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Médoc : la formation des terrasses et des croupes

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J'ai écrit hier soir un petit article pour notre " blog médocain ". J'ai pensé que ça pouvait vous intéresser. Si une grande partie du texte est commune, je l'ai complété en plusieurs endroits (commentaires de la carte des terrasses, par ex).

Lorsqu'on évoque le Médoc, c'est le terme de croupe qui revient le plus souvent. Il faut dire qu'elle sont visualisables par toute personne qui visite la région. L'érosion des 20.000 dernières années rend difficile d'imaginer qu'il existe des liens entre ces croupes successives et les terrasses dont nous allons parler maintenant.

Depuis un bon million d'années, la Gironde traverse le Médoc pour se jeter dans la mer, déposant progressivement pierres et alluvions au fil des glaciations et réchauffements successifs. Voici comment cela s'est passé :

A chaque glaciation, le niveau de la mer baissait, obligeant le fleuve à creuser son lit pour pour pouvoir la rejoindre. Dès que le climat se réchauffait, le fleuve le comblait de galets, graviers, sables et argiles. Les dépôts ne se sont faits que sur la rive "gauche" car les hautes falaises calcaires de la rive droite empêchait tout "débordement"...

Comment en est-on arrivé aux croupes ? Il faut revenir à la dernière ère glaciaire il y a 20.000 ans : le niveau de la mer (et donc de la Gironde) est alors 120 m plus bas que le niveau actuel. Aussi tous les petites rivières et ruisseaux affluents de la Gironde doivent creuser perpendiculairement les terrasses pour rejoindre le fleuve. Dans le même temps, des vents violents venant de l'ouest ont amené du sable des Landes jusqu'à recouvrir les terrasses.

Lors du réchauffement climatique, environ 10.000 ans plus tard, la Gironde comble tous les espaces disponibles de vases et de sédiments, créant les palus et les marais à la base des croupes (qui ont perdu entre temps une bonne partie du sable qui les recouvrait). Les marais ne disparaîtront qu'à partir du XVIIème siècle avec la création de digues et d'écluses qui existent toujours (merci les hollandais !).

Grâce à ces travaux gigantesques, la population a pu utiliser les terres fertiles nouvellement gagnées pour y planter des céréales et faire paître les troupeaux. Du coup, les croupes ont été libérées, et on a pu y faire pousser une plante peu exigeante : la vigne !

Depuis une vingtaine d'années, Pierre Becheler réalise un véritable travail d'archéologue en essayant d'identifier les différentes terrasses déposées par la Gironde. Pour cela, il faut creuser et observer les couches successives, faire des rapprochements, en déduire la circulation des différents cours d'eaux en présence... Encore aujourd'hui, il n'est pas au bout de ses découvertes, et remet sans cesse son travail en question.

Au jour d'aujourd'hui, il a réussi à identifier six terrasses numérotées de T1 à T6 qui présentent chacune des caractéristiques propres. Les grands crus médocains sont principalement sur les terrasses T3 et T4 constituées de graves et de graviers, reposant sur des sols marneux ou argileux.
[size=x-small]Cliquer pour agrandir[/size]

Vous pouvez remarquer sur la carte ci-dessus que la zone située entre Margaux et Saint-Julien a une terrasse de type 5 (en vert), et non 4 (en rouge) ce qui suffit à expliquer des différences qualitatives. Vous pouvez aussi voir que l'appellation Margaux est la plus hétérogène puisque sont présentes des terrasses de type 2,3,4,5 et 6. Et qu'il faudrait plutôt dire que Latour est le plus "Saint-Julien des Pauillac" puisqu'il il est le seul domaine de l'appellation à être sur une terrasse de type 4, les autres étant de type 3. Depuis l'installation des vignes au XVIIème siècle, le classement par commune a toujours existé, et engendré beaucoup plus tard les appellations communales. Mais il n'est pas forcément cohérent avec la géologie....

Si Pierre (PEIO) s'est chargé de restituer les différentes terrasses en 3D, nous avons confié le texte de ces quelques pages consacrées à la géologie à Pierre Becheler et à Jean-Pierre Tastet (son ancien professeur, et complice dans ses recherches et excursions) car ils nous paraissaient les mieux placés pour en parler. Le style est un peu plus dense et aride que le mien, mais nous avons la certitude de n'avoir trahi ni leurs travaux, ni leurs pensées ;o)

Eric
Mon blog
01 Juil 2010 16:15 #1

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Réponse de lanèfle sur le sujet Re: Médoc : la formation des terrasses et des croupes

Merci Eric,

pour ce texte qui intéresse l'amateur de géologie que je suis.

Mais je m'interroge : Un beau p'tit cru, une belle croupe graveleuse. Cela donne-t-il un vin qui a de la cuisse ?

:D

Et sinon, qu'est-ce qui différencie les terrasses : composition ? granulométrie ?

Merci


Nous n’avons plus de grand homme mais des petits qui grenouillent et sautillent de droite et de gauche
avec une sérénité dans l’incompétence qui force le respect. Desproges
Le blog du rustre
01 Juil 2010 16:39 #2

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Selon les terrasses, les compositions des roches varient, leur granulométrie, la proportion de sable. Mais les sols initiaux (calcaires, sables, argiles...) sur lesquelles elles reposent sont tout aussi importants, et ont joué un rôle essentiel dans l'évolution de ces terrasses depuis leur mise en place (avec deux "vedettes" principales : l'eau et le fer). D'où au final, une multiplicité de sols dans un espace relativement limité.

Eric
Mon blog
01 Juil 2010 17:12 #3

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