moi avons autre chose à faire : déguster, déguster, déguster. Et pour déguster, je vais déguster puisque l’ami Gildas n’aura de cesse que de me faire boire le cépage rouge ligérien emblématique. Résisterai-je ? La réponse d’ici un quart d’heure.
Un modo et un quasi-modo (copyright Oliv) heu-reux !
Le salon des vins de Loire jouit d’une organisation bien rodée. Imaginez un hall d’entrée, où l’on scanne les pass et où l’on fournit les verres de dégustations, qui oriente les visiteurs vers deux salles opposées :
- Une salle dans laquelle sont présentés les vins issus de la viticulture conventionnelle et/ou bio ou en conversion biologique,
- Une salle dans laquelle se déroule
La Levée de la Loire, où l’on ne déguste, dans de très bons verres, que des vins certifiés bio et biodynamiques.
Le visiteur peut passer d’une salle à l’autre au gré de ses envies. Notre matinée sera consacrée aux vins en agriculture conventionnelle et l’après-midi sera réservée aux vins Bio et bioD.
Les vins en agriculture conventionnelle et/ou bio ou en conversion biologique :
Nous commençons par le hall réservé aux vins en agriculture conventionnelle. Un verre de qualité moyenne nous est remis et nous entrons dans ce hall gigantesque. Difficile de se repérer sans plan. Le hasard nous amène sur le stand de Stéphane RIFFAULT, du
domaine Claude RIFFAULT, chez lequel nous avions si bien dégusté en juin dernier.
Chez Stéphane RIFFAULT, des vins... lumineux.
Le Blanc du domaine 2018 est élevé en cuve béton. Il est issu de vignes reprises d’un fermage s’épanouissant sur un sol argileux. Simple, efficace, sérieux, bon, ce vin sera mis en bouteille en mars.
Boucauds 2018 : 70 % bois, 30% cuve. Parenté de style évidente, mais plus large que le précédent. Note vanillée. C’est bon.
Chasseignes 2018 : Vin issu de sols de caillottes (calcaires durs), élevé sous bois. Nez diabolique, précis. Vin sec, tendu, moins large que le précédent. Profil mûr. Très bien.
Denisottes 2018 : issu de sol kimmeridgien sédimentaire. Belle acidité. Beaucoup de volume. Limpide et lisible. Un vin qui ne se livre pas facilement et qu’il faut aller chercher.
Chailloux 2018 : austère, serré, cistercien dans l’âme. Vin issu de sol à silex, élevé un an en fûts et foudres grands contenants. L’amertume, en finale, étire le vin. Superbe.
Les nouveautés :
Mono parcelle 469 Les Sentiers. Vigne de 60 ans issue d’une sélection massale poussant sur un sol kimmeridgien. 18 mois d’élevage. Beaucoup de volume. Très équilibré. Un vin extraordinairement salin, très pur. Brillant !
Monoparcelle 538, anciennement Les Démalés. Sol kimmeridgien en surface. 18 mois d’élevage sous bois. Un vin plus dur à goûter, moins accessible, mais qui deviendra probablement étincelant.
En résumé :
De très, très beaux vins, avec une âme. Un domaine à suivre de très, très près.
Les impressions de Gildas :
« Je suis, encore une fois, subjugué par la qualité et la pureté des vins du domaine ! L’entrée de gamme est déjà très accessible, et plus on monte, plus les étages se ressentent. Je suis également surpris que ce domaine ne fasse pas parler plus de lui, comme s’il était dans l’ombre des Mellot et des stars de l’appellation. Cependant, Stéphane n’a pas besoin de plus de médiatisation, car il n’y a pas grand-chose à vendre, malgré une fourchette de prix située plutôt dans le haut du panier. Heureux de constater que 2018 lui a permis de « faire le plein » afin de contenter un peu plus d’amateurs.
Plus qu’une confirmation après notre passage au domaine en juin dernier, c’est un réel coup de cœur » !
Le super système de présentation/rafraîchissement des bouteilles.
Devant : une plaque de verre. Derrière, un compartiment en inox recevant de la glace pilée. TOP !
En continuant notre périple, nous tombons sur un truc assez extraordinaire. En deux endroits de ce hall, des dizaines de bouteilles sont proposées en libre dégustation. Laissons parler Gildas.
« C’est à ce moment que le Rougeot commence sa parade de paon : il trépigne devant toutes ces cuvées de melon de Bourgogne, je ne le tiens plus. Les interjections pleuvent : « Oh ! Hé ! T’as vu ça ? P’is ça ? incroyab’ ! La vache, ça c’est bon ! Et lui il fait une cuvée EX-TRA-OR-DI-NAIRE… ». j’en passe et des meilleurs.
Nous savons que dans les travées du salon sont présents des commerciaux, mais je ne crois pas avoir vu plus fier ambassadeur du Muscadet que mon pote ! Malheureusement il déchantera rapidement quand, lorsqu’il arrive au « Muscadet truck » des Vins de Nantes, il se voit refuser catégoriquement des verres à l’effigie de son vignoble préféré. Verres qu’il convoite depuis de nombreuses semaines sur la page Facebook de l’événement. C’est donc la tronche en biais et la queue entre les jambes qu’il repart et que je dois le consoler. Je suis tellement triste pour lui, la vie est absolument injuste…
Des boutanches, des boutanches, des boutanches...
D’un côté, les chenins sous toutes leurs versions, du plus sec au plus liquoreux. De l’autre, des blancs, des rouges, des rosés. Le pied total ! Personne pour commenter, pas de stress, pas d’explication : seulement le vin et le dégustateur qui papillonne de bouteille en flacon au gré de son envie ou de son intérêt. A votre avis ? Vers quelle fine appellation me suis-je dirigé ? Bingo.
Une grosse trentaine de muscadets est proposée en accès libre. Je repère les bouteilles du domaine BIDEAU-GIRAUD. Un peu plus loin la cuvée TESS 2012 de Bruno CORMERAIS est à peine entamée. Jérémie HUCHET propose son Clos les Montys. Il y a du beau monde et du melon jusqu’à plus faim. Plus soif…
Pas facile-facile de choisir un bon melon en février !
Dans cet ilot aux trésors, nous découvrons le Château Thébaud 2014 du
domaine BOUCHAUD. Un muscadet qui claque, salin en diable, fumé comme une Morteau. Un truc qui vous fait chavirer. Nous décidons d’aller au stand E134. Pierre-Luc BOUCHAUD étant retenu, par un agent commercial, nous dégustons au pas de charge avec un autre viticulteur. A Angers, les stands sont souvent partagés entre copains vignerons. Dans une bonne ambiance, ils multiplient ainsi les chances de faire déguster leurs vins.
Le muscadet de Sèvres et Maine 2018 est fruité et floral. Il est encore marqué par la mise.
Perd son pain 2018, dans le même style, est plus tendre, mais aussi plus sec et plus salin.
Pont Caffino 2018 est une parcelle pentue, située en bordure de Maine est plus salin. Moins fruité, il est plus timide dans son expression. Néanmoins racé, il est franchement prometteur.
Enfin,
Château Thébaud 2014 est fumé, minéral à souhait. Gros volume, belle trame, bouche sans défaut, c’est un vin de gastronomie et un vrai coup de cœur. Bravo !
Gildas est également convaincu :
Je partage l’avis de Rougeot sur ce coup de cœur avec ce Château Thébaud Pont Caffino 2014, à la fine austérité comme j’aime trouver dans les vins qui ne sont pas tapageurs. Dense, finement fumé. Le final claque sur la langue, c’est une magnifique bouteille !.
Magnifique Château Thébaud de BOUCHAUD.
LA découverte du salon. Bravo !
BIDEAU-GIRAUD :
Gildas, visiblement heureux de boire du bon vin.
Quel plaisir de retrouver ce couple sympathique, cultivant les 47 ha de son vignoble selon la démarche Terra Vitis.
Le Muscadet
Grand Mortier Gobin 2014 est tel que je le connais : à la fois gras et traçant, volumineux, il présente un beau jus de roche avec de sympathiques notes fumées. Redoutable en perfusion.
Son cadet d’un an est moins fumé, beaucoup plus fruité, avec un peu moins de tension. Classique du cru et de ce millésime. Vieillira en toute sérénité.
Séduisants Grand Mortier Gobin 2014 et 2015.
La cuvée
Vieilles Vignes 2013, commence à être commercialisée. Il s’agit d’un vin issu de vignes âgées de 60 à 80 ans, élevé trois ans dans des fûts de 3 à 7 vins ; pour moitié acacia, pour moitié chêne.
Le vin est un peu marqué par l’élevage (vanille, coco), mais il y a du jus. C’est gras, volumineux, fruité mirabelle, un peu désarçonnant, mais la finale s’étire sur la coquille, le calcaire mouillé. Aucune inquiétude à avoir avec ce vin qui, l’expérience l’a prouvé, digère son élevage et se révèle sous son meilleur profil au bout de 5 à 10 ans de garde.
La Haye Fouassière 2012 : issu des vieilles vignes de Grand Mortier Gobin et de Haute Carizière, s’étant épanouies sur un substrat d’orthogneiss. Tendu, sec, fumé, volumineux, large, très long. C’est splendide ! Au niveau du Château Thébaud de BOUCHAUD. Bravo !
Mature 2010 : l’OBNI.
On le sait, je le répète à l’envi, le vignoble du muscadet est en pleine ébullition. Le niveau général monte en flèche, on y tente beaucoup et les vinifications longues, très longues, voire expérimentales s’y multiplient.
Ce Mature 2010 est un muscadet « nature », vinifié sans aucun intrant. Des vendanges jusqu’à la mise en bouteille, le vin a vécu sa vie comme il l’a souhaité.
Récolté en 2010, il a fait sa première fermentation alcoolique. Il est resté en fût, sur ses lies et sans ajout de SO2 toute l’année 2011. En septembre/octobre, il a fait une deuxième fermentation qui a permis de digérer tous les sucres. Il a finalement été mis en bouteilles en 2012, 15 ou 16 mois après la vendange, avec ses lies qui se présentent dans la bouteille sous la forme de filaments noirs. Pourquoi garder les lies en bouteille et ne pas filtrer le vin ?
"Parce qu’elles sont réductrices et permettront sa bonne conservation", explique Daniel GIRAUD.
Daniel BIDEAU évoque la vinification de son Mature 2010. Un vin... Clivant !
A la dégustation, le vin se révèle sous une curieuse note de métal froid, avec des saveurs et une structure totalement inédites. Impossible de déterminer, à l’aveugle, qu’il s’agit d’un muscadet. Encore moins de vous expliquer ce que j’ai bu, tant mes repères sont tombés. Un vin borderline, sans « défaut » œnologique mais à ne pas mettre dans toutes les bouches. A tel point que je suis encore incapable de savoir si j’aime ou non !
Abouriou 2018 : robe rose/rouge très légère. Epicé. Fluide. Pas très tannique. Très bon. Le vin de table par excellence, à placer sur des charcuteries. Vendu à 3,40 €, il représente une excellente affaire !
Un mot sur le millésime 2018 ?
« On peut parler de vendange du siècle. Du vent en permanence, pas de canicule, des raisins parvenus à leur maturité optimale, avec un équilibre rarement vu. Ce millésime s’inscrit dans la veine des 29, 45, 59… Et 89, qu’il surclasse largement ».
Avis aux amateurs : il faudra se ruer sur les communales lorsqu’elles sortiront.
Gildas est en phase. Enfin… Presque :
Un couple d’une extrême gentillesse. Très en phase sur les cuvées de Muscadet avec l’ami Vincent. La Haye Fouassière 2012 est une superbe bouteille que l’on aimerait ouvrir dans quelques années, même si elle se montre déjà séduisante et avenante. Par contre, je n’ai pas du tout accroché sur Abouriou 2018, que je trouve plat et vraiment anodin. Vincent se place en ambassadeur des vins de Muscadet devant M et Mme Bideau Giraud, en faisant un petit numéro, dont vous aurez la primeur un peu plus tard
La Levée de la Loire : les vins biologiques, biodynamiques et "nature".
Domaine GIGOU, Jasnières et Coteaux du Loir :
Des vins que j’ai globalement mal goûtés. Gildas a essayé de me convaincre en insistant sur leur caractère autochtone, voire indigène, ces vins n’étaient pas à mon goût. Ils ont une véritable typicité qui les rend intéressant, mais je n’ai pas accroché. Trop tendus, trop vifs, peut-être un peu « décharnés », avec des goûts pas franchement séduisants…
Coteaux du Loir 2017 : élevage en fûts de châtaigner. Très vif. Note de pois cassé. Curieux.
Jasnières Jus de Terre 2017 : élevage 50 % en fûts de chêne, 50 % en cuve. Tendu. Très vif, salin, plus complexe, mais une note pas très nette, limite vieille futaille, en ce qui me concerne. Gildas dément.
Jasnières Clos Saint Jacques 2017 : élevage en fûts de chêne. Vieilles vignes de 70 ans. Dans le même style. Gildas a beaucoup aimé, je suis resté circonspect.
Gildas :
« Je n’irai pas contre l’avis de Vincent qui n’a visiblement pas aimé le style. C’est un style à part je le conçois, très sec, jus de caillou sur des notes de salpêtre et de silex frotté. Un chenin à part, qui ne ressemble à aucun autre. Le chenin est un grand cépage, qui montre encore une fois sa capacité à emprunter le sol sur lequel il pousse.
Un vigneron attachant, des vins plus clivants.
Gildas a beaucoup aimé, moi un peu moins.
Je reverrai ces vins dans un ou deux mois, dans un salon près de Rouen, afin de confirmer ou infirmer mon jugement.
Alsace domaine FLEITH :
Des vins « nature » qui ne m’ont pas enthousiasmé. Gildas a aimé ; je suis moins laudatif.
Une gamme cohérente, avec les traditionnels cépages alsaciens, une cuvée issue de complantation. Un riesling et un gewurzt plutôt pas mal sont mes seuls souvenirs.
« Rien à ajouter à ce qu’a écrit Vincent : on aime le style ou pas. C’est nature, mais ça reste néanmoins cadré et sans extrémisme ». (Je confirme).
Les Alsace biodynamiques de Vincent FLEITH.
Très naturels. Peut-être même un peu trop pour moi.
Château SIMIAN – Côtes du Rhône et Châteauneuf du Pape :
13 vins en dégustation.
Une gamme très cohérente, avec de jolis côtes du Rhône (mention spéciale pour la gourmandise qu’est la
Jocundaz, Côtes du Rhône massif d’Uchaux) et un magnifique C9P
Les grandes grenachières d’Hypolite 2016 ; quasiment pur Grenache.
L’avis de Gildas :
« Vougeot m’a emmené sur ce stand en me vantant la cuvée « les Grandes Grenachières d’Hippolyte » qu’il avait gouté à Rouen lors d’un salon. Bien l’en a pris : c’est un magnifique C9P très pur, alliant puissance, élevage millimétré porté par un superbe fruit. Dans mon TOP 3 du jour ! A noter le très bon accueil du vigneron ».
Les jolis rouges du château SIMIAN. Du jus et de l'équilibre.
Dans les blancs, on retiendra l’entrée de gamme
Jeu d’Rolle pour son fruit exubérant porté par un bel équilibre et remarquable cuvée
La Louronne ; séveuse à souhait, très équilibrée, sans la lourdeur qui signe parfois les blancs du sud.
La très belle et très gourmande gamme de blancs du château SIMIAN.
Interlude comique...
Nous quittons le domaine heureux mais Moderator1, ne pouvant répondre à la fatidique question «
Et maintenant, chez qui allons-nous ? », est joueur :
- «
Ecoute… Je te propose que nous nous arrêtions au 6e stand après 3 allées, à droite...
-
Vas-y mon Gildouille ! Banco, j’te suis.
-
Un… deux… trois… un… deux… trois… quatre… cinq… six…
-
Oh meeeeerde…
-
Ahahahahahah !
C’est reparti pour un calvaire.
Bourgueil Domaine XXX (je ne cite pas pour ne pas faire de tort au très sympathique vigneron qui nous a super bien reçus).
Un pet’nat à l’effervescence digne d’un MENTOS plongé dans du coca light. Un vin plus dur à cracher qu’à ingérer, même si, déjà, les notes de vieux cidre n’incitaient pas à la dégustation.
Pet’nat’ + salive = mousse polyuréthane expansive.
Un blanc du même acabit, sans l’effervescence destructrice, mais teinté de pomme blette, de verni…
Quant aux rouges… Pfffffff… Gildas se marre, se marre, se marre. Il prend des photos.
-
« Je veux conserver ça pour la postérité » me dit-il, ce p’tit fumier.
P***ain ! Ce n’est pas bon. Comment ne pas le dire au vigneron ? Le gars est sympa. Comment rester, gentil, aimable, faux-cul ?
« C’est floral et aérien. D’habitude, je n’aime pas trop le cabernet mais, là, faut reconnaître… » glissé-je entre deux remontées acide.
« Oui, c'est vrai ! Je cueille mûr parce qu'il faut bien reconnaître que le cabernet pas mûr, c'est un peu strident » confirme l'aimable vigneron.
Du point de vue de Gildas,
»ce colosse de vigneron, Laurent Biiiiiiip, est d’une extrême gentillesse. Je me verrai bien passer une soirée avec lui, ça doit-être quelque chose.
Les vins issus de cabernet-franc sont frais, digestes et bien mûrs, sans cette sensation dans l’archétype du vin nature (lisez aucune note d’écurie ou de fosse septique). A noter une jolie cuvée de vendanges solidaire issues de raisins de syrah, grenache et mourvèdre provenant du sud de la France, au degré alcoolique faible : floral et immédiat ».
A côté, quelques vieux trentenaires/jeunes quadras sont aux anges. Visiblement, les vins leur plaisent et ils se pâment en avalant à grandes lampées ce jus que je ne trouve franchement pas à mon goût.
« Heureusement qu’il y a un public pour ce genre de production… Ou alors, il faut la boire dans un jean slim avec des Stan Smith aux pieds pour la comprendre » persifflé-je…
A peine revenu de l’enfer, une question s’impose : comment se fait-il que systématiquement, dès que je suis en salon, il y ait un LPVien qui veuille me faire boire du Cabernet Franc ? A Rouen, à Paris, à Angers : pas un mec qui ne souhaite me voir passer par tous les états après ingestion de vinaigre aromatisé au poivron.
Je dois être une attraction. Au même titre que la femme-araignée ou l’homme sans tête, je suis devenu un phénomène de foire. On se presse des quatre coins de France pour voir mon visage se tordre de douleur à la vue d’un verre de cabernet franc. Une sorte de
Grand Zampano avec, dans le rôle de Gelsomina, les mecs qui m’accompagnent ou qui me rencontrent. Ladide, si tu me lis…
- «
Et maintenant, Mesdames, Messieurs, le « Grand Vougeot » va boire un verre de cabernet franc…
- Ooooooohhh…
- Veuillez éloigner les animaux, tenir les enfants en laisse et, surtout, ne pas crier. L’exercice est périlleux »…
J’en soupçonne même quelques-uns, modérateurs pour ne pas les citer, de ne m’inviter que pour ça. Les mecs sont prêts à supporter 6 heures de commentaires foireux, de dégustations sans intérêt et d’extase sur des vins anodins simplement pour avoir le bonheur de contempler ma douleur. Sadique, hein ?
Mais pourquoi faire du pif avec ça alors qu'il y a tellement de trucs bien meilleurs ?
Bon… revenons au vin. Au vrai.
Chez les cousins
FOUASSIER, à Sancerre : qu’est-ce que c’est bon !
Paul et Benoît FOUASSIER offre des 2017 de haute volée, vifs, tendus et salins à souhait. La gamme est cohérente et irrésistible. Les sauvignons sont mûrs, limpides, brillants et offrent un large aperçu des sols du sancerrois. Sur la dizaine de vins dégustés, mention spéciale aux
Romains pour son volume : largeur, longueur, hauteur, tout y est ! Une ode au sauvignon. Les pinots noirs sont également dignes d’entrer dans nos caves. Moins séducteurs que chez Gérard BOULAY, mais tout de même très bons.
Gildas confirme :
« La gamme est d’une régularité exemplaire. Les maturités sont très justes et l’expression du sauvignon s’exprime en délaissant tout le côté variétal que je déteste. S’il ne fallait retenir un terroir parmi tous ceux qui étaient en forme, ce serait comme Vincent : « Les Romains ». Il y a un supplément de tout avec cette salinité et cette vibration qui signent en général cette cuvée ».
Deux gars qui savent recevoir et faire du vin ! Top !
Catherine et Philippe DELESVAUX :
Nous sommes reçus par Madame DELESVAUX qui écrit en anglais à des Danois. Pour ceux qui en doutaient encore, la mondialisation est en marche.
Nous attaquons la dégustation avec
Envie de bulles, effervescent élaboré avec 2/3 de chenin et 1/3 de cabernet franc de saignée (qu’on ne sent pas ! Ouf ! ). C’est un vin disons… classique. Bien fait, il ne laisse pas un souvenir impérissable. Bulle un peu trop envahissante à mon goût.
Les blancs secs offrent un très beau jus de chenin. La typicité, sans artifice ni facilité. Purs et nets, ce sont assurément des vins de gastronomie.
Les moelleux et liquoreux sont également remarquables. Notamment, la cuvée
Grains nobles 2015 à la richesse superlative sans être roborative. Ses 240 grammes de sucre glissent en bouche comme un bas nylon glisse sur la jambe de Marlène DIETRICH.
Pour les moins fortunés, le
Coteaux du Layon Les Clos 2016, avec « seulement » 120 g de sucres résiduels représente un très bon rapport qualité/prix/plaisir.
Une fois de plus, Gildas et moi nous accordons :
« Pareil que Rougeot : quel vin ce « Grains Nobles » 2015. A siroter en fin de soirée, pour refaire le monde ».
Sec, moelleux ou liquoreux, chez DELESVAUX, tout est beau.
Domaine d’Orfeuilles :
Conseillés par les cousins FOUASSIER, nous nous dirigeons vers les Vouvray de leur copain Arnaud HERIVAULT. Les vins sont bien typés Vouvray, avec – point positif ! - une acidité mesurée.
Le
vouvray méthode traditionnelle est d’une expression assez simple et d’une bulle un peu… envahissante. Je n’ai pas accroché.
Le
vouvray sec est simple, mais bien fait. Je lui ai préféré la cuvée
Silex d’Orfeuilles, plus complexe et plus volumineuse.
Le
vouvray demi-sec se cherche un peu, entre un vin sec et un moelleux. Je me suis demandé avec quoi l’accorder.
Le
vouvray moelleux est, bien entendu, plus riche en sucre, avec une trame acide donnant de la fraîcheur au vin. Mais il reste digeste.
Les vins en vrac :
Domaine de Juchepie - Anjou - Les Clos 2014 :
Beaucoup de volume, des fruits jaunes un peu masqués par l’élevage (vanille). C’est un beau vin de gastronomie, un peu pataud néanmoins. Il m'a fait penser à une Côte de Beaune trop bien élevée.
Domaine LEDUC FROUIN – Coteaux du Layon Les grands clos 2016. Richesse et acidité, rôti, équilibre. Un bien joli vin. Le 1971 nous avait beaucoup plus, il y a 7 ans.
Domaine aux Moines - Savennières roche aux Moines :
Le 2016 est en place. Il m'a paru un peu comprimé à l'heure actuelle. Pas de déviance, comme Jérôme nous l'avait fait remarquer il y a trois ou quatre ans. Pas d'inquiétude à avoir avec ce vin qui se révèle au terme de 6 à 10 ans de garde.
Le 2017 est moins étincelant. En l'état, il paraît même anodin. Mais, une nouvelle fois, je ne suis pas inquiet.
Le
Berceau des fées 2018 est trop jeune pour se faire une idée. C'est un vin brouillon, qui travaille toujours, marqué par des arômes et saveurs de jus de pomme en train de fermenter. Difficile de prédire ce qu'il donnera. Pas convaincu.
Choix plutôt restreint chez Tessa LAROCHE...