Toute occasion est bonne pour ouvrir une bouteille.
L'anniversaire a ceci de bien que c'est une excellente occasion pour en ouvrir un certain nombre.
J'avais donc invité une bonne dizaine d'amies et amis pour le repas servi en buffet, avec carpaccio de Saint-Jacques (pour moitié au gingembre), gésiers de canard à la poire (les gésiers avaient joué quelques heures sur le feu avec le contenu d'une bouteille de Pinot gris la veille), rillettes aux 2 saumons et gingembre, crème de betterave aux coraux des Saint Jacques (je ne carpacciotte pas les coraux).
En plat chaud suivait une tourte de canard à l'orange.
Puis plateau de fromages merveilleusement affinés,
puis gâteau au chocolat et gingembre.
J'accueillis mes invités avec un Magnum de Jacquesson 733, à la bulle fine, meilleur que celui du Grand Tasting qui présentait des notes de champignons. Celui-ci était très élégant, avec des notes d'agrumes, la bouche assez tendue, une finale très précise... Un Champagne qui a ravit tout le monde, et c'était là l'essentiel. Je l'ai regoûté vers la fin du repas, pour tester l'accord avec le camembert (intéressant... sûrement meilleur avec un Champagne plus puissant), et il avait pris un aspect vineux très fin, presque salin, très agréable.
Pour aller avec les Saint Jacques, j'ouvris alors un Vougeot 1er cru "Le Clos Blanc" La Vougeraie 2000 au boisé entêtant à l'ouverture. Cependant, au bout de moins d'une minute, le boisé avait filé, et le nez se présentait avec une puissance et une complexité presque virile que j'associe aux blancs de la Côte de Nuits. Le vin me semble à son apogée aujourd'hui. La bouche était ample et pleine de gras, et se montrait accueillante envers le carpaccio. Un très joli vin, un Grand Bourgogne comme j'en boirais des jéroboams...
J'avais prévu le Clos Rougeard "Brézé" 2001 pour les rillettes aux 2 saumons et gingembre. Ici aussi le boisé caramel à l'ouverture s'estompe, mais le vin se montre nerveux, rocailleux, présentant une matière magnifique mais pas encore totalement fondue. J'aurais du attendre pour cette bouteille. La longueur est impressionnante, mais je reste sur cette déception de n'avoir pas su l'attendre plus.
Pour ensuite partir sur les rouges, j'ouvris un Lirac "Reine des Bois" La Mordorée 1997. J'en avais parlé à Mr Delorme au Grand Tasting, de cette bouteille. Il m'avait dit qu'il y avait peu de chance que cela soit encore grand. Et bien ça l'était! Sur des arômes de cuir, très animal, et en même temps un vin très complet, un fruit encore bien présent, avec une finesse et un équilibre remarquables. Vraiment une jolie bouteille. Prochaine fois que j'en trouve, je fonce!
Nous passâmes ensuite à un Canon La Gaffelière 2001 encore jeune lui aussi, mais un grand vin, assurément. Une matière complexe et raffinée, puissante, une fougue qui fit dire à un ami qu'il comprenait que Mouton soit rive gauche et Cheval rive droite. La bouche était ample, grasse, avec un tannin pas encore apaisé mais très joli, et une finale un peu réglissée... Je suis loin d'avoir fait le tour, mais je crois être plus sensible aux vins du Libournais... Ce vin m'a vraiment plu,
Puis pour jouer avec le Merlot du Bordeaux, je débouchai un Falesco Montiano 2001 (100% Merlot). Au premier nez, j'ai eu peur d'avoir fait une erreur en l'ouvrant après le Canon LG. Cependant, de fil en aiguille, en prenant notre temps, ce vin nous a charmé, par sa finesse, son coté voluptueux, sa bouche ronde et soyeuse, ses tannins très fins, très mûrs, sa finale très aérienne. Probablement que le fait d'avoir servi le Saint Emilion avant rendu ce vin plus fin que s'il avait été bu juste après les blancs. Mais en tout cas, à ce moment là, sa finesse était admirable.
Enfin, erreur de jeunesse (encore...?), un Bandol Tempier 2005 passa dans nos verres. Le vin était tendu, très jeune, la matière riche n'était pas du tout dompté, les arômes de garrigue et de fruits noirs étaient là, mais j'aurais du carafer ce vin quelques heures avant pour qu'il soit plus apprécié. Je crois que je "voulais me faire un Tempier" ce soir et que c'était une erreur. Comme parfois quand on sait qu'on est en train de faire une connerie mais qu'on fonce quand même. Bref, je vais laisser dormir les Tourtine et Migoua quelques décennies avant de les approcher, telle aura été la leçon.
Pour le fromage, je souhaitais faire découvrir un vigneron qui m'émeut à chaque fois que j'ouvre une de ses bouteilles. J'ouvris donc un Gewurztraminer Clos Windsbuhl Zind Humbrecht 2004. Et j'étais heureux de voir combien mes invités étaient fascinés par le contenu de leur verre, venant me demander un autre verre ("y en a plus!"), voulant en savoir plus sur le vin. Ce nez épicé, poivré même, très complet, avec un petit coté sucré qui se montrait, était passionnant. La bouche était d'un équilibre inouï.. Un vin vivant en bouche, des sensations plein le palet, de gras et de minéralité, de fruits exotiques... Chaque fois que j'ai la chance de déguster un vin du Clos Windsbuhl, je suis en extase... A noter que le munster au cumin prévu pour l'occasion, bien affiné, était trop tendre pour ce Grand Cru.
Pour résumer, j'ai eu beaucoup de plaisir à faire découvrir de tels vins à des amis pas forcément très très érudits, mais aimant les bonnes choses. Le Zind a enthousiasmé tout le monde, le Jacquesson en magnum a fait aimer le Champagne à certaines, le Lirac en avait encore sous le pied, le Montiano est vraiment un grand vin, le Brézé et le Tempier sont jeunes encore, le Canon la Gaffelière aussi mais est superbe dès maintenant, et le Vougeot blanc une très jolie découverte.
Vivement l'an prochain!