Mon ami Gaby, qui accumule depuis un certain temps les vins de pinot noir d'un peu partout, est passé à la phase active il y a déjà quelques temps, et je suis convié à l'opus 2 (il me semble) de ces dégustations.
Nous allons donc déguster 20 rouges secs issus de différentes régions (12 vins français variés et 8 vins étrangers), tous ouverts quelques heures avant, ainsi qu'un rouge liquoreux, issu du même cépage, pour finir.
La dégustation se fait à l'aveugle, chaque étiquette étant dévoilée avant de passer au vin suivant.

1°) Le nez est d'abors très discret, , il faut le "travailler" beaucoup pour obtenir des notes de cerises légèrement "kirch" ainsi que quelques fruits rouges, déjà un peu évolué. En bouche, le vin est plutôt fluide, et je lui trouve une verdeur qui le rend peu agréable.
Il s'agit d'un VDP des côteaux du verdon, pinot noir du domaine de la Valmoissine 2005, maison Louis Latour., France.

2°) Le nez est beaucoup plus puissant mais fortement dominé par le bois. La bouche révèle une très légère pointe de gaz, elle est très boisée, beaucoup trop, le corps du vin ne le supporte pas.
C'est un pinot noir 2005 de Cloudy Bay, Marlborough, Nouvelle Zélande

3°) Le nez est explosif sur les fruits rouges et une pointe florale. Peut-être une très légère pointe de volatile, qui apporte un peu plus de fraicheur sans nuire aucunement au profil général du vin. L'attaque est presque ronde sur la gelée de groseille, pas de grosse densité mais un vin léger, fin et très agréable. Les 14° d'alcool ne se soupçonnent pas un seul instant.
C'est le pinot noir de Cono Sur, millésime 2008, Chili. (trouvé à 20 € environ, ce n'est pas "canon", mais c'est très agréable) Une belle fraicheur comme ça, je n'aurais jamais pensé en trouver au Chili vu ce que j'ai pu boire de ce pays jusqu'ici.

4°) Nez mûr sur un mélange de fruits noirs et rouges mélangés à des notes d'élevages présentes mais pas dominantes, un peu chaleureux mais également un pointe végétale. L'attaque est moyenne, le corps juste correct, un peu maigrichon, la finale est courte et on y retrouve ce côté légèrement "vert" ressenti au nez.
Nous avons là un VDP de Côteau Charitois "Les Pénitents" 2007 par A. Mellot, France

5°) Nez très mûr, sur les fruits noirs, accompagnés d'un petit côté acidulé. L'attaque est ronde, assez tannique, le corps est correct, la longueur est bonne mais le vin sèche un peu en finale. Manque cruellement de finesse, je trouve. à la limite de la surextraction. Je n'avais pas eu ce ressenti au domaine lorsque je l'avais bien mieux goûté fin 2006 (réflexion post dévoilement de l'étiquette, évidemment), mais je dois dire que, regoûté il y a un ou deux an(s), il m'avait fait la même impression que cette dernière bouteille dégustée, donc cela semblerait plutôt conforme à son évolution... Dans les pinots "ambitieux" de la zone, je préfère à l'heure actuelle les quelques Burlenberg de Deiss que j'ai pu déguster.
Nous avons ici un pinot noir "Clos saint Landelin" 2004 de René Muré, France

6°) Nez plus sur les fruits noirs, pas explosif mais qui s'exprime quand même pas mal. L'attaque est ronde, la suite présente un bel équilibre et une bonne longueur. Pas très complexe mais bien fait, je pense qu'il en a sous la pédale. Néanmoins, il est d'ores et déjà séducteur et plait à "l'assemblée".
Il s'agit d'un Marsannay "Champs Salomon" 2005 du domaine Bart, France, LE meilleur RQP de la soirée.

7°) Le nez est peu expressif, même en l'agitant fortement. L'attaque est assez fluide, il présente également nettement moins de chair et de rondeur que son prédécesseur. Correct, sans plus (il souffre peut-être de la comparaison avec le Marsannay).
C'est un Bourgogne, cuvée "L'héritière" 2008 de Nicolas Rossignol, France

8°) Le nez est sur les fruits rouges, auxquels s'ajoutent (je trouve) des notes de charcuterie (saucisson). L'attaque est ronde, la suite est cohérente, agréable, bien quoiqu'un poil court? La structure me fait penser à certains vins du Beaujolais que j'ai bus ces derniers temps, même si l'aromatique "pinote".
Il se trouve que j'ai de la chance, c'est un Morgon 2009 du domaine de la Chanaise (Piron), France, pirate que Gaby nous avait inséré dans la série

9°) Nez très marqué par le bois (caramel dominant), la bouche est également très boisée. Le vin commence en rondeur, puis très vite il devient asséchant, et reste dominé par son boisé d'un bout à l'autre.
Voici donc le pinot noir "Très noir" 2003 de J. Mourat, France, il porte bien son nom, mais pour ce qui est du plaisir de le boire, ça ne me correspond pas.

10°) Nez expansif, sur des fruits plus "confiturés" que frais, avec une pointe animale. L'attaque est très ronde, se poursuit avec suavité (une légère sucrosité pouvant l'expliquer), la finale est relevée par une jolie amertume, pas du tout agressive.
C'est un pinot noir 2004 "Mas Borras", Penedes, de la maison Torres, Espagne

11°) Nez expressif et léger, parfumé, sur les fleurs sèches et le cuir. Bouche "évaporée" mais correcte, vin élégant, mais qui manque quand même de fond. Longueur correcte.
Pinot noir Paul Achs 2002, Burgenland, Autriche. En revanche, je trouve que c'est très cher pour ce que c'est, si le prix annoncé est le prix de vente "normal" (55€)

12°) Nez "sauvage", en bouche l'attaque est fluide, sur les cerises à l'eau de vie. Vin plutôt "dilué", finale courte.
C'est un pinot noir "élevé en barriques" 2002 du domaine d'Auvernier, Neufchatel, Suisse.

13°) Nez franchement animal, limite foxé. La bouche est sur le fruit confituré et l'animal (dominant). L'attaque est assez bonne, la bouche ronde, mais dominée par le bois, la finale est gentiment astringente. Correct sans plus.
C'est un Sancerre "belle dame" 2002 du domaine Vacheron, France.

14°) Nez sur les fruits mûrs, limite confiturés, peu complexe. La bouche est correcte, lisse, mais peu diserte, pour moi ce vin est actuellement fermé. Correct en l'état, mais à revoir dans quelques années, je suis sûr qu'il aura bien plus de choses à dire.
C'est un Pernand Vergelesses 1er cru "Ile des Vergelesses" 2002 du domaine Dubreuil Fontaine, France.

15 °) Nez: poussière. Bouche: mort. Point.
Bouzy rouge (côteaux champenois) Georges Vesselle, France, non millésimé (il pourrait s'agir d'un assemblage 2000-2001). Il paraît que ça se vend autour de 40€... Sans commentaire.

16°) Nez: solvant-colle-vinaigre. Bouche déviante du même style.
Dommage pour ce Pinot noir 1999 Moss wood, Margaret river, Australie

17°) Nez évolué, expressif, sur les fruits mûrs, avec une discrète touche de céleri. La bouche est agréable, délicate, longue, très agréable. Une très légère note liégeuse me chiffonne un peu en milieu de bouche, dommage, mais c'est un très bon vin. A noter que je crois être le seul (ou presque) à avoir noté ce léger problème.
Joli Aloxe Corton tasteviné 1998 de Michel Gay, France.

18°) Nez fruité, sur la "confiture de vieux garçon", les fruits à l'alcool. La bouche est sans vrai défaut, mais assez lisse, présente une bonne cohérence, mais il est sans doute un peu trop tard. Dommage, je suis sûr qu'en son temps il aurait eu plus de choses à dire.
Pinot noir 1999 Rochioli , Russian river valley, USA

19°) Le nez est élégant, sur les fruits noir plutôt, avec une touche de poivron étonnante. La bouche est sphérique, fraiche, plutôt courte mais très agréable, et on y retrouve l'aromatique du nez. Ce vin me fait penser à un style "italien". C'est bon.
C'est un Pino nero 1992 "Fontodi", Vino da tavola a Colli, Toscani, Italie

20°) Nez peu disert mais agréable. C'est mûr, profond. La bouche est ronde, élégante, sans faiblesse. Belle chair, vraiment un beau vin. Son seul défaut est d'être sans doute encore un peu jeune, mais il est déjà très bon en l'état.
C'est un Nuits "1" 2002, Nuits saint georges 1er cru, du domaine Prieuré Roch, France

Nous passons ensuite au dessert, avec le dernier vin:

21°) Le nez est sur les fruits rouges à l'alcool, sucrés, avec une pointe de torréfaction. La bouche est relativement simple, sur les mêmes arômes, peu complexe. C'est bon, mais son intérêt réside plus dans le côté "curiosité" que pour un caractère de grand liquoreux, contrairement aux autres ruster ausbruch du domaine.
C'est un Ruster ausbruch pinot noir 1999 (vinifié en rouge) de Feiler Artinger, Burgenland, Autriche.

Voilà, nous arrivons au bout, nous avons appris pas mal de choses, et pour ma part je suis impatient de faire la prochaine série. Merci encore au G.O. de la soirée (et du déjeuner du lendemain, dont j'ai déjà posté les CR dans les domaines concernés( ).

Pierre

Sancerre "les bonnes dames" 2002 du domaine Vacheron

N'est-ce pas plutôt "Belle Dame" ?
En tout cas j'aime beaucoup ce genre de série. Eclectique, sans taper dans le haut vol, mais une gamme cohérente qui permet certaine comparaison...si tant est qu'on puisse en faire.

Pierre,

Tu risques de retrouver un ou quelques CRs de Pinot de Cono Sur, qui comptaient parmi ceux que je préferai au Chili.

Bon, pas de grosse surprise en fait...que des confirmations, non?

Anthony, je ne suis pas vraiment étonné que tu aies apprécié ce domaine. Etonnant! (enfin surtout lorsqu'on ne connait pas bien les vins chiliens, j'imagine8-))

Didier, pour prendre quelques exemples, personnellement je ne connaissais pas Cono Sur ni le "fontodi", ce ne sont donc pas des confirmations... Je n'aurais pas attendu tant d'un "simple" Aloxe 1998 non plus, fût-il d'un très bon producteur.
Je serais également curieux de goûter une bouteille de "rochioli" (russian river valley) d'un bon millésime, au bon moment.

Franck, pour "belle dame", tu as raison, j'ai corrigé. Une interprétation abusive de mon cerveau tordu ce soir-là, sans doute...

Bon, c'est pas tout mais il va falloir organiser la prochaine en Normandie, comme ça nous aurons plusieurs visions des choses.

Amitiés,
Pierre

"Pinot noir Paul Achs 2002, Burgenland, Autriche. En revanche, je trouve que c'est très cher pour ce que c'est, si le prix annoncé est le prix de vente "normal" (55€)"

Le prix "normal" est (était) plutôt de 30 à 32 EUR...
A noter que les vins de Paul Achs demandent une bonne aération pour s'exprimer. Je ne sais pas si c'était le cas.
Dégustation intéressante dans l'esprit. Bravo.

Pierre

Merci pour cette précision concernant le prix du vin de Paul Achs. Sous toute réserve, compte tenu de ce que nous en avons perçu ce soir-là, ça reste relativement cher.

Compte tenu de l'ordre de dégustation, il a été ouvert environ 5-6 heures avant qu'on ne s'intéresse à lui. Je l'ai suivi sur 15-20 minutes environ dans mon verre.

Cordialement,
Pierre

pour l'adepte quasi-inconditionnel de pinot noir que tu es, c'est une dégustation inratable !
compte-rendu magnifique, sélection d'un rare ecclectisme
bravo !

5°) Nez très mûr, sur les fruits noirs, accompagnés d'un petit côté acidulé. L'attaque est ronde, assez tannique, le corps est correct, la longueur est bonne mais le vin sèche un peu en finale. Manque cruellement de finesse, je trouve. à la limite de la surextraction. Je n'avais pas eu ce ressenti au domaine lorsque je l'avais bien mieux goûté fin 2006 (réflexion post dévoilement de l'étiquette, évidemment), mais je dois dire que, regoûté il y a un ou deux an(s), il m'avait fait la même impression que cette dernière bouteille dégustée, donc cela semblerait plutôt conforme à son évolution... Dans les pinots écrit:

on a pas déja eu l'occaz de le boire ensemble (2003 ?) et impression similaire ?

C'est à vérifier, ce que je sais c'est que le dernier pinot noir alsacien (hors LPV HN spécial Alsace) que nous ayons dégusté ensemble était le Burlenberg de Deiss apporté par Didier.

Il me semble que le seul Clos Saint Landelin que j'aie eu était également un 2004; justement parce que dégusté au domaine il m'avait semblé bien mieux doté que les millésimes précédents.

Bonjour Pierre

Voilà, nous arrivons au bout, nous avons appris pas mal de choses écrit:

Je suis en effet curieux de connaitre tes conclusions d'une telle dégustation ?

Pour les amoureux de ce cépage,les commentaires peuvent faire peur (fluide,boisé,végétal .. etc...)
A te lire, tu n'a pas pris beaucoup de plaisir a une telle dégustation (ce n'est pas une critique bien sure)

On peux s'interroger pour des vins vendus entre 10 et 40 € ?

Eric

Bonjour Eric,

effectivement, je comprends que mes commentaires puissent faire "peur" si l'on envisage d'acheter l'un ou l'autre des vins qui en sont l'objet. Néanmoins je ne me vois pas trop dire autre chose sachant que ce sont justement ces sensations qui font que je ne les rechercherai pas.
Ne t'inquiète pas pour la remarque, je ne me vexerai pas pour si peu. De plus, tu n'as pas tort: Effectivement si plusieurs vins m'ont bien accroché et apporté pas mal de plaisir, il faut reconnaître que cela doit représenter environ 1/3 des vins dégustés. J'ai connu mieux en "taux de réussite", mais aussi moins bien, même sur des dégustations où chacun avait "sélectionné" son apport en le connaissant mieux. Or, nous sommes ici souvent avec des vins qui ne nous étaient pas connus, donc sélectionnés par Gaby (qui ne les connaissait pas plus) sur des "réputations" ou des conseils pour un certain nombre (hors Bourgogne), dès lors il est difficile d'être sûr de son coup, et je ne suis donc pas tellement surpris.

Ta remarque sur les prix de vente de ces vins est tout à fait justifiée, je me la suis faite également. Outre le fait que certains prix ont sans doute été "grossis" par rapport aux prix "domaine" ou que l'on pourrait trouver par d'autres biais, il faut tout de même reconnaître qu'un nombre non négligeable de ces vins affichaient des tarifs ( qui nous ont été annoncés à chaque fois, si tu veux je pourrais les rechercher) que j'ai trouvés trop élevés par rapport à ce qu'il y avait dans notre verre (et je pense que j'étais loin d'être le seul). Le (classique?) exemple du Marsannay de bart étant là pour remettre un peu les pendules à l'heure, de ce point de vue.

Enfin, je déclare que nous avons appris pas mal de choses car, pour ce qui me concerne, je n'avais pas encore dégusté la grande majorité de ces vins. Donc rien que ça m'a fait apprendre. Ca et le fait de comparer différents styles de différents pays. D'autre part, je vais essayer de ne pas trop en faire mais bon, je répète que le vin chilien a complètement remis en question l'idée que je me faisait des vins que pouvait faire ce pays, certes basée sur peu de rencontres car je n'insiste pas toujours lorsque les premières impressions sont mauvaises... Donc j'ai aussi trouvé un intérêt supplémentaire dans la découverte de nouveaux (pour moi) vignobles à explorer.

Cordialement,
Pierre