Marché aux vins d'Ampuis 2023
Un marché qui aura tenu toutes ses promesses ! Toujours un exercice intéressant que d’aller sur le terrain confronter les différentes lectures qu’on a pu avoir sur certains millésimes/cuvées et de le tester en direct. Confirmer ou non certaines intuitions, aussi.
Avant de commencer, il faut souligner le très haut niveau du millésime 2020 qui a meublé une belle partie du salon, et a brillé par son équilibre et sa finesse chez beaucoup. J'y ai trouvé d’ores et déjà une grande accessibilité.
Je rejoins les deux dégustateurs ci-dessus lorsqu’ils parlent d’équilibre, c’est vraiment le maître-mot.
2021, toutefois, et cela sera en filigrane de mon CR, sera comme attendu très très décevant en rouge, au regard de la qualité de ce qui a été dégusté. Il n’y a pas de miracle : la nature n’a pas offert de bonnes conditions + le gel, nous nous retrouvons donc avec des vins en manque de maturité, parfois verts et acides.
Ce qui est clair, c’est que les amateurs de vins moins charpentés, plus axés sur la minéralité, y trouveront leur compte.
Après un
bon repas
à Vienne, et déjà quelques belles dégustations au compteur, en route vers Ampodium !
Domaine Mouton père et fils
Un réel plaisir de retrouver ce domaine découvert l’an passé. La
côte-rôtie Enomis 2020 (35€) montre un moins grand caractère que 2019, mais s’offre au dégustateur sur un profil délicat. Spectaculaire
côte-rôtie Maison Rouge 2020 en revanche (47€), qui symbolise toute la grandeur de cette appellation, avec un nez explosif de fruits, sur un beau lardé fumé. Acheté (et encavé), cette bouteille accompagnera à merveille le soir même une belle saucisse de Morteau et quelques pommes de terre.
Maison Rouge constitue l'un des tout meilleurs rapport qualité-prix du salon, en jeunesse, à voir ce que cela donnera au vieillissement.
Domaine Pierre et Jérôme Coursodon
Nous le savions, les Coursodon - un domaine que j’apprécie énormément par ailleurs - ne proposait cette année que les 2021.
Par ailleurs, la récolte difficile de l’année n’a pas permis d’embouteiller ni la Sensonne, ni le Paradis en rouge. Ces deux cuvées ont été « reversées » dans l’Olivaie.
Ainsi, 2 cuvées de Saint-Joseph sont proposées, la
Silice 2021 (22€) et
l'Olivaie 2021 (32€), dont le manque de maturité sautait malheureusement au nez.
Olivaie s’est offerte avec une jolie fraîcheur et des notes minérales / d’olive noire mais affichant un faible volume en bouche et un côté pas mûr peu appètent.
Snif
Domaine E. Guigal
Un
Saint-Joseph Lieu-Dit 2020 (42€) dégusté au caveau (oui, on mange à tous les râteliers…) qui s’est montré moins exubérant que le 2019, plus timide, comme si par ailleurs le boisé se ressentait moins, laissant apparaître de belles notes de fruits rouge et de poivre. C'est toujours très bon, par contre le prix a augmenté de presque 10€ par rapport à l'an passé
, ce qui est vraiment dommage parce qu'au tarif initial, on était vraiment dans le rapport qualité-prix exceptionnel (à mon goût).
Il n'y avait plus de Saint-Joseph Vignes de l'hospice 2019 disponible à la dégustation, ni à l'achat, c'était bien la peine de faire saliver les gens avec de
tels CR
, Oliv
Une nouvelle fois, spectaculaire
côte-rôtie Château d’Ampuis 2019 (93€) qui fait montre de davantage de finesse que le 2018, plus explosif, avec une très belle expression de lardé, fumé, poivré sur un joli fond moka. Voilà deux profils différents mais complémentaires que le temps patinera.
Très grande côte-rôtie et « grande garde » en vue selon Philippe Guigal pour cette bouteille, mais aussi pour ce millésime dans l'ensemble.
Des LaLaLa 2018 qui se sont très bien goutées cette année : je me rappelle l’an passé d’avoir bu Turque et Mouline du même millésime, cadenassées ; tel n’était pas le cas ici avec 3 cuvées bien ouvertes, un splendide côté aérien pour la Landonne, une turque plus sombre et une mouline tout à fait délicieuse.
Domaine du Monteillet
Un ressenti assez similaire que dans d’autres domaines : un millésime 2020 plus équilibré mais peut-être moins exubérant que le 2019.
Ce sont deux profils complémentaires, mais en tout cas, encore une dégustation remarquable chez Montez.
Un
St Joseph Papy 2020 (25€) qui s’offre à merveille, sur un joli nez de fruits noirs, de poivre, et un élevage « Montez style », qui apporte une belle fraîcheur, qui me plaît beaucoup. Dégusté et déjà parfaitement accessible, sur la gourmandise, en accompagnement belle entrecôte le dimanche midi.
Comme d’habitude, j’ai beaucoup aimé le
côte-rôtie Fortis 2020 (50€) qui s’est ouvert sur de beaux arômes de fruits noirs et de moka d’élevage, avec une belle fraîcheur. Supplément de matière et de densité, dans ce superbe
côte-rôtie Bons arrêts 2020 (74€) encore une grande réussite pour ce parcellaire hyper expressif, qui éblouit par sa finesse et sa concentration, arômes très côte-rôtie, matinés de moka, et un côté fumé, une très belle patine / longueur en bouche.
Grand vin.
Quelle belle dégustation, mais c'est pas tout, il faut payer maintenant, il y a du monde.
Bon... zut, qu'est-ce que je prends ? C'est trop dur, là.
Allez, va pour prendre les 3 cuvées, pas de jaloux, 2 de chaque pour faire simple.
Domaine Jean-Michel Gerin
A peine remis de nos émotions Montezienne...
Quel pied là encore ! On démarre avec la traditionnelle
côte-rôtie Champin le Seigneur 2020 (46€) déjà accessible, qui propose un nez expressif, un beau lardé fumé, là aussi beaucoup moins boisé et surmûri que le 2019, et qui fait montre de plus d’équilibre.
Une
Viallière 2020 (67€) un peu de en-deçà de mes espérances, sur un côté animal, légèrement floral, et sombre. M. Gerin m’indique également un côté minéral que je n’ai pas. C’est rare que je fasse ça, mais j’ai acheté une (
ne mens pas, Manas, t’en as même acheté 2) bouteille qui ne me plaisait pas forcément, en pariant sur l’avenir, sur les conseils du vigneron.
Beaucoup moins de doute, toutefois, sur cette splendide
côte-rôtie Les Grandes Places 2020 (100€) au nez hyper expressif, sur de belles notes de moka, à la bouche dense et racée. Même sentiment maintes fois ressenti chez d'autres : plus d'équilibre et de finesse que le prédécesseur, qui m'a énormément plu par ailleurs.
J’peux en ravoir M’sieur Gerin siouplaît ?
La
Landonne 2020 (170€), a une nouvelle fois brillé par son côté tactile et aérien, sur de jolies notes de fruits rouges et boisées séduisantes.
Domaine du Tunnel
Une autre de mes valeurs sûres.
Bon, et bien 2021 ne m’a pas (non plus) convaincu chez un de mes chouchous, sur les 3 Cornas proposés. On retrouve le style Robert des vins concentrés à la robe sombre et à l’élevage savoureux. Mais, même problème que chez Coursodon, avec une matière plutôt faible et un côté raisin pas mur.
Quand soudain, un ovni venu de nulle part :
— « C’est quoi cette cuvée de St-Jo, M. Robert ? »
— « C’est un
Saint-Joseph Peygros, une cuvée réalisée avec le concours de Jean Louis Grippa, les vignes sont à Tournon », sur le millésime 2020.
Coeur de coeur absolu du salon
: un vin spectaculaire qui scotché notre petit groupe, sur des arômes hyper expressifs de fruits noirs qui confinent presque au réglisse. Un nez puissant, à l’image de la bouche veloutée, qui fait montre d’une concentration hors norme. A revoir dans 10 ans minimum.
M. Robert nous explique le lendemain qu’il ne fait même pas 1000 bouteilles de cette cuvée, nous avons bien fait d’en acheter une la veille, donc, il n’y en avait d'ailleurs déjà plus le lendemain.
Pour les amateurs : il y en a chez les
cavistes sérieux
.
Domaine Eric et Joel Durand
Un
St Joseph Lautaret 2021 sympathique, mais moins concentré et plus acide que le
2020 qui m’avait tant plu
. Coup de chance M. Durand a qui j’ai chanté les louanges de cette bouteille, a accepté de m'en ramener deux direct domaine (25,50€) le lendemain.
Les Cornas 2020 ouverts à la dégustation étaient tous à la hauteur, de l’entrée de gamme Prémices, à la matière plus souple, poivrée et élégante ; au Confidence, plus serré.
Ma préférence est allée au
Cornas Empreinte 2020, à la fois immédiate et de garde (35€) qui donnera une très belle bouteille d’ici 10 ans.
Domaine Mathilde et Yves Gangloff
Que dire, que vous ne saviez pas déjà.
Du monde, toujours.
A notre arrivée en milieu d'après-midi, un petit peu moins, mais il paraît que les gens auraient fait la queue dès l'ouverture pour rentrer et se seraient précipités directement chez Gangloff. Cela devait être un sacré spectacle.
Il faut dire qu'à des tarifs si sages au regard d'une telle qualité le domaine tend littéralement le bâton pour se faire battre
De fait, le
Saint-Joseph rouge 2020 (35€) était superbe : le nez est expressif malgré un tout petit fond de verre, il s'ouvre sur un côté lacté/petit suisse très appètent et gourmand, c'est du travail d'orfèvre.
La
côte-rôtie La Barbarine 2020 (50€) malgré sa finesse et ses belles notes de violette et de poivre, m'est apparue un cran en-dessous du St Jo. Bien évidemment, à nuancer compte tenu de la jeunesse du vin et des petites portions servies qui ne me permettrait pas d'affirmer cela de façon certaine.
Plus rien à vendre bien sûr.
Il faudra bientôt coucher pour avoir une bouteille.
Ce n'est pas grave, me dis-je, en quittant le stand à la fois un peu frustré, mais néanmoins philosophe ; je sais au moins que j'aurais énormément de plaisir à déguster ces 2020 tranquillement, lors d'un beau repas avec Madame au restaurant EMA, l'une nos
tables fétiches
dans son Beaujolais natif.
***
Quelques notes en vrac : belle déception chez Villard, dont les 2021 en rouge ont tous souffert d’un manque de maturité et offraient peu de plaisir en l’état.
Plutôt bonne dégustation chez Cuilleron, mais dans un style assez facile, avec un boisé international style, et parfois « fruits cuits », en particulier le
Crozes-Hermitage Les Châssis 2020. Un manque d’équilibre global me paraît caractériser la dégustation, et pourtant, c'est un hylophile qui écrit ces lignes.
Enfin, j’ai trouvé que le millésime avait été plutôt bien réussi chez Delas, domaine qui a eu tendance à me décevoir ces derniers temps. Des prix toujours trop élevés, toutefois, au regard de la qualité. Une mention particulière au
Crozes-Hermitage « Le Clos » 2018 (38€ de mémoire), parcellaire de caractère, qui affiche une matière solide et que j’aurais plaisir à chroniquer ici puisque j'en ai pris une.