La formule « vacances oenologico-gastronomique » s’étant avérée passionnante les deux années précédentes, c’est avec enthousiasme que nous avons recommencé cette année. Au programme cette année : une semaine dans le Languedoc, une journée en St Emilion, deux jours dans le Médoc, et quelques jours dans le Bergeracois pour s’en remettre…
Nous avons logé comme il y a deux ans dans une maison d’hôtes au bord du Lac de Salagou :
www.maisonlac.com
en plus d’un cadre absolument sublime, ce lieu offre l’avantage d’avoir une position assez centrale dans le vignoble languedocien : Montpeyroux, Jonquières, Faugères, Cabrières et plein d’autres sont à moins d’une heure de voiture (sans parler du Mas des Chimères, à 5mn).
Afin d'illustrer le côté magique de ce lieu, de ma chambre, on a cette vue:
http://sit.photos.wanadoo.fr/sitdriver?cid=f10f949fe3daf6ec&width=500&height=500&app=photos.wanadoo.fr:8080
1er jour
Nous commençons raisonnablement à 11h le matin au Domaine de l’Aiguelière. C’est la propriétaire, très aimable, qui nous accueille. On passe directement aux choses sérieuses : le premier « plop » de notre périple résonne agréablement dans la pièce : c’est parti !!!
« Les Sarments »,(2004 ?) vin de pays du Mont Baudile , 50% viognier, 50% sauvignon: jolie robe or pâle, nez très avenant de miel et d’abricot, la bouche est ample, fruitée, d’une belle fraîcheur. Bonne persistance. C’est bon !
« Grenat » 2003, vin de pays du Mont Baudile, 90 % grenache 10% syrah : robe rubis assez claire, nez de griotte et d’épices, bouche légère, très fruitée, avec une légère astringence en fin de bouche. Le genre de vin à boire avec des cochonnailles à 10h le matin. Pas mauvais, mais pas trop mon truc…
Cuvée tradition 02, Montpeyroux, 60% syrah, 40% grenache, élevé en cuve. Robe rouge sombre, nez d’épices et de fruits noirs, bouche moelleuse, ronde, très agréable. Un peu de sécheresse en fin de bouche. Pas mal…
Cuvée tradition 2000, Montpeyroux, 60% syrah, 40% grenache, élevé 5 mois en barriques : vin plus sombre, nez plus complexe. La bouche est soyeuse, d’une bonne complexité. Belle longueur. C’est franchement bon !
Côte dorée 2002, Montpeyroux, 95% syrah 5% grenache (en fait au départ uniquement syrah avec ouillage des barriques de l'Allier avec la cuvée tradition) : robe violet/noir , nez superbe, très complexe (cassis, cerise noire, réglisse,épices, tabac blond), bouche d’une grande intensité, mûre, veloutée, soyeuse. Finale longue et superbe. Envoûtant !
Côte rousse 2002, Montpeyroux (assemblage identique à la précédente, mais dans des barriques de la Nièvre, avec des sols différents: argilo-calcaire pour la rousse, graveleux pour la dorée) : robe noire, nez plus discret que la précédente sur la mûre sauvage et le moka, bouche moins explosive, mais d’une densité hors norme. Derrière les tannins parfaitement polis, on sent une matière énorme qui ne demande qu’un peu de temps pour se révéler. D’ailleurs, dans les verres Syrah de Riedel que la propriétaire est partie chercher à la maison, le vin s’ouvre et s’exprime beaucoup plus, au point de supplanter au nez la côte dorée. C’est très très bon !!
Ce qui m’a beaucoup plus dans les deux derniers vins, c’est que malgré une grande puissance, ce sont des vins raffinés, frais, sans lourdeur aucune, loin des clichés des syrah languedociennes. A souligner ce que ces deux vins sont issus de vendange non égrappée, ce qui montre que l’on peut obtenir des vins soyeux sans verdeur aucune si les rafles sont bien mûres…Nous repartons enchantés de cette première visite
Cinq minutes à pied plus tard, nous voici à Aupilhac. Pour être honnête, nous n’avons pas été enchantés par l’accueil de Véronica, qui avait l’air de nous servir les vins à contre-cœur. Nous n’avons d’ailleurs pas eu la chance de déguster les vins blancs, ni les « plôs des baumes », le haut de gamme de la maison, soi-disant pas à la dégustation : dommage, nous en aurions peut-être acheté…
Les Servières 2004, pur cinsault rouge issu de vignes d’un siècle : rouge chatoyant, nez de griotte, bourgeon de cassis, bouche souple et fraîche, légère sécheresse en fin de bouche. Agréable.
Lou Maset 2003, grenache 60%, cinsault 30%, syrah 10% : nez charmeur sur les fruits rouges et les épices, bouche charnue, gourmande, fin de bouche épicée (un peu sèche). Beau vin de cochonnaille
Montpeyroux 2002, Mourvèdre 30%, syrah 25%, carignan 25%M, grenache 16%, cinsault 4% : robe rouge sombre, nez complexe sur les fruits noirs bien mûrs et les épices, en bouche, la matière est mûre, concentrée, mais encore un peu dure, belle finale. Beau vin en devenir.
Les cocalières 2003 , grenache 30%, syrah 40%, mourvèdre 30% : robe rouge sombre, nez de garrigue d’une grande fraîcheur, bouche riche, complexe, mais toute aussi fraîche et d’un grand équilibre. Belle finale. Très beau vin.
Le Carignan 2003 (100% carignan) : nez original mêlant tapenade, cassis et notes animales, bouche puissante, riche mais un rien trop tannique. Finale à l’avenant. A attendre pour juger sereinement…
Et puis c’est tout
. J’avoue être sorti un peu frustré de cette dégustation, pauvre en échanges et en émotions. Je pense qu’une rencontre avec le maître des lieux eût été beaucoup plus passionnante… C’est la vie…
Pour nous remettre de ce petit blues passager, direction à la cave de l’horloge, chaudement recommandée par Jérôme, pour un p’tit repas sympa. Nous prenons tout d’abord en apéro le blanc du Château Jonquières 2003 (assemblage improbable de grenache blanc, chenin et roussane) dont je tombe amoureux : nez enchanteur de miel, de pêche blanche et d’abricot, bouche riche, presque confite, et paradoxalement d’une grande fraîcheur. Un régal !
Avec une assiette d’agneau (morceaux et cuissons variés), nous prenons un pur cinsault du domaine Lacroix Vanel (à Caux) , dont la couleur est proche d’un clairet, le nez est très friand (framboise), la bouche gourmande… Très agréable!!
Avec une assiette de fromage régionaux, nous nous laissons enfin tenter par les baronnies 2001 du Château de Jonquières (on y revient !!) de toute beauté : robe quasi noire, nez d’épices et de fruits noirs, confits, bouche concentrée, séveuse, sur la myrtille, la cerise noire et les épices, très belle finale épicée… Miam !!!
Bon, c’est pas tout, mais on part se reposer un peu : nous avons un rendez-vous à 15 h au domaine de Malavieille, situé à qqs kms du Salagou. J’ai déjà évoqué ce domaine en bio sur LPV : le vin que j’avais dégusté m’avait plu. Je voulais avoir une idée plus complète de l’ensemble de la production…
Malavieille, 15h : nous rencontrons Eric, le maître de chai, d’origine bourguignonne, et fanatique de fraîche date des vins languedociens. Il est totalement tombé amoureux de cette région et des possibilités d’expression qu’elle offre…
Charmille 2004 , 1/3 viognier , 1/3 sauvignon, 1/3 grenache : nez très aromatique, bouche foisonnante, très fraîche. Un beau vin de mise en bouche
Boutine 2003, chenin, chardonnay, roussane : robe dorée, nez sur le miel et le citron confit, bouche riche, onctueuse mais pourvue d’une belle minéralité grande persistance. Bon vin.
Alliance 2003 : roussane, grenache blanc : or pale, vin encore plus gras, étonnamment voluptueux pour un vin sec avec des arômes de pêche blanche et de muscat, très belle finale. Très bon vin !!
Alliance 2002 : vin avec plus de fraîcheur, équilibre plus septentrional, l’année supplémentaire rend les arômes plus complexes : apparaissent des notes épicées, un rien orientales….Très bon aussi !!
Je vous épargne la dégustation des rouges, plutôt sympas et agréable, mais d’un intérêt plus limité. J’ai par contre été épaté par la qualité des vins en bag-in-box (blanc, rosé et rouge), d’une finesse et d’une gourmandise rare pour des vins de ce type (on se boirait les 5 litres d’affilées
)
Nous filons ensuite au mas Conscience où nous rencontrons Laurent Vidal. La rencontre fut si passionnante que j’ai omis de prendre des notes
; sur les vins dégustés. Le chai qu’il s’est construit est de toute beauté, tout en étant sobre et pratique (utilisation de la gravité). L’on sent un souci du terroir et du travail bien fait.
Un exemple en est son IN 2004 (comme « IN »=branché ou INconscience) mélange de grenache, roussane, et … vermentino. Ce dernier apporte une belle fraîcheur aux deux autres cépages, riches et aromatiques mais qui ont besoin d’acidité en contrepoint. Le résultat est éloquent.
Nous avons regoûté le fameux As 2003 qui avait tant fait parlé de lui lors des LPViades, ainsi que le Cas 2004 (Doc, le 2003 est effectivement épuisé
).
Je n’ai pas retrouvé la magie des LPViades sur l’As 2003 (il m’a paru beaucoup plus fermé, mais la bouteille venait d’être ouverte). Pour un avis plus définitif, j’ouvrirai une bouteille dans le mois qui suit et vous dirai ce qu’il en est….
Le Cas 2004 est très différent au niveau aromatique du Carignan d’Aupilhac bu qqs heures plus tôt. Nous sommes ici sur des notes pures de cassis et de myrtille. Par contre, la matière est toute aussi imposante, assez tannique, quoiqu’un peu plus suave. A suivre également.
Nous avons visité son local technique afin de voir le matériel et les produits phyto utilisés ; que du naturel: hélio-souffre, orties, prêle, fougère. Pour le matériel, la surprise vient d’un quad avec pulvérisateur intégré (avec réservoirs à l’avant et à l’arrière du véhicule). C’est beaucoup plus maniable qu’un tracteur remorquant un pulvérisateur et l’autonomie est tout de même d’un hectare. Quand traiter la vigne devient un plaisir
...
Le chai du domaine des Grécaux découvert lors de la « dégustation des 41 » à Paris est à 5mn du Mas conscience (à St Jean de Fos). Par contre, leurs vignes se situent sur Montpeyroux, dont certaines à 300m d’altitude.
En me voyant, les Caujolle se rappellent de notre rencontre en novembre dernier. Je leur dis que leurs vins faisaient partie de ceux qui m’avaient le plus impressionné à cette dégustation. Ils ne pourront pas nous les faire regoûter : c’était des 2001 ; c’est maintenant le 2002 qui est à la vente.
Cuvée Terra Solis 2002, 80% grenache (élevé en cuve), 20% carignan (élevé en barrique), cultivée à 150m d’altitude: robe rouge sombre, nez sur les épices et la cerise noire, bouche sphérique, fraîche, avec qqs tannins présents en fin de bouche. Finale épicée. Beau vin.
Cuvée Héméra 2002, 60% syrah (barriques) 40% grenache (cuve) terroir situé à 300m d’altitude. Robe rouge sombre, opaque, nez fumé, poivré, cassis, menthol, bouche dense, mûre, épicée, d’une grande intensité, fin de bouche encore dure. Très beau vin en devenir.
Notre rencontre durera 1h30 avec beaucoup de questions de part et d’autres. Si nous sommes curieux de connaître leurs secrets de culture ou de vinification, ils veulent également mieux connaître leurs clients et savoir comment ils ont atterri chez eux. Au fur et à mesure, la confiance et la complicité s’installent, et l’on commence à déguster des cuves par ci, par là, et en particulier une cuvée limitée (300 ex) faite pour un caviste parisien, nommée « Vent de terre » 2003, pur grenache, d’une grande pureté, soyeuse, fruitée à l’extrème, tout en gardant une belle fraîcheur, une bombe à faire pâlir certaines grandes grenaches du Roussillon…
Fin de la première journée, riche en émotion et en découverte
; Demain, l’on visitera le grand Robert, après un détour matinal fort intéressant à Lunel, au domaine Grès Saint Paul, producteur de vin passionnant, lui aussi…