Repas chez Vincent Mercier et Visite au Château Climens
Vendredi 04 février 2005
Une production Ganesh da Capo
Le contexte :
A l'initiative de Vincent, une soirée de retrouvailles attendue entre amateurs bordelais, parisiens et toulousains.
Participants : Bruno Torsello, Fabrice Beaugrand, Thierry Geoffroy, Franck Bonnet, François Breteau, Eric Fonta, Vincent Mercier, Jacques Prandi, Laurent Gibet (LG), Pascal Perez (PP).
Le repas, pris au restaurant mitoyen de la maison de Vincent, se compose de :
- Gratin de fruits de mer
- Terrine au foie gras
- Civet de biche
- Entremets glacé au caramel
Les commentaires de dégustation sont synthétisés par Pascal Perez.
Les vins :
1. Champagne – Diébolt-Vallois – Blanc de blancs 1976 :
LG16 - PP15,5
- Cuis 1er cru (héritage Vallois).
- Le nez présente des traces oxydées puis de la pomme, de la poire très mûre, des zestes d'orange et de la muscade.
- Son corps est vertébré par une acidité de lame d'épée qui soutient vivement sa finale. Sa bulle est très fine et son volume correct. Sa gamme aromatique sur l'évolution (mousseron, pain d'épices) et un début d'oxydation (pomme) révèlent son âge avancé, alors que sa fraîcheur et sa vigueur le démentent. Un beau fin souffrant toutefois d'un léger déficit d'harmonie.
2. Mosel-Saar-Ruwer – Josef Rosch – Riesling Trocken 1999 (L1/00 ; 11,5°) :
LG15,5 - PP15
- Nez classique d'une grande minéralité, avec de la verveine, de la menthe, des agrumes et de la citronnelle.
- Il affiche une belle tension, de la fraîcheur renforcée par un léger CO2 résiduel et une pureté de fruit certaine, mais des limites aussi (simplicité aromatique et longueur moyenne) qui sont celles de son terroir.
3. Alsace Gd Cru Schlossberg – Paul Blanck – Riesling 1994 :
LG14,5 – PP13,5
- Senteurs généreuses et séduisantes : poire, menthe, épices douces (cumin) et pointe minérale/pétrolée.
- Une bouche particulièrement riche et nourrissante (fruits blancs sur-mûrs, profusion d'épices) conjugué à un manque flagrant de tonus finissent par donner un vin balourd qui, de plus, semble prématurément usé.
4. Pessac-Léognan – Château de Fieuzal – Blanc 1990 :
LG13 – PP13,5
- Le nez est doux et opulent : vanille, beurre, épices douces et poire blette.
- Malgré un volume respectable, la bouche n'enthousiasme pas avec ses tonalités de crème vanillée, de pêche poêlée au beurre, de miel et de nèfle toutes dépourvues de vivacité. Trop de lourdeur et pas assez d'élan donc.
5. Corton-Charlemagne – Domaine Roumier 1993 :
LGED – PPED
- Le nez comme la bouche se montrent désagréables, tyrannisés par une sensation omniprésente de banane chimique et aussi par du camphre, par une acidité volatile exacerbée et par une matière maigrelette. Sur cette bouteille, le vin est moribond.
6. Saumur-Champigny – Clos Rougeard – Le Bourg 1996 :
LG15 - PP16
- Fruits rouges (cerise, cassis), fleurs tout aussi rouges et menthe cohabitent harmonieusement avec des tonalités évoluées prononcées (cuir, fourrure, sous-bois).
- La patine de la robe et du spectre aromatique surprennent. Pourtant la bouche s'exprime avec beaucoup de finesse et d'élégance. Le fruit (un rien confituré) est toujours présent. De la fraîcheur et de la rémanence.
7. Côtes du Roussillon Villages – Clot de l'Oum – Numero Uno 2002 :
LG13,5 - PP15
- Nez plein sud, suintant le soleil (goudron, burlat, réglisse) mais non dépourvu de relief (amande) ni de minéralité.
- La matière est compacte et offre des inflexions sauvages, burinées et sanguines. Arômes sombres de goudron, de cerise, de marc et de poivre saupoudrés d'épices douces. De l'amertume en final (extraction ?) et des tannins quelque peu rustiques. A revoir.
8. Penedès – Can Rafols dels Caus – Caus Lubis 1997 :
LG10 - PP11,5
- Senteurs peu amènes d'élevage et de fruits rouges à l'alcool, voilées par une acidité volatile importante.
- Le volume est intéressant mais un goût désagréable de térébenthine et une sécheresse avancée privent le dégustateur de tout plaisir.
9. Ribera del Duero – Pago de Carraovejas – Crianza 1996 :
LG14,5 - PP15,5
- Le nez est suave et oriental (fraise, rose) sur un fond discret de cannelle.
- Sa grande souplesse, sa rondeur, son velouté le rendent extrêmement agréable et immédiatement accessible. Cette sensation de facilité est renforcée par un léger sucre résiduel. La fraise (au sucre donc) domine. Bonne longueur.
10. Bandol – La Tour du Bon – Saint Ferréol 1998 :
LG11 - PP13,5
- Nez sauvage, animal, fruits noirs, amande.
- La bouche apparaît bancale avec une acidité suspecte et une dureté certaine (limite sécheresse). La matière est énorme mais sera-t-elle suffisante pour contrebalancer ces défauts ? Les avis sont partagés.
11. Volnay 1ier Cru Clos de la Pousse d'Or – Domaine de la Pousse d'Or 1988 :
LG14,5 - PP14
- Nez doucereux de rose et de fraise compotée, réveillé par un soupçon d'amande.
- La bouche est fluide, évanescente même, avec une acidité saillante (certes propre au millésime mais, ici, pas seulement) et des notes de cerise toujours présentes. Pas vraiment d'évolution aromatique mais une usure certaine.
12. Pommard 1ier Cru Clos des Epeneaux – Comte Armand 1999 :
LG(13) - PP15,5+
- Le nez exprime des fruits rouges frais et un élevage encore très présent.
- La bouche est compacte, monolithique, équilibrée, fermée et tannique. Le boisé est insistant. Une partie de l'assemblée lui accorde le crédit relatif à ses mensurations avantageuses même si, le vin ne se livrant qu'avec parcimonie, tout jugement, à ce stade délicat, relève plus de la profession de foi que d'une analyse objective.
13. Chambertin Clos de Bèze – Domaine Armand Rousseau 1993 :
LG15+ - PP17
- Le nez est fruité (myrtille, agrumes), profond (goudron), complexe (herbes aromatiques, fumée) et boisé (orange sanguine).
- La bouche est elle aussi marquée par l'élevage. Ce dernier confère au vin un style lorgnant vers la Bourgogne moderne. Il apparaît encore, serré, viril et anguleux. Le fruit est pur, vivant et d'une grande maturité, l'équilibre est irréprochable. Très belle finale avec beaucoup d'allonge. A attendre en confiance même s'il n'arbore pas la profondeur du 1990 goûté en décembre 2003.
14. Barolo – Marcarini – La Serra 1996 :
LG13 - PP11
- Nez curieux de café, pruneau et sauce soja.
- La bouche est décharnée, avec des tannins terriblement secs pour les uns et minérale, serrée, crispante pour les autres. Une grande déception de toute façon.
15. Châteauneuf-du-Pape – Domaine du Pégau – Cuvée Réservée 2000 :
LG14,5+ - PP16
- Expression olfactive retenue de tabac et de fumée. Peu de fruit en l'état.
- Même impression en bouche avec un style plutôt droit et altier, tout de même amabilisé par une sensation sucrée. De l'olive noire et des épices. Très beaux tannins et bonne longueur.
16. Côte-Rôtie – Domaine Jamet – Côte Brune 1996 :
LG17 - PP18,5
- Ce nez ne peut provenir que d'une seule origine : une telle sauvagerie, un tel caractère signent son terroir et démasquent ses auteurs. Du lard fumé bien sûr, mais aussi de la violette, de la pivoine, du café, des épices, du goudron et de la ronce.
- La bouche offre une grande densité, beaucoup de profondeur, un très bel équilibre, des tannins admirables, une longueur phénoménale et, surtout, cette idiosyncrasie aromatique unique, extravagante, presque dérangeante mais envoûtante.
17. Saint Emilion Grand Cru – Château Troplong Mondot 1989 :
LG15,5 - PP16,5
- Nez accort, d'une grande maturité, avec de la rose, de la réglisse et du cèpe sec.
- Il nous gratifie d'un très beau volume et d'une cohérence simplement ternie par une pointe de chaleur en final. Il se trouve au point charnière de son évolution où le fruit encore présent (fraise cuite) se combine harmonieusement aux arômes tertiaires naissants. De la longueur.
18. Saint Julien – Château Léoville-Barton 1990 :
LG17 - PP18
- Il exprime son essence avec libéralité et race, dispensant cerise, myrtille, havane, amande, menthe, humus et fumée à pleines brassées.
- Ni sa rigueur toute médocaine, ni son fruit, bien présent et étonnement frais, n'ont été pervertis par l'exubérance du millésime. Densité, volume et longueur complètent le portrait de ce grand vin au profil de décathlonien.
19. Vouvray – Domaine Foreau – Moelleux Réserve 1995 :
LG14 - PP13,5
- Le nez est posé et agréable avec de fines senteurs de végétal (tilleul), de mandarine et de zeste d'agrumes.
- La bouche, sans surprise, est bâtie sur une base de grande fraîcheur, avec un bon équilibre global, mais elle reste trop simple (safran, rhubarbe confite) et propose trop d'amertume (zestes). Une déception pour ce domaine et cette cuvée estimés.
20. Sauternes – Primo Palatum 1998 :
LG14,5 - PP14,5
- Les arômes sont bien présents sur les épices douces et le gingembre, le cédrat et la réglisse, avec des composantes assez lourdes aussi (fruits très mûrs et chocolat blanc).
- La liqueur est conséquente, voire un peu pâteuse pour certains. Il ne fait pas dans la dentelle, livrant sans retenue tout ce qu'il a à proposer : nèfle, pralin, caramel, cannelle et gingembre. Dans cette générosité, l'alcool, malheureusement, n'est pas oublié. Longueur moyenne.
21. Rivesaltes – Château Lafforgues 2002:
LG14,5 - PP15
- Muté sur grain.
- Très beau nez profond, sur la cerise, le noyau et la rafle.
- Il peut faire penser à un Maury, avec son accroche tannique (âpreté), son sucre très mesuré et sa minéralité. Le fruit (cerise) est simple mais net. L'alcool est présent mais maîtrisé. Un vin attachant qui parvient à retourner ses petits défauts à son avantage.
Le lendemain, au cours d'une visite au Château Climens :
Synthèse par Laurent Gibet.
Barsac – Château Climens 1998 :
LG16
- Bouche peu sucrée, fine et fraîche, marquée par des goûts subtils et complexes (à défaut d'être fracassants) de citron confit, d'épices, de zeste d'agrumes, d'abricot, de fruits confits, de pêche, de vanille. Homogène, longiligne, humble et longue.
Barsac – Château Climens 1978 :
LG17
- Robe peu atteinte par les outrages du temps. Ici aussi, le vin sublime un millésime peu doté en pourriture noble en offrant une matière délicate « griffée Climens », à la race apéritive certaine. Saveurs multiples : pastille vichy, verveine (pour le côté aérien mosellan, mentholé et végétal), fumé léger, sous-bois, truffe blanche (et le côté prégnant de l'ail, si valorisé dans ce champignon), curry, ananas, abricot sec, angélique, coco. Belle fluidité sur une belle assise (un rien minérale), finale corsée, où les épices (galanga, presque piment) et l'amertume viennent tenir longuement le palais en alerte. Fraîcheur distinguée pour un vin qui n'est assurément pas une bête de concours.
Conclusion :
Dans une ambiance chaleureuse, Vincent nous a concocté un week-end dense et généreux, avec un parcours bachique certes cahoteux, mais toujours plein de motifs de plaisirs et/ou d'enseignements, ponctué par une visite passionnante et hautement instructive au Château Climens.
Laurent