La période de la fin d'année étant éprouvante moralement et physiquement, si, si, ne le niez pas, quelques amis et moi-même avons décidé de nous préparer psychologiquement avec un pré-repas de fête. Rien d'extraordinaire hein, mais bon, un dégustateur entraîné en vaut deux, voire trois.
On commence avec deux champagnes bus en apéritif sur quelques légumes crus et des charcuteries diverses.
A. Boatas & Fils - Brut grand cru blanc de blancs millésime 2008
Voilà un petit producteur que j'ai découvert très récemment à la faveur d'un salon. La gamme est restreinte avec une demi-douzaine de références, mais tout ce que j'ai goûté a semblé fort digne d'intérêt à mon palais de néophyte de la région. Et je ne suis pas le seul car cette bouteille a rencontré un vif succès et s'est évaporée à toute allure (bon, nous étions six tout de même).
Le nez est vif et précis sur les fleurs blanches et le pralin. Le train de bulles est fin et vient chatouiller le palais délicatement. La bouche fait montre à la fois de rondeur, d'aisance et de gourmandise tout en restant vive, avec quelques notes de tilleul et de miel et une belle finale saline. Assez peu amateur de champagnes d'habitude, j'ai beaucoup apprécié celui-ci.
Philipponnat - Royale réserve brut
Je découvre cette maison assez souvent commentée sur LPV par cette cuvée qui est clairement apparue pour ce qu'elle : une entrée de gamme. Cette bouteille est consensuelle mais sans véritable vertu : le nez est engageant, la bulle un rien grossière, la bouche est sympa, un chouïa pâtissière mais sans mollesse, ça se laisse boire facilement mais bon voilà quoi. Plus cher mais moins séduisant que le Boatas.
L'entrée est un velouté de lentilles au foie gras. Ca c'est du bon miam ! Et on boit quoi avec ça ?
Domaine Bohn - Gewurztraminer Carte Blanche 2015
Voilà un petit domaine peu commenté sur LPV, ce qui est dommage car sa production est intéressante. Un ami amateur de Gewurzt (oui, ça existe) en achète souvent et j'ai donc eu l'occasion de goûter plusieurs millésimes (et non je n'en avais pas parlé sur LPV jusqu'à ce jour, c'est mal, je sais, qu'Oliv, saint patron des
pochetrons Lpviens, me pardonne).
Gewurztraminer récolté en surmaturité, cette cuvée propose un nez à l'exhubérance typique du cépage, sur les fruits exotiques et le litchi. La bouche est large, parfumée, mais sans aucune lourdeur : le vin garde beaucoup d'allant, ce qui le rend très facile à boire et à servir à table, malgré un petit déficit de complexité.
On passe au plat principal, deux côtes de boeuf wagyu d'origine espagnole avec un accompagnement minimaliste sous la forme d'une salade. La viande a été juste saisie à la poêle avant de cuire au four. Fondante, grasse, elle est très très bonne.
Château Lascombes - Margaux 2003
Ayant bu assez souvent des Lascombes quand j'étais jeune et que je cherchais le secret du vin parfait, cela me fait plaisir de goûter de nouveau à ce cru pourtant assez irrégulier. Mais 2003 est une bonne pioche !
Le bouchon est impeccable, la robe foncée, le nez ouvert mais timide malgré le carafage : fruits noirs, quelques épices. La bouche surprend par sa finesse de texture : elle est soyeuse, les tannins sont fondus, un peu de tabac et des épices douces prolongent la finale. La douceur du vin répond bien à la sensation du gras de la viande. Certains convives ont trouvé que ce Lascombes manquait tout de même de corps : ce n'est pas faux mais personnellement cela ne m'a pas gêné.
Paul Jaboulet Aîné - Côte Rôtie Les Jumelles 2017
Un peu déçus par le Lascombes, certains épicuriens décident d'attaquer cette Côté Rôtie. La robe est opaque et le nez encore un peu timide. La bouche est typique d'une syrah du Rhône nord (je sais, c'est facile à dire quand on n'est pas à l'aveugle) : petits fruits noirs, épices, une pointe fumée. Mais les tannins sont encore récalcitrants, rendant le vin un peu abrupt. Néanmoins l'accord avec le wagyu se fait bien sur la note poivrée finale. Un bon vin, à attendre.
Château Calon Ségur - Saint-Estèphe 2002
Un autre classique de mes premières expériences d'amateur, ce Calon présente une robe avec un petit début d'évolution et un nez inexistant. En bouche, c'est pareil : mou, quelconque, sans intérêt. Sans doute la faute au millésime ? En l'espèce c'est police, menottes, prison pour ce jus à peine digne de remplir une bouteille de Mouton Cadet.
Domaine Ferraton Père & Fils - Saint-Joseph La Source 2017 blanc
Cette bouteille est ouverte sur un gargantuesque plateau de fromage. Mes quelques expériences avec ce producteur ne m'ont pas marqué et ce n'est pas ce vin qui changera cela. Ce 100% marsanne manque considérablement de punch, d'énergie et les quelques amers et la pointe miellée finale ne parviennent pas à masquer une impression de dilution.
Château Guiraud - Sauternes 2003
Ce Guiraud est dégusté sur des fromages persillés (roquefort et bleu de Gex) d'abord, puis sur un dessert au chocolat et enfin pour lui-même. Il clôt dignement le repas, avec une belle robe ambrée et un nez d'un classicisme d'école sur l'abricot et l'orange confite. La bouche est riche, avec un beau volume, elle manque de perdre l'équilibre plusieurs fois mais parvient tout de même à se rattraper tel une équilibriste grâce à une pointe d'acidité à peine suffisante. Un Sauternes à l'opulence gourmande.