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Quelques réflexions sur la dégustation

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Quelques réflexions sur la dégustation a été créé par Yves Zermatten

Contrairement à  d'autres savoirs, l'enseignement théorique de la dégustation ne peut se faire que de manière imparfaite car la majeure partie de l'apprentissage se fait dans la pratique. La dégustation n'est pas un savoir que l'on peut aisément enseigner. C'est avant tout un art qui s'acquiert par l'expérience, en portant une attention constante aux vins que l'on boit ou en faisant des séances de dégustation comparative. La théorie n'est importante que pour acquérir les notions de base. Ensuite, il faut se livrer à  un véritable apprentissage sensoriel, à  une véritable éducation de sens, en particulier du goût et de l'odorat.

Le paradoxe de la dégustation est qu'elle veut être une méthode objective mais qu'elle emploie des moyens subjectifs, puisqu'ils proviennent des donnés de nos sens et de l'interprétation que nous en faisons. Mais, en fin de compte, le dégustateur est seul devant le vin et ses sensations. A l'exception de sa mémoire et des sens affinés par l'exercice, il ne dispose d'aucun instrument pour l'aider dans sa démarche.

La dégustation ouvre la porte de la philosophie, avec les questionnements qu'elle ouvre sur la sensation, la perception, le lien au réel, l'interprétation des données transmises par les sens, que l'on utilise comme des instruments de mesure mais qui n'en sont pas. La dégustation ouvre aussi les portes de la physiologie. Le dégustateur se doit de connaître un peu le fonctionnement des récepteurs du goût et de l'odorat pour éviter des interférences parasites et se placer dans des conditions de dégustation optimales. Le dégustateur recherche la sensation primale, de façon à  saisir le message olfactif dans sa pureté. La dégustation n'est pas une activité d'égarement des sens mais une activité intellectuelle qui se construit sur les données transmises par les sens. La dégustation permet la jonction de l'esprit et de la matière, elle relie le minéral et le végétal, l'inerte et le vivant, la science et la poésie.

La dégustation demande une grande maîtrise des sens. Il faut apprendre à  saisir et à  identifier des sensations, acquérir une indépendance psychologique qui soustraie le dégustateur aux influences extérieures pour atteindre à  une parfaite autonomie de jugement. Déguster, c'est étudier, analyser, décrire, classer. La dégustation est une activité de jugement qui imprègne nos facultés intellectuelles. Il faut mentalement juger le vin, dans l'absolu, par rapport à  cet d'idéal qu'est LE grand vin. La dégustation est un bon moyen d'éducation des sens, mais aussi de l'intellect.

A partir de nos sens, la dégustation du vin édifie une construction intellectuelle qui se rapproche de la science par son approche analytique, mais aussi des beaux-arts et de la contemplation artistique par son côté esthétique. Comme l'artiste, l'oenophile recherche le beau. La dégustation est une activité humaine par excellence, elle est un acte culturel.

La dégustation apprend aussi à  se défaire de diverses formes de conditionnement. Elle nous apprend à  voir les choses telles qu'elles sont et non pas telles que nous croyons qu'elles sont. C'est un exercice difficile car nous sommes toujours portés à  retrouver dans les choses les vertus qu'on leur prête. De plus, le dégustateur doit sans cesse se référer à  un idéal qu'il ne cerne pas; le jugement est relatif à  l'expérience de chacun et celui qui n'a jamais mangé de grives trouvera les merles excellents.

cordialement

Yves Z

Yves Zermatten
01 Nov 2003 10:45 #1

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Réponse de Jérôme Pérez sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Effectivement, déguster, c'est chercher à  comprendre ce que l'on a dans le verre, bien avant le jugement.
Certains, la plupart, se contente de boire. Ce n'est déjà  pas si mal. Déguster c'est aussi se demander pourquoi c'est bon ou pourquoi ça ne l'est pas, qu'est ce qui fait que c'est ce goût que ce vin a et pas un autre, comprendre l'antériorité et la postériorité de cet instant. Cela demande effectivement expérience. L'expérience cependant , n'est pas une compétence, c'est une capacité qui peut sans cesse croître. Par contre pour reprendre ce que tu dis au début, il me semble qu'il y a des connaissances et des méthodes, une sorte d'apprentissage préalable et nécessaire.
Mais effectivement cet apprentissage n'est jamais terminé.

Jérôme Pérez
01 Nov 2003 13:25 #2

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Réponse de michelD sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Il faut toujours remettre l'ouvrage sur le métier.

Pour progresser dans la connaissance de la dégustation, il faut la confrontation des autres, frotter son expérience à  celles d'autres dégustateurs, qui est génératrice d'émulation et d'apport de connaissances nouvelles.

Une des premières qualités pour un dégustateur c'est, selon moi, l'humilité et en deuxième place je placerais la persévérance.

Michel
01 Nov 2003 16:19 #3

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Vaste et intéressant débat ...

Je souhaite insister sur un point (un peu ultime, certes).
La dégustation est aussi une manière de parler de soi, de se relier aux autres.
En quelque sorte, déguster (un plat, un vin), le décrire (avec des mots, mais on peut imaginer d'autres langages - coeur, corps, émotion, ...) est aussi un moyen de révéler des mécanismes internes essentiels :
* rapport au plaisir
* égo (puis-je me tromper ?, est-ce que j'accepte un avis différent du mien ?)
* recherche de reconnaissance par des pairs (cooptation)
* expression de valeurs, croyances, voire soufrances

Avec une certaine expérience, ne cherche-t-on alors pas plutôt à  se décrire soi qu'à  décrire le vin ?
(la vie est espiègle, facétieuse, et on sait la complexité de l'exercice, liée à  des facteurs innombrables plus ou moins subjectifs, militant pour la modestie, ce qui n'empêche en rien une approche volontaire, appliquée).

Qu'en pensez-vous ?
Au plaisir d'en repalrer avec vous ...

Laurent Gibet
03 Nov 2003 17:01 #4

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Réponse de Jérôme Pérez sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Bonjour Laurent,

Personnellement, je me refuse à  intellectualiser autant, mais c'est un choix.
Je ne comprends pas très bien d'ailleurs comment tu en arrives à  de telles conclusions. Une passion est déjà  assez dévorante alors je crois qu'il faut veiller à  ce qu'elle ne soit pas fusionnelle.

Ces derniers temps, le nombre de dégustations que j'effectue est en progression considérable, mais je vais délibérément freiner: fatigue, saturation. Je prends conscience que j'ai bien plus de plaisir à  déguster une bouteille sur plusieurs jours, voir comment évolue le vin, je trouve que je le respecte plus que de lui consacrer une minute d'attention et de le recracher illico. Et je me persuade d'ailleurs encore davantage de combien sont péremptoires les avis des critiques professionnels qui ne se bornent qu'à  ce type d'examen.

Je regarde évoluer ce Vouvray depuis deux jours, et je me dis que mon sentiment initial à  son sujet n'a rien à  voir avec celui que j'en ai ce soir.
Tiens voilà , je vais aller me resservir une gorgée de East India Solera pour essayer de méditer sur la dégustation!

Jérôme Pérez
03 Nov 2003 19:45 #5

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Intéressante approche, malgré tout, que celle de Laurent!...

Plutôt que de parler de soi, ce peut être avoir le "courage" de se révéler aux autres. Et se relier aux autres, c'est aussi se rassurer en cherchant des choses communes avec ses congénères!

Il me semble aussi qu'au delà  de la "technique" qu'on adopte petit à  petit, on ne déguste jamais mieux que lorsque l'on chasse au préalable ses propres certitudes (à  propos d'un cépage, d'une AOC...), que l'on admet que le prochain verre va nous surprendre, nous dérouter et que l'on se persuade d'en parler librement.

Admettre aussi que certains jours, on n'arrive plus à  déguster comme parfois, on a du mal à  calculer mentalement et que, donc, il faut aussi ne pas oublier de... boire, tout simplement (avec modération!... (bbb)) ce que l'on a dans son verre!

Pour la méditation : passito de pantelleria!...(bbb)

PhR
03 Nov 2003 20:14 #6

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Merci pour ces rebonds

J'en arrive à  ces conclusions, par au moins les biais suivants :
* ce que je constate sur le terrain (moi, les autres aussi variés soient-ils, ...)
* mon approche du sujet depuis plusieurs années, y compris dans le domaine professionnel (partage des connaissances)
* la lecture assidue de poins de vue innovants, un rien déroutants éventuellement (vous noterez que je ne dis rien de l'oenologie, de la plus académique à  la plus ésotérique, c'est encore autre chose)

Je t'ai répondu plus en détail en privé.
Je n'assène pas une certitude (sinon, je serais en contradiction, encore que celle-ci ne soit pas bloquante dans mon approche) mais une réflexion et aussi une sensibilité determinées.
Sommes-nous d'accords que le (grand) vin s'adresse à  la tête, au corps, au coeur (l'un et l'autre, pas l'un contre l'autre) ?

Et la présence de l'autre, avec qui on partage la libation, est déterminante.

Tout cela n'est pas négatif, ne conduit pas à  la fin de la dégustation : au contraire !
Dans mon approche, intellectualité et pragmatisme/hédonisme/méditation ne s'opposent pas mais se complètent (c'est la base de l'approche systémique, et je n'ai pas la place de développer ici).

C'est juste une dimension nouvelle, développée ailleurs par des personnalités du vin, et qui me semble intéressante à  incarner, à  relayer (de nouveau, je ne nie pas l'intérêt d'autres approches), parce que profondément humaine (l'amateur, le critique, le vigneron, l'oenologue, le chef de culture, l'ampélographe, le sommelier, le caviste, le restaurateur, ...).

Je crois aussi (tout comme toi) Jérôme à  la nécessité d'observer le vin dans la durée, mais tout va vite dans notre société marchande et spectaculaire.

Exemples concrets :
* peut-on accepter que 2 avis opposés aient raison sur la qualité d'une coulée de Serrant 87 ? qui peut légitimement s'autoriser à  me donner un avis définitif sur ce vin, et sur quelles bases ?
* je ne demande pas mieux que de me régaler dans qq temps sur 2 vins que j'ai préalablement honnis, mais pour lesquels j'ai lu des commentaires (avisés) favorables :
* Maghani 95 (dans la RVF)
* Clos des Truffiers 98 (avis de Hervé Bizeul)

Je pourrais précisément me bouffir d'orgeuil et, comme c'est parfois le cas, insulter très immodestement mes contradicteurs, dissimulant de fait mes doutes derrière mes certitudes.
Me ferait-on alors plus confiance, parce que (comme disent les Deschiens), je n'en veux ?

Et quel aveuglement de ne même pas s'interroger sur la variabilité des échantillons, des bouteilles, des contextes, ...

Le monde va suffisamment mal comme cela pour que je ne choisisse pas une approche plus écologique.

Je pense en conclusion que la force d'un dégustateur réside dans sa capacité à  s'interroger, à  accepter l'erreur, à  apprendre des autres.
Qu'est-ce d'autre qu'un intellectuel ?
On peut parfaitement jouir de l'intellectualité.

La problématique de la fusion (car il y a la passion comme liant essentiel) est aussi intéressante. C'est éclairant de poser la question de notre rapport aux vins aux gens qui vivent avec nous, en conscience !

Est-ce encore à  ce stade utile de préciser pour intérêt pour la cognition ?
Mais un critique potentiellement marchand peut-il se permettre de se tromper ?
Et un internaute volontaire, motivé, entreprenant a-t-il plus de lattitude, de liberté ?

Les égos, les peurs, les contractions, les mégalomanies, les narcisismes sont-ils en mesure de résister à  tant de pression (courtisanerie, vénalité, gratifications diverses, ...) ?

Je ne donne volontairement pas d'exemple, et je ne mets d'emblée pas à  l'écart (modestement) de toute critique (moi aussi, j'ai besoin de reconnaissance, à  mon niveau). Je suis impliqué, qq part entre idéalisme et dogmatisme, mais avec beaucoup de détermination.

Voilà  j'espère vous avoir un peu intéressés ...

A propos, un grand bravo, Jérôme (et les autres) pour la richesse d'échanges que permet ce type de forum !
Et vive aussi les rencontres humaines directes pour mieux se connaître, s'apprécier.

Laurent Gibet
04 Nov 2003 15:06 #7

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Réponse de Luc Javaux sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

(eee)

Moi y en pas tout avoir compris...

Luc
04 Nov 2003 16:29 #8

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Bonjour, Luc,

Je suppose que tu parles de mon post.

Si tu le souhaites, je peux essayer de compléter, clarifier un point particulier.

Cela m'aidera aussi à  être plus clair, plus précis.

Juste qq pistes détaillées récemment ailleurs : le cognitif inclut les repères culturels de chacun.

1.
* Comment par exemple aborder une certaine férocité tannique et acide de (certains) barolos ?
* Comment apprécier à  sa juste valeur, alors que l'on a déjà  beaucoup appris sur les vins français, l'équilibre, l'évanescence d'un riesling mosellan, la truculence d'un Amarone, la rondeur d'une syrah australienne, la puissance sans concession d'un Zinfandel US ..

2.
* comment ne pas voir, au delà  des compétences réelles des grands dégustateurs (chacun a son idole), les inimitiés, animosités, jalousies, luttes qui animent le monde vinicole, tous publics confondus.
Tiens, on parlait encore du Valinière canard - 3 petits oeufs (je peux expliquer) de Barral ...
Ces considérations (ainsi que des points beaucoup plus positifs, comme l'amitié, l'empathie, la connivence, la confiance) seraient-elles curieusement absentes du champ de la dégustation, sachant que cela implique prestige, argent, ... ?

3.
* se régale-t-on plus sur un petit vin de pays qui a un sens bu avec de bons amis après une course en montagne (éventuellemnt précaire) ou avec un Mouton 93 bu en repas d'affaire dans une ambiance qui nous déplait ?
Moi, j'ai le souvenir d'un Beaucastel 90 bu dans une auberge japonaise éloignée de tout centre touristique ... c'était très bon !

J'espère avoir un tant soi peu clarifier mes idées.

Amicalement

Laurent Gibet
04 Nov 2003 16:53 #9

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Ah oui, j'oubliais :

* Comment abordes-tu la communication sur le vin français pour des dégustateurs japonais (j'ai eu l'occasion concrète de le faire il y a qq années, avec des universitaires informaticiens - on avait balayé les mots, les chiffres (notes, statistiques), la poésie et les images (Haiku), les sons, ...) ?

* Comment te préparerais-tu pour une grande dégustation de saké (tu es par exemple invité dans l'enceinte du plus beau temple de Kyoto, et les cerisiers sont en fleurs ?)

* Idem pour une cérémonie du thé ? pour un repas (un peu périlleux) de fugu (au fiel destructeur) ?

Laurent Gibet
05 Nov 2003 11:35 #10

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

HO, HO, Luc, t'es là  ?

J'ai répondu à  tes interrogations ?

Ou bien suis-je totalement hors sujet ?

Dis-moi !

Laurent Gibet
06 Nov 2003 16:14 #11

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Réponse de Luc Javaux sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Qu'est-ce que c'est ? C'est à  moi qu'on parle ? Pas si fort, s'il vous plait, je ne suis pas sourd...(bbb)

Laurent,

Tu sais, il faut me parler avec des mots simples, avec des phrases de moins de dix mots et en évitant que je doive aller dans mon dictionnaire 3 fois par ligne... Je suis médecin moi, pas philosophe... (aaa) Et encore, un médecin de campagne... Mon quotidien, c'est les paysans, les ouvriers, les gens simples quoi...
Alors les problèmes de communication avec les dégustateurs japonais, les dégustations de saké à  Kyoto ou le repas de fugu, ça me laisse un peu froid, il faut bien l'avouer...

Tout simplement, je dirais que je suis très loin de me poser autant de questions que vous quand je déguste un vin...

Evidemment que le contexte dans lequel se déroule une dégustation a toute son importance, que "le cognitif inclut les repères culturels de chacun" (pff, celle-là , j'ai mis deux jours à  la comprendre...). Je pense néanmoins que le véritable Grand Vin est universel dans le sens où il s'impose à  tous avec évidence. Je pense qu'on pourrait me servir un Beaucastel 1990 dans n'importe quel contexte, je le trouverai toujours grand, tandis que Mouton 1993 a sans doute besoin d'un contexte favorable pour qu'on oublie ses imperfections.

Luc
06 Nov 2003 21:45 #12

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Réponse de claudius sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

"...Je pense néanmoins que le véritable Grand Vin est universel..."

tiens intéressant, Beaucastel 90 pour Luc ou disons plutôt l'archétype du vin "parfait" (Haut-Brion 89, Latour 1961, Mouton 96....etc) serait universel...?

Une fugue à  4 voix de Bach ou le Requiem de Mozart sont universels, l'Indien des haut-plateaux des Andes, le Chinois de Shanga௠tout comme l'habitant du Burkina Fasso comprennent cette musique ou disons plutôt se rendent compte qu'il s'agit de qqchse de "surprenant-spécial-qui-les-fait-vibrer"
...alors que Haut-Brion 1989 ou un autre aura pour tout effet de faire faire une grimace à  70% de la population de la planète après la première gorgée. Le 29% restant fera une remarque du genre "il est agréable" certains y rajouteront du soda, d'autres trouveront que le shiraz-australien-bu-l'autre-jour était meilleur.
0,0000000000000000001% du 1% restant atteindront vraiment le 7ème ciel...voire le point G.
Je vous laisse imaginer les variantes pour les 0,000000000000000000009% restant...

On parlait de quoi au juste? de l'universalité d'un tout grand vin?
06 Nov 2003 23:30 #13

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

auto-censure

Message edité (07-11-2003 11:12)
07 Nov 2003 00:10 #14

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Réponse de jeanclaude sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Pouffffff!

J'ai un mal de crâne d'un coup là .

Je vais me coucher!

(aaa)
07 Nov 2003 01:50 #15

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Par contre je vais reprendre tout le fil des interventions de Laurent, Luc, Jérôme etc… mais je vais les imprimer ça sera plus facile à  lire (bbb)
07 Nov 2003 08:55 #16

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Luc,

J'attendais juste avec impatience l'écho à  mes propos.

Je sais que mon propos est exigeant (j'en fais la même expérience dans mon milieu scientifique) et je persiste et signe à  rappeler cette dimension de la dégustation.

Je m'efforce d'expliquer, parce que je le comprends comme cela, que nombre de dissensions sur l'appréciation du vin ont leur origine dans des zones profondes (elles ne sont pas faciles à  expliciter en quelques mots, il faut certes un effort) et que souvent, on s'oppose sur la surface. Allez faire un tour sur iacchos, vous verrez !

Ca parle souvent à  tort et à  travers : soit !
Mais c'est plus condamnable quand ca s'insulte, se menace, se toise ...

L'exigence rend certainement la dégustation profondément humaine, encore plus palpitante !
Ce sont les rapports entre les hommes qui sont en jeu, et le contenu des verres n'est qu'un révélateur (admirable, je pense, c'est l'hédoniste qui parle).

Il m'arrive de déguster sans me prendre la tête (mais c'est en me prenant la tête que je pense avoir pas mal appris, des autres, avec des points de vue allant du plus simple au plus compliqué).
Et je suis loin d'avoir tout compris, mais ma soif de vin est insatiable (c'est la passion).

Le sourire d'un pote qui trempe ses lèvres dans le verre que vous lui offrez ...
Le regard plein d'envie que tu jettes sur une bouteille que tu rêves de goûter depuis des années !

Je ne pense pas que le grand vin soit universel (pas plus que le saké ou le cigare). Ce ne serait pas d'ailleurs un peu égo(ethno)centrique que de le penser ?

Et cette notion "se prendre la tête" n'a rien non plus d'universel : beaucoup de personnages brillants avouent leurs limites là  où les sots pérorent !
Combien de fois ai-je entendu des amateurs (dans le sens péjoratif du mot) me dire (alors qu'ils ouvrent 10 bouteilles par an, et souvent minable) : moi, je sais bien ce que c'est qu'un Bourgogne !

Chacun sa culture générale aussi, son cambouis, ses capacités et ses limites.
J'ai plein d'amis qui m'ébahissent par leur talent en bricolage !

Voilà , j'espère avoir été à  peu près clair. Mais je pense qu'à  trop simplifier, on dénature parfois.
Un exemple ?
* Raffarin (qui a dit que la pollution avait tué, dans le cadre de la canicule ?)
* Bush (inutile de développer)

La pédagogie, face à  des publics extrêmement variés, n'est pas plus universelle, ou alors cela se saurait.

Je finis par un exemple :
* Pourquoi des dégustateurs chevronnés décrivent-ils un vin blanc coloré en rouge comme un vin rouge ?
* Pourquoi notent-ils mieux un même vin servi dans une bouteille plus "prestigieuse" ?
* Pourquoi, récemment invité chez une personne que je connaissais peu mais dont je savais l'intérêt pour le vin, ai-je pris un simple minervois anonyme (mais propre, aux jolis tannins lisses et gourmands, sans aspérités) pour un Pomerol de beau pedigree ?
Et quand il m'a dévoilé mon errance (je pouvais raisonnablement faire l'hypothèse qu'il me servait un flacon prestige, car il était facétieux), les notes sudistes (et notamment l'olive noire, un peu comme dans Sylla de Borie de Maurel) du minervois m'ont sauté aux yeux, au nez, à  la bouche ! -

Dans le cadre d'un enjeu, mon égo aurait pu en prendre un coup, c'est cela que je veux dire ici !
Comment aurais-je alors décider de décrypter ce vin ?

Combien de fois as-tu bu Beaucastel 90 ?
Combien de fois s'est-il montré à  la hauteur ?
Penses-tu que tous les flacons (2 ?, 5?, 10?, 30?) que tu boiras le seront ?

A propos, dans quelle région exerces-tu ton beau métier ?

Laurent
(qui se trompe souvent sur le vin et récemment soigné d'une aponévrose de la loge antéro-externe - non poplytée - j'ai aussi du faire un effort pour véritablement prendre en charge mon symptôme).
07 Nov 2003 13:17 #17

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Réponse de Luc Javaux sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Laurent,

Beaucoup de questions encore...
Sans doute pas beaucoup de réponses à  te proposer mais je vais essayer...

"Je ne pense pas que le grand vin soit universel (pas plus que le saké ou le cigare). Ce ne serait pas d'ailleurs un peu égo(ethno)centrique que de le penser ?"

Effectivement...
J'ai su, dès que j'ai cliqué sur "envoyer", que j'avais écris une connerie...(jjj)
Universel n'est certainement pas le mot juste. Je voulais dire par là  que lorsqu'on présente une vingtaine de vins à  un groupe de dégustateurs, il y a parfois, rarement, un moment où le silence se fait, où une sorte de magie s'installe, où tous reconnaissent le Grand Vin, même ceux qui ne sont pas les plus "érudits" en la matière. Il y a des vins qui sont difficiles d'approche et qui demandent une "éducation" afin de pouvoir les comprendre (et ce ne sont pas les moins intéressants), mais le Grand Vin à  maturité impose sa grandeur et sa classe à  tous.

"Pourquoi des dégustateurs chevronnés décrivent-ils un vin blanc coloré en rouge comme un vin rouge ?
Pourquoi notent-ils mieux un même vin servi dans une bouteille plus "prestigieuse" ?
Pourquoi, récemment invité chez une personne que je connaissais peu mais dont je savais l'intérêt pour le vin, ai-je pris un simple minervois anonyme (mais propre, aux jolis tannins lisses et gourmands, sans aspérités) pour un Pomerol de beau pedigree ?"

Tout simplement parce qu'on ne trouve que ce que l'on cherche... La seule dégustation réellement objective est la dégustation à  l'aveugle complet (avec des verres noirs). Toute information glanée ci et là  (étiquette, forme de la bouteille, personne qui a apporté le vin si on connaît sa cave, et aussi couleur du vin) vont influencer notre recherche dans le décryptage du vin. Et plus "on s'y connaît" (dans le sens d'une culture livresque sur le vin importante), plus on se laissera influencer par ces informations "volées".
Il est par exemple très difficile pour un amateur de juger de façon objective une bouteille prestigieuse (Haut-Brion 1989 par exemple...) si la dégustation n'est pas effectuée à  l'aveugle. Soit on est impressionné par l'étiquette, on montre trop de respect vis-à -vis du vin et on ne peut que le trouver grand, soit au contraire, on refuse de se faire entendre dire qu'on est un buveur d'étiquettes et on va tenter de démontrer à  l'assemblée que ce vin est "bien trop cher pour la qualité offerte", et si on veut trouver un défaut dans un vin, il est rare qu'on en trouve pas un...
Pour le Pomerol, pas d'inquiétudes, j'en connais même qui osent prétendre qu'un vin de pays de l'Hérault souvent commenté sur ce forum pourrait donner une leçon à  quelques-uns des meilleurs représentants de cette appellation prestigieuse... Dans quel monde vivons-nous ! On ne respecte plus rien ! (aaa)

"Combien de fois as-tu bu Beaucastel 90 ?
Combien de fois s'est-il montré à  la hauteur ?
Penses-tu que tous les flacons (2 ?, 5?, 10?, 30?) que tu boiras le seront ?"

Malheureusement, je n'ai bu Beaucastel 1990 qu'à  une seule reprise, qui plus est dans un contexte très favorable à  son expression. Mon impression n'est dès lors sans doute pas totalement objective, mais il a fait partie de ces trop rares vins qui ont créé une émotion palpable chez tous les participants à  cette dégustation. Pour ma part, il s'est donc montré dans 100 % des cas à  la hauteur...(bbb) J'espère encore avoir un jour l'occasion de boire ce vin, mais rien n'est moins sûr... et puis il y a tant d'autres vins à  déguster... et puis il y a plus de 50 bouteilles plus jeunes de Beaucastel qui dorment dans ma cave en attendant leur apogée... et je suis patient.

Comme la plupart de ceux qui interviennent sur ce site, je suis à  100 % amateur en ce qui concerne la dégustation, avec toutes les imperfections que cela comporte. Je ne déguste que 5 à  600 vins par an, pour la plupart des vins que j'ai payés, ce qui ne permet assurément pas d'avoir une vision suffisamment élargie de la production de vin en France, et encore moins dans le monde. Cela ne m'empêche pas de donner mon avis sur les vins que je déguste, tout en sachant très bien que celui-ci est d'une importance plus que relative, et encore, je suis gentil... Je ne me sens pas investi d'une "mission", je laisse cela aux professionnels. Je ne me prends donc que très rarement la tête quand je déguste un vin, je prends tout simplement du plaisir que j'essaye de communiquer aux autres, c'est différent.

"A propos, dans quelle région exerces-tu ton beau métier ?"

Encore une tare supplémentaire à  mettre à  mon actif : je suis Belge, né d'une mère Flamande et d'un père Ardennais. J'ai passé ma jeunesse à  Bruxelles et me suis installé ensuite dans la région d'où est originaire ma compagne, à  savoir une zone rurale située à  20 km au Sud de Charleroi...

Je sens qu'on va encore trouver que j'ai fait long...

Luc
08 Nov 2003 21:04 #18

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Réponse de Anthony sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Luc, si le but premier de notre passion est de se faire plaisir, alors je te rejoins à  100% en disant que la subjectivité est ce qui nous différencie des professionels, et heureusement. La subjectivité nous permet des coups de coeur, de calcaire, des éclats de rire et des larmes indépendent (ou presque) de la qualité objective du cru en question.

Je préfère m'extasier devant un vin que d'autres trouveront nuls et passer à  côté d'autres vins encensés par les meilleurs dégustateurs, que de ne jamais vivre le grand frisson.

Mais était-ce le sujet originel ?

(bbb)

Anthony
09 Nov 2003 01:49 #19

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Réponse de Luc Javaux sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Anthony,

Je ne sais si c'était le sujet originel... A vrai dire, je sais bien que non... (bbb)
Il me semblait avoir clairement fait savoir plus haut que je n'avais pas tout compris dans cette discussion, mais comme on m'interroge...(jjj)
Alors, s'il vous plait, arrêtez de me harceler avec vos questions qui m'échappent complètement ! (aaa)(aaa)(aaa)

Luc, nul en philosophie... mais épicurien dans l'âme.
09 Nov 2003 10:26 #20

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Réponse de Guest sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

Très bien ...

On se rejoint, en tant qu'oenophiles, sur l'émotion.

Bonne journée à  tous !
12 Nov 2003 11:53 #21

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Réponse de Yves Zermatten sur le sujet Re: Quelques réflexions sur la dégustation

quelques réponses personnelles et tardives à  Laurent

la dégustation comme

* rapport au plaisir

Evidemment. Pour moi, c'est là  un part importante, pour ne pas dire essentielle, de l'activité de déguster. Aimer le vin implique pour moi aimer la vie, aimer les émotions profondes et intenses, aimer les bonnes choses, les belles choses, la Beauté, l'harmonie, bref, c'est tout un art de vie hédoniste.

* égo (puis-je me tromper ?, est-ce que j'accepte un avis différent du mien ?)

c'est aussi essentiel, le pluralisme de points de points de vue est une richesse. On met souvent l'accent sur l'apprentissage des mathématiques dans l'éducation. Or, les mathématiques, dont je ne conteste pas l'utilité, façonnent l'esprit d'une façon telle que l'on croit qu'il y a une "solution" à  toute interrogation (d'où le succès des notations en matière de dégustation). Or la réalité est complexe et les "solutions" simples ne sont pas fréquentes. La dégustation est une formation à  cette approche complexe. Comme souvent dans la vie, nous ne maîtrisons pas tous les paramètres et nous devons avancer à  tâtonnement, au feeling, à  l'intuition.

Se remettre en question, accepter le pluralisme des points de vue, être conscient de fait que notre jugement ne prend pas en compte tous les paramètres, accepter d'admettre qu'on s'est trompé, réviser son appréciation, savoir que les idéauxavec le temps, tout cela est une belle école de vie, non ?

* recherche de reconnaissance par des pairs (cooptation)
cooptation dans un groupe ? pour les journalistes, les membres d'un club de dégustation, ou pour ceux qui écrivent sur le forum, cela est problement le cas. Cela dit, je pense que la majorité "silencieuse" des amateurs de bons crus se fout totalement de la reconnaissance de ses pairs et qu'ils recherchent avant tout le plaisir du vin ou de l'ivresse.

* expression de valeurs, croyances, voire soufrances

J'aime cette idée. J'ai toujours pensé que la subjectivité de l'instant, tant physique que psychologique (et culturelle), avait une grande importance dans l'appréciation d'un vin. Avant de parler de "mises différentes", nous devrions parfois nous demander si ce n'est pas notre subjectivité physiologique et psychologique qui varie d'une fois à  l'autre. Par ailleurs, la dimension culturelle est aussi présente en ce sens qu'un Bourguignon ne déguste pas comme un Bordelais. Vincent ne recherche pas les mêmes vins que Jérôme. Et notre appréciation actuelle d'un vin m'est-elle pas le fruit d'une comparaison - qui n'est que partiellement consciente - avec tous les vins que nous avons dégustés dans notre vie et qui ont formé notre "goût".

bon, j'arrête, là  ;-)

amicalement

Yves Z

Yves Zermatten
12 Nov 2003 23:25 #22

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