Depuis trois ans, les copains de mon fils, de trente ans (c’est leur âge, pas la durée de leur amitié ) sont bien venus trois ou quatre fois faire des WE œnologiques, comprenant une dégustation éclectique et pédagogique à la maison. J’ai donc voulu changer un peu et cette fois j’ai invité les filles …
Les filles ? Oui, les femmes, les copines, les compagnes de ces copains précités. Elles sont huit, débutantes ou amatrices mais toutes intéressées, et ont dû trouver le maximum de cépages dominants, à l’aide d’un petit aide-mémoire. Les accompagnements étaient naturellement signés par une autre douce et tendre (la mienne).

Vin n°1

Seules indications donnée : le chardonnay donne de la finesse, le pinot meunier apporte du fruité et le pinot noir de la vinosité ... C’est très fin, frais et équilibré, c’est donc un chardonnay disent-elles en chœur ! Banco, c’est un Blanc de blancs du domaine Robert-Allait cuvée Stéphanie 2006 (15,5 / 20), associé aux classiques galettes de pomme de terre.

Vin n°2

La robe est paille, le nez très aromatique, la bouche marquée par une acidité presque mordante. Ce ne peut être qu’un sauvignon, même si le riesling a été évoqué furtivement … Bravo : deux sur deux ! C’est un Quincy 2010 du domaine Villalin (14,5 / 20) qui accompagne des verrines au saumon fumé, fromage blanc et concombre.

Vin n° 3

On change totalement de style avec cette robe or clair, ce nez très intense où toutes reconnaissent le pain grillé et certaines complètent par la vanille et l’amande. La bouche est bien grasse et ample, la longue finale sur la noisette fraîche. De plus cela se marie fort bien avec des coquilles Saint-Jacques au safran.
Tout cela ne mène qu’à une seule réponse : c’est un chardonnay, plus précisément un Pernand-Vergelesses 1er cru « Le Clos du village » 2005 du domaine Rapet. Je complète leur commentaire : il faut aimer les vins boisés pour bien apprécier ce vin qui va encore se fondre (16,5 / 20). Mais pendant ce temps, le score s’amplifie : et un, et deux, et trois à zéro ! Les oreilles des gars doivent siffler : vont-elles faire mieux que nous ?

Vin n°4

Ayant constaté cette robe pas si claire que cela mais franchement évoluée, ayant extrêmement apprécié ce nez ouvert et très fin, mais aux arômes tertiaires dominants (floraux, légèrement animaux), je me doute que cela ne va pas être facile. En bouche, c’est la finesse qui domine, il y a peu de fruit mais une vivacité qui procure à ce vin une superbe rectitude et une belle longueur (17 / 20). Les merveilleuses tartelettes aux cèpes sont un accompagnement idéal.
Il s’agit d’un Chambolle Musigny 2001 de Confuron-Cotedidot … mais comme prévu, les filles s’égarent ; elles partent du côté du cabernet franc, ce qui n’était pas du tout illogique ! J’avais pourtant choisi un vin typiquement féminin …

Vin n°5

La robe est sombre, mais sans plus (pas plus dense que le Chambolle), et encore assez jeune. Le nez est puissant d’abord très animal (ouille, cela va tout masquer !), mais le fruité apparaît à l’aération, l’ensemble étant dominé par un côté très poivré. En bouche, c’est au profit de la minéralité que les arômes animaux s’estompent. Belle bouche, persistante, magnifiée par des champignons au chorizo, accord qui en a surpris plus d’une ! L’analyse est bonne et la réponse également : c’est une syrah du Rhône septentrional, un Saint-Joseph 2006 de Chapoutier (16 / 20).

Vin n°6

D’un beau rubis soutenu, le dernier rouge dévoile des arômes superbes et complexes de fruits noirs, café, grillé, vanille, cuir, … La bouche impressionne par sa finesse, son onctuosité, sa rondeur, sa fraîcheur et la longue finale sur le café (17 / 20). C’est un superbe adolescent qui devrait encore mûrir sur 10 ans …
Tout de suite Bordeaux s’est imposé, mais quelle rive et quel cépage ? Les belles hésitent entre le cabernet sauvignon et le merlot. C’est le premier qui l’emportera d’une courte tête alors que là encore j’avais opté pour un vin féminin ... D’ailleurs mon commentaire allait dans ce sens, mais pour moi c’était plus facile … Il s’agit du très beau Saint-Emilion Château Fombrauge 2006, dont l’accord avec des magrets de canard aux épices est réussi, comme attendu.

Vin n°7

Pour finir, une petite douceur, mais sans trop de sucre.
La robe est bien dorée, le nez intense et miellé, avec de furtives notes de coing (mais cela c’est peut-être moi qui l’ai rêvé). L’attaque est assez liquoreuse, mais plus grasse que sucrée, la bouche bien équilibrée par la vivacité,la densité un peu faiblarde. Leur méconnaissance des vins liquoreux de Loire les a fait passer à côté (au niveau de la réponse, pas de l’appréciation) de ce Vouvray moelleux 2005 de François Pinon (16 / 20), par ailleurs apprécié pour sa légèreté (je dirais sa féminité).
L’accord avec des fraises et les très bons financiers maison était correct sans être transcendant.

Au final, bravo aux filles ! 4 cépages principaux ou unitaires reconnus sur 7 vins : j’aimerais bien avoir cette proportion dans les championnats de dégustation !
Elles ont été très fortes mais ce sont leurs commentaires avisés qui m’ont vraiment impressionné … Les filles dégustent vraiment très bien ! X(

Jean-Loup

Initiative très sympa et bravo pour la pédagogie

A te lire, on se dit qu'elles auraient remporté haut la main le concours organisé par les PACA

Arnaud - LPV Vaucluse

Jean-loup,

d' accord avec toi. Mes belles soeurs et surtout ma môman (pas de connaissances particulières) ont souvent
de bonnes perceptions et trouvent des arômes très rapidement.
Ma belle soeur m' a fait halluciner il y a peu sur un de fieuzal blanc 2005 en me faisant un cr oral après une gorgée des plus convainquant
alors qu' elle n' y connaît que dalle.

Jadore les pernand rouges de rapet, tu ne me donnes pas envie de goûter aux blancs boisés...

Est-ce toi qui a donné la passion à tout ce petit monde?

Bonjour
comme dit un de mes bons copains ,elles n'ont pas de mérite, elles cuisinent tous les jours (les garçons se réservant de temps en temps la cuisine un peu "prestige" de week-end) et se parfument. Elles ont une très bonnes connaissance des goûts, des saveurs et des arômes. De plus contrairement aux garçons elles n'y mettent aucune vanité de qui a la plus grosse (elles savent en général qu'elles n'en ont pas!). Elles goûtent simplement et sans chichis, elles mettent donc plus souvent que nous dans le mille.
En tout cas merci de l'avoir "rappelé" de manière simple et efficace:)

R

C'est toujours bon de rappeler à quel point le monde du vin et des hommes peut être macho

Merci pour vos réactions les mecs (euh les gars ...);

Paulo, si tu n'apprécies pas les vins boisés, tu peux effectivement cherchet ailleurs que chez Rapet.
Mais si, comme moi, tu aimes les Bourgogne blancs charpentés acceptant un boisé présent et bien intégré, alors tu regardes la note que j'ai mise et tu te dis que ce n'est pas mal du tout !
Quant à mon influence sur la passion de tout ce petit monde, c'est un peu tôt pour les filles mais il paraît que j'ai modestement aidé à développer celle des garçons.
D'ailleurs, ils ont décidé de créer une toute petite société qui a acheté du vin en vrac à un vigneron, rencontré par hasard et qui leur a bien plu (son vin aussi ...), et de le commercialiser sous leur propre étiquette. Je devrais le goûter dans le mois qui vient ...

Amitiés oenophiles,

Jean-Loup

Je suis étonné de la couleur du quincy qui était plutôt parcouru d'un trait vert que paille et effectivement avec une aromatique élevée. Malheureusement sur 2011, la grêle a fait de gros dégâts et la récolte sera petite.

Jean-Loup,

félicitations pour le choix tant didactique que qualitatif des bouteilles présentées ainsi que pour le principe sympa et convivial de la réunion.

Et bien sûr que les filles savent déguster!

jlj

Bonjour,

Sans vouloir me vanter, si j'avais été présent à cette dégustation j'aurais bien évidemment... fait beaucoup moins bien, sans doute aucun.

L'inexpérience (relative) peut également parfois aider à être sur la bonne voie car on va droit au but sans se poser de questions existentielles.

En tout cas bravo à ces demoiselles.

Cdt

Guillaume

Jean-Loup, le parfait gentleman séducteur
Tu vas porter ombrage à ton fils & ses copains qui ont d'ailleurs le même âge que moi...
Tu ne m'en veux pas si je ne te confie pas mes copines, mais je suis bien capable d'organiser des dégustations moi-même sans aide aucune du même genre que la patte magique de Nicole!!!
( = tu triches!!! )

Amitiés

Vivien

PS : je sens que je vais recycler le concept à ma sauce un de ces jours prochains...

J'ai aussi remarqué que les filles ( à niveau de connaissances égal avec les hommes ) gouttent souvent bien mieux. Elles sont souvent plus franches dans leurs analyses, ont une perception plus fine. Bref, je rejoins en grande partie le propo d'Herbey.

Chouette Constat !!! Venez Mesdames, Mesdemoiselles, vous serez toujours le bienvenues !

Olivier.

J'ai à nouveau invité pour un WE oenophile les femmes des copains de mon fils.

Une première étape importante a été la magnifique dégustation avec Bertrand Minchin : voir ICI .

Puis cela a été la dégustation à l'aveugle à la maison, accompagnée par des petites bouchées de ma tendre et douce.

Champagne – Robert Allait – Cuvée Prestige

Le nez est bien fruité et d’une certaine finesse.
La bouche est droite tout en faisant apparaître un côté tendre. Y aurait-il des sucres résiduels en haut de la fourchette des bruts ?
En raison de la droiture de la bouche et de la finesse du nez les filles ont annoncé chardonnay pour ce qui révèle être un 100 % pinot meunier 50 % pinot meunier, 35 % chardonnay et 15 % pinot noir. Ce sera leur seule erreur, bien excusable !
Un Champagne agréable mais sans grande personnalité, qui va bien sûr très bien sur les galettes de pomme de terre. Assez Bien +

Montlouis – François Chidaine – Les Choisilles – 2008
La bouteille a été carafée une heure.

La robe est d’un bel or clair.
Le nez montre une belle intensité sur les fleurs blanches et des notes d’infusion.
L’attaque est ample, la bouche suave, puis l’acidité prend le dessus et lui procure une énergie vibrante dans la finale bien persistante.
L’archétype d’un superbe Montlouis. Très Bien +
Le vin et le plat (excellentes crevettes aux herbes de Provence) font cependant chacun leur chemin de leur côté, sans être déstabilisés.

Chablis Grand Cru Bougros – William Fèvre – 2005
La bouteille a été carafée une heure.

La robe est d’une couleur paille tirant sur l’or.
Le nez est expressif sans être complexe, se composant de brioche et de fruits blancs.
La bouche est grasse et ronde, dotée d’une matière riche. La minéralité ne se perçoit pas mais il y a quand même une vivacité structurante avant une finale de mi-longueur sur la vanille.
Le reste de la bouteille fini le lendemain laissera poindre un peu de minéralité sur la finale.
Un (très) bon Chablis mais un peu décevant pour l’appellation. Très Bien
L’accord était excellent avec la blanquette de lotte aux petits légumes.

Chinon – Bernard Baudry – La Croix Boissée – 2005
La bouteille a été carafée une heure trente.

La robe sombre est à peine évoluée.
Le nez puissant dévoile une belle complexité : animal, poivron, épices, fruits noirs, un côté gréseux. La bouche corsée est équilibrée par une superbe fraîcheur mais l’austérité de l’ensemble est redoutable ! Le manque de fruit est gommé sur la saucisse de Morteau aux lentilles du Berry, qui apportent au vin de la rondeur et un certain fruité.
J’en attendais un peu mieux. Bien + tout seul, Bien ++ sur le plat.

Volnay – Rossignol-Changarnier – 2005
La bouteille a été carafée une heure.

La robe est assez claire avec des reflets de couleur brique.
Le nez n’est pas très ouvert mais il est fin, sur les fruits rouges (fraise, cerise), sans des arômes tertiaires plus floraux.
La bouche est très élégante, toute en finesse et longueur, sur un fruité léger mais savoureux.
Un bien beau Volnay. Bien ++ / Très Bien
L’accord s’est bien trouvé avec un salmis de pintade aux champignons avec des gnocchis poêlés, du fait que les champignons étaient juste poêlés à part et rajoutés en fin de cuisson : ainsi ils n’accentuaient pas le côté sauvage du plat.

Gigondas – Domaine de Santa Duc – Prestige des Hautes Garrigues – 2006
L'assemblage comprend 80 % de vieilles vignes de grenache. La bouteille a été carafée une heure.

La robe est assez sombre, avec des marques d’évolution.
Au nez un beau fruité explose, sur la fraise, la cerise et la framboise, complété par des touches florales et épicées.
La bouche est à l’avenant, sur un très bel équilibre, avec encore quelques petits tanins bien fins.
Un magnifique vin du Sud non caricatural. Très Bien +
Sur le délice de Bourgogne, l’accord était moyen (moins bien qu’avec un Bordeaux ou un Bourgogne). En revanche cela a bien fonctionné avec le comté de 18 mois, comme d’hab avec toutes sortes de vins.

Sauternes – Domaine Le Comte – Cuvée Céline – 2010

La robe est d’un doré légèrement ambré.
Le nez ouvert dévoile un côté rôti propre au botrytis. C’est très miellé, avec de l’abricot confit, peu d’agrumes, l’ensemble d’une grande finesse.
L’harmonie en bouche se fait entre la liqueur pas trop marquée, le fruit éclatant et la vivacité traçante.
Un bon Sauternes d’un grand classicisme, encore bien jeune. Très Bien
Le mariage, classique, était fort réussi avec une tarte aux poires et aux amandes.

Au final 6 cépages uniques ou majoritaires découverts sur 7 vins, parfois avec des indices donnés par ma chère et tendre , c'est très bien !
Et tout ceci dans la bonne humeur et le partage des ressentis.

Jamais deux sans trois !

Jean-Loup

Jean Loup, c'est le beau papa parfait comme on aurait tous rêvé d'en avoir un !

Heuh, je ne suis pas assez vieux trop jeune pour être ton beau papa, Oliv !

Quoique...

Jean-Loup

Jean-Loup, tu veux bien être notre beau-papa adoptif dis ?

O.

Adoptif... tout est possible, Olivier.
J'espère bien avoir tous les Olivier de LPV dans ma cave un jour !
Pas tous ensemble...

Jean-Loup

ça marche aussi avec les Florian???Dis??? Et pis on est moins nombreux, nous!!! Allez!!!!()

Tels les plus grands domaines bourguignons, la plus sympathique des caves de Bourges est victime de son succès

julien

Jean Loup
Mon père ne prendra pas ombrage si vous voulez m'adopter également,il a tellement de filles qu'il ne s'en apercevra pas.
Merci à vous
Agnès, sans famille

L'ami Claude me signale une erreur sur l'assemblage du Champagne : j'ai donc corrigé !
Et du coup les filles se sont rapprochées du 7/7 car avec 35 % de chardonnay elles n'étaient pas loin des 50 % de pinot meunier...

Jean-Loup