Le contexte :
Le repas du réveillon 2004.
Participants : Laurence et Philippe Lagarde, Jocelyne Puibusque, Laurent Gibet (LG), Pascal Perez (PP).
Le menu :
- Foie gras mi-cuit de la maison Cuq
- Huîtres aux truffes et ragoût de St Jacques
- Filet de bar, coulis de truffes, émulsion aux amandes
- Homard breton, macaroni et truffes en cocotte lutée
- Carré d'agneau clouté de truffes noires, son jus, cèpes et artichauts
- Gâteau Passiflora de la maison Belin (Albi)
Les vins sont connus à l'avance.
Les commentaires de dégustation sont synthétisés par Laurent Gibet.
Les vins :
1. Champagne - Vouette et Sorbée (Gautherot) - Extra Brut Cuvée Fidèle :
PP12,5 – LG12,5/13
- Dégorgé le 21/4/04.
- Olfaction brute, farouche et simple, chichement réduite à de la pomme et du citron.
- Bouche virile, acide, manquant cruellement d'harmonie, pour ce caractère singulier, d'ovni champenois déconcertant. Il faudra retester la production de ce jeune vigneron prometteur (issu de l'école Selosse).
2. Champagne - Krug - 1988 :
PP18 – LG18 (à terme)
- Le changement de catégorie est sans surprise spectaculaire. Distinction olfactive et rectitude gustative signent ce grand champagne, seulement à l'aube de sa vie. Notes de fruits rouges, de citron, de grillé et minérales très racées.
- Matière retenue mais noble, dense, minérale, dont l'austérité possède un aplomb incroyable. Alors bien entendu, le vin est encore un peu réticent.
3. Champagne - Bollinger - RD 81 :
PP17,5 – LG17
- Dégorgé le 19/10/99
- Notes complexes et plus évoluées de fruits secs (noix, noisette), de cire, de pomme, de café, d'épices, d'agrumes (orange), de mousseron.
- Bouche racée, fine, fraîche, droite et longuement corsée, régalante (fruitée), pour un vin apaisé, en belle vitesse de croisière. Belle plénitude vineuse.
4. Puligny-Montrachet 1er cru Clavoillon - Domaine Leflaive 1996 :
PP17,5 – LG17,5+
- Palette aromatique fine, dont l'élevage de classe dégage des senteurs nobles de vanille, d'agrumes, de végétal, de café, de noisette grillée.
- Bouche riche, pleine (le millésime veut cela !) pour un vin essentiel, en devenir, possédant une minéralité et formidable retour acide garants de longévité. Une certaine parenté (tranquille) avec le Krug.
5. Bâtard-Montrachet – Etienne Sauzet 1996 :
PP16,5+ – LG17+
- Nez plus capiteux, sur les fruits mûrs, le raisin sec, le miel, le caramel, le coing, le nougat, sur fond de légère oxydation.
- Une nature extrême, puissante en alcool et fortement épicée caractérise une bouche rebondie, épaisse (huileuse), baroque également, qui n'a pas encore montré tous ses talents évidemment. L'épure est peut-être moins nette que dans le Clavoillon en raison de cette signature plus sudiste (on a pensé à un Hermitage un brin décadent), plus imposante et plus souple. Grande longueur.
6. Charmes-Chambertin - Dujac 1998 :
PP17 – LG17,5
- Délicatesse réellement grisante pour ce grand pinot parfaitement clair qui tutoie les étoiles. Nuances irradiantes de fruits, de fleurs, de ronce (vendange entière ?), d'épices ténues, escortées par un boisé luxueux. Le bouquet commence à pointer.
- Bouche fine, pour des goûts complémentaires de nuoc-mam, de réglisse. Equilibre exemplaire, longueur et typicité magistrales qui prouvent une fois de plus le potentiel des grands pinots bourguignons, duaux, denses et aériens à la fois. Ils ne sont pas si nombreux que cela néanmoins.
7. Pauillac - Pichon-Longueville Comtesse de Lalande 1986 :
PP17,5 – LG18
- Arômes caractéristiques typés, à peine tertiaires et précieux de cassis, d'herbes aromatiques, de graphite, de santal, de viande rôtie, de suie, de réglisse, de havane, parfaitement en place.
- Bouche solide, qui possède la race minérale d'un grand Pauillac (millésime oblige), ferme et impériale, mais qui ne sacrifie nullement la gourmandise sur l'autel de l'austérité.
8. Gaillac – Plageoles – Vin d'Autan 1997 :
PP17,5 – LG17,5
- Une liqueur haut de gamme (c'était attendu), mettant brillamment en valeur des parfums ravissants de complexité et confondants de finesse : coing, safran très net, raisin sec, marc, épices douces, abricot, banane séchée, végétal (géranium discret).
- L'équilibre gustatif frise la perfection, la longueur est au rendez-vous pour un vin racé et subtil, enivrant, superlatif. On peut penser à un très beau Layon, pour une acidité suffisante.
Conclusion :
- Digne célébration de l'année passée et de celle à venir, avec une série de très haut niveau.
- Les 2 vins blancs n'ont pas la maturité des 2 vins rouges.
- Krug est nettement au début de sa carrière et Bollinger excelle en toute sérénité.
- Un champagne de producteur à revoir.
- Un Bordeaux aristocratique et sublime qui en remontre à un bourgogne pourtant étincelant.
- Un Gaillac doux remarquable, en général de haut niveau et au summum (c'est une confirmation) sur ce millésime béni des dieux (les 2001 sont également souvent renversants).
Laurent