Voici quelques paragraphes du chapitre « Le poivron vert » tiré du livre « arômes du vin », de Michaà«l Moisseeff et Pierre Casamayor, éditions Hachette, 2002.
« Naissance d'un arôme »
« Pour le chimiste, les molécules de la famille des pyrazines sont souvent synonymes d'odeurs de grillé ou de fumée. Seules quelques-unes d'entre elles présentent ces arômes de légumes ou de fruits. La 2 méthoxy-3 isobutyl-pyrazine en fait partie. Elle donne naissance à la note olfactive caractéristique des cépages rouges cabernet sauvignon et cabernet franc. Le poivron vert, arôme primaire, préfermentaire, apparaît dès que le raisin est pressé : la décompartimentation cellulaire permet alors aux enzymes d'agir sur les précurseurs d'arômes. Il est particulièrement sensible lorsque le début de la fermentation a souffert d'un manque de chaleur ou que la vendange manquait de maturité. Cette molécule est également présente dans le sauvignon, cépage blanc très aromatique. Le note de poivron vert se fond dans l'accord « buis », où elle est dominée par une molécule soufrée. Intimement mêlé au fruité, l'ensemble est alors flatteur. »
« … Et dans les vins »
« L'arôme du poivron vert est perceptible à la dégustation des vins du Bordelais ou de la vallée de la Loire. Issus des terroirs de prédilection des cabernet sauvignon et cabernet franc – margaux, moulis, listrac, pauillac, saint-julien, et saint-estèphe dans le Médoc ; saumur et, plus encore, saumur-champigny dans la Loire-, ces crus mêlent des flagrances fruitées à des senteurs de poivron vert. Les vignobles les plus propices à la découverte cet arôme sont ceux de l'AOC bourgueil et saint-nicolas-de-bourgueil, en Touraine, qui privilégient le cabernet franc, appelé localement « breton ». Le poivron vert se fond dans une palette dominée par la framboise. Lorsque son accent est perceptible, les vins « bretonnent », selon l'expression des dégustateurs. Les bourgueil et saint-nicolas-de-bourgueil issus de sols de graves livrent un nez et une bouche particulièrement aromatiques, frais, dès leur jeunesse ; ceux nés sur tuf sont plus structurés et se développent plus lentement dans le temps.
Quant au cépage sauvignon, il a colonisé le Berry et le Nivernais où il donne naissance au sancerre, au menetou-salon et au reuilly. Dans le Bordelais, l'appellation entre-deux-mers lui doit beaucoup. Toutefois, la note de poivron vert est loin d'être estimable lorsqu'elle domine ces vins pleins d'allant. Elle doit rester subtile, apportant de la fraîcheur au nez de bourgeon de cassis, de buis et de pamplemousse. »