Passage au domaine Sylvain Langoureau
10h30. Un contre la montre de 30 heures en Bourgogne commence lorsqu’Henri, Thierry et moi arrivons ce mardi 20 octobre 2020 devant les grilles du domaine. Notre périple nous mènera 2 fois à Saint Aubin, en Côte de Nuits et à Meursault pour un repas de haute volée en compagnie d’autres LPViens. Les comptes-rendus viendront en temps et en heure. Les gestes barrières auront été maintenu au mieux, j’ai personnellement gardé un masque le plus longtemps possible, hors temps de dégustation évidemment…
Madame Langoureau revient de la vigne lorsqu’elle nous ouvre les portes du domaine. Elle nous présentera le domaine, puis dégusterons une bonne partie de la gamme. Le domaine fait un peu moins de 10 ha, pour environ 70000 bouteilles produites en année pleine, comme 2018. Le millésime 2019 est plus réduit
(-30%) ce qui représente environ 52000 bouteilles.
Les ventes à l’export représentent environ 40%
(dans de très nombreux pays), 40% aux particuliers et environ 20% pour les cavistes/hôtelliers/restaurateurs.
La production est orientée à environ 90% en blancs et 10% en rouges, avec une culture de la vigne traditionnelle comprenant labourage et maîtrise des rendements, en lutte raisonnée. La vinification est traditionnelle, avec un élevage modéré de 11 mois environ en fûts de chêne, généralement renouvelés par tiers. La provenance est de la forêt de l’Allier, comprenant 5 tonnelliers, avec principalement Remond et Minier, et en complément Seguin Moreau, Chassin et Gillet.
Le bouchage est effectué avec des bouchons 49x24 de qualité extra
(coût de revient aux environs de 410-420€ les 1000. A titre de comparaison, le coût du verre représente environ 250€ les 1000).
Concernant les millésimes, 2019 est très beau mais de faible volume
(-30%). 2020 s’annonce magnifique en blanc, avec seulement 5% de pertes de volume environ. Les rouges seront plus délicats mais le résultat final s’annonce joli. Ce dernier a été vendangé à partir du 28 août 2020, par plus d’une trentaine de vendangeurs, logés pour 90% d’entre eux.
On voit d’ailleurs sur ce schéma que les dates de vendanges ont toujours oscillé au fil du temps, même si l’on voit clairement que depuis 40 ans, la tendance à la précocité est manifeste
(il manque la dernière décennie 2010-2020).
Un problème majeur concerne le domaine actuellement : le porte-greffe 161-49. Le domaine a beaucoup replanté entre 2000 et 2010, et s’est appuyé sur ce porte-greffe initialement recommandé pour ces valeurs de résistance et de qualité de production. Or, au bout d’une dizaine d’année environ, les plants dépérissent et imposent un arrachage pour replantation, ce qui n’épargne évidemment pas le domaine, qui devra passer par cette étape de façon échelonnée sur 5-6 ans. Il s’agit d’un problème majeur, touchant plusieurs régions, d’ailleurs, de nombreux travaux scientifiques sont en cours à ce sujet.
Coupe transversale d’une racine du porte greffe 161-49 C prélevée sur un cep dépérissant âgé de 4 ans mettant en évidence l’irrégularité de l’écorce, l’absence d’amidon et la présence importante de thylles; A: Organisation irrégulière et épaisseur anormale de l’écorce sont bien visibles; B: Vaisseaux xylémiens obstrués par les thylles; vue générale montrant l’importance de ce phénomène; C: Absence d’amidon au niveau des rayons ligneux (Ry) et les fibres du parenchyme ligneux (Py) ; présence de polyphénols (coloration orangée diffuse) dans les rayons ligneux et certains thylles. D: vue de détail d’un vaisseau contenant des thylles;
Coloration à l’APS-NBB (Schiff Naphtol Blue Black) : les grains d’amidon sont colorés en rose.
Place maintenant à la dégustation, essentiellement sur le millésime 2019 !
Saint Aubin 2018 :
2 ha, élevé 50% en fût. On a un nez beurré. La bouche est chaude, sur le tilleul, les fleurs blanches. C’est rond et court, de volume assez faible.
AB
Saint Aubin 2019 : Le nez présente un peu de gaz. La bouche est plus tendue et fraîche. On retrouve de la poire et quelques amers, il est plus long que le 2018.
B-
Saint Aubin 1er Cru Sur le Sentier du Clou 2019 : Le nez est plus profond que le village. La bouche est tonique, autour d’un joli citron jaune, vif, ciselé, avec juste un peu de rondeur. Il y a globalement une belle droiture, une jolie acidité centrée autour de jolis zestes d’agrume. J’ai beaucoup aimé ce vin.
TB
Saint Aubin 1er Cru Sur Gamay 2019 : Le nez est plus timide. La bouche est plus amère et austère, sur le gravier humide. L’aromatique citronnée est plus réservée et neutre, même si on devien timidement du chèvrefeuille. Il y a un peu plus de gras, une belle amertume l’équilibre bien.
B-TB
Saint Aubin 1er Cru Les Frionnes 2019 : Un peu de gaz au nez, puis du citron et de la bergamotte. La bouche est tendue, révélée par une grosse acidité structurante, supportant une belle matière dense et assez profonde. On retrouve du citron vert et du raisin vert frais. Long et frais, c’est un régal.
TB-E
Saint Aubin 1er Cru Le Champlot 2019 : Le nez est neutre. La bouche est grasse, ronde et pommadée. La finale est un peu chaleureuse, sur le tilleul. En plus de souffrir d’un effet séquence manifeste, il ne me paraît pas en place.
AB
Saint Aubin 1er Cru En Bas de Vermarain à l’Est 2019 : Le nez est neutre. La bouche est simple, sur le citron jaune. L'aci’ité est maîtrisée, on retrouve un bel équilibre. Propre quoiqu’un peu simple.
B
Puligny Montrachet 1er Cru La Garenne 2019 : Le nez est beurré, sur le tilleul, la chlorophylle, de façon assez légère. La bouche est doucereuse, on retrouve une belle maturité symbolisée par une sorte de
« sucrosité sèche ». Il est très rond et ample. On retrouve un fond de caramel, de menthe et de chlorophylle. Il est assez long, et se conclue par une finale un peu chaleureuse, sur le pétard grillé. Une marche est franchie en termes de complexité vis-à-vis des Saint Aubin.
E-
Meursault Blagny 1er Cru La Pièce Sous le Bois 2019 : On a un fond de viennoiserie au nez. La bouche se présente acidulée, façon bonbon harlequin, avec de la chlorophylle en complément. L’ensemble est plus droit que le Puligny, et est même un peu strict. La finale se montre chaleureuse et un peu déséquilibrée par des amers un peu prégnants.
TB+
Chassagne Montrachet Les Voillenots dessous 2019 : Le dernier vin est un rouge. On a un nez de bon bonbon kréma, avec un fond de ronce, et un léger cassis, très primaire. La bouche est d’une grande fluidité, sans tanins. Elle se révèle de demi-corps. On retrouve de la framboise, du cassis, un peu d’amers grillés, de façon assez fine. La finale est courte. Simple.
AB+
La dégustation s’achève, non sans remercier Madame Langoureau pour le temps passé ainsi que pour les explications apportées tout au long de ce moment, en toute franchise. Le trafic commence son chargement, quelques bouteilles complémentaires viennent ainsi s’ajouter aux cartons déjà commandés.
Au total, on est face à un domaine au bon rapport qualité/prix effectivement. J’ai trouvé des vins faciles, agréables et de belle qualité, manquant peut être d’un peu de profondeur pour viser encore plus haut. Néanmoins, il y a de quoi largement se satisfaire de la production. J’ai particulièrement apprécié le Puligny Montrachet 1er Cru La Garenne ainsi que Les Frionnes sur Saint Aubin, qui représente sans doute le meilleur rapport qualité/prix du domaine.
Il est 12h00 et direction le bas de la Côte de Nuits, pour découvrir à Nuits Saint Georges un domaine dont j’ai entendu le plus grand bien…
A suivre…